Comptes rendus

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Le traitement antidiabétique agissant sur l’effet incrétine est associé à une amélioration fonctionnelle des cellules ß

Le présent compte rendu est fondé sur des données médicales présentées lors d'un congrès de médecine reconnu ou publiées dans une revue avec comité de lecture ou dans un commentaire signé par un professionnel de la santé reconnu. La matière abordée dans ce compte rendu s'adresse uniquement aux professionnels de la santé reconnus du Canada.

Les 68es Séances scientifiques de l’American Diabetes Association

San Francisco, Californie / 6-10 juin 2008

Une meilleure compréhension des systèmes de signalisation reliant l’intestin et le pancréas a permis la mise au point de deux classes pharmacologiques pour le traitement du diabète de type 2 (DT2). Les deux stimulent l’activité du GLP-1 (glucagon-like peptide-1), hormone intestinale qui potentialise la sécrétion d’insuline par la cellule ß. L’exénatide, analogue du GLP-1, a été le premier agent à viser cette cible, mais il doit être injecté, contrainte non négligeable aux premiers stades du DT2, lorsque l’insuline n’est pas encore nécessaire. La sitagliptine, première solution de rechange orale, inhibe la DPP-4 (dépeptidyl peptidase-4), enzyme qui dégrade rapidement le GLP-1. Les études ne laissent planer aucun doute quant à l’efficacité de ces deux types d’agents et à la pertinence de leur utilisation, mais de nouvelles données indiquant qu’ils exerceraient un effet protecteur sur la cellule ont redéfini leur place éventuelle dans l’algorithme de traitement.

«Nous avons maintenant le choix entre sept classes de médicaments lorsque la metformine seule ne fonctionne plus. Quel est le rôle [des inhibiteurs de la DPP-4] dans la pratique clinique? À en juger par les données actuelles, j’estime que la raison la plus convaincante est que l’association metformine/inhibiteur de la DPP-4 préserve les avantages de la metformine. De plus, les inhibiteurs de la DPP-4 n’entraînent pas d’hypoglycémie et ne devraient pas causer de gain pondéral», affirme le Dr Michael A. Nauck, Centre de diabète, Bad Lauterberg, Allemagne.

Ces données bonifient celles des études d’efficacité. Dans une étude de phase III où l’association sitagliptine/metformine était comparée à la metformine seule, 66 % des sujets sous traitement d’association ont atteint un taux d’HbA1C <7,0 % vs 38 % des sujets sous metformine seule (p<0,001). Dans une autre étude où la sitagliptine et le glipizide (sulfonylurée) étaient tous deux associés à la metformine, les taux moyens d’HbA1C reportés sur un graphique au fil du temps étaient essentiellement superposables; ils étaient toujours <7,0 % après 52 semaines dans les deux groupes, mais les sujets sous glipizide pesaient en moyenne 2,5 kg de plus que les sujets sous sitagliptine (p<0,001). En outre, le taux d’épisodes d’hypoglycémie (32 % vs 4,9 % respectivement; p<0,001) favorisait la sitagliptine.

Effets de l’inhibition de la DPP-4 sur la cellule ß

Ces taux d’efficacité sont bien sûr importants, mais l’effet éventuel des inhibiteurs de la DPP-4 sur la cellule ß pourrait l’être davantage au chapitre du contrôle glycémique à long terme, voire de l’issue clinique. Ces incrétinopotentiateurs et les sulfonylurées stimulent l’insulinosécrétion par les cellules ß de façon totalement différente. Si les sulfonylurées exercent une stimulation chronique, qui entraînerait l’épuisement des cellules ß selon certains chercheurs, les incrétinopotentiateurs exerceraient plutôt une stimulation physiologique, la sécrétion d’insuline étant alors glucodépendante. De plus en plus de données, dont celles présentées au congrès, semblent indiquer que les cellules ß répondraient mieux après un traitement par un inhibiteur de la DPP-4 d’une durée atteignant 24 semaines.

Une nouvelle analyse des études de phase III sur la sitagliptine – selon laquelle celle-ci améliorerait la capacité fonctionnelle des cellules ß mesurée par le modèle homéostatique d’évaluation des cellules ß (HOMA-ß), le ratio proinsuline:insuline et l’indice insulinogénique – a révélé que les améliorations étaient d’autant plus marquées que la dysfonction initiale des cellules ß était sévère, après prise en compte des taux initiaux d’HbA1C. Selon une autre analyse des études de phase III, l’association sitagliptine/metformine a augmenté la sensibilité statique et dynamique des cellules ß par rapport à la metformine seule. L’amélioration était encore plus marquée lorsque l’association metformine à 2000 mg/sitagliptine à 100 mg était comparée à l’association metformine à 1000 mg/sitagliptine à 100 mg.

Dans une autre étude, des patients se sont prêtés à des tests de tolérance au glucose avec prélèvements rapprochés pendant 54 semaines. On a observé une amélioration substantielle de la capacité fonctionnelle des cellules ß, telle que mesurée par le modèle HOMA-ß, sous l’effet de la sitagliptine seule et de la metformine seule, mais les améliorations étaient encore plus marquées sous l’effet du traitement d’association, lequel a aussi autorisé la baisse la plus prononcée du taux d’HbA1C (Figure 1).

Figure 1. Amélioration de la capacité fonctionnelle des cellules ß et du contrôle glycémique


Rôle du GLP-1

L’amélioration fonctionnelle des cellules ß sous l’effet de molécules agissant favorablement sur l’effet incrétine n’a rien d’étonnant. Plusieurs études ont montré que le GLP-1 intervient dans de nombreuses voies de signalisation essentielles à la physiologie des cellules ß. Le GLP-1 stimule la néogenèse des cellules ß à partir de cellules souches insulaires, stimule la réplication de cellules ß à partir de cellules ß adultes et diminue l’apoptose des cellules ß, explique le Dr Nauck. D’autres études ayant associé le GLP-1 à un pourcentage accru de cellules insulaires sécrétrices d’insuline ont porté à la fois sur des incrétinomimétiques et des inhibiteurs de la DPP-4. Les résultats sont intéressants en raison de ce qu’ils laissent entendre au sujet des traitements chroniques et du contrôle glycémique soutenu à long terme. «Si l’on tient compte des facteurs qui déterminent le nombre de cellules ß, la taille des cellules insulaires, la sensibilité au glucose et son amélioration, on obtient une masse de cellules ß qui sécrètent plus activement, ce que l’on peut mesurer et tester en clinique. Bref, on observe une influence positive du GLP-1 à tous ces niveaux», poursuit le Dr Nauck.

De plus, le GLP-1 semble directement lié ou sensible à d’autres systèmes de signalisation qui régissent la motricité gastrique, l’appétit et la synthèse hépatique de glucose. De plus en plus de données montrent que les inhibiteurs de la DPP-4 et les incrétinomimétiques potentialisent l’activation par le GLP-1 de circuits neuronaux intervenant dans ces processus physiologiques, souligne le Dr Daniel J. Drucker, directeur, Banting and Best Diabetes Centre, University of Toronto, Ontario, qui a par ailleurs cité des études ayant relié l’inhibition de la DPP-4 à une diminution de la sécrétion de glucagon, à la régularisation de la satiété et à la prolongation de la survie des cellules ß. À son avis, les inhibiteurs de la DPP-4 pourraient non seulement exercer des effets additifs, mais aussi des effets synergiques avec certains antidiabétiques qui stimulent la libération de GLP-1. «Certains médicaments utilisés pour traiter le DT2 – la metformine en est le parfait exemple – pourraient accroître le taux plasmatique de GLP-1, ce qui les rend intéressants pour l’association avec un inhibiteur de la DPP-4», fait valoir le Dr Drucker.

Des études sur plusieurs inhibiteurs de la DDP-4 en développement, dont la vildagliptine, l’alogliptine et la saxagliptine, évoquent la possibilité d’autres effets outre la stimulation des cellules ß par les incrétines. Lors d’une étude visant à élucider les mécanismes par lesquels la vildagliptine aplanit les fluctuations glycémiques post-prandiales, 18 diabétiques de type 2 ont reçu aléatoirement l’inhibiteur de la DPP-4 ou un placebo. Comme on s’y attendait, le traitement actif a réduit significativement les pics sanguins post-prandiaux, mais il a aussi retardé considérablement la vidange gastrique et supprimé la sécrétion de glucagon. Bien que la contribution relative de ces effets au contrôle glycémique indépendant de la stimulation des cellules ß soit encore à l’étude, les auteurs allèguent qu’ils contribuent probablement de façon appréciable à prévenir l’hyperglycémie post-prandiale.

Des données montrent qu’un contrôle glycémique plus conforme à la physiologie normale comme celui que procurent les inhibiteurs de la DPP-4 est cliniquement pertinent, tant sur le plan de l’efficacité que de l’innocuité. Lorsqu’on a évalué le risque d’hypoglycémie dans une étude de phase III où l’on comparait la sitagliptine et le glipizide en présence de metformine, la réduction du risque d’hypoglycémie sous sitagliptine était 11 fois plus marquée que sous glipizide chez les patients de <65 ans, mais 29 fois plus marquée chez ceux de >65 ans. Cette différence reflète la sensibilité plus prononcée des patients âgés à l’hypoglycémie, ce qui confère à la sitagliptine un avantage relatif qui croît avec l’âge.

«L’un des aspects fondamentaux de la physiologie des cellules insulaires est leur capacité à s’adapter à de nouvelles exigences métaboliques et à les compenser, explique le Dr Jack L. Leahy, chef, division d’endocrinologie, de diabète et de métabolisme, University of Vermont, Burlington. Le DT2 découle en partie d’une défaillance de ce système d’adaptation. La sécrétion d’insuline fait défaut avant même que la glycémie dépasse le seuil normal de tolérance au glucose. Le prédiabète se caractérise à la fois par une perte de la première phase de la sécrétion d’insuline en réponse au glucose et par une diminution de 40 % de la masse des cellules ß», ce qui nous amène à considérer de nouvelles stratégies comme les traitements ciblant l’effet incrétine.

Ce résultat est conforme à la théorie voulant que le déclin fonctionnel des cellules ß résulte de toute forme de stress, qu’il s’agisse de la progression du diabète, de la stimulation chronique par les sulfonylurées ou de l’âge. On se tourne vers les inhibiteurs de la DPP-4 non seulement parce qu’ils sont efficaces dans les essais cliniques, mais aussi parce qu’ils pourraient permettre de préserver les cellules ß.

Résumé

Dans le DT2, les agents ciblant l’effet incrétine reproduisent très bien la physiologie normale. Contrairement aux sulfonylurées, ces agents stimulent la sécrétion d’insuline en réponse aux repas et semblent préserver la capacité fonctionnelle des cellules ß. Leur effet sur des systèmes connexes de signalisation, comme la motricité gastrique, l’appétit et le métabolisme, pourrait aussi contribuer au contrôle glycémique induit par les incrétines. Comme ils préservent les cellules ß en partie, les agents commercialisés comme la sitagliptine, qui améliorent l’effet incrétine, sont considérés comme appropriés pour le traitement précoce, surtout en association avec la metformine.

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