Comptes rendus

Traitement de l’infection à VIH : efficacité et simplification ne sont pas des objectifs cliniques mutuellement exclusifs
Le point sur l’efficacité du vaccin contre le zona chez l’adulte âgé

Obtenir et maintenir la cicatrisation de la muqueuse dans la colite ulcéreuse d’intensité légère à modérée

Le présent compte rendu est fondé sur des données médicales présentées lors d'un congrès de médecine reconnu ou publiées dans une revue avec comité de lecture ou dans un commentaire signé par un professionnel de la santé reconnu. La matière abordée dans ce compte rendu s'adresse uniquement aux professionnels de la santé reconnus du Canada.

Semaine européenne de gastroentérologie (UEGW)

Vienne, Autriche / 18-22 octobre 2008

De nombreux guides de pratique clinique proposent l’acide 5-aminosalicylique (5-ASA) comme traitement de prédilection dans la colite ulcéreuse (CU) d’intensité légère à modérée, en raison de son innocuité et de sa bonne tolérabilité. Le 5-ASA semble également offrir une protection significative contre le cancer du côlon, dont le risque est substantiellement plus élevé en présence de CU. Malgré cette première place, il est fréquent que le 5-ASA soit rapidement relayé par des traitements moins bien tolérés pour cause d’efficacité insuffisante. Or, selon de nouvelles données, l’utilisation d’une préparation optimale de 5-ASA permettrait de s’exempter de ce relais beaucoup plus souvent.

«La question qui se pose alors est : toutes les préparations de 5-ASA se valent-elles? observe le Dr Michael Kamm, St. Vincent’s Hospital, University of Melbourne, Australie. Franchement, la réponse est non. Ceux d’entre nous qui s’intéressent au domaine pensent que les différences entre les préparations, notamment quant au mode de libération, changent à coup sûr leur profil pharmacocinétique et se répercutent sur le taux de réponse.»

Des comparaisons directes font même ressortir une différence parmi les préparations à libération contrôlée. Dans une étude publiée l’année dernière par le Dr Kamm et ses collègues (Gastroenterology 2007;132:66-75), deux préparations de mésalamine — l’une utilisant un système de libération multi-matrice (MMX) et l’autre, un autre procédé de libération retardée (AsacolMC) — ont été comparées à un placebo quant à leur effet sur la cicatrisation de la muqueuse. Le taux de rémission clinique et endoscopique a atteint environ 41 % pour la mésalamine MMX (sans égard à la dose évaluée, soit 2,4 ou 4,8 g/jour), 33 % pour la mésalamine à libération retardée (2,4 g en trois prises) et 22 % pour le placebo. L’avantage démontré par rapport au placebo n’était pas statistiquement significatif dans le cas de la préparation à libération retardée (p=0,124), mais il l’était pour les deux doses de mésalamine MMX (p=0,007 pour la dose la plus élevée).

Le taux de rémission de 40 % associé au traitement par la mésalamine MMX est l’un des plus élevés jamais recensés, mais une étude plus récente sur le même composé indique qu’un taux de réussite encore plus élevé peut être obtenu si l’on permet aux patients de poursuivre le traitement plus longtemps. Dans cette étude, dont les résultats pourraient transformer la prise en charge initiale, 304 patients qui avaient participé à l’une de deux études de phase III sur la mésalamine MMX mais n’avaient pas obtenu de cicatrisation (40 % des patients des deux études ont atteint le critère de cicatrisation de la muqueuse rigoureusement défini après le premier traitement) ont été soumis à un deuxième cycle de traitement de huit semaines. Au terme de cette période, 59,5 % des sujets ont atteint le critère de cicatrisation de la muqueuse (Kamm et al. Inflamm Bowel Dis 2008; publié en ligne avant impression).

«La démarche classique est de traiter les patients pendant huit semaines, puis, s’ils n’entrent pas en rémission, de changer de traitement, fait observer le Dr Kamm. Cette étude démontre que le 5-ASA peut amener une rémission chez les deux tiers des patients si on leur donne une dose assez élevée pendant assez longtemps. Cela laisse à penser que nous devons assouplir notre façon d’utiliser ces médicaments si nous voulons que nos patients puissent en rester à ce traitement de première intention.»

C’est un fait nouveau que de savoir que certains patients connaissent une amélioration graduelle et ont encore des chances d’obtenir une rémission endoscopique si le traitement est prolongé. Selon le Dr Kamm, qui voit dans la rémission endoscopique un paramètre crucial du traitement à la phase aiguë compte tenu des données qui l’associent à un risque moins élevé de rechute et à un meilleur pronostic, le type de préparation de 5-ASA utilisé est vraisemblablement important. Bien que les préparations à prise monoquotidienne aient à l’origine été mises au point pour améliorer l’observance, il apparaît maintenant que le profil pharmacodynamique de certaines d’entre elles confère un avantage par rapport à des schémas pluriquotidiens même lorsque la dose quotidienne totale est similaire.

«Il est probablement plus efficace d’administrer une seule dose quotidienne de 5-ASA pour atteindre la concentration voulue dans la muqueuse enflammée», de conjecturer le Dr Kamm. Ce dernier croit que les préparations orales à prise monoquotidienne fortement dosées — dont il signale l’augmentation des teneurs, passées d’environ 500 mg par comprimé à 1,2 g dans le cas de la mésalamine MMX à l’heure actuelle — entraînent une importante régulation à la baisse des signaux inflammatoires en période d’activité de la maladie.

Le même principe pourrait valoir dans le traitement d’entretien, dont l’effet est également lié à la dose, selon le Dr Kamm. Bien que la question de la dose d’entretien optimale ne soit pas tranchée, «je pense pouvoir résumer les opinions actuelles là-dessus en disant qu’une dose d’environ 2 g par jour, sans égard à la préparation utilisée, est probablement raisonnable pour la plupart des patients».

À cette dose, l’immense majorité des patients peut escompter demeurer en rémission sur une longue période. Selon une étude publiée récemment sur la mésalamine MMX, dans laquelle on a évalué une dose de 2,4 g/jour administrée en une seule prise ou en deux prises de 1,2 g, environ 70 % des patients satisfaisaient au critère rigoureusement défini de rémission clinique (absence de poussée) et endoscopique après un an (Kamm et al. Gut 2008;57:893-902). Le taux de rémission clinique à un an était de 90 %. Dans les deux cas, ces chiffres sont impressionnants par rapport aux résultats observés précédemment dans de nombreuses études sur le traitement par le 5-ASA.

Dans le traitement des maladies inflammatoires de l’intestin, le 5-ASA a été éclipsé par les biothérapies apparues au cours des dernières années. Certes, les agents biologiques donnent lieu à des taux très encourageants de maîtrise de la maladie dans les formes sévères, mais les progrès apportés par les nouvelles préparations de 5-ASA et les systèmes de libération novateurs dont elles sont pourvues pourraient accroître la proportion de patients atteignant l’objectif de quiescence de la maladie qui les protège de la progression vers les stades avancés. Désireux de tirer le 5-ASA de l’ombre, le Dr Kamm a qualifié ce médicament de «vrai champion» sous ses nouvelles versions fortement dosées. N’est-il pas rarissime de disposer, dans une maladie aussi difficile que la CU, d’un médicament efficace qui soit en même temps aussi sûr? fait-il valoir.

La protection offerte par le 5-ASA contre le cancer n’est pas le moindre de ses attributs. De nombreuses études laissent entrevoir une réduction du risque de l’ordre de 80 % sous réserve d’une utilisation régulière. Dans l’une de ces études effectuée à partir d’une base de données sur les soins de santé au Royaume-Uni qui regroupait 5 millions de patients dont 18 969 avaient reçu un diagnostic de CU, peut-être l’étude la plus probante de l’avis du Dr Kamm, les investigateurs ont mis en évidence une forte corrélation entre une amélioration constante de l’observance du traitement par le 5-ASA et une réduction de plus en plus marquée du risque de cancer (van Staa et al. Gut 2005;54:1573-8). Sur la foi des données à l’appui d’un effet protecteur contre le cancer, qu’il tient pour suffisamment concordantes, le Dr Kamm prolonge maintenant le traitement par le 5-ASA à titre chimiopréventif chez ses patients, même après qu’ils sont passés à l’azathioprine.

Les progrès apportés par les nouvelles préparations de 5-ASA ont un retentissement immédiat sur la pratique clinique quotidienne, estime le Dr Kamm. Pour sa part, il utilise non seulement les préparations fortement dosées à une seule prise par jour chez les nouveaux patients qui amorcent un traitement par le 5-ASA, mais également chez la plupart des patients recevant une préparation plus ancienne qu’il fait passer aux nouveaux composés. Il souligne que le traitement des patients devrait être changé non seulement parce les nouvelles préparations sont plus commodes, mais également parce qu’elles sont plus efficaces.

Résumé

Dans le traitement de la CU légère à modérée, les nouvelles préparations de 5-ASA permettent une cicatrisation de la muqueuse et un maintien efficace de la rémission chez une bien plus grande proportion de patients que les anciennes préparations. Les données selon lesquelles le traitement monoquotidien et l’administration de fortes doses augmentent le taux de rémission clinique et endoscopique sont corroborées par des études comparatives. Selon les études menées sur la mésalamine MMX — préparation renfermant la dose la plus élevée de 5-ASA dans un seul comprimé à libération contrôlée — jusqu’à 60 % des patients peuvent obtenir une cicatrisation de la muqueuse, paramètre fortement prédictif d’une rémission soutenue. Lors d’une étude sur le traitement d’entretien, le taux de rémission clinique à un an a atteint 90 %. L’efficacité des agents actuels signifie que la majorité des patients atteints d’une forme légère à modérée de CU peuvent éviter les traitements de deuxième intention moins bien tolérés.

Commentaires

Nous vous serions reconnaissants de prendre 30 secondes pour nous aider à mieux comprendre vos besoins de formation.