Comptes rendus

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Intégration du nouveau vaccin contre le méningocoque de sérogroupe B dans la pratique clinique : le dire des experts

Le présent compte rendu est fondé sur des données médicales présentées lors d'un congrès de médecine reconnu ou publiées dans une revue avec comité de lecture ou dans un commentaire signé par un professionnel de la santé reconnu. La matière abordée dans ce compte rendu s'adresse uniquement aux professionnels de la santé reconnus du Canada.

PRESSE PRIORITAIRE - 11e Conférence canadienne sur l’immunisation

Ottawa, Ontario / 2-4 décembre 2014

 

Ottawa - Parmi les cinq sérogroupes responsables des infections invasives à méningocoque (IIM), le sérogroupe B est de loin le plus répandu au Canada à l'heure actuelle. Les IIM frappent très majoritairement les jeunes nourrissons et les adolescents. Le 4CMenB, nouveau vaccin multicomposants contre le méningocoque de sérogroupe B (menB) maintenant commercialisé, est indiqué de l'âge de 2 mois à l'âge de 17 ans. À en juger par les données épidémiologiques, le vaccin devrait protéger la population contre les deux tiers – la majorité, donc – des souches de méningocoque en circulation. L'efficacité et l'innocuité du vaccin 4CMenB chez les nourrissons et les adolescents sont maintenant étayées à la fois par des résultats d'essais cliniques et l'expérience clinique, et les experts affirment que le vaccin peut facilement se donner en même temps que les autres vaccins de l'enfance, ce qui simplifie grandement son intégration dans la pratique.

Rédactrice médicale en chef : Dre Léna Coïc, Montréal, Québec

 

Les infections invasives à méningocoque (IIM) sont des maladies rares et dévastatrices qui frappent des personnes normales et en santé, en particulier les très jeunes nourrissons. Les programmes de vaccination contre le méningocoque de sérogroupe C ayant eu du succès d’un bout à l’autre du Canada, le méningocoque de sérogroupe B (menB) est devenu la principale cause d’IIM. «Le menB en particulier est à l’origine d’au moins 80 % des cas d’IIM durant la première année de vie», affirme le Dr Ronald Gold, médecin honoraire, Hospital for Sick Children, Toronto.

 

Chez les adolescents – l’adolescence étant le deuxième pic d’activité des IIM –, le menB cause plus de 60 % de tous les cas d’IIM. C’est le groupe d’âge des 15 à 24 ans qui est en grande partie à l’origine de la transmission de toutes les souches pathogènes de méningocoque, explique le Dr Gold. «En temps normal, un enfant de moins de 10 ans n’est pas porteur de ces bactéries, poursuit-il. Ce sont les jeunes adultes qui les ramènent à la maison et contaminent les nourrissons.»

 

Une IIM se manifeste d’abord par des symptômes non spécifiques qui s’apparentent à la grippe – douleurs, fièvre et parfois vomissements –, mais la maladie progresse tellement rapidement que la personne peut se retrouver à l’unité des soins intensifs dans un délai de 12 à 24 heures; et, malgré les meilleurs soins possible, de 10 à 15 % des patients en meurent. Selon les données d’IMPACT recueillies dans 12 centres pédiatriques du Canada, au moins le quart des survivants d’une IIM ont de graves séquelles, souligne le Dr Marc Lebel, pédiatre-infectiologue, CHU Sainte-Justine, Montréal. À l’heure actuelle, on trouve sur le marché plusieurs vaccins conjugués monovalents contre le méningocoque de sérogroupe C (menC) (Menjugate, Meningitec, NeisVac-C) de même que deux vaccins conjugués quadrivalents contre les méningocoques de sérogroupe A, C, Y et W-135 (Menactra, Menveo).

 

Au cours de la dernière année, un vaccin multicomposants contre le méningocoque de sérogroupe B (Bexsero) a été homologué pour une utilisation à partir de l’âge de 2 mois jusqu’à l’âge de 17 ans. Le vaccin 4CMenB a été évalué lors d’essais cliniques regroupant environ 8000 nourrissons, enfants et adolescents. La primovaccination se donne en trois doses – à 2, 4 et 6 mois – et elle est suivie d’une dose de rappel à 12 mois; il a été démontré que le vaccin 4CMenB générait une solide réponse immunitaire vis-à-vis des quatre antigènes vaccinaux, note le Dr Lebel.

 

À défaut d’une prophylaxie par l’acétaminophène, la fièvre culmine environ 6 heures après l’administration d’une dose du vaccin 4CMenB en concomitance avec d’autres vaccins usuels de l’enfance; la fièvre survient uniquement chez les nourrissons, les adolescents étant épargnés. Lorsque l’acétaminophène est administré en même temps que le vaccin ou peu de temps après, les réactions locales au point d’injection constituent le principal effet indésirable du vaccin.

 

«Nous avons à ce jour administré environ un millier de doses du vaccin 4CMenB. [En ayant recours à l’acétaminophène] et en prévenant les parents de la possibilité d’un épisode de fièvre, nous avons réduit au minimum les appels téléphoniques et les visites de parents inquiets», affirme le Dr John Yaremko, professeur adjoint de pédiatrie, Université McGill, Montréal, qui faisait référence à sa propre clinique.

 

Expérience en conditions réelles

 

L’expérience «en conditions réelles» de plusieurs régions ayant eu à composer avec de récentes éclosions d’IIM menB – Princeton (Princeton University), Santa Barbara (University of California) et Saguenay-Lac-Saint-Jean, au Québec – est venue confirmer l’innocuité du vaccin contre le menB. Dans les deux universités à elles seules, environ 7000 sujets ont reçu le vaccin 4CMenB, et aucun effet indésirable inhabituel n’a été signalé.

 

De même, un taux élevé d’IIM menB dans la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean au Québec a incité les autorités sanitaires à lancer une campagne de vaccination massive contre le menB en mai 2014, la première au pays. En date du 5 septembre 2014, près de 45 000 personnes âgées de 2 mois à 20 ans ont reçu le vaccin contre le menB. Un système de surveillance rehaussée que les autorités sanitaires ont mis sur pied pour être à l’affût de tout effet indésirable après la première dose n’a mis en évidence aucun problème d’innocuité inquiétant, peut-on lire dans le rapport intérimaire.

 

«C’est la plus vaste expérience qu’un pays n’ait jamais eue avec Bexsero, fait valoir le Dr Lebel, et à ce jour, l’innocuité du vaccin n’a pas été remise en doute.»

 

Facile à intégrer dans la pratique

 

De l’avis d’experts présents au congrès, il n’y a aucune raison pour laquelle le vaccin 4CMenB ne pourrait pas être intégré facilement dans le calendrier de vaccination des nourrissons. Comme l’ont constaté le Dr Yaremko et ses collègues, un sondage assez récent a révélé que les parents étaient au courant de la méningite, qu’ils la redoutaient et qu’ils voulaient protéger leurs enfants contre l’IIM au même titre qu’ils voulaient se protéger eux-mêmes contre toute autre maladie évitable par la vaccination.

 

En fait, lorsqu’on leur a parlé du vaccin contre le menB – alors nouveau –, plus de 80 % des parents ont indiqué qu’ils voudraient faire vacciner leur enfant et plus de 90 % estimaient qu’une injection de plus lors de chaque visite de vaccination était acceptable, compte tenu du risque associé à cette infection dévastatrice. «L’administration simultanée de plusieurs vaccins ne pose pas de problème d’innocuité et, sur le plan immunologique, c’est efficace; de plus, il n’y a pas de meilleure façon de procéder si l’on veut assurer l’observance du traitement préventif, poursuit le Dr Yaremko. Personnellement, j’ai trouvé très facile d’intégrer le vaccin 4CMenB dans le calendrier de vaccination des nourrissons.»

 

Recommandations du CCNI

 

Dans une déclaration récente, le Comité consultatif national de l’immunisation (CCNI) recommande que le vaccin 4CMenB soit envisagé chez chaque nourrisson à partir de l’âge de 2 mois ainsi que dans certains groupes à risque élevé. Des experts présents au congrès ont émis des doutes quant à la recommandation du CCNI compte tenu de l’épidémiologie des IIM au Canada, où le menB prédomine, et de ses victimes, c’est-à-dire en très grande majorité des enfants et de très jeunes nourrissons en santé et sans facteur de risque particulier. «Au cours de mes 35 années d’exercice, j’ai vu un seul patient à risque élevé contracter une IIM; la majorité des cas d’IIM étaient des enfants en bonne santé», précise le Dr Tajdin Jadavji, professeur titulaire de microbiologie, d’immunologie et d’infectiologie, University of Calgary, Alberta. «Nous avons maintenant été témoins d’éclosions réelles à Princeton, à Santa Barbara et au Québec, et nous savons que le vaccin est efficace et qu’il a peu d’effets indésirables. À mon avis, nous devrions l’utiliser de façon appropriée dans tous les groupes d’âge.»

 

Le Dr Gold est d’accord : «Il y a autant d’infections invasives à menB au cours de la première année de vie qu’au cours des 3 années suivantes (1 à 4 ans), et au moins la moitié des cas observés avant l’âge de 12 mois surviennent au cours des 6 premiers mois de vie. Il n’y a donc aucune raison de retarder la vaccination, et je pense que chaque enfant ayant intérêt à le recevoir devrait le recevoir.»

 

Le Dr Yaremko a pour sa part rappelé à l’auditoire que ce n’est pas parce qu’un vaccin n’est pas remboursé par l’État qu’il ne vaut rien. «Si le CCNI recommande un vaccin et que notre province ne l’inclut pas dans son programme universel de vaccination, il nous incombe tout de même de communiquer aux parents l’information dont ils ont besoin pour décider eux-mêmes s’ils paieront le vaccin de leur poche», dit-il, ajoutant que les parents veulent surtout savoir si le vaccin est sûr et si leur médecin le recommande.

 

Conclusion

 

«Les parents font encore confiance aux médecins, aux vaccinateurs et aux infirmières, enchaîne le Dr Yaremko. L’opinion du vaccinateur est très importante, et nous devons nous assurer de bien faire nos devoirs en transmettant l’information dont nous disposons sur ce vaccin pour aider les parents à prendre une décision.» 

 

 

 

 

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