Comptes rendus

Emploi des anti-TNF dans le psoriasis
Évaluation des risques et des bénéfices des nouveaux traitements et des traitements actuels contre la sclérose en plaques

Améliorer le quotidien des patients atteints de MPOC et leurs perspectives d’avenir

Le présent compte rendu est fondé sur des données médicales présentées lors d'un congrès de médecine reconnu ou publiées dans une revue avec comité de lecture ou dans un commentaire signé par un professionnel de la santé reconnu. La matière abordée dans ce compte rendu s'adresse uniquement aux professionnels de la santé reconnus du Canada.

FRONTIÈRES MÉDICALES - 19e Congrès annuel de l’ERS (European Respiratory Society)

Vienne, Autriche / 12-16 septembre 2009

Dans le cadre de l’initiative GOLD (Global Obstructive Lung Disease), la maladie pulmonaire obstructive chronique (MPOC) se définit comme une restriction de l’écoulement de l’air qui n’est que partiellement réversible. Cette limitation étant associée à une réponse inflammatoire anormale du poumon aux particules ou gaz nocifs comme la fumée de cigarette, la maladie est considérée comme évitable.

Les statistiques sur la prévalence de la maladie varient, en partie à cause de la définition de la maladie qui varie d’une étude à l’autre et en partie parce que cette maladie est probablement sous-diagnostiquée. Selon certaines estimations, cependant, 600 millions de personnes seraient atteintes de cette maladie à l’échelle mondiale, ce qui a d’importantes conséquences sur la santé publique. À l’heure actuelle, la MPOC vient au quatrième rang des causes de morbidité chronique et de mortalité aux États-Unis. Selon les projections de la Banque mondiale et de l’Organisation mondiale de la Santé, la maladie occupera le cinquième rang mondial des maladies associées à un lourd fardeau de morbidité en 2020.

Les symptômes de la MPOC fluctuent même lorsque la maladie est stable

Il est bien établi que la MPOC dans son ensemble, sa sévérité et les exacerbations qu’elle entraîne diminuent la qualité de vie. Si on présumait que les effets de la maladie étaient répartis uniformément tout au long de la journée, on sait maintenant que les symptômes peuvent varier au fil de la journée ou de la semaine, même durant les périodes où la maladie est stable.

Comme l’expliquaient le Pr Martyn Partridge, Imperial College London, Royaume-Uni, et ses collaborateurs, un sondage en ligne récent a objectivé des répercussions substantielles de la MPOC sur la routine du matin (Partridge et al. Curr Med Res Opin 2009; 25:2043-8). Une analyse de données provenant d’une étude transversale réalisée à la grandeur de l’Europe – également présentée au congrès – étaye aussi cette observation. À en juger par les réponses des 2441 sujets, les symptômes de la MPOC sévère fluctuent en dehors des exacerbations chez 60 % des patients. Le Pr Partridge et ses collaborateurs ont conclu que les symptômes de la MPOC (dyspnée, expectorations, toux, respiration sifflante et oppression thoracique) étaient tous plus incommodants le matin, soit dès le réveil, soit un peu plus tard. Ils ont aussi constaté que les symptômes avaient un impact sur les activités du matin, comme sortir du lit, se laver, se sécher et s’habiller. De l’avis des auteurs, ces observations pourraient avoir des conséquences sur la prise en charge du patient, et le traitement pourrait être mieux adapté aux besoins individuels si on en tenait compte.

Au vu de l’importance éventuelle des symptômes matinaux de la MPOC, un nouveau questionnaire intitulé CDLM (Capacity of Daily Living during Morning) a été élaboré. Ce questionnaire comporte un certain nombre de questions sur les activités du matin comme faire sa toilette, se sécher, s’habiller, déjeuner et aller et venir, et le patient a un choix de quatre réponses : «oui, j’y suis arrivé(e) seul(e)»; «oui, j’y suis arrivé(e) avec de l’aide»; «non, je n’y suis pas arrivé(e)»; «non, je n’ai pas... pour d’autres raisons». Le questionnaire a été validé dans les règles de l’art et a été utilisé dans deux études présentées au congrès de l’ERS, CLIMB et SPEED.

L’étude CLIMB

L’étude CLIMB était conçue pour déterminer si l’ajout de l’association formotérol/budésonide au tiotropium pouvait améliorer la fonction pulmonaire, les symptômes et les activités du matin de même que la qualité de vie chez des patients atteints de MPOC admissibles à un traitement par un corticostéroïde en inhalation (CSI) en association avec un bêta-agoniste à longue durée d’action (BALA). Les critères d’inclusion étaient notamment un âge supérieur à 40 ans et au moins une exacerbation de MPOC ayant nécessité un corticostéroïde oral et/ou un antibiotique au cours des 12 derniers mois. Les patients admissibles recevaient du tiotropium à raison de 18 µg une fois par jour pendant une période préliminaire de deux semaines, après quoi ils étaient randomisés de façon à recevoir l’association formotérol/budésonide ou un placebo en plus du traitement par le tiotropium qu’ils recevaient pendant 12 semaines. Tant pendant la période préliminaire que pendant la période de traitement, les patients étaient autorisés à prendre de la terbutaline à 0,5 mg/dose au besoin pour soulager leurs symptômes.

Le paramètre principal était la variation du volume expiratoire maximal en une seconde (VEMS) mesuré le matin à la clinique entre la randomisation et la fin du traitement. Lors des visites à la clinique, on utilisait également le questionnaire St. George (St. George’s Respiratory Questionnaire for COPD patients ou SGRQ-C) afin de mesurer la qualité de vie. Les autres variables, que les patients consignaient dans un journal en ligne, étaient les mesures spirométriques de chevet, les symptômes matinaux et diurnes (Global Chest Symptoms Questionnaire [GCSQ]), les activités du matin telles que mesurées par le questionnaire CDLM, et le recours aux médicaments de secours pour soulager les symptômes.

En tout, 331 patients ont été randomisés dans le groupe placebo + tiotropium et 329, dans le groupe association + tiotropium. Les deux groupes étaient bien équilibrés quant aux variables démographiques et aux caractéristiques de la maladie. Au départ, parmi les 660 patients randomisés, 418 patients utilisaient un CSI et 503, un BALA. Chez la majorité des patients (66 % dans le groupe placebo + tiotropium et 62 % dans le groupe association + tiotropium), la maladie était de stade III selon la classification GOLD (30 % <u><</u> VEMS < 50 %). Il importe ici de souligner que le taux d’abandons de cette étude, bien que celle-ci ait été de courte durée, était très faible et similaire dans les deux groupes : 7,9 % dans le groupe association + tiotropium vs 8,5 % dans le groupe placebo + tiotropium.

Comme le souligne le Dr Tobias Welte, chef de la pneumologie, Université de Hanovre, Allemagne, «aucune différence entre les taux d’abandons n’a pu influer sur l’interprétation des résultats de cette étude». Il s’agit là d’un point important, car des différences entre les taux d’abandons ont été sources de controverse dans le passé, en particulier dans les études où les patients souffraient de MPOC sévère.

Soulagement plus efficace des symptômes le matin

Lors de l’essai CLIMB, le VEMS pré-bronchodilatation (paramètre principal) mesuré à la clinique s’est amélioré dans les deux groupes (Figure 1). L’amélioration était toutefois plus marquée chez les patients recevant la trithérapie que chez ceux recevant le tiotropium seul (p<0,001 pour la comparaison des groupes). Vu l’importance grandissante que l’on accorde à l’expression clinique de la maladie le matin, on avait prévu au protocole une évaluation de la fonction pulmonaire au chevet des patients. «L’amélioration de la fonction pulmonaire était maximale le matin et elle devenait apparente en très peu de temps, plus précisément dans un délai de 16 minutes chez les patients qui recevaient la trithérapie», affirme le Dr Welte. C’est donc dire que les possibilités de soulagement des symptômes de la MPOC sont beaucoup plus grandes le matin et qu’il est logique d’administrer l’association le plus tôt possible.

Figure 1. CLIMB : Variation du VEMS pré-bronchodilatation mesuré à la clinique


Sur le plan du soulagement des symptômes, les chercheurs ont observé des différences entre les deux traitements quant aux scores de tous les symptômes de la MPOC : dyspnée, réveils nocturnes, oppression thoracique et toux. En particulier, la dyspnée et l’oppression thoracique sont considérées comme des symptômes importants qui sont particulièrement incommodants pour le patient. Or, selon le GCSQ, ces symptômes ont diminué de manière significative chez les patients sous trithérapie par rapport aux patients sous monothérapie.

L’utilisation moindre de traitements de secours témoignait de l’amélioration des symptômes sous l’effet de la trithérapie. Ainsi, la variation moyenne de l’utilisation de traitements symptomatiques le matin était de -0,48 pour la trithérapie vs -0,08 pour la monothérapie, ce qui correspond à une différence moyenne de -0,4 (IC à 95 % : -0,564 à -0,236). «Le matin, moment de la journée où les symptômes sont plus prononcés, la trithérapie atténue les symptômes. Ces patients n’ont donc pas utilisé de médicaments de secours aussi souvent que ceux du groupe monothérapie», explique le Dr Welte.

Les améliorations de la fonction pulmonaire et des symptômes se reflètent dans l’amélioration des scores au questionnaire CDLM. Les améliorations ont été perceptibles dès le départ dans le groupe trithérapie, et les écarts entre les groupes à 12 semaines ont atteint le seuil de significativité statistique pour tous les items du questionnaire (Figure 2). Selon les résultats au SGRQ-C, la trithérapie – par comparaison à la monothérapie – a aussi permis une amélioration significativement plus marquée du score par rapport au score initial (3,8 unités vs 1,5 unité, respectivement; p<0,05).

Figure 2. CLIMB : Amélioration des activit
riode de 12 semaines

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Maîtrise future de la maladie

Une étude de trois mois ne peut pas générer de données directes sur la maîtrise future de la maladie, mais précise le Dr Welte, «les exacerbations fréquentes sont la clé du déclin de la fonction pulmonaire et de la surmorbidité chez les patients atteints de MPOC». Le taux d’exacerbations peut donc servir de marqueur de la maîtrise future de la maladie. «Le résultat le plus étonnant de cette étude a été la baisse remarquable du taux d’exacerbations dans le groupe trithérapie», ajoute-t-il. Globalement, 7,6 % des patients sous trithérapie ont eu une exacerbation sévère – que l’on définissait comme une exacerbation nécessitant la prise de corticostéroïdes oraux, une visite aux urgences ou l’hospitalisation – par comparaison à 18,5 % des patients sous monothérapie, et la différence entre les deux groupes quant au taux d’exacerbations sévères était de 62 % en faveur de la trithérapie (p<0,001). L’effet en faveur de la trithérapie était apparent, qu’un CSI ait été utilisé au début de l’étude ou non (on pourrait avancer que la prise d’un tel médicament réduit le risque d’exacerbation). De même, lors des exacerbations, l’utilisation d’antibiotiques a été moins fréquente dans le groupe trithérapie que dans le groupe monothérapie (19 patients [6 %] du groupe trithérapie vs 38 patients [12 %] du groupe monothérapie). «La trithérapie sert à la fois de traitement à court terme en raison de ses effets bronchodilatateurs qui soulagent les symptômes et de traitement de fond, peut-être en raison du nombre moindre d’exacerbations grâce au CSI. Bref, nous réussirons peut-être à améliorer le pronostic à long terme de ces patients», conclut le Dr Welte.

Poursuite de l’exploration des bénéfices matinaux associés au traitement

L’étude SPEED – qui portait également sur les bénéfices matinaux associés au traitement – a été réalisée par le Pr Partridge et son équipe. Le budésonide/formotérol a été comparé au salmétérol/fluticasone selon un protocole croisé comportant deux périodes de une semaine de traitement actif séparées par un intervalle sans médicament de une ou deux semaines. Les patients devaient avoir plus de 40 ans et avoir eu au moins une exacerbation de MPOC au cours des 12 mois précédents. En tout, 442 patients ont été recrutés; 71 % d’entre eux étaient des hommes et 81 % d’entre eux recevaient un CSI au départ. Chez la plupart des patients (59 %), la maladie était de stade III selon la classification GOLD. Les paramètres de la fonction pulmonaire ont été déterminés à la fois au chevet du patient et au cours des visites à la clinique qui étaient prévues au protocole. En outre, on a consigné les scores CDLM et GCSQ de même que le recours aux médicaments de secours.

L’évaluation du paramètre principal de l’étude SPEED – le débit expiratoire maximal (DEP) 5 minutes après l’administration – n’a montré aucune différence entre les traitements, les améliorations observées ayant été similaires dans les deux groupes. Des différences ont toutefois été signalées quant aux paramètres secondaires. Ainsi, le VEMS matinal mesuré 15 minutes après l’administration témoignait d’une amélioration significativement plus marquée dans le groupe budésonide/formotérol que dans le groupe salmétérol/fluticasone (0,140 L vs 0,100 L, respectivement; p<0,05). Le DEP et le VEMS mesurés au chevet du patient – consignés dans un journal en ligne et exprimés par rapport aux valeurs précédant l’administration pour donner une idée de la rapidité du début d’action – ont objectivé des différences significatives en faveur du budésonide/formotérol (p<0,001). Dans le cas du score CDLM, le budésonide/formotérol a été associé à une augmentation significativement plus marquée pour les items déjeuner et aller et venir de même que pour le score total. Prises ensemble, ces différences montrent que l’utilisation du budésonide/formotérol pourrait être bénéfique. «Le début d’action rapide du budésonide pourrait permettre aux patients atteints de MPOC de mieux commencer la journée», concluent les auteurs.

L’étude CODEX

Il a été démontré que le budésonide/formotérol agit rapidement lorsqu’il est administré dès le réveil. Dans le cadre d’une autre étude, on a exploré les effets à plus long terme du traitement sur la tolérance à l’effort. Les sujets atteints de MPOC et admissibles à un traitement par un CSI et un BALA recevaient consécutivement, selon un protocole croisé, le budésonide/formotérol, le formotérol seul ou un placebo (une inhalation deux fois par jour). L’âge moyen des 111 patients admis à l’étude était de 63,7 ans, et 39 % utilisaient un CSI au départ. Chez la plupart des patients (70 %), la MPOC était de stade III selon la classification GOLD. Le paramètre principal était la durée de la tolérance à l’effort (DTE) mesurée à 75 % de la capacité d’effort maximale sur ergocycle une heure après l’administration de la dose du matin. La DTE était mesurée de nouveau 6 heures après l’administration de la dose, explique le Dr Heinrich Worth, Hôpital universitaire d’Erlangen-Nuremberg, Fürth, Allemagne.

Une heure après l’administration de la dose, la DTE était significativement plus longue dans le groupe recevant l’association (517 secondes) que dans le groupe recevant du formotérol (448 secondes, écart de 14 %) et le groupe placebo (412 secondes, écart de 28 %). Cette prolongation s’est maintenue 6 heures après l’administration de la dose. Pendant le test d’effort, les auteurs ont également évalué la capacité inspiratoire afin d’avoir une appréciation de la distension dynamique. L’association a donné lieu à une augmentation de 21 % de la capacité inspiratoire par rapport au placebo une heure après l’administration de la dose (p<0,05) et à une augmentation de 8 % de la capacité inspiratoire six heures après l’administration de la dose. «Ces résultats semblent indiquer que si les patients atteints de MPOC recevaient du budésonide/formotérol plutôt que du formotérol seul, ils seraient en mesure d’accomplir une routine plus exigeante et plus longue tout de suite après la dose du matin et jusqu’à six heures après celle-ci», conclut le Dr Worth.

Résumé

Des résultats d’études présentés au congrès de l’ERS ont révélé que l’association budésonide/formotérol, qu’elle ait été ajoutée au tiotropium ou administrée seule, peut améliorer la fonction pulmonaire et atténuer les symptômes du matin. Comme le disait le Dr Roland Buhl, Hôpital universitaire de Mayence, Allemagne, en guise de conclusion : «nous avons compris que le matin est un moment très crucial de la journée pour un patient atteint de MPOC. C’est le moment de la journée où il a le plus besoin de notre aide et où ses symptômes sont particulièrement pénibles. Non seulement pouvons-nous améliorer la maîtrise actuelle de la maladie, mais nous pouvons aussi réduire le risque futur comme le montrent d’excellents résultats quant au nombre d’exacerbations».

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