Comptes rendus

Évaluation de stratégies visant à prolonger au maximum la survie du patient et du greffon
Réévaluation des stratégies de traitement optimales pour trois types d’infections fongiques : le point sur les plus récentes données

Progrès dans le traitement des onychopathies

Le présent compte rendu est fondé sur des données médicales présentées lors d'un congrès de médecine reconnu ou publiées dans une revue avec comité de lecture ou dans un commentaire signé par un professionnel de la santé reconnu. La matière abordée dans ce compte rendu s'adresse uniquement aux professionnels de la santé reconnus du Canada.

PRESSE PRIORITAIRE - Réunion académique estivale 2012 de l’American Academy of Dermatology (AAD)

Boston, Massachusetts / 15-19 août 2012

Boston - Les premiers traitements conçus expressément pour améliorer les propriétés mécaniques de la plaque unguéale sont maintenant à notre portée. Selon des données présentées au congrès, ces traitements – qui renforcent l’ongle et en améliorent l’apparence – semblent utiles en présence de plusieurs étiologies de pousse anormale de l’ongle. Nous avions auparavant très peu d’options pour rétablir l’équilibre des teneurs en eau et en kératine essentiel à un ongle sain. Nous n’avions pratiquement d’autre choix que de maîtriser le processus morbide sous-jacent, tel le psoriasis, ou de protéger l’ongle contre l’exposition continue aux facteurs d’agression extérieurs. Ces stratégies demeurent importantes, certes, mais les nouveaux traitements qui ciblent l’ongle directement semblent permettre une amélioration plus rapide et plus efficace. Les atteintes unguéales – problème cosmétique important aux yeux de celui qui en souffre – peuvent restreindre les possibilités de travail lorsque l’apparence des mains compte. L’arrivée sur le marché d’une option plus efficace pour rétablir l’apparence des ongles comble un vide thérapeutique important.

Les dystrophies unguéales peuvent avoir de nombreuses causes, notamment l’exposition à des agents nocifs, une immersion prolongée dans l’eau et diverses maladies systémiques comme le psoriasis. Il en résulte, à des degrés divers, fragilité, dédoublement, dyschromie, pousse avec déformation et pousse sous-optimale de l’ongle. La plupart de ces troubles et anomalies ont en commun un déséquilibre des teneurs en eau et en kératine. Jusqu’à tout récemment, aucun traitement n’exerçait d’effet direct substantiel permettant de rétablir cet équilibre. Même les corticostéroïdes topiques corrigent la composante inflammatoire et non les variables clés de la formation de la matrice unguéale. Un produit approuvé récemment aux États-Unis (et maintenant au Canada sous la marque Veralac) semble être parmi les premiers à agir directement sur les propriétés mécaniques de l’ongle.

«Les dermatologues connaissent beaucoup de traitements topiques qui améliorent la pousse et l’apparence de l’ongle, mais les données à l’appui d’améliorations significatives sont inexistantes ou presque. Les essais à double insu en cours sur les nouveaux traitements pourraient toutefois nous permettre d’accumuler des données concluantes», affirme le Dr C. Ralph Daniel, University of Mississippi Medical Center, Jackson. Certains anti-inflammatoires ou antibactériens permettent d’améliorer l’apparence de l’ongle en présence d’inflammation ou d’infection, respectivement, mais beaucoup de traitements – comme l’application de vaseline – sont en fait des remèdes maison, ajoute-t-il.

Nouvelles données cliniques

Dans le psoriasis, la Food and Drug Administration (États-Unis) a récemment homologué un produit composite topique sur la foi des données d’un essai à double insu présentées au congrès. Cet agent – produit topique hydrosoluble pour les ongles à base d’hydroxypropyl-chitosane (HPCH), d’Equisetum arvense (extrait de prêle) et de méthyl-sulphonyl-méthane (MSM) – a été le premier produit conçu expressément pour le traitement des anomalies unguéales à être homologué par la FDA. Les nouvelles données à l’appui de son efficacité dans le psoriasis témoignent maintenant de sa polyvalence.

«L’étude a confirmé que cet agent était efficace. Même après 16 semaines, l’analyse en intention de traiter [IT] a fait ressortir un bénéfice clinique significatif», souligne la Pre Franca Cantoresi, Università La Sapienza, Rome, Italie. «Compte tenu des piètres résultats cliniques associés aux traitements systémiques et topiques pour le psoriasis unguéal, ce vernis [hydrosoluble] est une option valable, efficace et sûre qui atténue les signes de dystrophie [unguéale] chez les patients atteints de psoriasis.»

Dans l’étude sur le psoriasis unguéal, 87 patients présentant une atteinte légère à modérée du lit ou de la matrice de l’ongle ont été randomisés de façon à appliquer le vernis (HPCH + MSM + extrait d’E. arvense) ou un placebo 1 fois/jour, le soir. Les patients ne pouvaient pas avoir reçu d’agent systémique antipsoriasique au cours des 3 mois précédents ni avoir appliqué quelque produit que ce soit sur l’ongle, y compris des vernis. De plus, les résultats des examens mycologiques devaient être négatifs. Toutes les 4 semaines, des chercheurs évaluaient à l’insu l’efficacité du traitement selon l’indice mNAPSI (modified Nail Psoriasis Severity Index). Le paramètre principal – la guérison clinique – était défini par un score ≤4 selon l’indice mNAPSI, lequel s’échelonne de 1 à 96. Le vernis à base d’HPCH ne dégage pas d’odeur forte et s’applique comme du vernis à ongles.

L’analyse en IT à 24 semaines a révélé que 55 % des patients randomisés dans le groupe de traitement actif avaient atteint le paramètre de la guérison clinique vs 31,7 % des témoins (p<0,05). Selon l’analyse per protocol à 24 semaines, ces proportions grimpaient à 67,7 % et à 40,6 %, respectivement (Figure 1). Selon l’analyse à 16 semaines, paramètre secondaire prévu au protocole, les taux de guérison clinique s’élevaient respectivement à 41,9 % et à 18,7 % (p<0,05).

Ni le traitement actif ni le placebo n’ont entraîné d’effets indésirables. La plupart des patients des deux groupes (96,8 % et 78,1 %, respectivement) estimaient que l’acceptabilité du traitement était bonne ou très bonne, mais il importe ici de souligner que 21,9 % des témoins vs seulement 3,2 % des patients recevant le vernis à base d’HPCH ont qualifié l’acceptabilité de médiocre.

Les données cliniques objectives ayant mené à l’homologation proviennent de divers essais cliniques dont les premiers résultats ont été publiés en 2006. Contrairement aux émollients qui atténuent le dédoublement des ongles déshydratés sans les renforcer, les trois ingrédients actifs de ce vernis hydrosoluble semblent interagir de façon synergique pour protéger les ongles tout en favorisant une pousse normale. Selon diverses études en laboratoire et cliniques, l’HCPH pénètre dans l’ongle pour en augmenter l’hydratation, l’extrait d’E. arvense fournit la silice qui renforce l’ongle et la teneur en soufre du MSM favorise la pousse de l’ongle.

Figure 1. Paramètre principal : Taux de guérison clinique après 24 semaines de traitement

 

Autres résultats

L’efficacité du vernis sur l’ongle psoriasique ajoute beaucoup de poids aux données sur l’efficacité contre le dédoublement et la fragilité. Lors d’une étude comparative publiée qui regroupait des femmes dont la plaque unguéale était altérée par divers facteurs, 90 % des sujets sous traitement actif ont vu une amélioration alors que 10 % n’ont vu aucune amélioration. Dans le groupe placebo, en revanche, 5 % des témoins ont rapporté une amélioration, 90 %, aucun changement et 5 %, une aggravation (Sparavigna et al. J Plastic Derm 2006;2:31-8). La microscopie électronique à balayage a pu mettre en évidence des changements évidents dans les caractéristiques des ongles entre le début et la fin du traitement par rapport au placebo.

Une étude récente dont seul un résumé a été présenté a associé le vernis à des changements objectifs sur le plan de la dureté, de la résistance à la rupture et de la structure (Mailland et al. 2012, résumé 35, Fourth Skin and Formulation Symposium, Lyon, France).

Le paramètre principal de l’étude présentée au congrès était la guérison, mais une vaste proportion de patients qui n’avaient pas atteint la guérison à 24 semaines ont décidé de poursuivre leur traitement en raison d’une amélioration progressive au fil de l’étude. Il importe d’ailleurs de souligner que le nombre de réponses complètes a continué d’augmenter avec le temps, précise la Pre Cantoresi. Dans un cas de déformation de longue date, il a fallu 27 mois pour obtenir une guérison complète, ce qui témoigne d’un effet cumulatif du traitement sur la pousse de l’ongle.

«Il y a bien peu de produits sur le marché pour le psoriasis unguéal», affirme la Dre Phoebe Rich, Oregon Health Sciences University, Portland. Fascinée par les données à double insu présentées au congrès, elle a animé une séance de synthèse sur le traitement du psoriasis unguéal. Il faut parfois avoir recours aux agents systémiques, y compris les agents biologiques, pour le traitement des atteintes unguéales sévères, même lorsque les lésions cutanées sont blanchies, indique-t-elle, mais il reste qu’un traitement topique agissant exclusivement sur l’ongle représente un énorme progrès.

La difficulté à équilibrer les teneurs en eau et en kératine a toujours été un obstacle à la mise au point de traitements visant à rétablir la matrice de l’ongle et ses propriétés mécaniques. Le vernis à base d’HPCH est le seul traitement approuvé contre la fragilité de l’ongle, mais notre compréhension grandissante des mécanismes moléculaires qui sous-tendent la production d’un ongle sain contribue au développement d’autres options. Ces traitements devraient avoir d’énormes retombées sur la qualité de vie des personnes aux prises avec d’importantes déformations unguéales.

«Il est difficile de sous-estimer le fardeau des atteintes unguéales. C’est une importante question de qualité de vie. Pour ces patients vraiment gênés par l’apparence de leurs ongles ou dont le travail en souffre, il nous faut poursuivre notre quête d’un remède efficace», conclut la Dre Rich.

Résumé

Un traitement permettant de soulager les signes et les symptômes de l’onychodystrophie – qui a récemment été homologué au Canada et aux États-Unis – s’est aussi révélé efficace pour normaliser la pousse de l’ongle perturbée par le psoriasis. Il semble que ce traitement soit le premier à agir directement sur la mécanique et la pousse de la plaque unguéale. Son mode d’action – le rétablissement de l’équilibre des teneurs en eau et en kératine qui favorise la formation de la matrice – montre que l’on peut cibler efficacement le processus moléculaire sous-jacent à la formation de l’ongle et obtenir des effets bénéfiques sur l’ongle de même qu’une amélioration de son apparence globale. 

 



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