Comptes rendus

Prévenir le cancer de la prostate et la progression de l’hypertrophie bénigne de la prostate
Vers une meilleure compréhension du glaucome

De nouvelles stratégies antirétrovirales élargissent l’éventail d’options de traitement

Le présent compte rendu est fondé sur des données médicales présentées lors d'un congrès de médecine reconnu ou publiées dans une revue avec comité de lecture ou dans un commentaire signé par un professionnel de la santé reconnu. La matière abordée dans ce compte rendu s'adresse uniquement aux professionnels de la santé reconnus du Canada.

La 46e Conférence interscience sur les agents antimicrobiens et la chimiothérapie

San Francisco, Californie / 27-30 septembre 2006

Lors d’un essai sur des schémas à une prise par jour dont les résultats ont été présentés à une séance de dernière heure, le fosamprénavir (FPV) potentialisé a été comparé à l’atazanavir (ATV) potentialisé, deux inhibiteurs de la protéase (IP) que le USA Panel de la Société internationale sur le SIDA vient d’ajouter à sa liste d’IP privilégiés (Hammer et al. JAMA 2006;296:827-43). L’ajout du FPV à cette liste découle principalement de l’essai KLEAN (Kaletra versus Lexiva with Epivir and Abacavir in ART-Naïve patients), lors duquel il a été démontré que le FPV à 700 mg potentialisé par le ritonavir à 100 mg et administré deux fois par jour (f.p.j.) offrait une efficacité et une innocuité comparables à celles du lopinavir à 400 mg potentialisé par le ritonavir à 100 mg et administré 2 f.p.j. (les deux IP étaient associés à l’abacavir [ABC] et à la lamivudine). Dans le cadre du nouvel essai, la comparaison portait sur deux schémas à une prise par jour : FPV à 1400 mg potentialisé par le ritonavir à 100 mg; et ATV à 300 mg potentialisé par le ritonavir à 100 mg; les deux IP étaient associés au ténofovir et à l’emtricitabine.

«Les deux schémas ont permis d’obtenir des taux élevés de suppression virologique», souligne la Dre Kimberly Smith, division des maladies infectieuses, Rush University Medical Center, Chicago, Illinois. Décrivant les résultats à 24 semaines dans la présentation de dernière heure de l’essai ALERT, elle a indiqué que le schéma à base de FPV/r 1 f.p.j. était au moins aussi sûr que le schéma à base d’ATV/r 1 f.p.j. En fait, les variations des taux lipidiques étaient semblables, mais le taux d’effets indésirables de classe 3 ou 4 était considérablement plus faible dans le groupe FPV/r (14 % vs 49 %), principalement en raison du taux assez élevé d’hyperbilirubinémie dans le groupe ATV/r.

La comparaison de l’efficacité du schéma à base de FPV/r 1 f.p.j. à celle du schéma à base d’ATV/r, le seul IP dont la posologie monoquotidienne est approuvée à l’heure actuelle, revêt une grande importance, car c’est la première fois que l’on évalue le FPV à une prise par jour potentialisé par seulement 100 mg de ritonavir, plutôt que par la dose habituelle de 200 mg. Le schéma FPV potentialisé par une dose plus faible de ritonavir – dont on prévoyait l’efficacité à la lumière des analyses des paramètres pharmacocinétiques – pourrait prévenir certains effets indésirables, dont l’hypercholestérolémie et la néphrotoxicité. La durée prévue de l’essai en cours est de 48 semaines, mais les données à 24 semaines semblent indiquer que ces deux schémas à une prise par jour sont à tout le moins équivalents.

Le paramètre principal de cette étude comparative, randomisée et sans insu – qui regroupe 106 patients jamais traités auparavant – est la proportion de patients qui auront une charge virale <50 copies de l’ARN du VIH/mL à 48 semaines. Selon les résultats à 24 semaines, cette proportion ne différait pas significativement selon que l’analyse était fondée sur le principe de l’intention de traiter (79 % pour le FPV vs 83 % pour l’ATV) ou qu’elle incluait uniquement les patients ayant terminé les 24 semaines (84 % vs 88 %, respectivement). Lorsque seuls les patients ayant terminé les 24 semaines étaient inclus, la proportion ayant une virémie <400 copies/mL était de 94 % dans les deux groupes. De même, il n’y avait aucune différence significative quant au rétablissement du système immunitaire, le nombre de cellules CD4+/mm³ se chiffrant à plus de 125 après 24 semaines dans les deux groupes. Le taux de cholestérol total a augmenté de seulement 0,43 mmol/L dans les deux groupes. Le taux de C-LDL a pour sa part augmenté de 0,10 mmol/L dans le groupe FPV et de 0,13 mmol/L dans le groupe ATV/r, alors que le C-HDL a augmenté de 0,08 mmol/L dans le groupe FPV/r et de 0,18 mmol/L dans le groupe ATV/r.

Faible taux d’échec virologique

Un échec virologique a été observé chez deux patients du groupe FPV/r et un patient du groupe ATV/r, mais l’infection était déjà résistante au départ chez l’un de ces patients du groupe FPV/r. Seulement sept sujets de cette étude avaient abandonné le traitement à 24 semaines; la majorité de ces patients avaient été perdus de vue ou avaient enfreint le protocole. L’étude est digne de mention pour la représentativité de son échantillon de patients. Plus de 50 % des patients étaient d’origine Afro-américaine ou hispanique, précise la Dre Smith. Au moment de la randomisation, l’âge médian était de 40 ans. Si elles se maintiennent à 48 semaines, l’efficacité et l’innocuité du schéma FPV/r 1 f.p.j. par rapport à celles du schéma ATV/r 1 f.p.j. plaideront fortement en faveur de l’inclusion de ce schéma dans la liste des schémas à base d’IP 1 f.p.j.

Ces résultats concordent avec ceux d’une étude randomisée préalable lors de laquelle un schéma à une prise par jour à base de FPV/r (ritonavir dosé à 200 mg) a été comparé à un schéma à deux prises par jour à base de nelfinavir. La suppression de la charge virale (seuils de <50 copies/mL ou de <400 copies/mL) a été légèrement meilleure dans le groupe FPV/r, mais la différence n’a pas atteint le seuil de signification statistique. Par contre, les échecs virologiques étaient beaucoup moins fréquents dans le groupe FPV/r.

«Si l’on se penche sur les études qui ont évalué des schémas à base d’IP administrés 1 f.p.j., les mutations conférant la résistance aux IP sont très peu fréquentes. Dans l’étude où l’on comparait le FPV au nelfinavir, des mutations de résistance aux IP ont été observées chez 8 % des patients recevant le nelfinavir 2 f.p.j. vs 0 % des patients recevant le FPV potentialisé 1 f.p.j.», souligne le Dr Eric Daar, chef, division du VIH, Harbor-UCLA Medical Center, Torrance, Californie. Lors de l’essai SOLO (Gathe et al. AIDS 2004;18:1529-37), ajoute-t-il, le taux d’échec virologique à 48 semaines se chiffrait à 17 % dans le groupe nelfinavir vs 7 % dans le groupe FPV/r.

Toujours dans l’essai SOLO, l’avantage du FPV par rapport au nelfinavir, l’un des IP les plus prescrits au moment de l’étude, tient probablement en partie au meilleur profil pharmacocinétique d’un IP potentialisé, qui est généralement associé à des concentrations minimales plus élevées et à une aire sous la courbe plus élevée par rapport à un IP non potentialisé.

Optimisation de la surveillance des concentrations sanguines

Le nombre croissant de laboratoires équipés pour surveiller les concentrations sanguines du traitement médicamenteux de façon fiable augmente les possibilités d’individualisation du traitement. «La mesure des concentrations sanguines ne sera peut-être jamais systématique, mais elle pourrait être très utile dans certains groupes de patients et pour certains agents si l’on souhaite s’assurer que les concentrations sont suffisantes ou qu’elles ne sont pas excessives», estime le Dr David Burger, Centre médical de l’Université Radboud, Nijmègue, Pays-Bas. Cette mesure est particulièrement intéressante chez les patients infectés par le VIH du fait que de nombreux antirétroviraux ont un indice thérapeutique assez étroit. Certes, on observe une variabilité considérable d’un patient à l’autre quant à la façon dont ces composés sont métabolisés, mais la réponse pharmacologique ne peut pas être mesurée autrement à court terme.

La mesure des concentrations sanguines permettrait d’utiliser certains schémas relativement moins puissants dans certaines populations choisies, car elle pourrait confirmer que les médicaments administrés sont présents en concentrations suffisantes. Par exemple, si un essai comparatif révélait qu’une triple association d’inhibiteurs nucléosidiques de la transcriptase inverse (INTI) est utile pour autant qu’elle soit utilisée à bon escient chez certains patients n’ayant jamais été traités, la recommandation actuelle voulant que l’on doive éviter une trithérapie d’INTI en première intention serait remise en question.

Triple association d’INTI

«Nos données plaident en faveur de l’utilisation de trois INTI chez certains patients, surtout ceux dont la charge virale initiale est < 100 000 copies de l’ARN du VIH/mL», affirme la Dre Princy N. Kumar, chef intérimaire, division des maladies infectieuses, Georgetown University Medical Center, Washington, DC.

L’étude ACTION, qui a été présentée par la Dre Kumar, regroupait 279 patients n’ayant jamais été traités. Ces patients étaient répartis dans 46 centres en Amérique du Nord et, après randomisation, ils recevaient 1 f.p.j. l’association ABC/lamivudine/zidovudine (ZDV) ou l’association ATV/lamivudine/ZDV. Selon les résultats, les deux schémas étaient comparables, sauf chez les patients dont la charge virale initiale était élevée.

Au terme de l’étude de 48 semaines, la proportion de patients ayant atteint une charge virale <50 copies/mL était de 62 % dans le groupe INTI vs 59 % dans le groupe ATV. Cependant, lorsque les patients étaient stratifiés en fonction de la charge virale initiale, les résultats divergeaient. Parmi les patients dont la virémie initiale était <100 000 copies/mL, 66 % de ceux qui recevaient trois INTI et 59 % de ceux qui recevaient le schéma à base d’ATV ont atteint une charge virale <50 copies/mL. En revanche, la proportion chutait à 39 % dans le groupe INTI et grimpait à 60,2 % dans le groupe ATV lorsque la charge virale initiale était >100 000 copies/mL. Bien que la triple association d’INTI ait «vraiment sous-performé» lorsque la charge virale initiale était élevée, l’efficacité comparable des deux schémas chez les patients dont la charge virale initiale était plutôt faible donne à penser que le schéma à base de trois INTI «demeure une option viable en première intention» dans un sous-groupe trié sur le volet. Pareille stratégie pourrait être particulièrement intéressante si l’on surveille de près les concentrations sanguines afin de s’assurer que la virémie est supprimée de façon appropriée.

Résumé

De nouvelles données ont jeté un éclairage nouveau sur le rôle relatif de diverses options thérapeutiques déjà à notre disposition pour le traitement de l’infection à VIH chez les patients qui n’ont encore jamais été traités. Les données à 24 semaines d’une comparaison directe entre un schéma à base de FPV/r et un schéma à base d’ATV/r, tous deux administrés 1 f.p.j., semblent indiquer que, selon toute vraisemblance, la liste des schémas à base d’IP à une prise par jour s’allongera. Par ailleurs, la comparaison directe d’un schéma à base de trois INTI et d’un schéma à base d’ATV, tous deux administrés 1 f.p.j., laisse entendre que l’individualisation du traitement est une possibilité. Chez certains patients, certains schémas moins puissants pourraient être particulièrement intéressants si l’on s’assure que les concentrations sanguines sont suffisantes.

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