Comptes rendus

Infections fongiques invasives chez les patients sévèrement immunodéprimés : stratégies d’amélioration de la survie globale
Regard sur de nouvelles options de traitement dans le syndrome de la vessie hyperactive

Optimiser le traitement de l’hypertension pour améliorer l’issue rénale chez le patient atteint de diabète

Le présent compte rendu est fondé sur des données médicales présentées lors d'un congrès de médecine reconnu ou publiées dans une revue avec comité de lecture ou dans un commentaire signé par un professionnel de la santé reconnu. La matière abordée dans ce compte rendu s'adresse uniquement aux professionnels de la santé reconnus du Canada.

PRESSE PRIORITAIRE - 22e Réunion scientifique de la European Society of Hypertension

Londres, Royaume-Uni / 26-29 avril 2012

Londres - Selon la plupart des guides de pratique reconnus, le premier antihypertenseur ? prescrire ? un patient atteint de diab?te qui pr?sente un autre facteur de risque cardiovasculaire (CV) et/ou des signes de dysfonctionnement r?nal, une microalbuminurie par exemple, est un inhibiteur de l’ECA ou un antagoniste des r?cepteurs de l’angiotensine (ARA). Cela dit, la majorit? des patients hypertendus atteints de diab?te ont besoin d’un deuxi?me antihypertenseur pour atteindre leur tension art?rielle cible. ? l’heure actuelle, la plupart des inhibiteurs du syst?me r?nine-angiotensine sont combin?s avec un diur?tique en raison de la synergie qui d?coule de leur association, mais comme diverses ?tudes ont montr? que le choix du diur?tique importait, les guides de pratique vont maintenant jusqu’? ?num?rer les diur?tiques recommand?s. Au vu de donn?es ? l’appui de la th?orie voulant que les diur?tiques n’abaissent pas tous l’incidence des ?v?nements CV et r?naux de fa?on similaire et qu’ils ne soient pas interchangeables, on observe un changement subtil, mais important de la d?finition d’une prise en charge optimale de l’hypertension.

Le système rénine-angiotensine (SRA) alimente la progression des maladies cardiovasculaires (CV), comme le remodelage cardiaque, et des dysfonctionnements rénaux, dont la protéinurie. Comme les inhibiteurs de l’ECA et les antagonistes des récepteurs de l’angiotensine (ARA) inhibent le SRA, le Joint National Committee on Prevention, Detection, Evaluation, and Treatment of High Blood Pressure (JNC) aux États-Unis et le National Institute for Health and Clinical Excellence (NICE) au Royaume-Uni les considèrent comme des antihypertenseurs de première intention pour les patients atteints de diabète. Les chiffres tensionnels cibles (<130/80 mmHg) n’étant pas faciles à atteindre, le traitement doit généralement comporter au moins deux antihypertenseurs. Il est recommandé d’associer un diurétique à un inhibiteur du SRA, mais le NICE souligne l’importance du choix du diurétique dans la plus récente version de son guide de pratique.

Nouvelles recommandations au sujet des diurétiques

Selon les nouvelles recommandations du NICE – qui ont été présentées au congrès par le Dr Franz H. Messerli, directeur du programme sur l’hypertension, St. Luke’s-Roosevelt Hospital Center, New York –, un «diurétique apparenté aux thiazidiques comme la chlorthalidone [12,5-25 mg, 1 fois/jour] ou l’indapamide [1,5 mg de la préparation à libération modifiée ou 2,5 mg, 1 fois/jour]» devrait être utilisé «de préférence à un diurétique thiazidique classique comme le bendrofluméthiazide [BFTZ] ou l’hydrochlorothiazide [HCTZ]». Le Dr Messerli, qui a exposé les données ayant motivé ce changement en août 2011, estime que d’autres guides de pratique, dont celui du JNC, contiendront des recommandations similaires.

Ce changement découle de l’absence de données prouvant que les diurétiques thiazidiques, comme l’HCTZ, réduisent significativement le nombre d’événements CV et rénaux, même quand ils maîtrisent la tension artérielle (TA). En revanche, l’indapamide et la chlorthalidone en association avec un inhibiteur de l’ECA ou un ARA ne font pas que maîtriser l’hypertension, ils sont aussi associés à une diminution marquée du nombre d’événements. L’indapamide et la chlorthalidone seraient plus avantageux du fait qu’ils semblent exercer un effet plus marqué sur le processus physiopathologique sous-jacent comme l’aggravation de la néphropathie. Pour autant que ces agents soient prescrits avant la survenue d’une atteinte sévère des organes cibles, le risque d’événement grave s’en trouve diminué.

Plus précisément, on peut faire reculer la mortalité associée au continuum maladies CV-rénales en prévenant la microalbuminurie, en faisant régresser la macroalbuminurie et en retardant l’aggravation de la néphropathie, explique le Dr Pavel Hamet, Centre de recherche du Centre hospitalier de l’Université de Montréal (CHUM), Québec. «Finalement, les médecins devraient intervenir très tôt afin de prévenir l’apparition d’un dysfonctionnement rénal», dit-il.

L’essai ADVANCE (Action in Diabetes and Vascular Disease: PreterAx and DiamicroN MR Controlled Evaluation) ayant été mené en conditions réelles, il n’y avait aucun critère d’inclusion quant au taux d’HbA1c ou à la TA. Les sujets diabétiques de l’étude sont donc très représentatifs des patients que l’on rencontre en milieu communautaire. L’association du perindopril, un inhibiteur de l’ECA, et de l’indapamide à doses fixes a réduit de 21% le nombre de nouveaux cas de microalbuminurie par rapport au placebo (Lancet 2007;370:829-40), précise le Dr Hamet. Le traitement actif a également fait reculer de 22 % le risque de progression de ≥1 stade de l’albuminurie et fait augmenter de 16% la probabilité de régression de ≥1 stade de l’albuminurie (J Am Soc Nephrol 2009;20:883-92). L’étude a démontré globalement que, par comparaison à un placebo, l’association avait réduit de 18 % l’incidence des décès d’origine CV, de 21 % le nombre total d’événements rénaux et de 14 % la mortalité toutes causes confondues.

«Il est très important pour un médecin de pouvoir faire régresser la maladie chez son patient diabétique, insiste le Dr Hamet. La maladie peut régresser de 50 % en 5 ans, et il suffit d’ajouter une association à doses fixes pour obtenir une réduction supplémentaire de 16 %.»

Présentation de nouvelles données de l’étude NIKA

Selon une analyse de sous-groupe de l’étude NIKA présentée au congrès, la même association a eu un effet bénéfique similaire sur la fonction rénale. Dans cette étude qui regroupait 445 sujets diabétiques, dont 77 présentaient une microalbuminurie au départ, les patients recevaient l’association du perindopril à 5 mg (posologie équivalente au Canada : 4 mg) et de l’indapamide à 1,25 mg pendant 6 mois (résumé 596). La microalbuminurie a régressé chez 80 % des patients, passant en moyenne de 48 μg/min à 30 μg/min (p=0,034), et 36 % avaient une albuminurie normale en fin d’étude (Tableau 1). Fait digne de mention, 63 % des patients ont atteint la TA systolique cible de <130 mmHg. Cette sous-analyse étaye les résultats de l’étude ADVANCE, à savoir que l’association contribue à la baisse optimale de la TA et à la régression de la néphropathie chez les patients atteints de diabète, y compris ceux qui présentent une microalbuminurie.

 

Associations à base d’un inhibiteur de l’ECA

Depuis une dizaine d’années, on voit de plus en plus que le dysfonctionnement rénal est à l’origine d’événements CV et rénaux majeurs chez les patients atteints de diabète et d’hypertension. On observe un événement rénal chez environ 75 % des patients diabétiques, par exemple une microalbuminurie, une diminution de la clairance de la créatinine, une macroalbuminurie ou le doublement de la créatininémie. La simple présence d’un diabète triple le risque de mortalité imputable à une maladie rénale et double le risque de mortalité imputable à une cause vasculaire (N Engl J Med 2011;364:829-41). Il importe aussi de souligner que >75 % des patients hypertendus atteints d’un diabète de type 2 ont besoin d’un traitement d’association.

Comme l’a montré l’étude ADVANCE, l’albuminurie et la fonction rénale sont deux prédicteurs indépendants de l’issue CV et rénale (J Am Soc Nephrol 2009;20:1813-21). «Dans les années à venir, nous devrons probablement différencier ces deux composantes et traiter chacune de façon ciblée», poursuit-il. Fait important, le traitement actif a réduit la mortalité totale de 14 %. «J’estime qu’il s’agit là d’un bénéfice clair qui importe aux yeux d’un clinicien, affirme le Dr Hamet. Outre les résultats de l’essai ADVANCE, nous avons quelques données montrant que la protection rénale diminue la mortalité», souligne-t-il.

Complications microvasculaires

Une nouvelle analyse des données de l’essai ADVANCE présentée au congrès a révélé qu’une augmentation de 10 bpm de la fréquence cardiaque était associée à une augmentation de 13 % du risque de complications microvasculaires majeures (p<0,001) (résumé 1333). Le Pr John Chalmers, professeur émérite de médecine, The George Institute for International Health, University of Sydney, Australie, a expliqué qu’au sein de l’effectif de 11 140 patients, la fréquence cardiaque maximale au repos (84-140 bpm) était associée à une augmentation de 60 % du risque. Les chercheurs ont aussi observé un risque accru d’apparition ou d’aggravation de rétinopathie (16 %) de même qu’un risque accru d’apparition ou d’aggravation de néphropathie (11 %). Cet effet ne variait pas selon le sexe, les antécédents de macroangiopathie, le traitement de la fibrillation auriculaire par un bêtabloquant, ni selon le traitement de l’hypertension ou de l’hyperglycémie attribué aléatoirement.

«On ne sait pas vraiment si l’augmentation de la fréquence cardiaque est directement responsable de cette augmentation du risque ou si c’est un marqueur de problèmes sous-jacents – par exemple une mauvaise condition physique, l’obésité, l’hypertension ou des dyslipidémies – qui expliquent le mauvais pronostic, chacun de ces facteurs étant étroitement lié à un risque accru de microangiopathie dans le diabète», enchaîne le Pr Chalmers. L’un des mécanismes en cause pourrait être que le dysfonctionnement autonome associé au diabète entraîne une hyperactivité sympathique et une altération du baroréflexe, ajoute-t-il.

Le type de diurétique semble important

Bien qu’aucune étude n’ait ciblé expressément des patients diabétiques, le Dr Messerli en a cité plusieurs selon lesquelles le choix du diurétique pourrait avoir des retombées sur les résultats. Au nombre de ces études figurent HYVET (Hypertension in the Very Elderly trial), où l’association perindopril-indapamide a donné lieu à une diminution marquée des événements, dont une baisse de 21 % de la mortalité toutes causes confondues, par rapport à un placebo (N Engl J Med 2008;358:1887-98) et PATS (Post-Stroke Hypertension Study) où l’indapamide seul a été associé à une réduction de 29 % de l’incidence des AVC par rapport à un placebo (Chin Med J 1995;108:710-7). Il n’y a pas de données sur le BFTZ et l’HCTZ, mais l’essai MRFIT, qu’il a cité dans son allocution, a associé la chlorthalidone – mais pas l’HCTZ – à des réductions hautement significatives de l’incidence des infarctus du myocarde, des AVC et des interventions de revascularisation.

«L’effet antihypertenseur des diurétiques ne découle pas directement de la diurèse», note le Dr Messerli, qui expliquait en quoi les antihypertenseurs de la classe des diurétiques diffèrent. L’HCTZ ne devrait donc plus être utilisé ou, plutôt, «si un diurétique est indiqué dans le traitement de l’hypertension, on devrait privilégier la chlorthalidone ou l’indapamide». Ce n’est pas une opinion personnelle, insiste-t-il, mais bien la conclusion vers laquelle convergent les auteurs des guides de pratique, emboîtant ainsi le pas au NICE qui a déjà pris position.   

 

Commentaires

Nous vous serions reconnaissants de prendre 30 secondes pour nous aider à mieux comprendre vos besoins de formation.