Comptes rendus

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Myélome multiple : augmentation des taux de réponse et de la durée de réponse

Le présent compte rendu est fondé sur des données médicales présentées lors d'un congrès de médecine reconnu ou publiées dans une revue avec comité de lecture ou dans un commentaire signé par un professionnel de la santé reconnu. La matière abordée dans ce compte rendu s'adresse uniquement aux professionnels de la santé reconnus du Canada.

PRESSE PRIORITAIRE - 16e Congrès de la European Hematology Association (EHA)

Londres, Royaume-Uni / 9-12 juin 2011

Rédactrice médicale en chef : Dre Léna Coïc, Montréal, Québec

«Depuis que nous avons du bortézomib – un inhibiteur du protéasome – pour traiter le myélome multiple [MM], le schéma bortézomib+dexaméthasone [VD] est devenu le traitement d’induction de référence avant l’autogreffe de cellules souches [AGCS] et c’est à ce schéma que nous devrions comparer les autres schémas plus complexes», affirme le Pr Philippe Moreau, CHU Hôtel-Dieu, Nantes, France. Utilisé comme traitement de consolidation après l’AGCS, l’inhibiteur du protéasome pourrait améliorer le taux de réponse complète (RC), autoriser une réponse plus profonde permettant l’obtention d’une RC moléculaire, prolonger la durée de la réponse et, grâce au traitement d’entretien, prolonger la survie sans progression (SSP).

Traitement à forte dose et agents innovants en première intention

Une étude rétrospective réalisée chez des patients atteints d’un MM sous la direction du Dr Hareth Nahi, Hôpital universitaire Karolinska, Stockholm, Suède, a souligné l’importance d’obtenir une réponse quasi complète (RqC) au traitement à forte dose de première intention dans la pratique clinique. La probabilité d’une RqC était plus élevée chez les patients recevant un agent innovant (bortézomib, lénalidomide, thalidomide) que chez les patients n’en recevant pas (63 % vs 49 %). Les chercheurs ont constaté qu’une RqC au traitement de première intention était associée à une probabilité de 48 % d’obtenir au moins une très bonne réponse partielle (=TBRP) et à une probabilité de 35 % d’obtenir une RqC au traitement de deuxième intention. La médiane de survie globale (SG) se chiffrait à 6,3 ans au sein de la population totale et à 6,9 ans chez les patients ayant eu une RqC au traitement de première intention. Les chercheurs en ont conclu que les agents innovants administrés en première intention amélioraient la réponse.

Un meilleur pronostic après l’AGCS

Selon une étude dirigée par le Dr Josep-Maria Ribera, Hospital Universitari Germans Trias i Pujol, Badalona, Espagne, un traitement d’induction de première intention reposant sur la dexaméthasone, un agent alkylant et une anthracyline augmente le risque de décès imputable à une infection ou à la toxicité du traitement au cours de la première année post-AGCS, comparativement à un traitement reposant sur le bortézomib ou la thalidomide. Dans le cadre d’une étude monocentrique portant sur le MM nouvellement diagnostiqué, une première cohorte (1999-2005) a reçu un traitement d’induction par la dexaméthasone, un agent alkylant et une anthracycline avant l’AGCS et du bortézomib et/ou un agent immunomodulateur au moment de la récidive. Une seconde cohorte (2005-2009) a reçu un agent immunomodulateur et/ou du bortézomib, puis une AGCS en première rémission et, en cas de récidive, elle recevait le même traitement ou d’autres agents.

Sur 141 patients, 49 de la première cohorte et 39 de la seconde ont reçu une AGCS après l’induction. Au cours de la première année post-AGCS, on a enregistré au sein de la première cohorte 6 décès imputables à une infection ou à la toxicité du traitement, 1 décès imputable à une cause non reliée et 3 récidives. Dans la seconde cohorte, un seul patient est décédé à cause de la progression de la maladie. Les taux de RC avant l’AGCS et de réponse globale après l’AGCS étaient significativement plus élevés dans la seconde cohorte (6 % vs 16 %, p=0,024 et 35 % vs 62 %, p=0,009, respectivement). Le taux de SG post-AGCS projeté à 4 ans était de 83 % dans la seconde cohorte.

Traitement d’induction et de consolidation

L’essai de phase III mené par le réseau italien GIMEMA a objectivé les bénéfices associés à un schéma d’induction et à un schéma de consolidation reposant sur le bortézomib, la thalidomide et la dexaméthasone (VTD) dans le MM nouvellement diagnostiqué chez 480 patients qui ont reçu une double AGCS (Lancet 2010;376:2075-85). «Le suivi à long terme des patients semble confirmer les retombées favorables du schéma VTD comme traitement de consolidation post-AGCS sur l’issue clinique», affirme le Dr Michele Cavo, Istituto di Ematologia Seragnoli, Università di Bologna, Italie. Le traitement d’induction – administré en cycles de 21 jours – comportait 100 mg/jour de T pendant 14 jours, puis 200 mg/jour, et 320 mg/cycle de D seule (TD) ou avec 1,3 mg/m² de V 2 fois/semaine (VTD), le tout suivi d’une double AGCS. En date du 20 mars 2011, 161 patients sous TD et 160 sous VTD avaient reçu deux cycles de 35 jours (planifiés) de traitement de consolidation (T : 100 mg/jour, D : 320 mg/cycle seule ou avec V : 1,3 mg/m² 1 fois/semaine).

Après un suivi de 29 mois (médiane) à partir du début du traitement de consolidation, les chercheurs ont observé chez les patients sous VTD une augmentation significative des taux de RC (61 % vs 46,5 %, p=0,012) et de RC/RqC (73 % vs 61 %, p=0,020). Entre la période pré-consolidation et la période post-consolidation, la probabilité globale du passage d’une <RC à une RC se chiffrait à 31 % dans le groupe VTD vs 17 % dans le groupe TD (p=0,03). Le taux de SSP à 3 ans estimé à partir du début du traitement de consolidation était significativement plus élevé sous VTD (62 % vs 44 %, p=0,016), et on a observé une réduction relative de 36 % du risque de progression ou de décès.

Cet effet subsistait dans les sous-groupes de mauvais pronostic, y compris les patients porteurs des anomalies chromosomiques del(13q) et t(4;14) ± del(17p). Le schéma VTD, contrairement au schéma TD, a réduit la maladie résiduelle minime de manière significative. Les deux schémas ont été bien tolérés. Cependant, note le Dr Cavo, «le rôle du traitement de consolidation doit être évalué prospectivement dans le cadre d’un essai avec randomisation. Ce sera d’ailleurs l’une des deux grandes questions qu’abordera le European Myeloma Network dans l’essai de phase III EMN02 à venir sous peu.»

Nentralisation du mauvais pronostic lié aux facteurs génétiques

Une analyse de sous-groupe de l’essai de phase III HOVON-65/GMMG-HD4 a révélé qu’une AGCS suivie d’un traitement d’entretien par l’inhibiteur du protéasome permettait d’améliorer significativement l’impact négatif de l’anomalie chromosomique del(17p13) à risque élevé. «Le traitement à long terme par le bortézomib doit être considéré comme la norme chez ces patients», fait remarquer le Dr Kai Neben, Département de médecine interne V, Universität Heidelberg, Allemagne.

Dans le cadre de cette étude, 744 atteints d’un MM symptomatique et nouvellement diagnostiqué ont été randomisés de façon à recevoir le schéma vincristine+adriamycine+dexaméthasone (VinAD) ou le schéma bortézomib+adriamycine+dexaméthasone (VAD). Dans le groupe VAD, la progression de la maladie était significativement moins probable, et on a observé une amélioration significative de la SG (Blood 2010;116[21]:résumé 40).

À l’aide de la technique d’hybridation in situ en fluorescence (FISH) que l’on a utilisée chez 399 patients allemands, 4 anomalies chromosomiques – à savoir, t(4;14), del(13q14), del(17p13) et +1q21 – ont été corrélées de manière significative avec un mauvais pronostic sur les plans de la SSP et de la SG. Cependant, pour toutes les anomalies chromosomiques analysées, les médianes de SSP et de SG à 3 ans sous VAD étaient égales ou supérieures aux médianes sous VinAD. «Il est clair que les patients porteurs de l’anomalie del(17p13) avaient des résultats significativement meilleurs lorsqu’ils recevaient le schéma à base de bortézomib», affirme le Dr Neben. En présence de l’anomalie del(17p13), le traitement par l’inhibiteur du protéasome a amélioré la médiane de SSP (de 12 à 26 mois [p=0,024]) et la SG à 3 ans (de 17 % à 69 % [p=0,028]). «La délétion 17p était un facteur de mauvais pronostic très important dans le groupe recevant le traitement de référence, mais pas dans le groupe bortézomib», poursuit-il.

Obtention d’une rémission moléculaire

À en juger par les données actuelles, la rémission moléculaire (RMol) est un important facteur de pronostic de la survie à long terme dans le MM. On a présenté au congrès les premières données sur la RMol obtenues grâce à la technique ASO-RQ-PCR (allele-specific-oligonucleotide-real-time quantitative-polymerase chain reaction) chez des patients symptomatiques qui avaient reçu un traitement d’induction à base de bortézomib, puis un traitement à forte dose et une AGCS. Dans cette étude en cours, dirigée par la Dre Raija H. Silvennoinen, Hôpital universitaire de Tampere, Finlande, 36 patients ont reçu 4 cycles de VD en traitement d’induction, après quoi 9 patients sont parvenus à une RqC/RC et 2 patients, à une RMol. Trois mois après l’AGCS avec melphalan à 200 mg/m2, on a rapporté une RqC/RC chez 14 des 29 patients évaluables et une RMol chez 6 patients (21 %). Six mois après l’AGCS, 12 patients sur 26 étaient en RqC/RC et 7 patients (27 %), en RMol. D’autres études s’imposent pour que l’on puisse explorer l’issue clinique à long terme associée à une RMol.

Nouvel agent

Selon les plus récentes données de l’essai de phase II PX-171-004 toujours en cours, le carfilzomib, inhibiteur du protéasome de deuxième génération, administré seul dans le traitement du MM récidivant ou réfractaire est associé à des taux de réponse élevés et à une incidence minime de neuropathie chez les patients jamais exposés au bortézomib. Dirigée par le Dr Michael Wang, University of Texas MD Anderson Cancer Center, Houston, l’étude avait pour objectif d’évaluer le carfilzomib chez 129 patients qui avaient reçu deux schémas de traitement (médiane) comprenant notamment des corticostéroïdes (97 %), de la thalidomide ou du lénalidomide (92 %), un agent alkylant (81 %), et/ou une AGCS (73 %). Les patients recevaient l’inhibiteur du protéasome les jours 1, 2, 8, 9, 15 et 16 d’un cycle de 28 jours, soit à raison de 20 mg/m2 pendant au plus 12 cycles (cohorte 1), soit à raison d’une dose progressive de 20 mg/m2 le 1er cycle et de 27 mg/m2 durant les autres cycles (cohorte 2). Des taux importants de réponse globale ont été rapportés : 42 % et 51 % des sujets des cohortes 1 et 2, respectivement. Après un suivi de la première cohorte de 17,5 mois (médiane), l’intervalle sans progression et la durée de la réponse se chiffraient à 8,3 et 13,1 mois (médianes). Dans la deuxième cohorte, les médianes de ces paramètres n’avaient toujours pas été atteintes après un suivi de 10,3 mois (médiane). L’incidence et la sévérité des effets indésirables étaient semblables dans les deux cohortes. Aucune toxicité cumulative n’a été constatée.

Résumé

Il a été démontré que les agents innovants utilisés en première intention permettaient d’augmenter le taux de RqC. Les schémas de consolidation et d’entretien à base de bortézomib améliorent significativement la SSP et la SG, même chez les patients porteurs d’anomalies chromosomiques de mauvais pronostic. Les stratégies de traitement d’induction, de consolidation et d’entretien reposant sur le bortézomib étant plus efficaces, elles permettent d’améliorer les taux de réponse et de survie.

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