Comptes rendus

Un pas en avant dans le diagnostic et la maîtrise des maladies gastro-œsophagiennes

Un nouveau schème de référence dans le traitement des tumeurs neuro-endocrines bien différenciées

Le présent compte rendu est fondé sur des données médicales présentées lors d'un congrès de médecine reconnu ou publiées dans une revue avec comité de lecture ou dans un commentaire signé par un professionnel de la santé reconnu. La matière abordée dans ce compte rendu s'adresse uniquement aux professionnels de la santé reconnus du Canada.

FRONTIÈRES MÉDICALES - 6e Conférence annuelle de l’ENETS pour le diagnostic et le traitement des tumeurs neuro-endocrines

Grenade, Espagne / 5-7 mars 2009

Il est généralement admis que les tumeurs neuro-endocrines (TNE) sont rares. «Les statistiques indiquent toutefois que le nombre de TNE bien différenciées, tous types confondus, est à la hausse depuis une trentaine d’années», souligne le Pr Kjell Öberg, Service des tumeurs neuro-endocrines, Hôpital universitaire d’Uppsala, Suède. En Europe, dont la population est estimée à 850 millions d’habitants, par exemple, on dénombre environ 80 000 nouveaux cas par année et, bon an mal an, une prévalence d’environ 250 000 TNE. «C’est donc dire que le fardeau est assez lourd pour les médecins, voire extrêmement lourd si l’on tient compte des ressources consacrées au diagnostic et au traitement de ces tumeurs», explique le Pr Irvin Modlin, Département de chirurgie, Yale University School of Medicine, New Haven, Connecticut.

Symptômes des TNE

Dans les conditions physiologiques normales, la sérotonine libérée par les cellules entérochromaffines module la sécrétion d’eau et d’électrolytes, la motricité de l’intestin et la prolifération des fibroblastes. Dans les TNE fonctionnelles, on pense que libération excessive de sérotonine et d’autres substances serait à l’origine de nombreux symptômes, comme la diarrhée et les bouffées vasomotrices, et de troubles graves comme la cardiopathie carcinoïde. La libération de sérotonine peut être bloquée par l’action d’un antagoniste de la somatostatine au niveau des récepteurs des cellules entérochromaffines, et c’est effectivement de cette façon qu’agissent les analogues de la somatostatine comme l’octréotide. «Le soulagement des symptômes ainsi obtenu a eu d’énormes retombées sur la qualité de vie des patients», affirme le Pr Modlin. De nouveaux analogues de la somatostatine comme le pasiréotide sont en cours de développement. Ce composé exerce une forte activité fonctionnelle sur les récepteurs 1, 2, 3 et 5 de la somatostatine.

Au-delà du soulagement des symptômes

Depuis le jour où l’on a commencé à administrer de l’octréotide pour soulager les symptômes, des données à l’appui de l’activité antitumorale éventuelle de cet agent se sont dégagées de modèles précliniques de cancer (Weckbecker et al. Digestion 1996;57[Suppl 1]:22-8). Après l’arrivée de cet agent sur le marché, on a observé dans la pratique clinique que la survie des patients porteurs d’une TNE métastatique était passée de 19 mois (entre 1973 et 1987) à 39 mois (entre 1988 et 2004) (Yao et al. J Clin Oncol 2008; 26[18]:3063-72), ce que le Pr Modlin a qualifié de «premières preuves d’une amélioration de l’issue clinique». L’évolution des connaissances dans la biologie cellulaire fondamentale des TNE nous amène à penser que les analogues de la somatostatine pourraient freiner la croissance tumorale en bloquant les voies qui induisent la croissance et la prolifération des cellules tumorales. Cela dit, nous manquons de données probantes à l’appui de tels effets.

PROMID : données très probantes à l’appui d’une activité antitumorale

L’hypothèse voulant que l’octréotide exerce des effets antiprolifératifs a été mise à l’épreuve dans le cadre de l’essai randomisé avec placebo PROMID (Placebo-controlled, Double-blind, Prospective Randomized Study on the Effect of Octreotide LAR in the Control of Tumor Growth in Patients with Metastatic Neuroendocrine Midgut Tumors). En tout, 85 patients ont été traités entre 2001 et 2008 (sur un effectif prévu de 162). On a mis fin au recrutement en raison de la robustesse des résultats de l’analyse partielle prévue au protocole, que l’on présente ici.

La population de l’étude était bien définie (Tableau 1). Tous les patients étaient porteurs d’une TNE métastatique bien différenciée, fonctionnelle ou non, localisée dans l’intestin moyen. Aucun de ces patients n’avait été traité auparavant, et aucune autre option thérapeutique n’était envisageable chez ces patients. Après la présélection, les patients étaient randomisés de façon à recevoir 30 mg d’octréotide LAR par voie intramusculaire (i.m.) tous les 28 jours ou un placebo pendant 18 mois ou jusqu’à la progression de la tumeur (Figure 1).

Figure 1. Plan de l’essai PROMID


Le délai médian de progression tumorale – le paramètre principal de l’étude – favorisait significativement le groupe de traitement actif : 14,3 mois pour l’octréotide LAR (IC à 95 % : 11,0-28,3) vs 6,0 mois (IC à 95 % : 3,7-9,4) pour le placebo (HR de 0,34; IC à 95 % : 0,20-0,59; p=0,000072) (Figure 2). La tumeur s’est stabilisée à la fois chez des patients porteurs d’une TNE fonctionnelle et des patients porteurs d’une TNE non fonctionnelle. On a observé une réponse de la tumeur à six mois chez 28 patients sur 42 (67 %) dans le groupe octréotide LAR vs 16 patients sur 43 (37 %) dans le groupe placebo.

Fait digne de mention, l’analyse des sous-groupes a révélé que l’issue clinique était plus favorable chez les patients sous traitement actif, peu importe que le taux de chromogranines A (CgA) ait été faible ou élevé ou que la tumeur ait été fonctionnelle ou non. Cette dernière donnée est importante, car elle témoigne du bien-fondé de l’octréotide chez les patients asymptomatiques. L’effet observé chez les patients dont les métastases hépatiques envahissent <u>></u>10 % du parenchyme n’était pas statistiquement significatif, mais il importe de souligner que le nombre de patients était faible (n=12 et n=11, respectivement).

La survie globale était un paramètre secondaire de l’étude. À ce chapitre, on n’a pu déterminer s’il y avait des différences entre les groupes. «La quasi-totalité des patients sous placebo dont la tumeur a progressé sont passés à l’octréotide, de sorte qu’il a été impossible de déterminer la survie globale de la population ne recevant pas d’octréotide», explique le Dr Arnold.

Potentialisation de l’activité antitumorale

L’évérolimus, inhibiteur de mTOR, interfère aussi avec les voies responsables de la croissance et de la prolifération des cellules tumorales, et des modèles précliniques ont objectivé une activité antitumorale. Les résultats d’un essai de phase II présentés au congrès semblent étayer cette activité dans un contexte clinique. Lors d’une étude, des patients atteints d’une TNE pancréatique avancée et réfractaire à la chimiothérapie ont été randomisés de façon à recevoir de l’évérolimus en monothérapie ou en association avec de l’octréotide LAR. Des réponses objectives durables et des stabilisations ont été observées dans les deux groupes. Une comparaison avec des témoins historiques a fait ressortir un taux plus élevé de survie sans progression à six mois (28 % vs 65 % pour l’évérolimus seul et vs 71 % pour l’association évérolimus/octréotide). «L’évérolimus est actif, tant en monothérapie qu’en association avec l’octréotide chez des patients atteints d’une TNE pancréatique réfractaire», récapitule le Pr James Yao, M.D. Anderson Cancer Center, Houston, Texas.

Tableau 1. Caractéristiques ini
mis à l’essai PROMID

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Perspective canadienne

La majorité des congressistes avaient l’impression que les résultats de l’étude PROMID influeraient sur les recommandations européennes pour le traitement des TNE. Comme le soulignait un participant, le Dr Simron Singh, Sunnybrook Health Sciences Centre, Toronto, Ontario, «nous avons commencé récemment à scruter les recommandations canadiennes et nous avons décidé d’y inclure les données de l’essai PROMID». L’essai PROMID a généré des résultats très clairs, en partie parce que la population de l’étude était très bien définie. Comme ces études sont très difficiles à réaliser, le Dr Singh affirme qu’il ne serait «pas réticent à extrapoler ces résultats à d’autres TNE».

Bien que les résultats n’aient pas semblé aussi prometteurs pour les patients porteurs de nombreuses métastases hépatiques, précise le Dr Walter Kocha, London Health Sciences Centre, Ontario, «le nombre de ces patients était faible, de sorte qu’il est plus difficile d’obtenir des résultats très significatifs sur le plan statistique. De toute façon, ces résultats ne concordent pas avec mon expérience clinique. J’ai en effet déjà vu des patients porteurs de nombreuses métastases hépatiques répondre extrêmement bien au traitement. Au nombre des autres questions d’intérêt clinique, le Dr Kocha estime que le moment où l’on amorce le traitement est important. «Si on amorce le traitement tôt, peut-être réussirons-nous à éviter quelques décès», conclut-il.

Résumé

Des données probantes sont venues raviver l’espoir chez les patients porteurs d’une TNE. Pour la première fois, un essai a clairement démontré qu’un traitement par l’octréotide LAR peut prolonger le délai de progression tumorale. Ces résultats vont probablement modifier la démarche thérapeutique auprès de cette population et paver la voie à l’utilisation de l’octréotide LAR en présence d’une tumeur non fonctionnelle. En outre, l’application de nouvelles connaissances en biologie cellulaire au développement de nouveaux traitements devrait se traduire par une prolongation supplémentaire de la survie et une diminution plus marquée des symptômes de ces cancers difficiles à tra
ai de progression tumorale reporté sur une courbe de Kaplan-Meier

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