Comptes rendus

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Le rôle des bisphosphonates dans le traitement adjuvant du cancer du sein

Le présent compte rendu est fondé sur des données médicales présentées lors d'un congrès de médecine reconnu ou publiées dans une revue avec comité de lecture ou dans un commentaire signé par un professionnel de la santé reconnu. La matière abordée dans ce compte rendu s'adresse uniquement aux professionnels de la santé reconnus du Canada.

PRESSE PRIORITAIRE - Le 33e Symposium annuel de San Antonio sur le cancer du sein

San Antonio, Texas / 9-12 décembre 2010

Il est bien établi que les bisphosphonates (BP) ont un rôle à jouer dans le traitement préventif des complications osseuses du cancer du fait qu’ils font obstacle à l’ostéolyse maligne, ce qui coupe court à la destruction osseuse et à la croissance tumorale. Des études précliniques semblent indiquer que les BP, surtout les agents azotés comme l’acide zolédronique, ont une activité anticancéreuse inhérente (Oncologist 2004;9[suppl 4]:3-13; Cancer Treat Rev 2008;34:453-75). Au nombre des preuves de cette activité anticancéreuse, on compte des études ayant montré que son administration avait amélioré la survie dans des modèles expérimentaux de cancer (J Bone Miner Res 2003;18:482-92, Int J Cancer 2010;126:239-46).

L’acide zolédronique a fait la preuve de son activité anticancéreuse dans le cadre de plusieurs études d’envergure dans divers cancers. Lors d’une étude portant sur le traitement adjuvant du cancer du sein, on a observé une réduction statistiquement significative de 41 % du risque de récidive ou de décès chez des patientes qui recevaient de l’acide zolédronique en plus d’un inhibiteur de l’aromatase (IA) (p=0,017) (SABCS 2009, résumé 4082).

L’essai AZURE, à l’appui d’un BP en adjuvant

De solides données justifiaient donc l’évaluation élargie de l’acide zolédronique dans le cadre d’un traitement adjuvant du cancer du sein, affirme le Dr Robert E. Coleman, University of Sheffield, Royaume-Uni. C’est ainsi qu’a vu le jour l’essai multicentrique AZURE (Adjuvant Zoledronic Acid to Reduce Recurrence) ciblant des patientes atteintes d’un cancer du sein de stade II/III.

Des chercheurs de 174 établissements ont admis à cette étude 3360 femmes atteintes d’un cancer du sein de stade II/III, lesquelles ont été randomisées de façon à recevoir le traitement adjuvant de référence (traitement hormonal ou/et chimiothérapie) ou le traitement adjuvant de référence plus l’acide zolédronique. Les patientes recevaient une dose de 4 mg du BP 1 fois toutes les 3 à 4 semaines pendant 6 mois, puis 1 fois tous les 3 mois pendant environ 2 ans et 1 fois tous les 6 mois pendant environ 2,5 ans. Les patientes randomisées dans le groupe BP adjuvant ont ainsi reçu un total de 19 doses sur une période de 5 ans. L’essai avait comme paramètre principal la survie sans cancer (SSC) et comme paramètres secondaires majeurs, la survie sans cancer invasif (SSCi), la survie globale (SG) et la survie sans métastase osseuse.

Influence du statut ménopausique

Les résultats de cet essai ont contrasté avec ceux de l’essai XII de l’ABCSG (Austrian Breast Cancer Study Group) qui avait objectivé une diminution significative du risque d’événement compromettant la SSC chez des patientes sous acide zolédronique. Dans le cadre de l’essai ABCSG XII, seules étaient admissibles des patientes non ménopausées atteintes d’un cancer du sein à récepteurs hormonaux (RH+) de stade I ou II.

La comparaison statistique des 1800 patientes de l’essai ABCSG XII et des 1200 patientes non ménopausées de l’essai AZURE a fait ressortir une hétérogénéité significative (p=0,02) de même qu’une tentative d’explication des résultats en apparence contradictoires. «Les résultats de l’essai AZURE diffèrent nettement de ceux de l’essai ABCSG XII, explique le Dr Coleman. On a observé une hétérogénéité hautement significative de l’effet en fonction du statut ménopausique, la SSC et la SG s’étant améliorées chez les patientes ménopausées depuis plus de 5 ans.»

Selon l’analyse prévue au protocole d’un paramètre secondaire de l’essai AZURE, le risque d’événement compromettant la SSC augmentait même sous acide zolédronique chez les patientes non ménopausées et les patientes ménopausées depuis moins de 5 ans. Chez les patientes ménopausées depuis plus de 5 ans, en revanche, le BP a été associé à un bénéfice qui se comparait à la réduction du risque observée dans l’essai ABCSG XII. En outre, les chercheurs ont noté une réduction statistiquement significative de 29 % du risque de décès (p=0,017). Par contre, la SG était presque identique dans les deux groupes parmi les patientes non ménopausées (Figure 1).

Figure 1. AZURE : Survie globale en fonction du statut ménopausique


«L’efficacité du BP en adjuvant pourrait dépendre d’une faible concentration en œstrogènes dans le micro-environnement osseux», explique le Dr Coleman.

Dans l’ensemble, les effets indésirables étaient comparables d’un groupe de traitement à l’autre, et ils étaient pour la plupart attribuables aux autres agents du schéma. Le nombre de cas confirmés d’ostéonécrose de la mâchoire – 17, soit 1,6 % de l’effectif – est compatible avec notre expérience de cet agent, précise le Dr Coleman.

Maintien des bénéfices à long terme : ABCSG XII

La mise à jour d’une analyse de l’essai ABCSG XII a confirmé les premiers résultats, l’effet favorable de l’acide zolédronique sur le risque de récidive du cancer du sein s’étant maintenu au-delà de 5 ans de suivi. Après une médiane de 48 mois de suivi, on avait observé une diminution de 36 % du risque relatif d’événement compromettant la SSC (HR 0,64, p=0,02). «En particulier, nous avons noté une forte tendance à la baisse du risque de décès chez les patientes traitées par l’acide zolédronique [HR 0,60, p=0,11]», souligne le Dr Michael Gnant, École de médecine de Vienne, Autriche.

Après une médiane de 62 mois de suivi, les résultats initiaux n’avaient varié que minimalement. En effet, chez les patientes ayant reçu le BP, la réduction du risque relatif d’événement compromettant la SSC demeurait hautement significative à 32 % (HR 0,68, p=0,006). De plus, l’analyse a objectivé un avantage de l’acide zolédronique pour chacun des événements compromettant la SSC : récidive globale (65 vs 92), récidive à distance (44 vs 56), métastases osseuses (21 vs 32), récidive locorégionale (15 vs 30), cancer du sein controlatéral (6 vs 8) et tumeur maligne secondaire (11 vs 16). Le BP n’a pas été associé à une incidence accrue d’effets indésirables comparativement au traitement hormonal seul.

«L’acide zolédronique devrait être envisagé en association avec le traitement hormonal adjuvant chez les femmes non ménopausées dont le cancer du sein précoce répond au traitement hormonal», ajoute le Dr Gnant.

Les données à l’appui d’un effet antitumoral de cet agent ont persuadé plusieurs pays d’Amérique latine d’en approuver l’utilisation dans un contexte de traitement adjuvant du cancer du sein, poursuit-il. L’Agence européenne des médicaments (EMEA) et la FDA songent elles aussi à approuver cette indication. «Dans les recommandations qu’elle a publiées récemment, la European Society for Medical Oncology souligne que l’acide zolédronique pourrait être approprié pour prévenir la perte osseuse et réduire le risque de récidive de cancer du sein chez les femmes non ménopausées qui reçoivent un traitement hormonal et les femmes en postménopause qui reçoivent un traitement par un IA», conclut le Dr Gnant.

Effet ostéoprotecteur : ZO-FAST

Le suivi de 5 ans d’un autre essai clinique d’envergure est venu confirmer une fois de plus que l’acide zolédronique était efficace pour prévenir la perte osseuse chez des patientes recevant un IA pour leur cancer du sein. Lors de l’étude ZO-FAST (Zometa-Femara Adjuvant Synergy Trial), des chercheurs de 28 pays ont randomisé 1065 patientes atteintes d’un cancer du sein de stade I à IIIa de façon à ce qu’elles reçoivent de l’acide zolédronique – d’emblée ou ultérieurement – en association avec un traitement hormonal adjuvant par le létrozole.

Les patientes qui ne recevaient pas d’acide zolédronique dès le départ étaient autorisées à le recevoir plus tard uniquement si leur densité minérale osseuse (DMO) diminuait au point d’atteindre un score T =2 ou d’être associée à une fracture clinique ou à une fracture asymptomatique à 36 mois, explique le Dr Richard de Boer, Royal Melbourne Hospital, Victoria, Australie. Le paramètre principal était la variation de la DMO de la colonne lombaire après 12 mois. Au nombre des paramètres secondaires figuraient les fractures, la récidive du cancer, le décès et la variation des taux de marqueurs du renouvellement osseux.

L’analyse du paramètre principal à 12 mois a révélé que la DMO de la colonne lombaire avait augmenté de 2 % chez les patientes ayant reçu le BP d’emblée alors qu’elle avait diminué de 3,8 % dans l’autre groupe (p<0,0001). Le fossé entre les groupes a continué de se creuser au fil du temps, si bien qu’après 60 mois de suivi, les patientes randomisées de façon à recevoir de l’acide zolédronique d’emblée bénéficiaient d’un avantage global de 9,7 % au chapitre de la DMO (p<0,0001).

L’analyse à 5 ans du paramètre mixte regroupant les récidives du cancer et les décès a aussi mis en évidence une différence absolue de 3,6 % en faveur du traitement immédiat (91,9 % vs 88,3 %), soit une diminution de 34 % du risque relatif (HR 0,66, p=0,0375). Le taux de SG à 5 ans se chiffrait à 95,2 % pour le traitement immédiat et à 93,9 % pour le traitement retardé, ce qui représente une différence non significative. Le suivi de 60 mois de l’étude ZO-FAST a confirmé que la DMO rapportée antérieurement s’était maintenue, voire qu’elle avait augmenté sous l’effet du traitement immédiat par l’acide zolédronique, par comparaison à l’administration différée du traitement. Cette différence de DMO entre les groupes de traitement s’est maintenue malgré l’administration du BP chez une proportion substantielle de patientes du groupe de traitement retardé.

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