Comptes rendus

Sur le pied de guerre grâce à la vaccination antigrippale prépandémique
Prise en charge du sca axée sur l’inhibition de l’agrégation plaquettaire : De meilleurs résultats à l’horizon

La spondylarthrite ankylosante et les spondylarthropathies

Le présent compte rendu est fondé sur des données médicales présentées lors d'un congrès de médecine reconnu ou publiées dans une revue avec comité de lecture ou dans un commentaire signé par un professionnel de la santé reconnu. La matière abordée dans ce compte rendu s'adresse uniquement aux professionnels de la santé reconnus du Canada.

OPTIONS MÉDICALE dans la spondylarthrite ankylosante

2008 octobre

Dorsalgies inflammatoires ou mécaniques? Une approche probabiliste pour intervenir plus tôt dans la SA

Dr Martin Rudwaleit, Hôpital universitaire de la Charité, Campus Benjamin Franklin, Berlin, Allemagne

Évaluation de l'activité de la maladie et nouveaux repères pour guider le traitement

Dr Xenofon Baraliakos, et Dr Juergen Braun, Ruhr-Universität Bochum Herne, Allemagne

Effets bénéfiques à long terme de l'inhibition du TNF-asur l'activité de la maladie

Dr Nick Barkham, University of Leeds, Leeds, Royaume-Uni

Effets indirects de l'inhibition du TNF-a : regard sur les variations des marqueurs histopathologiques et moléculaires

Dr Dominique L. Baeten, Centre médical universitaire / Université d'Amsterdam, Amsterdam, Pays-Bas

Stratégies pour infléchir le cours de la maladie et prévenir les complications tardives

Dr Filip Van den Bosch, Hôpital universitaire de Gand, Gand, Belgique

DORSALGIES INFLAMMATOIRES OU MÉCANIQUES? UNE APPROCHE PROBABILISTE POUR INTERVENIR PLUS TÔT DANS LA SA

Commentaire éditorial :

Martin Rudwaleit, MD

Expert-conseil en rhumatologie, Hôpital universitaire de la Charité, Campus Benjamin Franklin, Berlin, Allemagne

Parmi les causes de lombalgies, la spondylarthrite ankylosante (SA) est l’une des plus susceptibles d’aboutir à une incapacité importante. Plusieurs avantages pourraient découler d’un diagnostic précoce, mais on ne connaît à ce jour aucune caractéristique ou combinaison de caractéristiques permettant de différencier à coup sûr la SA d’autres affections avant qu’elle devienne décelable à la radiographie. Dans divers articles publiés depuis quatre ans, on a décrit un système probabiliste capable de déceler une SA avec un indice élevé de fiabilité. Depuis son introduction, ce système a fait la preuve de son utilité en accélérant le diagnostic et la mise en route du traitement. Il y a des avantages cliniques évidents à reconnaître rapidement une cause traitable de la lombalgie, mais l’utilité clinique de cet outil pourrait être encore plus grande s’il s’avère, comme on s’y attend, que les inhibiteurs du facteur de nécrose tumorale alpha (anti-TNF-a) et d’autres traitements très ciblés modifient le cours évolutif de la SA.

Bien-fondé du diagnostic précoce

Il est monnaie courante de présenter, au moins une fois au cours de sa vie, un épisode prolongé de lombalgies. Lors d’une enquête sur la santé menée auprès d’adultes aux États-Unis, la prévalence sur 12 mois des lombalgies ayant persisté durant au moins un mois était de 17,8 %1. Le faible rendement des évaluations radiographiques signifie cependant que la majorité de ces épisodes restent idiopathiques2. La prévalence des spondylarthropathies, elle, oscille entre 1 et 2 % selon les enquêtes; c’est donc dire qu’elles sont au moins aussi fréquentes que la polyarthrite rhumatoïde3. Même s’il est relativement rare que la SA soit la coupable dans les nombreux cas de lombalgies, elle est traitable et représente l’une des principales causes de dorsalgies conduisant à une incapacité permanente. Il s’écoule en moyenne plus de huit ans avant que la SA soit diagnostiquée4.

Bien qu’on s’accorde à dire que la présence d’une sacro-iliite visible à la radiographie chez un patient symptomatique autorise un diagnostic de SA5, il s’impose de trouver des stratégies pour établir un diagnostic de présomption à un stade beaucoup plus précoce. Le diagnostic précoce comporte plusieurs avantages éventuels, dont celui de traiter les symptômes plus rapidement . Le diagnostic de SA probable permet de rassurer le patient quant à la cause physique, et non purement psychique, de ses dorsalgies, et de lui épargner des interventions diagnostiques et thérapeutiques inutiles, coûteuses et potentiellement nuisibles. En outre, les observations récentes selon lesquelles les anti- TNF-a pourraient modifier le cours évolutif de la maladie et, dès lors, retarder ou prévenir la survenue de lésions articulaires irréversibles6, fournissent un autre argument potentiel en faveur du diagnostic précoce.

Jusqu’ici, les tentatives pour définir les critères diagnostiques cliniques de la SA avant l’apparition d’anomalies radiographiques ont péché par une trop grande imprécision. Par exemple, bien que les critères du European Spondyloarthropathy Study Group, publiés en 19917, soient souvent cités, une étude a montré que seulement 46 % des patients chez qui on avait diagnostiqué une SA selon ces critères avaient une SA confirmée après cinq ans8. D’autres démarches diagnostiques semblables ont également été critiquées pour leur manque de fiabilité9.

Diagnostic par association de signes cliniques : les rapports de raisemblance

Bien qu’aucune caractéristique clinique de la SA ne soit pathognomonique, on peut raisonnablement s’attendre à ce que l’accumulation de signes cliniques associés augmente la probabilité d’être atteint de SA. En partant de ce principe, on a élaboré une démarche pour le diagnostic précoce de la SA fondée sur les rapports de vraisemblance (RV) afin d’aider le clinicien à mieux évaluer la probabilité de SA. Décrite pour la première fois en 200410, cette méthode porte sur les spondylarthropathies (SpA) axiales - ce qui englobe la SA et SpA indifférenciées - et fait appel à des critères cliniques, à des analyses de laboratoire et à l’imagerie du squelette. Toutefois, il n’est pas nécessaire d’avoir des résultats positifs dans ces trois catégories pour établir le diagnostic.

Le tableau clinique habituel est le suivant : dorsalgies inflammatoires pouvant comprendre des douleurs fessières à bascule, enthésites, arthrites, dactylite, uvéite antérieure aiguë, antécédents familiaux de SpA ou d’uvéite, de psoriasis et de maladie de Crohn, et sensibilité des symptômes aux AINS. Sur le plan biologique, les indices usuels sont notamment une élévation du taux des protéines de phase aiguë et la présence de HLA-B27. Bien que les signes radiographiques des formes débutantes ne soient pas suffisamment spécifiques pour affirmer une SpA ou une SA, le type d’anomalies observé peut, compte tenu des autres résultats, apporter une preuve suffisante pour porter un diagnostic.

Après une évaluation de ces caractéristiques au sein d’un vaste échantillon de patients atteints de SA et de patients atteints d’autres troubles musculo-squelettiques, des scores de probabilité ont été calculés à partir des signes cliniques, biologiques et radiographiques. Intégrée dans un arbre décisionnel visant à séparer les patients ayant une faible probabilité des patients ayant une forte probabilité d’être atteint de SA, cette méthode a permis une stratification efficace. Aux fins du diagnostic précoce, on a estimé que le seuil diagnostique nécessitait une probabilité =90 %. Ainsi, si la présence de une ou deux caractéristiques cliniques de SA donnait une probabilité de seulement 35 à 70 %, la présence de deux caractéristiques cliniques était suffisante pour atteindre le seuil de =90 % lorsque la positivité du critère HLA-B27 était également confirmée.

Les RV ne correspondent pas simplement à la somme des caractéristiques présentes, car chacune d’elles est pondérée différemment selon sa valeur prédictive dans l’analyse initiale. Les RV combinent en un seul paramètre la sensibilité et la spécificité de n’importe quelle caractéristique diagnostique donnée. Bien que les valeurs soient approximatives, la pondération relative est importante pour démontrer qu’une caractéristique est distincte des autres. Par exemple, l’antigène HLA-B27 a un RV plus élevé que chacune des caractéristiques cliniques, y compris l’arthrite ou l’uvéite, et pèse donc davantage dans l’établissement d’un diagnostic de présomption.

Critères proposés pour le diagnostic de dorsalgies inflammatoires devant un tableau de dorsalgies chroniques (âge de début <50 ans) Critères d’évaluation individuels des dorsalgies inflammatoires : • Raideur matinale persistant au-delà de 30 minutes • Dorsalgie soulagée par le mouvement mais non par le repos • Dorsalgie qui réveille au cours de la seconde moitié de la nuit • Douleurs fessières à bascule

Application en tant que critères de classification : La présence d’au moins deux des quatre paramètres ci-dessus indique l’existence de dorsalgies inflammatoires avec une sensibilité de 70,3 % et une spécificité de 81,2 % (meilleur compromis entre sensibilité et spécificité)

D’après Rudwaleit et al. Arthritis Rheum 2006;54:678-81.

Tableau 1. Spondylarthropathies (SpA) axiales : Valeurs représentatives de la sensibilité et de la spécificité pour plusieurs tests/paramètres et RV obtenus


L’algorithme et le calcul des probabilités ont été élaborés en vue de déceler une SA débutante chez des patients qui n'ont pas de sacro-iliite radiographique certaine, l'un des critères de New York modifiés. On retiendra notamment de cette analyse de probabilités qu’aucun symptôme ou résultat pris isolément n’est suffisant pour affirmer un diagnostic de SA, étant donné que seulement 5 % des sujets présentant des lombalgies chroniques ont une SA ou une SpA axiale indifférenciée. En général, au moins trois paramètres doivent être présents pour que le diagnostic soit fiable.

Dans une version subséquente de l’algorithme, les RV négatifs ont été introduits dans les estimations11. Avec l’ajout des RV négatifs, la proportion de patients ayant une maladie probable a diminué, le seuil diagnostique proposé de 90 % étant devenu plus difficile à atteindre. Dans le contexte clinique, où l’objectif est de repérer les patients ayant une probabilité élevée d’être atteint de SA, la méthode décrite à l’origine ainsi que dans une publication subséquente est préférable à cette dernière version12.

Des estimations les plus justes à l’application clinique

Les données de probabilité fournissent la meilleure estimation de la présence d’une SA et permettent ce faisant de restreindre la réalisation inutile d’examens d’imagerie plus coûteux. Lorsqu’on soupçonne une SA, une exploration par une quelconque technique d’imagerie doit d’emblée être réalisée. La radiographie est la modalité la plus utilisée, mais la tomodensitométrie (TDM) pourrait également être utile, en particulier pour déceler une sacro-iliite lorsque les images radiographiques standard sont équivoques. Cela dit, la radioexposition associée à la TDM suscite des réserves, surtout quant à son utilisation chez les jeunes femmes. La méthode la plus utile pour l’exploration des articulations sacro-iliaques est l’imagerie par résonance magnétique (IRM), mais il n’est pas toujours possible d’y recourir pour des raisons d’accessibilité ou de coût. Les autres techniques d’imagerie comme la tomographie par émission de positons (TEP) ou la scintigraphie ont un intérêt limité en raison d’une sensibilité et d’une spécificité soit médiocres (scintigraphie), soit inconnues (TEP), et sont par conséquent clairement inférieures à l’IRM. En présence de signes cliniques et d’une probabilité suffisante, un traitement par un AINS à la dose complète pendant deux ou trois jours devrait également être envisagé pour corroborer le diagnostic.

Figure 1. Probabilité post-test de SpA axiale selon le produit des RV ob
lité pré-test de 5 %

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D’après Rudwaleit M, Feldtkeller E, Sieper J. Ann Rheum Dis 2006;65:1251-2.

Chez un patient porteur de HLA-B27 qui répond bien aux AINS et présente un épisode d’enthésite, il est raisonnable d’évoquer un diagnostic de SA sans égard aux résultats des radiographies, qui peuvent être normales durant les premières années de la maladie. Cependant, il est important de souligner la nécessité d’une analyse des probabilités. Par ailleurs, le clinicien ne doit pas seulement considérer les diagnostics différentiels mais aussi concomitants. Par exemple, une hernie discale lombaire peut causer des dorsalgies même chez le patient atteint de SA. En outre, bien qu’on ait retenu une probabilité de 90 % comme seuil diagnostique dans l’une des analyses de cette méthode, une probabilité plus faible pourrait raisonnablement être interprétée comme une forte indication de SA lorsque d’autres variables accréditent un diagnostic positif. Ainsi, un RV de 80 % autoriserait un diagnostic de SA chez un jeune homme souffrant de dorsalgies inflammatoires depuis trois à cinq ans et porteur de HLA-B27. À l’opposé, des examens d’imagerie coûteux ne sont pas justifiés chez un patient âgé de plus de 65 ans ayant des dorsalgies chroniques depuis 20 ans et ne présentant pas de signes de sacro-iliite ni de syndesmophytes à la radiographie. La vraisemblance de la présence d’une SA chez un tel patient est très faible (<0,5 %).

Un diagnostic précoce de SA certaine facilite la conduite du traitement. Bien qu’on puisse instaurer un traitement par un AINS en l’absence d'un diagnostic de certitude, cette stratégie rencontre une opposition grandissante en raison des complications auxquelles elle expose, dont un risque d’hémorragie digestive haute environ quatre fois plus élevé13. Les anti- TNF-a sont extrêmement efficaces lorsque la réponse aux AINS est insuffisante, mais là encore, cette option n’offrira un rapport bénéfice-risque acceptable que si un diagnostic de SA fortement probable est d’abord établi. On ne sait pas encore - et c’est là un enjeu important - si les anti-TNF-a peuvent modifier le cours évolutif de l’AS en stoppant sa progression. Si cet espoir se concrétise, les algorithmes de traitement actuels seront probablement modifiés, en particulier en ce qui concerne l’intensification des stratégies thérapeutiques dès les premiers stades de la maladie.

Résumé

On peut porter un diagnostic de SA fortement probable à partir de plusieurs indices caractéristiques fournis par l’examen clinique, les analyses de laboratoire et les examens d’imagerie. En établissant un tel diagnostic chez les patients lombalgiques, on peut éviter le recours à des examens diagnostiques supplémentaires et instaurer un traitement. L’objectif le plus important de la mise en route précoce d’un traitement approprié est de soulager les symptômes pour améliorer la qualité de vie. Toutefois, s’il est prouvé qu’une maîtrise précoce de la maladie peut retarder la survenue de complications, un argument de plus pourra être invoqué en faveur du traitement précoce. Le long intervalle qui sépare en moyenne l’apparition des symptômes et l’établissement d’un diagnostic de certitude met en évidence le besoin d’analyses probabilistes pour guider l’intervention précoce dans l’une des causes les plus graves de lombalgies.

Références

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6. Baraliakos et al. Radiographic progression in patients with ankylosing spondylitis after four years of treatment with the anti-tumor necrosis factor alpha antibody infliximab. Rheumatology 2007;46:1450-3.

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10. Rudwaleit et al. How to diagnose axial spondyloarthritis early. Ann Rheum Dis 2004;64:535-43.

11. Rudwaleit M, Feldtkeller E, Sieper J. Easy assessment of axial spondyloarthritis (early ankylosing spondylitis) at the bedside. Ann Rheum Dis 2006;65:1251-2.

12. Rudwaleit M, Khan MA, Sieper J. The challenge of diagnosis and classification in early ankylosing spondylitis: do we need new criteria? Arthritis Rheum 2005;52:1000-8.

13. Langman et al. Risks of bleeding peptic ulcer associated with individual non-steroidal antiinflammatory drugs. Lancet 1994:343;1075-8.

ÉVALUATION DE L'ACTIVITÉ DE LA MALADIE ET NOUVEAUX REPÈRES POUR GUIDER LE TRAITEMENT

Commentaire éditorial :

Xenofon Baraliakos, MD, et Juergen Braun, MD

Rheumazentrum Ruhrgebiet, Ruhr-Universität Bochum, Herne, Allemagne

La spondylarthrite ankylosante (SA) est le prototype des spondylarthropathies (SpA). À l’heure actuelle, selon les critères modifiés de New York, le pivot du diagnostic de la SA est la présence de lésions structurales dans les articulations sacroiliaques à la radiographie1. Cela dit, le processus morbide débute habituellement bien avant l’apparition d’anomalies radiographiques évidentes. Comme les guides de pratique actuels exigent en général la preuve radiographique de modifications structurales des sacroiliaques pour autoriser un diagnostic de SA certaine, le clinicien se heurte à des obstacles lorsque les patients atteints d’une SpA moins avancée ont besoin d’un traitement anti-inflammatoire puissant. La sacro-iliite, signe typique de la SA, peut être détectée beaucoup plus tôt dans l’évolution de la maladie si l’on fait appel à l’imagerie par résonance magnétique (IRM)2,3. Une fois le diagnostic établi, l’activité de la maladie doit être surveillée de près, ce qui implique l’évaluation de ses marqueurs cliniques (dorsalgies inflammatoires, raideur matinale et autres symptômes), biologiques (p. ex., pro
et vitesse de sédimentation) et visuels(signes IRM, notamment).

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Séquence IRM coron
trant des modifications de la moelle adipeuse sous-chondrale (flèches) et une irrégularité des sacro-iliaques.

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Séquence IRM coronale pondérée en T1 e
tion de graisse, montrant de petites zones de rehaussement dans la partie inférieure des sacro-iliaques (flèches).

Bredella et al. AJR 2006;187:1420-6.

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Séquence IRM STIR montrant une spondylite antérieure T6/7 et T7/8 et une spondylite postérieure T8/9. L'inflammation apparaît sous forme de spots dans les vertèbres (flèches).

Baraliakos et al. Ann Rheum Dis 2005;64:730-4.

La présence de signes certains de SA avant l’apparition de stigmates structuraux conduit habituellement à un diagnostic de SpA indifférenciée (SpAi) ou de SpAi axiale. Récemment, l’IRM s’est également révélée utile pour l’identification des patients exposés à un risque élevé d’apparition de lésions structurales progressives; en effet, on a relevé pour la première fois des indications d’un lien possible entre la présence d’une inflammation initiale du rachis et la progression ultérieure de lésions radiographiques dans la SA4.

Comme les AINS procurent en général un soulagement initial très efficace des symptômes de lombalgies inflammatoires chez ces patients, le médecin n’effectue pas toujours d’autres examens diagnostiques. Cela dit, les recommandations cliniques actuelles font du diagnostic de certitude une condition sine qua non de l’utilisation de traitements plus puissants5.

Importance d'une détection précoce de l'inflammationactive et impact de l’imagerie

À l’heure actuelle, l’intervalle moyen qui sépare l’apparition des premiers symptômes de la SA du diagnostic oscille entre cinq et sept ans, ce qui est beaucoup plus long que pour les autres maladies rhumatismales inflammatoires6. Ce retard peut contribuer à pérenniser la douleur et les déficits fonctionnels, qui surviennent par surcroît chez des sujets jeunes. Il est donc très utile de disposer d’outils objectifs d’évaluation de l’activité de la maladie chez ces patients, aux phases précoces comme plus avancées7. L’IRM présente une sensibilité d’environ 80 % pour détecter une inflammation active dans les sacro-iliaques et le rachis, qu’elle soit utilisée au début ou aux stades ultérieurs de la maladie8. Les autres modalités d’imagerie qui pourraient être considérées dans cette indication, par exemple la scintigraphie, ont une sensibilité beaucoup moins bonne, qui est de l’ordre de 50 à 70 %.

Du soulagement des symptômes à la maîtrise de l'activité de la maladie

Les agents biologiques contribuent substantiellement au traitement des patients atteints de SA9-11.Outre qu’ils réduisent significativement l’activité de la maladie à court terme, les anti-TNF-a ont fait preuve d’une efficacité clinique durable lors des études à long terme, tout en étant bien tolérés et dépourvus de risques majeurs12-15.

Dans les guides de pratique actuels, tels que les recommandations conjointes du groupe de travail ASAS (Assessment in AS) et de la Ligue européenne contre le rhumatisme (EULAR)5, le choix du traitement est dicté par les symptômes. Bien que les symptômes permettent de mesurer sur-le-champ l’impact de la maladie sur la qualité de vie, ils ne sont pas nécessairement représentatifs de la progression pathologique dans les structures osseuses atteintes. L’analyse des données IRM des patients traités par des agents biologiques fait elle aussi ressortir cette disparité : le traitement à long terme réduit significativement l’activité inflammatoire, ce qui se reflète dans les paramètres cliniques; toutefois, même après deux ans, des lésions inflammatoires du rachis subsistent chez ces patients16-18.

Par conséquent, une inflammation persistante pourrait paver la voie à la progression de la maladie chez des patients dont les symptômes sont raisonnablement bien soulagés. Il apparaît de plus en plus que la vitesse de progression de la SA varie énormément d’un patient à l’autre19. Bien qu’on puisse calculer une moyenne de la rapidité d’évolution des lésions radiographiques à partir de cohortes historiques19, il existe de nombreux cas où la progression est beaucoup plus rapide que la moyenne, et d’autres où il n’y a aucune progression. Des études récentes montrent que cette variation est liée à la propension individuelle à présenter de nouveaux syndesmophytes au fil des années. Selon des données récentes, seul le nombre de syndesmophytes déjà présents au moment du diagnostic permet de prédire la rapidité de la progression radiographique ultérieure20.

En revanche, bien que l'on n'ait pas pu démontrer hors de tout doute que les agents biologiques stoppent la progression des lésions structurales chez les patients ayant une SA avancée21-23, il est admis que ces agents diminuent notablement l’activité de la maladie dans le rachis, comme en témoignent les évaluations IRM16-18. Mais ce qui importe plus encore, c’est que ces agents améliorent la capacité fonctionnelle et la mobilité rachidienne au fil du temps, même s’ils n’ont pas empêché la surve
rales mineures sur une période de deux ans24.

Figure 1. Évolution des lésions rachidiennes après 3 mois et 2 ans de traitement (placebo/infliximab ou infliximab en mode ouvert)

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Résumé

La détection précoce de la SA et des SpA est primordiale pour la prise en charge des patients, et notamment pour l’instauration rapide d’un traitement efficace. La maîtrise de l’inflammation persistante du rachis est un objectif majeur des stratégies de traitement. Bien que des signes radiographiques de SA demeurent le critère standard pour établir un diagnostic formel, l’IRM objective l’inflammation et l’activité persistante de la maladie beaucoup plus tôt que la radiographie. Les symptômes cliniques et les marqueurs objectifs de l’inflammation, tels la CRP et les clichés IRM, sont des repères importants pour guider le traitement de la SA.

Références

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4. Baraliakos et al. The relationship between inflammation and new bone formation in patients with ankylosing spondylitis. Arthritis Res Ther 2008;10(5):R104.

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10. Brandt et al. Six-month results of a double-blind, placebo-controlled trial of etanercept treatment in patients with active ankylosing spondylitis. Arthritis Rheum 2003;48(6):1667-75.

11. van der Heijde et al. Efficacy and safety of adalimumab in patients with ankylosing spondylitis: Results of a multicenter, randomized, double-blind, placebo-controlled trial. Arthritis Rheum 2006;54(7):2136-46.

12. Braun et al. Persistent clinical efficacy and safety of anti-tumour necrosis factor alpha therapy with infliximab in patients with ankylosing spondylitis over 5 years: evidence for different types of response. Ann Rheum Dis 2008;67(3)340-5.

13. Baraliakos et al. Outcome of patients with active ankylosing spondylitis after two years of therapy with etanercept: Clinical and magnetic resonance imaging data. Arthritis Rheum 2005;53(6)856-63.

14. Baraliakos et al. Persistent clinical efficacy and safety of infliximab in patients with ankylosing spondylitis over 7 years - evidence for different response to anti-TNF-a therapy. Ann Rheum Dis 2008;67(résumé 2):375.

15. Baraliakos et al. Persistent clinical response in patients with ankylosing spondylitis after 5 years of treatment with etanercept. Ann Rheum Dis 2008; 67(résumé 2):376.

16. Baraliakos et al. Magnetic resonance imaging examinations of the spine in patients with ankylosing spondylitis before and after therapy with the tumor necrosis factor alpha receptor fusion protein etanercept. Arthritis Rheum 2005; 52(4):1216-23.

17. Braun et al. Major reduction in spinal inflammation in patients with ankylosing spondylitis after treatment with infliximab: results of a multicenter, randomized, double-blind, placebo-controlled magnetic resonance imaging study. Arthritis Rheum 2006;54(5)1646-52.

18. Sieper et al. Persistent reduction of spinal inflammation as assessed by magnetic resonance imaging in patients with ankylosing spondylitis after 2 yrs of treatment with the anti-tumour necrosis factor agent infliximab. Rheumatology (Oxford) 2005;44(12):1525-30.

19. Baraliakos et al. Radiographic progression in ankylosing spondylitis (AS) – the natural course. A retrospective cohort study. Assemblée scientifique annuelle de l’American College of Rheumatology. Présentation orale, novembre 2007.

20. Baraliakos et al. Progression of radiographic damage in patients with ankylosing spondylitis: defining the central role of syndesmophytes. Ann Rheum Dis 2007; 66(7):910-5.

21. Baraliakos et al. Radiographic progression in patients with ankylosing spondylitis after 4 yrs of treatment with the anti-TNF-alpha antibody infliximab. Rheumatology (Oxford) 2007;46(9)1450-3.

22. Baraliakos et al. Less radiographic progression in patients with active ankylosing spondylitis after 2 years of Anti-TNF therapy. Assemblée annuelle de l’American College of Rheumatology, San Antonio, TX, 12-17 nov 2005 [résumé].

23. van der Heijde et al. Radiographic progression of ankylosing spondylitis after up to two years of treatment with etanercept. Arthritis Rheum 2008;58(5):1324-31.

24. Braun et al. Infliximab improves spinal mobility in patients with ankylosing spondylitis: two-year findings from the ASSERT clinical trial. Congrès annuel de l’American College of Rheumatology, 2007.

EFFETS BÉNÉFIQUES À LONG TERME DE L'INHIBITION DU TNF-a SUR L'ACTIVITÉ DE LA MALADIE

Commentaire éditorial :

Nick Barkham, MB, ChB, MRCP (Royaume-Uni)

Département des maladies de l'appareil locomoteur, University of Leeds, Leeds, Royaume-Uni

L'étude ASSERT ( Ankylosing Spondylitis Study for the Evaluation of Recombinant Infliximab Therapy) a révélé que l'administration précoce d'un agent biologique ralentit la progression de la spondylarthrite ankylosante (SA). L'effet qu'a exercé cet agent biologique, un inhibiteur du facteur de nécrose tumorale alpha (anti-TNF-a) en l'occurrence, sur le cours évolutif de la SA n'avait encore jamais été observé avec un AINS ou un autre traitement. La possibilité qu'offrent les agents biologiques de modifier la physiopathologie des maladies inflammatoires a des répercussions sur le risque d'apparition des complications les plus graves, dont une incapacité irréversible. Certes, les rapports coûtefficacité et risque-bénéfice de l'utilisation précoce d'un anti-TNF-a dans la SA demeurent mal définis, mais les résultats de l'étude ASSERT soulignent la nécessité d'une nouvelle orientation, notamment vers un diagnostic plus précoce de la maladie et une surveillance plus étroite de l'inflammation. Somme toute, on aspire maintenant à maîtriser la maladie plutôt qu'à en soulager les symptômes.

ASSERT : maîtrise de l'activité de la maladie

Les inhibiteurs du TNF-a, cytokine reconnue pour être l'un des principaux déclencheurs de la cascade inflammatoire, se sont révélés efficaces contre un vaste éventail de processus inflammatoires, dont la polyarthrite rhumatoïde1, les maladies inflammatoires de l'intestin2 et le psoriasis3. Dans la SA, les essais cliniques ayant objectivé une diminution marquée des symptômes ont porté sur trois anti- TNF-a, l'infliximab4, l'étanercept5 et l'adalimumab6. Les réponses cliniques observées lors de ces études étaient souvent remarquables, même dans les cas où la maladie était réfractaire aux traitements administrés en première intention. Si les premières études mesuraient surtout le soulagement des symptômes, c'est-àdire le résultat immédiat le plus important d'une maladie à progression lente, plusieurs études ont ensuite évalué l'effet de ces agents sur l'activité de la maladie. L'objectif auquel on aspire en bloquant la cascade inflammatoire est de protéger le patient contre la progression de la SA. Ainsi, si le traitement visait jadis à améliorer la qualité de vie, il vise maintenant à améliorer l'issue à long terme.

Plusieurs études étayent maintenant la théorie voulant que les anti-TNF-a modifient l'évolution de la SA. De toutes ces études, ASSERT – étude à double insu et randomisée avec placebo qui utilisait l'imagerie par résonance magnétique (IRM) pour l'évaluation de l'activité inflammatoire dans les articulations touchées – est la plus vaste. Dans la première publication des résultats de cette étude, les auteurs ont comparé les groupes randomisés après 24 semaines7, mais le suivi remonte maintenant à sept ans8. Après 24 semaines, les clichés IRM montraient que l'anti-TNF-a était associé à une diminution de l'inflammation comparativement au placebo. Depuis, le paramètre principal regroupe l'amélioration clinique durable de la mobilité rachidienne et d'autres paramètres inclus dans les critères de réponse ASAS (Assessments in Ankylosing Spondylitis).

Dans le cadre de l'étude ASSERT, 276 patients ont été randomisés de façon à recevoir, selon un ratio 8:3, soit l'anti-TNF-a, à savoir l'infliximab à raison de 5 mg/kg, soit un placebo, suivant un calendrier prédéterminé : au départ, après deux et six semaines, puis toutes les six semaines. Environ 80 % des patients présentaient au moins une lésion rachidienne active au départ. L'évaluation de l'activité de la maladie à l'IRM après 24 semaines par deux examinateurs qui ignoraient le traitement attribué a fait ressortir un avantage hautement significatif pour les 194 sujets sous infliximab par rapport aux 72 témoins sous placebo (p<0,001). En effet, l'activité inflammatoire a persisté dans le groupe placebo pendant cette période alors qu'on a observé une résolution quasi complète de l'inflammation rachidienne dans le groupe infliximab, indépendamment du degré initial d'inflammation.

Au terme de l'évaluation réalisée après 24 semaines, les témoins sous placebo avaient la possibilité de passer à l'infliximab, administré là encore à raison de 5 mg/kg au départ, à deux et à six semaines, puis toutes les six semaines. Chez les sujets déjà sous infliximab, on pouvait poursuivre leur traitement, mais chez ceux qui n'avaient pas atteint un score =3 selon l'indice BASDAI (Bath Ankylosing Spondylitis Disease Activity Index) lors de deux évaluations consécutives, on portait la dose à 7,5 mg/kg toutes les six semaines. La dose a ainsi été augmentée chez 106 (53 %) des patients randomisés d'emblée dans le groupe infliximab qui ont poursuivi l'étude. En tout, 161 patients ont été évalués après 102 semaines selon diverses méthodes d'évaluation clinique9.

Après 102 semaines, les clichés IRM ont objectivé une diminution persistante – et non la suppression – de l'inflammation rachidienne chez tous les patients. Les paramètres de l'activité de la maladie et les données IRM n'étaient pas en parfaite corrélation, mais ils concordaient. Les auteurs en ont conclu que les deux types de données pourraient être utiles pour définir la réponse à un anti-TNFa. Au chapitre des paramètres cliniques, les améliorations obtenues après deux ans selon l'indice BASDAI et les critères de réponse ASAS étaient semblables aux améliorations obtenues après 24 semaines chez les sujets qui avaient poursuivi leur traitement par l'infliximab. De plus, on constatait toujours une amélioration de la mobilité rachidienne par rapport à la mobilité initiale. Les améliorations cliniques relatives par rapport aux valeurs initiales étaient comparables chez les témoins sous placebo qui étaient passés à l
es sujets qui avaient reçu l'infliximab d'emblée. Ces résultats cliniques traduisaient une maîtrise soutenue de la maladie grâce à la suppression de l'inflammation.

Résultats de l’étude ASSERT : score de l’activité rachidienne de la SA à l’IRM

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D’après Braun et al. Congrès 2007 de l’EULAR, résumé OP0044.

Après sept ans, l'indice BASDAI était <4 chez 78 % des patients. Le critère de réponse ASAS 20 a été observé chez 82 % des patients et critère de réponse ASAS 40, chez 62 % des patients. Comme les patients qualifiés de nonrépondeurs après sept ans (18 %), à l'exception d'un seul, avaient tous atteint le critère ASAS 20 au moins une fois au cours des trois années antérieures, peut-être serait-il préférable de les qualifier de répondeurs partiels. La durée de l'intervalle entre l'apparition des symptômes et le début du traitement par l'infliximab a eu des retombées sur la probabilité d'une réponse partielle. En effet, seulement 23 % des sujets traités tardivement ont atteint ce critère de réponse clinique, comparativement à 56 % des sujets traités plus tôt. À en juger par ce résultat, il serait justifié d'évaluer plus à fond la possibilité qu'un traitement précoce confère une protection contre les lésions structurales à long terme.

Diminution des lésions inflammatoires : confirmée par l'IRM

Une étude randomisée de plus petite envergure reposant sur l'IRM a généré des résultats similaires sur le traitement de la SA par l'infliximab10. Lors de cette étude, 40 sujets porteurs de HLA-B27 qui n'avaient jamais été traités et qui présentaient des dorsalgies inflammatoires évocatrices de la SA ont subi un examen IRM du rachis et des articulations sacro-iliaques. Les patients, qui ont été randomisés en deux groupes de taille égale, recevaient en perfusion soit un placebo, soit l'infliximab à 5 mg/kg au départ, puis après deux, six et 12 semaines. Les patients des deux groupes étaient autorisés à prendre des AINS en concomitance, mais la dose du traitement à l'étude ne pouvait pas être ajustée. Les participants étaient âgés en moyenne de 28 ans, et leurs symptômes remontaient en moyenne à environ 15 mois. Le paramètre principal était l'évolution, sur les clichés IRM, des lésions rachidiennes et sacro-iliaques après 16 semaines de traitement. Les scores des lésions repérées au départ et réévaluées après 16 semaines ont été appariés. Tous les clichés IRM ont été évalués par deux examinateurs qui ignoraient le traitement attribué.

Au départ, le score IRM total des lésions sacro-iliaques était de 5,1 en moyenne. Après 16 semaines, le score était inchangé dans le groupe placebo alors qu'il avait diminué de 2,0 en moyenne (intervalle de 0 à 6,5) dans le groupe infliximab (p=0,033). Parmi les lésions sacro-iliaques repérées au départ sur les clichés IRM, 62,7 % s'étaient résorbées après 16 semaines dans le groupe infliximab vs 29,4 % dans le groupe placebo (p=0,001). De nouvelles lésions ont été observées après 16 semaines chez un seul patient sous infliximab vs 11 témoins sous placebo (p=0,004). Neuf patients présentaient des lésions rachidiennes au départ. Après 16 semaines, les lésions s'étaient résorbées chez trois des cinq sujets sous infliximab, comparativement à un seul des quatre témoins sous placebo. Toujours à 16 semaines, 10 des 18 (55,6 %) patients sous infliximab vs 2 des 16 (12,5 %) patients sous placebo (p=0,009) étaient parvenus à une rémission partielle telle que définie en fonction des critères ASAS.

Confirmation des résultats par l'indice BASDAI et les critères de réponse ASAS

Les écarts entre les groupes sur le plan de la maîtrise de l'inflammation se sont reflétés dans les résultats de diverses évaluations cliniques pendant la même période. Par exemple, l'indice BASDAI a baissé de 3,41 dans le groupe infliximab vs 0,75 dans le groupe placebo (p=0,002). La proportion de patients ayant atteint le critère de réponse ASAS 20 se chiffrait à 77,8 % dans le groupe infliximab vs 31,3 % (p=0,006) dans le groupe placebo. La proportion de patients ayant atteint le critère ASAS 70 se chiffrait respectivement à 55,6 % et à 12,5 % (p=0,009).

Les données de cette étude, comme celles de l'étude ASSERT, montrent que l'infliximab soulage les dorsalgies en autorisant une diminution rapide de l'activité inflammatoire de la maladie mesurée par l'IRM. Une sousétude d'ASSERT a établi un lien entre la diminution de l'inflammation et la suppression des cytokines inflammatoires, dont la protéine C-réactive (CRP), l'interleukine-6 (IL-6) et le facteur de croissance de l'endothélium vasculaire (VEGF)11. Aucun traitement n'avait encore été associé à la suppression des lésions inflammatoires sur les clichés IRM dans la SA très précoce. Certes, les données actuelles semblent indiquer que l'infliximab inhibe les processus physiopathologiques sous-jacents à la SA, mais d'autres études s'imposent pour que l'on puisse déterminer si le traitement précoce stoppe également l'ankylose.

Résumé

Les traitements qui ciblent le TNF-a peuvent modifier le cours évolutif naturel de la SA et d'autres maladies inflammatoires progressives. Dans le passé, le traitement de la SA visait à soulager les symptômes et, par conséquent, à améliorer la qualité de vie. Les agents biologiques permettent maintenant de moduler le processus physiopathologique et ainsi de changer l'issue. Par exemple, de nouvelles données de l'étude ASSERT ont établi un lien entre un traitement biologique précoce et l'atteinte plus probable du critère de réponse ASAS 70 après sept ans. Si le rapport risque-bénéfice et le coût des agents biologiques donnent tout lieu de croire que ces traitements ne sont peut-être pas justifiés chez tous les patients souffrant de SA, il reste que les sujets dont la maladie évolue inéluctablement vers des lésions articulaires sévères pourraient en bénéficier avant que celle-ci n'atteigne un stade avancé. Pendant que l'on continue de débattre ces questions, les études réalisées à ce jour semblent au moins indiquer que de nouvelles stratégies s'imposent pour accélérer le diagnostic de la SA et surveiller l'activité de la maladie. Il est bien sûr essentiel de soulager les symptômes à court terme pour donner au patient une qualité de vie acceptable, mais le traitement du processus morbide pourrait réduire le risque d'incapacité à long terme.

Références

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2. D’haens et al. Endoscopic and histological healing with infliximab anti-tumor necrosis factor antibodies in Crohn’s disease: A European multicenter trial. Gastroenterology1999;116:1029-34.

3. Mease et al. Etanercept in the treatment of psoriatic arthritis and psoriasis: a randomised trial. Lancet 2000;356:385-90.

4. Brandt et al. Successful treatment of active ankylosing spondylitis with the anti-tumor necrosis factor monoclonal antibody infliximab. Arthritis Rheum 2000;43:1346-52.

5. Marzo-Ortega H, McGonagle D, O’Connor P, Emery P. Efficacy of etanercept in the treatment of the entheseal pathology in resistant spondylarthropathy. Arthritis Rheum 2001;44:2112-7.

6. Van der Heijde et al. Adalimumab effectively reduces the signs and symptoms of active ankylosing spondylitis in patients with total spinal ankylosis. Ann Rheum Dis 2007;publié en ligne avant impression.

7. Braun et al. Treatment of active ankylosing spondylitis with infliximab: a randomised controlled multicentre trial. Lancet 2002;359:1187-93.

8. Baraliakos et al. Persistent clinical efficacy and safety of infliximab in patients with ankylosing spondylitis over 7 years – evidence for different response to anti-TNF-A therapy. Congrès 2008 de la Ligue européenne contre le rhumatisme (EULAR), résumé FRI0290.

9. Sieper et al. Persistent reduction of spinal inflammation as assessed by magnetic resonance imaging in patients with ankylosing spondylitis after two years of treatment with the anti-tumor necrosis factor infliximab. Rheumatology 2005;44:1525-30.

10. Barkham et al. A Randomized Controlled Trial of Infliximab shows clinical and MRI efficacy in patients with HLA B27 positive very early ankylosing spondylitis. Congrès annuel 2008 de l’American College of Rheumatology, résumé FRI0310.

11. Visvanathan et al. Inflammatory biomarkers, disease activity, and spinal disease measures in patients with ankylosing spondylitis after treatment with infliximab. Ann Rheum Dis 2008;67:511-7.

EFFETS INDIRECTS DE L'INHIBITION DU TNF-a : REGARD SUR LES VARIATIONS DES MARQUEURS HISTOPATHOLOGIQUES ET MOLÉCULAIRES

Commentaire éditorial :

Dominique L. Baeten, MD, PhD

Immunologie clinique et rhumatologie, Centre médical universitaire / Université d'Amsterdam, Amsterdam, Pays-Bas

Le facteur de nécrose tumorale alpha (TNF-a) s'est avéré une cible thérapeutique importante dans un vaste éventail de maladies inflammatoires. Si l'action bénéfique des anti-TNF-asemble découler principalement de la suppression d'un médiateur clé de la cascade inflammatoire, ces agents exercent aussi divers effets en aval de leur site d'action et autres effets connexes dont l'importance pourrait varier d'une maladie à l'autre. Dans la spondylarthrite ankylosante (SA) et d'autres spondylarthropathies, diverses études ont montré que l'infliximab et d'autres anti- TNF-a modifient l'activité de la maladie au niveau de la synoviale, dont les changements vasculaires et structuraux favorables résultent d'effets indirects de l'inhibition du TNF-a. Dans la SA, ces actions pourraient jouer un plus grand rôle que l'inhibition des lymphocytes T. Les différences, si différences il y a, entre l'infliximab, d'autres anti-TNF-a et les inhibiteurs d'autres cytokines proinflammatoires pourraient jeter un éclairage nouveau sur les mécanismes des maladies qui répondent aux agents biologiques anti-inflammatoires.

Participation d'autres médiateurs inflammatoires

L'efficacité des anti-TNF-a confirme qu'un bénéfice clinique substantiel découle du ciblage de médiateurs spécifiques de la cascade inflammatoire. Cela dit, pour plusieurs raisons, les mécanismes qui sous-tendent ce bénéfice ne sont pas nécessairement les mêmes d'une maladie inflammatoire à l'autre. Entre autres, il est peu probable que la relation entre les médiateurs de l'inflammation et la progression de la maladie soit identique dans des tissus différents, par exemple l'intestin grêle et les grandes articulations. Si l'activation des leucocytes est commune aux maladies qui répondent aux anti-TNF-a, la participation des autres médiateurs de l'inflammation diffère, et les altérations pathologiques des tissus touchés ne sont pas nécessairement analogues. Bien sûr, on s'entend pour dire que l'interruption de la cascade inflammatoire est la clé de voûte de l'activité des anti-TNF-a, mais la mise en évidence d'autres mécanismes nous éclairerait sur les étapes moléculaires qui contribuent à l'apparition et à la persistance de la maladie.

L'activité propre à l'infliximab dans les maladies inflammatoires de l'intestin (MII) et la SA permet d'explorer les mécanismes relatifs qui sous-tendent ses effets bénéfiques dans le traitement des maladies caractérisées par une activation de l'inflammation. Bien que, à l'échelon cellulaire, les effets de l'inhibition du TNF-a soient probablement similaires dans les deux maladies, la contribution relative de ces effets à la maîtrise de la maladie pourrait varier de manière substantielle. Par exemple, si les lymphocytes T jouent un rôle pathogène évident dans la maladie de Crohn, ce n'est pas le cas dans la SA. Les effets directs de l'infliximab sur les lymphocytes T – notamment l'inhibition lymphocytes Tdépendante de la synthèse du facteur de stimulation des granulocytes et des macrophages (GM-CSF) et l'apoptose des lymphocytes T1 – pourraient être plus pertinents dans le cas de la maladie de Crohn, tandis que la diminution de l'activité inflammatoire et du remodelage tissulaire, lymphocytes T-dépendants ou non, pourrait être plus importante dans la SA.

Régulation à la baisse de l'activation endothéliale et de l'hypervascularisation

Dans la SA, les améliorations cliniques substantielles associées à l'infliximab, inhibiteur monoclonal du TNF-a2, et l'étanercept, antagoniste des récepteurs du TNF-a3, témoignent d'une diminution de l'activité inflammatoire, mais des études récentes ont démontré que d'autres actions pourraient contribuer à la maîtrise de la maladie. Dans une petite étude où l'on effectué une série de biopsies de la synoviale chez huit patients souffrant d'une spondylarthropathie pour étudier l'effet de l'infliximab, on a observé des baisses remarquables de l'épaisseur de la synoviale qui s'accompagnaient d'une régulation à la baisse de l'activation endothéliale et de l'hypervascularisation4.

Ces modifications, qui étaient corrélées avec une diminution des infiltrats inflammatoires, ont donné lieu à une deuxième analyse de plus grande envergure qui comportait un petit groupe témoin sous placebo5. Deux populations étaient incluses dans cette analyse. L'une d'elles était une cohorte composée de 10 patients ayant reçu de l'infliximab à raison de 5 mg/kg au départ, puis après deux et six semaines, ainsi que trois patients sous placebo. La seconde population était une cohorte mixte de 20 patients qui avaient aussi reçu de l'infliximab à raison de 5 mg/kg au départ et après deux et six semaines. Dans le premier groupe, l'infliximab a réduit significativement l'épaisseur de la synoviale (p=0,015), l'activation endothéliale (p=0,034), et les infiltrats inflammatoires de polynucléaires neutrophiles (p=0,041), de macrophages (p=0,034) et de lymphocytes T (p=0,026) par comparaison aux valeurs initiales et au groupe placebo. Dans le second groupe, on a observé non seulement une diminution comparable de l'inflammation, mais également une normalisation de l'épaisseur de la synoviale et une diminution significative des vaisseaux sanguins (p=0,039). Ces modifications – que l'on a observées parallèlement à l'amélioration clinique des symptômes – étaient indépendantes du sous-type de spondylarthropathie.

Activité relative dans différentes voies

Après 12 semaines de traitement par l'infliximab, la tendance à la normalisation des données histologiques a été étayée par des modifications favorables de divers marqueurs moléculaires, comme la régulation à la baisse de l'expression de VCAM-1 et de CD146. Nous avons besoin d'études de plus longue durée pour déterminer si cette normalisation se poursuit. De telles études présentent un intérêt particulier au vu de l'hypothèse voulant que le remodelage de la synoviale se traduise par des changements au niveau des structures osseuses et cartilagineuses. Les effets relatifs d'autres anti-TNF-a sont aussi intéressants. Il a été démontré que l'étanercept exerce lui aussi des effets favorables sur le remodelage de la synoviale6, mais les autres agents biologiques comme l'adalimumab n'ont pas encore été évalués. La comparaison de l'infliximab et de l'étanercept fait ressortir un certain nombre de différences histologiques, comme les infiltrations de macrophages7, ce qui donne à penser que les anti-TNF-a diffèrent vraiment quant à leur activité relative dans différentes voies.

Dans les spondylarthropathies, les marqueurs de substitution du bénéfice du traitement, comme les analyses séquentielles du tissu synovial auxquelles on a eu recours dans les études pilotes susmentionnées, pourraient être d'une utilité considérable pour nous aider à comprendre l'activité relative des traitements ciblés. On a eu recours à des biopsies en série de la synoviale pour valider des marqueurs de substitution de l'amélioration clinique dans la polyarthrite rhumatoïde8. De même, dans la SA, des études pilotes ont confirmé l'utilité comparable de prélèvements en série de la synoviale pour valider des marqueurs de substitution et ont révélé que ces prélèvements fournissaient de nouvelles données sur les changements histopathologiques et moléculaires définissant cette maladie9. D'autres études visant à valider ces marqueurs de substitution et d'autres du même type s'imposent. Si le mécanisme qui sous-tend l'effet bénéfique de l'inhibition du TNF-a varie d'une maladie à l'autre, les effets indirects relatifs des divers agents qui exercent une activité dans les spondylarthropathies pourraient être importants non seulement parce qu'ils nous aident à comprendre cette maladie, mais aussi d'autres maladies inflammatoires, comme l'uvéite, qui peuvent survenir isolément ou en concomitance. Des études d'association ont déjà établi que les MII et l'uvéite sont plus étroitement liées avec les spondylarthropathies périphériques qu'avec une forme axiale pure de SA, ce qui pourrait nous aider à repérer les mécanismes communs qui sous-tendent les effets bénéfiques cliniques des anti-TNF-a. De même, le psoriasis semble davantage associé aux troubles articulaires et axiaux qu'aux maladies inflammatoires de l'appareil digestif. L'utilité des anti-TNF-a comme l'infliximab dans de multiples maladies inflammatoires évoque la possibilité de caractéristiques physiopathologiques communes, mais peutêtre serait-il plus utile de connaître ce qui les d
de la signalisation histopathologique et moléculaire pour comprendre à fond comment on peut faire régresser les dysfonctions immunitaires propres à chaque tissu.

Tableau 1. Analyses histologiques et immunohistochimiques en présence de spondylarthropathies, chez des sujets sous infliximab

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Les scores des analyses immunohistochimiques et histologiques semiquantitatives sont exprimés sous forme de médiane (intervalle). Dans le cas des marqueurs immunohistochimiques CD83 et CD1a (soussynoviale), seules la présence (+) ou l'absence (-) ont
e cas de la 1re population étudiée, la valeur pa été déterminée à l'aide du test de Wilcoxon pour observations appariées dans le cas des analyses semi-quantitatives et du test de McNemor dans le cas des analyses dichotomiques. INC = incalculable.

Tableau 2. Réponse clinique au traitement de la SA traitée pendant 12 semaines*

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Dans les maladies inflammatoires progressives comme la SA, il est surtout urgent de savoir si l'administration d'un agent biologique ciblé peut modifier le cours évolutif naturel de la maladie. Le soulagement des symptômes est bien sûr un objectif fondamental, mais les études pilotes sur l'histopathologie qui ont mis en évidence une normalisation de la synoviale donnent à penser que l'on pourrait non seulement stopper la progression de la maladie, mais aussi faire régresser les changements structuraux découlant de la maladie. À l'heure actuelle, les traitements ciblés sont généralement réservés aux stades avancés des maladies inflammatoires, dont la SA, mais si l'on parvient à confirmer qu'un traitement plus précoce pourrait éviter les lésions structurales, il deviendra possible de prévenir la progression de la maladie.

Résumé

La mise au point des anti-TNF-a a aidé à cerner les caractéristiques moléculaires des maladies inflammatoires, dont la SA. L'activité de ces agents dans de nombreuses maladies touchant divers tissus valide le rôle instrumental du TNF-a dans la réponse inflammatoire. Cela dit, c'est l'interaction du TNF-a avec les différents systèmes de signalisation qui détermine le type de maladie inflammatoire. Il ressort d'études récentes sur la SA que les effets cliniques bénéfiques de l'infliximab semblent découler d'une diminution de la vascularisation et du remodelage tissulaire. Contrairement à ce que l'on observe dans les MII, où l'apoptose des lymphocytes T pourrait contribuer beaucoup plus étroitement à l'induction de la quiescence de la maladie, les effets histologiques et moléculaires particuliers de l'inhibition du TNF-a dans la SA nous aideront assurément à mieux comprendre la cascade inflammatoire dans divers tissus où les anti-TNF-a se sont montrés actifs.

Références

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2. Van den Bosch et al. Randomized double-blind comparison of chimeric monoclonal antibody to tumour necrosis factor alpha (infliximab) versus placebo in active spondyloarthropathy. Arthritis Rheum 2002;46:755-65.

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8. Taylor et al. Reduction of chemokine levels and leucocyte traffic to joints by tumour necrosis factor alpha blockade in patients with rheumatoid arthritis. Arthritis Rheum 2000;43:38-47.

9. Kruithof et al. Identification of synovial biomarkers of response to experimental treatment in earlyphase clinical trials in spondylarthritis. Arthritis Rheum 2006;54:1795-804.

STRATÉGIES POUR INFLÉCHIR LE COURS DE LA MALADIE ET PRÉVENIR LES COMPLICATIONS TARDIVES

Commentaire éditorial :

Filip Van den Bosch, MD

Service de rhumatologie, Hôpital universitaire de Gand, Gand, Belgique

L’hypothèse selon laquelle les inhibiteurs du facteur de nécrose tumorale alpha (anti-TNF-a) pourraient modifier le cours évolutif de la spondylarthrite ankylosante (SA) est en partie fondée sur leur remarquable efficacité clinique et en partie sur leur action favorable sur les processus cellulaires et moléculaires considérés comme des marqueurs de substitution de la progression de la maladie. Au fil des années, les études à long terme menées chez des patients atteints de SA recevant un traitement continu par un anti-TNF-a nous permettent d'avoir plus de recul et ainsi de mieux évaluer l’effet tangible de ces agents sur la progression, mesurée par la radiographie et d’autres modalités d’imagerie objectives. Bien que des essais comparatifs aient établi les bienfaits cliniques à court terme des anti-TNF-a dans le traitement de la SA, on devra peut-être repenser les algorithmes de traitement si les études à long terme prouvent que l'on peut stopper la progression de la maladie. Actuellement, la plupart des guides de pratique recommandent l’emploi des anti-TNF-a seulement en cas d’inefficacité des anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS). Si le traitement peut diminuer le risque d'incapacité à long terme, son rôle ne se limitera plus au soulagement des symptômes mais englobera aussi la prévention des lésions structurales tardives et de leur retentissement fonctionnel.

Effet soutenu sur la progression de la maladie

Les anti-TNF-a sont associés à un taux élevé d’efficacité dans le traitement de la SA. Lors des études comparatives avec placebo d’abord menées sur l’infliximab, les améliorations cliniques s’accompagnaient d’une réduction hautement significative des paramètres biologiques de l’activité de la maladie1,2. Des études subséquentes portant sur l’étanercept et l’adalimubab, deux autres anti-TNF-a, ont mis en évidence une efficacité similaire dans la SA3,4. Cette efficacité résulte du rôle central du TNF-a dans la réponse inflammatoire. L’hypothèse selon laquelle les anti-TNF-a pourraient stopper, voire renverser le processus pathologique repose sur une série d’études cliniques sur la SA ainsi que d’autres affections qui semblent partager les mêmes mécanismes pathologiques, telle la polyarthrite rhumatoïde. Dans ces deux affections, on croit que l’infliximab pourrait prévenir la progression de la maladie en raison des changements favorables observés sur des biopsies synoviales itératives après son utilisation, notamment la normalisation de la synoviale, la réduction des infiltrats inflammatoires et la régulation négative de la vascularisation5,6. Ces modifications à court terme des marqueurs de substitution sont encourageantes, mais, comme la SA est une affection chronique caractérisée par une atteinte structurale progressive, la pierre de touche d’un agent de rémission réside en fait dans la prévention de la progression clinique à long terme. Du point de vue du patient, le signe le plus tangible de cette protection est la stabilisation ou l’amélioration de mesures cliniques reproductibles telles que l’indice BASFI (Bath Ankylosing Spondylitis Functional Index). Sur le plan anatomopathologique, les modifications favorables des paramètres structuraux objectivées en imagerie et en histologie en sont la meilleure traduction.

En recherche clinique, des améliorations du score BASFI ont été confirmées dans toutes les études menées jusqu’ici sur les anti-TNF-a, dont plusieurs s’appuyaient sur un suivi de près de cinq ans. Lors d’un essai publié qui comportait un suivi de cinq ans, 38 des 69 patients ayant initialement participé à un essai randomisé à double insu ont continué de recevoir l’infliximab à une dose de 5 mg/kg toutes les six semaines. À cinq ans, 78 % d’entre eux avaient un score <4 selon l’indice BASDAI (Bath Ankylosing Spondylitis Disease Activity Index), et 84 % avaient atteint le critère ASAS 20 (amélioration de 20 % selon les critères Assessments in Ankylosing Spondylitis) (64 % avaient atteint le critère ASAS 40)7. D’autres groupes de chercheurs ont publié des résumés faisant état de résultats à long terme similaires.

Cela dit, il semble important de poursuivre le traitement pour que les bienfaits se maintiennent. Selon une analyse du bénéfice à trois ans effectuée par un groupe ayant par ailleurs publié les résultats de son étude à cinq ans, l’interruption du traitement après trois ans s’est soldée par une rechute chez 41 des 42 patients au cours d’un intervalle moyen de 17,5 semaines8. Même si les réponses obtenues après la reprise du traitement étaient comparables à ce qu’elles étaient durant le traitement initial, la réactivation relativement rapide de la maladie donne à penser qu’un traitement d’entretien administré à intervalles réguliers est nécessaire pour tenir la maladie en échec.

Des études radiographiques ont apporté la preuve d’une modification du cours évolutif de la maladie sous l’
ans certaines spondylarthropathies. Ainsi, dans le rhumatisme psoriasique, on a observé une inhibition de la progression radiographique moins de six mois après le début du traitement par l’infliximab9.

Figure 1. IMPACT 2: Variation moyenne des scores Sharp/van der Heijde modifié, d’érosion et PIA (pincement de l’interligne articulaire) après 54 semaines

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D’après Van der Heijde et al. Arthritis Rheum 2007;56(8):2698-707.

Des études préliminaires dans la SA ont mis en évidence une progression moins marquée des lésions structurales à deux ans chez les sujets recevant de l’infliximab que chez les sujets n’en ayant pas reçu au cours de la même période10. Dans une seconde étude dont le suivi s’échelonnait cette fois sur quatre ans, on a noté une progression radiographique des lésions sous infliximab, mais elle était moins importante que ce que laissaient prévoir les changements observés chez des témoins historiques11.

Toutefois, aucune des études de phase III réalisées sur l’infliximab ou l’étanercept n’a associé le traitement par un anti-TNF-a à un ralentissement significatif de la progression des lésions structurales, à en juger par le score SASSS (Stoke Ankylosing Spondylitis Spine Score) modifié12,13. Même si on manque de données, il est sans doute peu réaliste d’envisager de faire des études comparatives avec placebo d’une durée suffisante pour démontrer un ralentissement de la progression radiographique. La meilleure façon de confirmer la possibilité de modifier le cours de la maladie pourrait dès lors être d’accumuler un corpus substantiel de données mettant en corrélatio
l'issue clinique et une atténuation des atteintes structurales par comparaison avec des témoins historiques. Des études additionnelles, telles que des évaluations IRM périodiques, pourraient compléter utilement les études radiographiques pour confirmer une activité modifiant l’évolution de la maladie.

Figure 2. Progression radiographique : traitement par l’infliximab vs traitement classique au sein de la cohorte OASIS

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D’après Baraliakos et al. Rheumatology 2007;46:1450–3.

L’évaluation histologique de la progression de la SA pose problème en raison de la difficulté à obtenir des échantillons tissulaires du squelette axial, des articulations sacroiliaques et des enthèses14. Cependant, des évaluations de séries de biopsies synoviales ayant associé l’infliximab à une réduction de l’hypervascularisation et de l’hyperplasie de la synoviale fournissent un premier élément de preuve à l'appui d’un effet protecteur dans les tissus touchés5. L’infliximab a également été associé à une régulation négative des métalloprotéinases m
viale, qui interviennent dans la néovascularisation, la dégradation de la matrice et la destruction de l’os et du cartilage15. Prises isolément, les données histologiques témoignant d’une maîtrise de la maladie démontrent peut-être moins formellement l’effet protecteur contre sa progression que les données radiographiques, mais elles confirment bel et bien l’existence d’une activité favorable à l’échelon cellulaire et moléculaire.

Figure 3.

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D’après Vastesaeger et al. Congrès SpA 2006, Gand, Belgique. Résumé de l’étude ASPECT P21.

Du soulagement des symptômes à la prévention des complications tardives : une différence fondamentale

De plus en plus de données cliniques autorisent à penser que les anti-TNF-a peuvent être administrés efficacement et sans danger dans le cadre d'un traitement d’entretien à long terme, mais dans la comparaison de ces agents avec d’autres options de traitement sur les plans de l’innocuité, de l’efficacité et du coût, il est fondamental de tenir compte des objectifs du traitement. En effet, les stratégies susceptibles d’infléchir le cours de la maladie, et donc de réduire le risque de complications tardives telles qu’une incapacité, n’engendrent pas les mêmes rapports risque-bénéfice et coûtavantage que les stratégies purement symptomatiques. Pour la même raison, la protection relative offerte par ces agents contre les manifestations extra-articulaires est aussi une donnée importante dans l’évaluation de l’utilité clinique. Lors de l’essai ASPECT (Ankylosing Spondylitis Patients Epidemiological Cross-sectional Trial), 42 % des 847 patients ont présenté au moins une manifestation extra-articulaire16. Au nombre de ces manifestations, on a observé des cas d’uvéite antérieure, de psoriasis et de maladie inflammatoire de l’intestin (MII) chez 27 %, 11 % et 10 % d’entre eux, respectivement. Le risque de manifestation extra-articulaire semble augmenter avec l'ancienneté de la maladie.

Prévenir l’apparition de complications extraarticulaires par l’administration précoce d’un agent de rémission pourrait être une stratégie plus avantageuse que d’intensifier le traitement après leur survenue.

L’espoir que, au vu des données actuelles, les agents biologiques puissent freiner la progression de la maladie bouleverse l’orientation du traitement, jusqu’ici focalisé sur le soulagement des symptômes à court terme. Comme beaucoup d’autres maladies inflammatoires qui répondent aux anti-TNF-a, la SA est une affection chronique pour laquelle l’effet des stratégies de traitement doit être considéré dans une perspective à long terme. Si l’on parvient à démontrer la supériorité d’une stratégie par rapport aux autres options existantes quant à la protection contre la progression de la maladie, ce sera là un aspect fondamental à considérer dans le choix du traitement optimal. Maintenant que deviennent disponibles des données sur les effets à cinq ans de l’infliximab, de l’étanercept, de l’adalimumab et d’autres anti-TNF-a, il sera possible d’évaluer leur action sur la maladie même et leur capacité de modifier le pronostic à long terme.

Résumé

Des données cliniques, radiographiques et histologiques étayent l’hypothèse selon laquelle les anti-TNF-a peuvent modifier le cours évolutif de la SA. Toutefois, les études menées chez un nombre croissant de patients qui ont poursuivi le traitement durant au moins cinq ans - ce qui représente une durée plus pertinente pour démontrer une rémission dans le contexte d’une maladie au cours évolutif relativement lent, objectivement parlant - devraient fournir des données plus concluantes. Bien que les anti-TNF-a soient actuellement presque toujours réservés aux patients dont la SA est réfractaire aux autres traitements, ces agents pourraient à l’avenir être utilisés plus largement ou plus précocement s’il était démontré qu’ils peuvent prévenir les conséquences irréversibles de la progression de la maladie. La capacité d’infléchir le cours de la maladie sera d’autant plus importante si on parvient à mettre au point des outils diagnostiques pour reconnaître précocement les patients présentant une forme à progression rapide de la maladie ou tout autre signe de mauvais pronostic. L’objectivation d’un tel effet des anti-TNF-a confirmerait toute la pertinence de cibler une voie moléculaire clé de la cascade inflammatoire.

Références

1. Van den Bosch et al. Randomized double-blind comparison of chimeric monoclonal antibody to tumor necrosis alpha (infliximab) versus placebo in active spondyloarthropathy. Arthritis Rheum 2002;46:755-65.

2. Braun et al. Treatment of active ankylosing spondylitis with infliximab: a randomized, controlled multicenter study. Lancet 2002;359:1187-93.

3. Gorman JD, Sack KE, Davis JC. Treatment of ankylosing spondylitis by inhibition of tumour necrosis factor alpha. N Engl J Med 346:2002;1349-56.

4. Van der Heijde et al. Adalimumab effectively reduces the signs and symptoms of active ankylosing spondylitis in patients with total spinal ankylosis. Ann Rheum Dis 2008;67:1218-21.

5. Ulfgren et al. Systematic anti-tumor necrosis factor alpha therapy in rheumatoid arthritis downregulates synovial tumor necrosis factor alpha synthesis. Arthritis Rheum 2000;43:2391-6.

6. Kruithof et al. Histological evidence that infliximab treatment leads to downregulation of inflammation and tissue remodelling of the synovial membrane in spondyloarthropathy. Ann Rheum Dis 2005;64:529-36.

7. Braun et al. Persistent clinical efficacy and safety of anti-tumour necrosis factor therapy with infliximab in patients with ankylosing spondylitis over 5 years: evidence for different types of response. Ann Rheum Dis 2008;67:340-5.

8. Baraliakos et al. Clinical response to discontinuation of anti-TNF therapy in patients with ankylosing spondylitis after 3 years of continuous treatment with infliximab. Arthritis Res Ther 2005;7:R439-R444.

9. Van der Heijde et al. Infliximab inhibits progression of radiographic damage in patients with active psoriatic arthritis through one year of treatment: results from the induction and maintenance psoriatic arthritis trial 2. Arthritis Rheum 2007;56:2698-707.

10. Baraliakos et al. Radiographic progression in patients with ankylosing spondylitis after 2 years of treatment with tumor necrosis factor alpha antibody infliximab. Ann Rheum Dis 2005;64:1462-6.

11. Baraliakos et al. Radiographic progression in patients with ankylosing spondylitis after four years of treatment with the anti-tumor necrosis factor alpha antibody infliximab. Rheumatology 2007;46:1450-3.

12. Braun et al. Treatment of active ankylosing spondylitis with infliximab; a randomized controlled multicentre study. Lancet 2002;359:1187-93.

13. van der Heijde et al. Two-year etanercept therapy does not inhibit radiographic progression in patients with ankylosing spondylitis. Ann Rheum Dis 2006;65(résumé II):81.

14. Sieper J, Appel H, Braun J, Rudwaleit M. Critical appraisal of assessment of structural damage in ankylosing spondylitis: implications for treatment outcomes. Arthritis Rheum 2008;58:649-56.

15. Vandooren et al. Involvement of matrix metalloproteinases and their inhibitors in peripheral synovitis and down regulation by tumor necrosis factor-a blockade in spondyloarthropathy. Arthritis Rheum 2004;50:2942-53.

16. Vander Cruyssen et al. The epidemiology of ankylosing spondylitis and the commencement of anti-TNF therapy in daily rheumatology practice. Ann Rheum Dis 2007;66:1072-7.

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