Comptes rendus

Évolution des critères d’utilisation des agents biologiques dans la colite ulcéreuse
Le rôle de l’inhibition de la pompe à protons dans divers contextes cliniques

Événements cardiovasculaires et dorsalgies en médecine de premier recours

Le présent compte rendu est fondé sur des données médicales présentées lors d'un congrès de médecine reconnu ou publiées dans une revue avec comité de lecture ou dans un commentaire signé par un professionnel de la santé reconnu. La matière abordée dans ce compte rendu s'adresse uniquement aux professionnels de la santé reconnus du Canada.

PRESSE PRIORITAIRE - Le 61e Cours de recyclage annuel pour les médecins de famille

Université McGill, Montréal (Québec) / 28 novembre-1er décembre 2010

Habitudes de vie : quelles sont les mesures efficaces?

La modification des habitudes de vie peut favoriser la bonne santé et la prévention des maladies, prolonger quelque peu la vie et se révéler plus efficace qu’une augmentation de la dose du traitement antihypertenseur ou hypolipidémiant, affirme le Dr Steven Grover, professeur titulaire de médecine et directeur du Programme d’amélioration de la santé cardiovasculaire de McGill. «Si vous voulez vraiment optimiser la prise en charge des facteurs de risque chez vos patients, regardez du côté du mode de vie plutôt que des médicaments et des doses que vous prescrivez», conseille-t-il.

Lorsque vient le temps d’adopter de nouvelles habitudes de vie et de les conserver, la motivation fait souvent défaut, reconnaît le Dr Grover. En effet, les études cliniques indiquent que le patient se décourage, car, dans bien des cas, les changements apportés ne donnent pas les résultats escomptés, ou leurs effets tardent à se manifester; par ailleurs, certaines recommandations reposent sur des fondements scientifiques plutôt bancals, fait-il observer. En outre, les conseils du médecin sont parfois difficiles à suivre, sans compter que devant la pléthore d’informations sur la santé et la nutrition véhiculées dans les médias, il se peut que le patient ne sache plus à quel saint se vouer.

Par exemple, un patient qui tient à manger sainement se fera dire d’y aller mollo sur les matières grasses, le sel, le sucre et les aliments à indice glycémique élevé, tout en consommant plus de fruits et de légumes ainsi que d’aliments contenant des antioxydants et des vitamines. «Pour ma part, je suis d’avis que l’idéal est de manger plus de fruits et de légumes, et d’éviter les aliments transformés […] ce n’est pas bien compliqué», soutient-il.

Cela dit, «faire un peu plus d’exercice et perdre quelques kilos, ça marche vraiment», concède le Dr Grover. Ainsi, chez les participants à l’étude DPP (Diabetes Prevention Program) qui avaient des antécédents familiaux de diabète ou une glycémie correspondant aux valeurs du prédiabète, une modification marquée du mode de vie amenant une perte de poids moyenne de 2 à 5 kilos a fait reculer de 60 % l’évolution vers le diabète par rapport au placebo. De plus, le suivi à 10 ans a révélé que les sujets qui avaient profité initialement de leurs nouvelles habitudes de vie en tiraient encore des avantages par rapport au groupe placebo. «Si vous parvenez ne serait-ce qu’à réduire l’incidence du diabète chez vos patients, vous faites déjà un grand pas dans la bonne direction [...] Le diabète est le facteur qui augmente le plus le risque cardiovasculaire, et ses complications sont très préoccupantes», fait remarquer le Dr Grover. Le patient auparavant sédentaire qui commence à faire quotidiennement des exercices d’intensité modérée peut abaisser sa tension artérielle (TA) d’environ 5-6 mmHg et son C-LDL, d’environ 5 %. Qui plus est, chez certains patients, l’exercice amène une hausse impressionnante du C-HDL, surtout s’il est pratiqué pendant au moins 18 mois. Lors d’une étude récente sur l’effet des exercices aérobiques et de l’entraînement contre résistance chez des sujets diabétiques, la glycémie à jeun et le taux d’hémoglobine A<sub>1c</sub> ont diminué à un point tel qu’on a pu alléger le traitement antidiabétique chez de nombreux patients.

Pour encourager les patients à commencer à faire de l’exercice et à persévérer, on peut leur parler des outils de motivation qu’on trouve dans Internet, par exemple sous forme de défis qu’ils pourront relever seuls ou en groupe. On peut s’attendre à un taux d’abandon de 30 à 50 %, quel que soit le programme d’exercices, mais «c’est encore mieux que les taux de cessation tabagique», fait remarquer le Dr Grover. «Si le patient abandonne, ce sera à nous de le remettre sur les rails lorsqu’il sera prêt.»

Prise en charge de l’hypertension : faits saillants

Le sodium a des effets tant aigus que chroniques sur les reins (rétention liquidienne, diminution de l’excrétion du sodium) et le réseau vasculaire (dysfonction endothéliale accrue et diminution de la vasodilatation). Il importe donc de restreindre l’apport de sodium, a fortiori en présence d’hypertension, affirme le Dr Luc Trudeau, professeur adjoint, Division de médecine interne, et cofondateur du Centre de prévention cardiovasculaire, Hôpital général juif. Cela dit, une réduction de l’apport de sodium peut, en abaissant la TA moyenne, être avantageuse même chez les personnes normotendues. Selon des études épidémiologiques, la consommation de plus de 6 g de sodium par jour est associée à une augmentation des maladies cardiovasculaires et de la mortalité globale. Le respect des nouvelles recommandations quant à l’apport de sodium devrait donc avoir des effets très favorables sur la TA et les événements cardiovasculaires. «Si les Canadiens consommaient 1800 mg de sodium de moins par jour, le nombre d’hypertendus au pays chuterait de un million», déclare le Dr Trudeau.

La plupart du temps, l’atteinte des cibles tensionnelles nécessite la prise de plusieurs médicaments. Dans les recommandations les plus récentes du Programme éducatif canadien sur l’hypertension (PECH), on peut lire que les associations médicamenteuses faiblement dosées sont souvent plus efficaces et mieux tolérées que le traitement séquentiel, ou «stratégie du pas à pas», qui consiste à n’ajouter un agent que lorsque l’agent précédent a été essayé à la dose maximale. Dans STITCH, un essai récent, le traitement d’association initial (inhibiteur de l’ECA ou antagoniste des récepteurs de l’angiotensine [ARA] et diurétique dans un comprimé à dose fixe) a permis à 85 % des patients de parvenir à l’objectif visé, soit une TA <140/90 mmHg. La baisse initiale moyenne de la TA dépassait 20 mmHg, «ce qui est énorme», commente le Dr Trudeau. Dans un autre essai sur le traitement d’association, ACCOMPLISH, des sujets exposés à un risque cardiovasculaire élevé ont subi 20 % moins d’événements lorsqu’ils recevaient un inhibiteur de l’ECA et un antagoniste calcique (dihydropyridine) plutôt qu’un inhibiteur de l’ECA et un diurétique. «Les personnes hypertendues atteintes de diabète ou de maladie coronarienne devraient idéalement recevoir cette association», indique-t-il.

Prise en charge efficace des lombalgies

L’hypertension est l’un des principaux motifs de consultation en médecine de premier recours, mais les dorsalgies suivent de près. Lors d’un symposium extraordinaire, des conférenciers du Groupe scoliose et colonne vertébrale de McGill ont proposé un algorithme d’évaluation des lombalgies (www.mcgill.ca/spineprogram/algorithms/). L’algorithme débute dans la salle d’attente, où le patient doit répondre à deux questionnaires, soit celui d’Oswestry et STartT Back, outils qui permettent de caractériser la douleur et l’invalidité. Il répondra à ces questionnaires lors de chaque visite de suivi. (On peut télécharger ces instruments à partir du site Web ci-dessus.)

L’anamnèse et l’examen physique révéleront des signes ou des symptômes évoquant soit une maladie grave qui impose une prise en charge urgente, soit un diagnostic telle une myélopathie ou une sténose du canal rachidien. En cas de douleurs non spécifiques, il suffit dans la plupart des cas de bien renseigner le patient (par exemple, en lui expliquant qu’il a intérêt à poursuivre ses activités plutôt que de rester au lit) et de lui prescrire un bref traitement par des analgésiques et, peut-être, des myorelaxants, fait observer le Dr Jean Ouellet, chirurgien et chef du Service de scoliose et du rachis, Hôpital général de Montréal. Si la douleur ne s’est pas atténuée après 4 à 6 semaines, on devra réévaluer le patient. À ce stade, des tests plus poussés, notamment des examens d’imagerie, pourraient être justifiés.

Le médecin devra également envisager la possibilité que la douleur ou l’invalidité chroniques soient alimentées par des facteurs psychologiques ou sociaux, explique le Dr Mohan Radhakrishna, chef du Service de médecine physique et de réadaptation, Centre universitaire de santé McGill. Si le patient est toujours en proie à ses dorsalgies des semaines ou des mois après sa première consultation, une équipe multidisciplinaire spécialisée dans le traitement des troubles rachidiens ou de la douleur devra peut-être prendre la relève.

La physiothérapie est une autre voie thérapeutique possible en cas de lombalgies. Cependant, peu de données probantes attestent les effets bénéfiques d’interventions précises chez certains patients ou dans des syndromes douloureux bien définis, reconnaît Richard Preuss, PhD, professeur adjoint, École de physiothérapie et d’ergothérapie, Université McGill. Cela dit, les programmes axés sur l’extension des muscles, le gainage ou les manipulations vertébrales sont, semble-t-il, les plus efficaces. Ces méthodes semblent porter fruit lorsque les mouvements d’extension ou les exercices d’amplitude entraînent une centralisation de la douleur, c’est-à-dire son déplacement vers la région médiane. Si l’état du patient ne s’est pas amélioré après six à dix séances, on devrait probablement mettre fin à la physiothérapie.

Résumé

Les problèmes cardiovasculaires (surtout l’hypertension) et les dorsalgies comptent au nombre des motifs de consultation les plus fréquents en médecine de premier recours. Une évaluation et une prise en charge efficaces – conformes aux guides de pratique et aux protocoles recommandés – jumelées à la communication des objectifs en des termes simples, sont autant de mesures qui peuvent faire gagner du temps et contribuer à satisfaire les besoins du patient.

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