Comptes rendus

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L’atteinte du taux cible de C-LDL pourrait devenir systématique ou presque grâce à de nouveaux hypolipidémiants

L’individualisation de la posologie d’un ITK augmente considérablement le taux de réponse objective dans l’adénocarcinome rénal métastatique

Le présent compte rendu est fondé sur des données médicales présentées lors d'un congrès de médecine reconnu ou publiées dans une revue avec comité de lecture ou dans un commentaire signé par un professionnel de la santé reconnu. La matière abordée dans ce compte rendu s'adresse uniquement aux professionnels de la santé reconnus du Canada.

PRESSE PRIORITAIRE - 39e Congrès de la European Society for Medical Oncology (ESMO)

Madrid, Espagne / 26-30 septembre 2014

Madrid - À en juger par les données objectives d’une étude prospective, le seul fait d’individualiser la dose et le schéma posologique afin de maintenir l’intensité de la dose semble optimiser la réponse à un inhibiteur de la tyrosine kinase (ITK) dans le traitement de première intention de l’adénome rénal métastatique (ARm). Dans un essai multicentrique de phase II, cette méthode a été associée à un taux de maîtrise de la maladie (réponses objectives + stabilisations de la maladie) de 89,2 % et à un taux de réponse objective (réponses complètes + partielles) de 55,4 %. Ces taux sont jusqu’à 70 % plus élevés que ceux d’essais de phase III publiés antérieurement. Le schéma posologique était ajusté en fonction du grade de toxicité évalué à intervalles prédéterminés après le début du traitement. Les données, qui définissent un nouveau modèle de prise en charge de l’ARm par les ITK, sont préliminaires mais elles sont compatibles avec d’autres données voulant que les paramètres pharmacocinétiques (PK) des ITK soient très variables d’un patient à l’autre, favorisant ainsi l’individualisation des stratégies posologiques.

Rédactrice médicale en chef : Dre Léna Coïc, Montréal, Québec

Les ITK ciblant la voie du facteur de croissance de l’endothélium vasculaire (VEGF) sont devenus la norme dans le traitement de l’adénome rénal métastatique (ARm), mais il ressort de nouvelles données que l’ajustement de la posologie du sunitinib peut améliorer considérablement le taux de réponse comparativement aux taux de réponse enregistrés lors d’essais antérieurs. Dans une étude où l’on a modifié à la fois la dose et la durée du traitement en fonction du grade de toxicité de certains effets indésirables (EI), le taux de réponse objective a augmenté substantiellement par rapport aux taux rapportés antérieurement.

«Les résultats de cette étude remettent en question l’approche universelle que nous utilisons dans le traitement par un ITK», affirme le Dr Georg A. Bjarnason, Sunnybrook Odette Cancer Centre, Toronto, Ontario. «La grande variabilité des paramètres pharmacocinétiques était déjà bien établie, mais nous avons maintenant la preuve que cette variabilité a une portée clinique. L’individualisation de la dose semble un moyen sûr et efficace d’augmenter les taux de réponse associés aux schémas posologiques fixes.»

L’algorithme d’ajustement posologique du sunitinib – selon lequel le nombre de jours sous traitement consécutifs passe du schéma classique de 28 jours à 14 ou 7 jours – a été évalué dans un essai de phase II. Les ITK sont devenus la norme de traitement dans l’ARm le jour où un essai de phase III a montré que le sunitinib avait presque doublé la durée de survie sans progression (SSP) comparativement à l’interféron (Motzer et al. N Engl J Med 2007;356:115-24).

La toxicité du traitement détermine l’intensité de la dose

Selon l’algorithme, tous les patients commencent à recevoir du sunitinib à la dose standard de 50 mg 1 fois/jour et sont réévalués après 14 jours : en cas de toxicité, la posologie est alors modifiée. Les résultats de l’étude – à laquelle 91 patients ont été admis à ce jour – semblent valider cet algorithme relativement simple contenant deux points de décision majeurs.

Plus précisément, cet algorithme a été associé à un taux de réponse objective (RO) de 55,4 %, dont 4,6 % de réponses complètes (RC). Dans les études antérieures sur l’ARm, les RC ont été extrêmement rares, peu importe le traitement évalué. En comparaison, le taux de RC a atteint 31 % dans le premier essai de phase III sur le sunitinib, 31 % dans un essai visant à établir la non-infériorité du pazopanib par rapport au sunitinib (Motzer et al. N Engl J Med 2013;369:722-31), et 32 % dans un essai sur l’axitinib utilisé dans le traitement de deuxième intention de l’ARm (Motzer et al. Lancet Oncol 2013;14:552-62). Or, le taux de RO associé au nouvel algorithme posologique est environ 70 % plus élevé que chacun de ces taux de réponse.

Première évaluation à 14 jours

Dans cet algorithme graduel relativement simple à mettre en application, le premier des deux points de décision majeurs a lieu 14 jours après le début du traitement par le sunitinib à 50 mg. Si des effets toxiques de grade 2 ou de grade supérieur sont survenus au cours des 14 premiers jours, la dose est réduite et le schéma est individualisé : la plupart des patients prennent du sunitinib pendant 14 jours afin de maintenir l’intensité de la dose, après quoi on leur accorde un congé de 7 jours (14/7). La période de traitement peut être plus longue ou plus courte, mais le congé de 7 jours est une constante dans tous les cas.

Si la dose de 50 mg est bien tolérée à 14 jours, le point de décision suivant a lieu à 28 jours. En l’absence de toxicité, la dose est augmentée; là encore, le schéma est individualisé, même si la plupart des patients suivent le schéma 14/7. En général, les patients aux prises avec un EI de grade 2 continuent de recevoir la dose classique de 50 mg selon un schéma 28 jours de traitement/7 jours de congé.

«Cette approche très pratique augmente l’intensité de la dose tout en atténuant les EI, poursuit le Dr Bjarnason. C’est une autre étape importante vers l’individualisation du traitement.»

Les premiers résultats de cette étude semblent valider la toxicité en tant que paramètre de substitution de la pharmacocinétique. Le Dr Bjarnason précise que chez 60 % des patients, l’intensité de la dose a été augmentée comparativement aux critères posologiques standard. Environ 40 % des patients ont continué de prendre la dose standard de 50 mg 1 fois/jour, mais la durée du traitement a été moindre; le schéma 14/7 s’est ainsi révélé avantageux pour une proportion substantielle de patients chez qui il aurait autrement fallu réduire la dose.

En quête d’une suppression maximale du VEGF

Le sunitinib, le sorafenib et le pazopanib sont tous homologués pour le traitement de première intention de l’ARm, qui représente 25 à 30 % de tous les cas d’AR au moment du diagnostic. Certes, chaque ITK cible un éventail légèrement différent de voies moléculaires, mais la suppression du VEGF – commune à tous – est considérée comme le principal mode d’action dans l’ARm. La suppression de cette voie demeure une solution thérapeutique viable même après l’apparition d’une résistance à un inhibiteur du VEGF en traitement de première intention. Les autres ITK qui inhibent la voie du VEGF, notamment l’axitinib, le tivozanib et le cabozantinib, se sont tous révélés actifs en deuxième intention chez des patients déjà exposés à un ITK en première intention.

Dans ces études, dont celle qu’a présentée au congrès le Dr Pablo Maroto, Hospital de la Santa Creu, Barcelone, Espagne, les données font systématiquement ressortir une corrélation entre le taux de RO et la maîtrise de la maladie. Dans le cadre de l’étude présentée par le Dr Maroto, les résultats «en conditions réelles» ont fait l’objet d’une évaluation dans un programme d’utilisation compassionnelle de l’axitinib chez 241 patients. Dans cette étude, la dose a dû être réduite chez seulement 16,7 % des patients, mais «la SSP a été plus longue [14,2 vs 7,49 mois; p=0,004] chez ceux qui étaient parvenus à une réponse objective que chez ceux dont la maladie s’était stabilisée», peu importe l’intensité de la dose.

Dans les cas où un ITK a déjà été utilisé en première intention, sa réintroduction après la progression du cancer au cours des traitements ultérieurs semble associée à un bénéfice clinique renouvelé, à en juger par les résultats de l’étude RESUME. Dans cette étude présentée au congrès par le Dr Stéphane Oudard, Hôpital européen George-Pompidou, Paris, France, la réponse à une réintroduction du sunitinib en troisième intention a été évaluée chez 51 patients. Au sein de ce groupe, 15 % ont obtenu une réponse objective et 46 %, une stabilisation de la maladie, même si tous avaient reçu du sunitinib en première intention. La médiane de SSP après la réintroduction du sunitinib a été de 7,9 mois, et le Dr Oudard estime que la médiane de survie globale de 55 mois est attribuable à l’activité du sunitinib en traitement de troisième intention.

Mise à l’essai d’autres stratégies

de traitement en deuxième intention

Axées sur l’intensité de la dose dans le traitement de première, de deuxième et de possiblement troisième intention, ces études soulignent l’importance de la suppression maximale du VEGF, mais d’autres options sont à l’essai à un stade avancé de la maladie. Des études en cours portent sur les inhibiteurs de mTOR comme le temsirolimus et l’évérolimus, mais l’activité du nivolumab, un anticorps dirigé contre le récepteur PD-1 (Programmed Death-1), suscite beaucoup d’attention. Les anticorps anti-PD-1 comme le nivolumab sont évalués dans le traitement de divers cancers avancés et difficiles à traiter. On a présenté au congrès des données de phase II sur 168 patients atteints d’un ARm à cellules claires qui avaient déjà reçu un ITK bloquant le récepteur du VEGF. La majorité des patients en avaient reçu au moins deux, et environ le tiers des patients avaient aussi reçu un inhibiteur de mTOR.

Malgré les multiples traitements antérieurs, le nivolumab a été associé à un taux de RO de 21 %, affirme le Dr Robert J. Motzer, Memorial Sloan Kettering Cancer Center, New York. Qualifiant ces données d’«encourageantes», il a précisé que la durée de la maîtrise de la maladie chez les patients parvenus à une réponse objective était peut-être le résultat le plus impressionnant. La réponse s’est en effet maintenue pendant au moins 12 mois chez 19 des 35 patients (54 %) ayant obtenu une RO. Deux ans après le début du traitement, la réponse se maintient toujours chez un petit nombre de patients.

Moins de 10 % des patients ont abandonné le traitement en raison d’un EI considéré comme lié au nivolumab, et des EI de grade 3 ou de grade supérieur ont été signalés chez moins de 20 % des patients. Compte tenu de l’activité du nivolumab et de son innocuité «acceptable», le Dr Motzer estime que des essais de plus grande envergure s’imposent.

Conclusion

L’avènement des ITK anti-VEGF a amélioré le pronostic de l’ARm de façon remarquable. La maîtrise optimale de la maladie semble toutefois dépendre de l’individualisation du traitement qui compense la variabilité du métabolisme de ces agents. Une dose fixe de sunitinib ou possiblement d’un autre ITK expose le patient à un risque de surexposition et d’intensité inadéquate de la dose. L’ajustement de la dose en fonction de la toxicité nous donne la possibilité d’augmenter substantiellement le taux de RO, un prédicteur de la SSP. L’utilisation séquentielle d’inhibiteurs du VEGF comme le sunitinib et l’axitinib peut être associée à une maîtrise durable de la maladie de même qu’à des taux faibles et acceptables d’EI.  

 

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