Comptes rendus

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Vaccin contre le virus du papillome humain : expérience grandissante

Le présent compte rendu est fondé sur des données médicales présentées lors d'un congrès de médecine reconnu ou publiées dans une revue avec comité de lecture ou dans un commentaire signé par un professionnel de la santé reconnu. La matière abordée dans ce compte rendu s'adresse uniquement aux professionnels de la santé reconnus du Canada.

La 44e Assemblée annuelle de l’Infectious Diseases Society of America

Toronto, Ontario / 12-15 octobre 2006

La fréquence des infections transmissibles sexuellement (ITS) curables baisse de façon constante dans toutes les régions du monde où un programme de lutte contre les ITS a été mis sur pied, mais ce n’est pas le cas des ITS virales. «Maintenant que nous avons des vaccins contre deux des quatre principales ITS virales, nous allons pouvoir mieux combattre ces infections si nous utilisons les vaccins efficacement» affirme le Dr King Holmes, professeur titulaire de médecine, University of Washington, Seattle.

Vu sa nature ubiquiste, le virus du papillome humain (VPH) est à l’origine de la plus importante des ITS. Dans une étude menée auprès d’étudiantes vierges à leur entrée à l’université, par exemple, l’incidence cumulative d’infections à VPH était de 75 % après quatre ans d’études universitaires.

L’infection à VPH est aussi associée à un lourd fardeau de morbidité. À l’échelle mondiale, les deux types oncogènes les plus fréquents du VPH – 16 et 18 – occasionnent environ 70 % de tous les cancers du col, tandis que les types non oncogènes 6 et 11 causent environ 90 % de tous les condylomes génitaux, une importante proportion de dysplasies cervicales de faible grade et essentiellement toutes les papillomatoses laryngées.

Le fardeau de morbidité associé à l’infection à VPH chez les hommes hétérosexuels non infectés par le VIH est substantiel, explique la Dre Anna R. Giuliano, professeure titulaire de médecine, d’épidémiologie et de biostatistique, département d’oncologie interdisciplinaire, University of South Florida College of Medicine, Tampa. Le VPH cause des cancers du pénis, de l’anus, de la cavité buccale, de l’oropharynx et possiblement de la tête et du cou. «Tous ces cancers sont surtout attribuables au VPH de type 16», confirme-t-elle. Chez les hommes américains, on estime au bas mot à 10 000 le nombre annuel de cancers attribuables au VPH, principalement le VPH de type 16. Selon des méthodes de détection perfectionnées que l’on a utilisées au sein d’une cohorte d’hommes vivant aux États-Unis, au Mexique et au Brésil, environ 60 % des sujets avaient été infectés par le VPH. Aux États-Unis seulement, cela revient à environ 500 000 cas par année de condylomes génitaux chez les hommes.

Bien que rare, la papillomatose respiratoire récurrente, manifestation particulièrement incommodante de l’infection à VPH, se traduit chez les enfants infectés par des tumeurs papillomateuses dans le larynx qui peuvent obstruer l’écoulement de l’air et évoluer vers un cancer. Aux États-Unis, les pédiatres voient chaque année environ 1500 à 2500 nouveaux cas de papillomatose respiratoire récurrente. Les enfants – âgés entre deux et quatre ans au moment du diagnostic – ont généralement besoin d’environ quatre interventions chirurgicales par année jusqu’à ce que leurs voies aériennes soient assez développées pour ne pas s’obstruer, poursuit la Dre Giuliano.

Non seulement l’infection à VPH est-elle associée à un fardeau de morbidité important chez l’homme, mais elle influe aussi sur le risque de morbidité chez la femme. Des études cas-témoin indiquent, par exemple, que les femmes dont les conjoints sont atteints d’un cancer du pénis sont exposées à un risque accru de cancer du col, tout comme les femmes dont le conjoint a perdu sa première femme à cause d’un cancer du col et les femmes dont le conjoint a de multiples partenaires sexuelles ou des contacts avec les prostituées.

Vaccin quadrivalent contre le VPH

À ce jour, les essais cliniques sur le nouveau vaccin quadrivalent contre le VPH n’ont ciblé que de jeunes femmes, mais des données préliminaires indiquent que le vaccin pourrait aussi être efficace chez les jeunes hommes. Dans une étude réalisée chez des garçons de neuf à 15 ans, les titres d’anticorps en réponse au vaccin étaient deux à trois fois plus élevés chez les garçons adolescents que chez les jeunes femmes. La réponse anticorps observée chez ces garçons était aussi plus marquée que chez les filles du même âge. «On note une réponse au vaccin robuste et très profonde chez les garçons», d’ajouter la Dre Giuliano. Par conséquent, une stratégie de vaccination qui ciblerait les deux sexes pourrait optimiser la protection contre l’infection à VPH, d’où une diminution plus rapide et profonde du fardeau de l’infection à VPH chez la femme, comme le montre le modèle mathématique de la Dre Giuliano et de ses collaborateurs.

Le même modèle a aussi montré que la vaccination chez l’homme réduirait substantiellement le fardeau de morbidité, surtout l’incidence des condylomes génitaux. Selon les résultats de l’étude pivot de phase III sur le vaccin quadrivalent renfermant les types 6, 11, 16 et 18 du VPH, le vaccin a été hautement efficace contre tous les paramètres évalués. Comme le précise le Dr Darron Brown, professeur titulaire de médecine, de microbiologie et d’immunologie, Indiana University School of Medicine, Indianapolis, le vaccin quadrivalent s’est révélé efficace à 97 % contre l’apparition de lésions intraépithéliales cervicales (CIN) de grade 1 ou pire et efficace à 95 % contre les condylomes génitaux et les néoplasies vulvaires ou vaginales après un suivi moyen de 24 mois. Le vaccin s’est aussi révélé efficace à 97 % contre les CIN de grade 2 ou 3 et les adénocarcinomes cervicaux in situ.

À cinq ans, le vaccin quadrivalent offrait toujours une protection de 100 % contre les CIN et les condylomes génitaux liés aux types de VPH ciblés par le vaccin, et était efficace à 96 % contre les infections ou les maladies persistantes liées aux types de VPH ciblés par le vaccin.

Les Centers for Disease Control et le Prevention’s Advisory Committee on Immunization Practices (ACIP) recommandent le vaccin pour les filles de 11 ou 12 ans ainsi que pour les filles et les femmes de 13 à 26 ans qui n’ont pas encore été vaccinées. Selon les recommandations de l’ACIP, le médecin pourrait même envisager de vacciner une fillette dès l’âge de neuf ans s’il estime qu’elle bénéficierait d’une protection contre le VPH. «Nous n’avons aucune donnée montrant que ce vaccin exerce un effet thérapeutique, fait remarquer le Dr Brown, mais on peut tout de même le donner à des femmes sexuellement actives ou ayant des antécédents de dysplasie cervicale, car nous savons que, chez les femmes infectées par l’un des types de VPH, le vaccin offre tout de même une protection contre les autres types de VPH.» Étant donné que seulement 50 % environ des femmes ont une réponse anticorps à une infection naturelle par le VPH, la moitié des femmes infectées par le VPH demeurent à risque de récurrence si elles sont infectées de nouveau par le même type de virus que les types contenus dans le vaccin. Ainsi, si le vaccin quadrivalent pouvait stimuler l’immunité, il pourrait également offrir une protection importante contre les épisodes futurs.

Élargissement du spectre de protection

Si environ 70 % de tous les cancers du col sont associés aux types 16 et 18 du VPH, 30 % sont liés à d’autres types oncogènes du VPH. Les chercheurs doivent maintenant déterminer si l’administration du vaccin quadrivalent protège les sujets vaccinés contre des maladies liées au VPH qui ne sont pas causées par les types 6, 11, 16 et 18. Bien qu’il soit encore trop tôt pour le confirmer, le Dr Brown se dit confiant.

Il y a environ 15 types oncogènes de VPH à risque élevé, dont les types 31, 33, 35, 39, 45, 51, 52, 56 et 66. Les types 16 et 31 sont très apparentés, tout comme les types 18 et 45. «Nous avons des raisons de croire que l’immunisation par des particules virales non infectantes (VLP, pour virus-like particles) de type 16 pourrait protéger contre le VPH de type 31 et que l’immunisation par des VLP de type 18 pourrait protéger contre le VPH de type 45», dit-il.

Les essais cliniques à long terme en cours sur le vaccin quadrivalent nous permettront probablement de répondre à cette question avec certitude. D’ici là, l’utilisation systématique du condom réduit le risque de transmission du VPH, bien que celui-ci ne puisse pas prévenir toutes les infections à VPH. La circoncision réduit aussi la transmission du VPH et du VIH de façon significative. (En Israël, par exemple, aucun cas de cancer du pénis n’a été signalé depuis 10 ans.)

La stratégie de l’abstinence ne semble pas fonctionner, poursuit le Dr Brown. Dans une étude où les femmes avaient fait «vœu de chasteté», la prévalence de l’infection à VPH était de 26,5 %. Chez celles dont l’engagement était chancelant, la prévalence de l’infection à VPH était de 28,5 %.

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