Comptes rendus

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Optimisation des traitements d’induction et d’entretien du myélome multiple chez le patient âgé

Le présent compte rendu est fondé sur des données médicales présentées lors d'un congrès de médecine reconnu ou publiées dans une revue avec comité de lecture ou dans un commentaire signé par un professionnel de la santé reconnu. La matière abordée dans ce compte rendu s'adresse uniquement aux professionnels de la santé reconnus du Canada.

PRESSE PRIORITAIRE - La 51e Assemblée annuelle de l’American Society of Hematology

La Nouvelle-Orléans, Louisiane / 5-8 décembre 2009

Le vaste essai multicentrique VISTA a récemment fait de la trithérapie bortézomib + melphalan + prednisone (VMP) la nouvelle norme dans le traitement d’induction du myélome multiple (MM) chez le patient âgé, remplaçant à ce titre la bithérapie MP (San Miguel et al. N Engl J Med 2008;359:906-17).

De nouvelles analyses de la survie sont venues étayer la forte activité de ce schéma. Selon une analyse de la survie prévue au protocole, la trithérapie VMP est toujours associée à une réduction de 35 % du risque de mortalité (taux de risque [HR] de 0,65; p=0,0008), par rapport à la bithérapie MP, après un suivi d’une durée médiane de trois ans, même si les sujets ayant participé à cette étude continuent de recevoir des traitements. Les résultats de cette nouvelle analyse, qui sont venus renforcer l’efficacité du schéma d’induction VMP, ont amené la Dre Maria-Victoria Mateos, Hospital Universitario de Salamanca, Espagne, à conclure qu’«il semble plus profitable d’administrer le schéma VMP en première intention que de réserver le bortézomib ou d’autres agents innovants pour une utilisation ultérieure en cas de récidive».

En traitement d’induction, cependant, l’agent optimal à associer au bortézomib, inhibiteur du protéasome, demeure à définir. Et on se demande si, après le traitement d’induction, un traitement d’entretien reposant sur le bortézomib pourrait augmenter le taux de réponse tout en ayant une toxicité acceptable.

Diminution de la toxicité et augmentation de la réponse

Dans une nouvelle étude multicentrique, qui aura aussi pour conséquence de redéfinir la pratique, on a renforcé l’efficacité de ce schéma d’induction en démontrant qu’une bithérapie d’entretien à base de bortézomib pouvait, tout en étant bien tolérée, donner lieu à une survie sans progression (SSP) relativement longue. «L’ajout du traitement d’entretien a augmenté le taux de réponse complète (RC) tout en étant associé à une faible toxicité sur une longue période», souligne l’auteure principale, la Dre Mateos.

L’étude avec randomisation en deux phases a généré une brochette de nouvelles données, montrant notamment que les schémas à base de bortézomib «semblent triompher du sombre pronostic associé aux anomalies cytogénétiques à risque élevé», poursuit-elle.

Dans le cadre de cette étude, 260 patients ont reçu aléatoirement l’un de deux schémas d’induction (six cycles), puis l’un de deux schémas d’entretien pendant un maximum de trois ans. Durant la phase d’induction, la norme actuelle, c’est-à-dire le schéma VMP (1,3 mg/m² de bortézomib les jours 1, 4, 8, 11, 22, 25, 29 et 32 du premier cycle de six semaines, puis un jour par semaine pendant les cinq cycles subséquents; 9 mg/m² de melphalan et 60 mg/m² de prednisone du premier au quatrième jour des six cycles), a été comparée au même schéma dans lequel on avait substitué la thalidomide au melphalan (VTP). La thalidomide était administrée à raison de 50 mg/jour les 15 premiers jours, puis de 100 mg/jour pendant le reste du premier cycle de six semaines et les cinq autres cycles de cinq semaines. Durant la phase d’entretien, on comparait le bortézomib administré à raison de 1,3 mg/m² les jours 1, 4, 8, 11 tous les trois mois en association avec 50 mg de prednisone toutes les 48 heures (VP) avec la même dose de bortézomib administrée en association avec 50 mg/jour de thalidomide (VT).

Réponse au traitement d’induction

Les réponses aux deux schémas d’induction ont été rapides et similaires. La durée médiane du délai de réponse a été de 1,6 mois dans les deux cas, et le taux de réponse globale se chiffrait à 80 % pour le schéma VMP et à 81 % pour le schéma VTP. Une RC a été obtenue chez 32 % des sujets sous VMP et 37 % des sujets sous VTP alors que les taux de réponse partielle (RP) se chiffraient respectivement à 48 % et à 46 %. Aucune de ces différences n’a atteint le seuil de significativité statistique. Le type de toxicité différait toutefois d’un groupe à l’autre. Le schéma VMP a été associé à une hématotoxicité plus marquée; la neutropénie (39 % vs 22 %; p=0,008) et la thrombopénie (27 % vs 12 %; p=0,001), en particulier, étaient plus fréquentes. Le schéma VTP a quant à lui été associé à un pourcentage plus élevé d’événements cardiaques (8 % vs 0 %; p=0,001). Les neuropathies périphériques étaient peu fréquentes, et la différence entre les schémas VMP et VTP n’était pas significative (5 % et 9 %, respectivement). Par contre, les infections étaient plus courantes sous VMP (7 % vs <1 %; p=0,01). Les abandons pour cause d’effets indésirables graves étaient significativement plus fréquents sous VTP (17 % vs 11 %; p=0,03). En tout, 5 % des sujets des deux groupes sont décédés, le plus souvent d’une cause cardiaque dans le groupe VTP et d’une infection dans le groupe VMP.

Réponse au traitement d’entretien

Chez les 178 patients évaluables qui ont ensuite été randomisés de façon à recevoir un traitement d’entretien dans le cadre de l’étude, les deux schémas d’entretien se sont révélés hautement efficaces pour augmenter le taux de RC, y compris chez les patients qui présentaient des anomalies cytogénétiques de mauvais pronostic. Une RC ou une quasi-RC a été obtenue chez 59 % des sujets sous VT et chez 55 % des sujets sous VP. Les taux de RC avaient donc quasiment doublé depuis la fin du traitement d’induction. Le taux de réponse complète avec immunofixation négative (RCIF-) était aussi légèrement plus élevé sous VT que sous VP (44 % vs 39 %), mais l’écart n’était pas significatif.

En termes d’intervalle sans progression (ISP) et de survie globale (SG), les bénéfices du traitement, quel qu’il soit, étaient d’autant plus importants que la réponse était marquée. Ainsi, le bénéfice était plus marqué pour le groupe quasi-RC + RP que pour le groupe RP seules, pour le groupe RCIF- que pour le groupe quasi-RC + RP, et pour le groupe rémission immunophénotypique que pour le groupe RCIF-. Comme dans d’autres études, l’ISP et la SG étaient nettement meilleurs en l’absence de maladie résiduelle minimale (MRM) qu’en présence de MRM.

Les deux schémas d’entretien ont été bien tolérés, les effets indésirables ayant motivé seulement 5 % des abandons sous VP et 7 % des abandons sous VT. Les événements cardiaques (1 % vs 2 %, respectivement) et les infections (1 % vs 2 %, respectivement) ne différaient pas significativement entre les deux groupes. Fait digne de mention, les taux de neuropathies périphériques étaient très faibles (2 % sous VP et 5 % sous VT).

Après un suivi d’une durée médiane de 24 mois, la médiane de SSP n’avait pas encore été atteinte sous VT alors qu’elle s’établissait à 23 mois sous VP (p=0,05). Le taux de SG à deux ans était similaire dans les deux groupes : 86 % et 81 %, respectivement (p=0,7). Selon une analyse de régression de Cox des résultats obtenus pendant les périodes d’induction et d’entretien, la SSP s’est toutefois améliorée de 60 % dans le groupe VMP/VT par rapport au groupe VTP/VP (RR de 1,6; p=0,008). Les auteurs en ont conclu que la séquence à privilégier était le schéma VMP en traitement d’induction suivi du schéma VT en traitement d’entretien.

Données supplémentaires d’intérêt clinique

Deux autres observations tirées de cette étude revêtent une grande importance pour la pratique clinique. Dans un premier temps, on a observé un taux de réponse élevé chez les patients qui présentaient les anomalies cytogénétiques t(4;14), t(4;16) et del 17p identifiées par la technique d’hybridation in situ en fluorescence (FISH). Dans un deuxième temps, quelle qu’ait été la stratégie d’induction, le taux de réponse variait peu selon que le profil cytogénétique était anormal ou standard (29 % vs 23 %). De même, quel qu’ait été le traitement d’entretien, le taux de CRIF- variait peu selon que le profil cytogénétique était anormal ou standard (38 % vs 42 %). La Dre Mateos a par ailleurs insisté sur le faible taux de neuropathies périphériques comparativement aux études antérieures sur le bortézomib, qu’elle a attribué à l’administration une fois par semaine plutôt que deux fois par semaine.

L’avantage lié à l’administration hebdomadaire

Deux autres études récentes sont venues étayer les avantages de l’administration hebdomadaire du bortézomib. Dans la première étude, on comparait le schéma VMP au schéma VMP + thalidomide (VMPT). Une fois le recrutement amorcé, les chercheurs ont modifié le protocole pour que le bortézomib soit administré une fois par semaine dans les deux groupes plutôt que deux fois par semaine. Lorsque les 370 patients admis à l’étude après cette modification ont été comparés aux 141 patients qui avaient reçu deux perfusions par semaine, l’incidence globale des neuropathies périphériques a chuté de 45 à 27 % (p=0,0002) et celle des neuropathies périphériques de grade 3 ou plus, de 16 à 3 % (p<0,0001), explique l’auteure principale, la Dre Francesca Gay, Département d’hématologie, Mayo Clinic, Rochester, Minnesota. L’administration hebdomadaire a été associée à une légère baisse du taux de RC qui a presque atteint le seuil de significativité statistique (25 % vs 33 %; p=0,07), mais il n’y avait pas de différence significative entre les deux schémas d’administration quant à la SSP (68 % vs 60 %; p=0,31) ni quant à la SG (91 % vs 89 %; p=0,44) après deux ans.

Dans la seconde étude, d’envergure beaucoup moins grande, 63 patients atteints d’un MM symptomatique jamais traité ont été répartis dans deux cohortes : schéma CyBorD standard (cyclophosphamide, bortézomib [deux fois par semaine] et dexaméthasone) et schéma CyBorD modifié (bortézomib une fois par semaine). La comparaison des deux cohortes a révélé que la meilleure tolérabilité du schéma modifié permettait d’augmenter la dose globale de l’inhibiteur du protéasome (6,0 vs 5,2 mg/m² par cycle) tout en éliminant les neuropathies périphériques de grade 3 (0 % vs 6 %).

Résumé

Moins de deux ans après que le schéma VMP ait été établi comme le plus efficace des traitements de première intention du MM chez le patient âgé considéré comme inapte à recevoir un traitement fortement dosé, une nouvelle étude semble indiquer que les gains peuvent être amplifiés par un traitement d’entretien à base de bortézomib et de thalidomide. En effet, cette bithérapie relativement bien tolérée améliore la survie tout en offrant une qualité de vie acceptable. L’administration séquentielle des schémas VMP et VT pour les traitements d’induction et d’entretien a établi une nouvelle norme à laquelle les autres stratégies seront comparées.

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