Comptes rendus

Risque cardiovasculaire et facteurs de risque cardiométabolique dans la schizophrénie
Traitement ciblé dans le cancer du rein avancé : prolongation de la survie

Médecine transfusionnelle et chirurgie cardiaque : vers la mise sur pied d’un programme d’épargne sanguine

Le présent compte rendu est fondé sur des données médicales présentées lors d'un congrès de médecine reconnu ou publiées dans une revue avec comité de lecture ou dans un commentaire signé par un professionnel de la santé reconnu. La matière abordée dans ce compte rendu s'adresse uniquement aux professionnels de la santé reconnus du Canada.

12e Mise à jour annuelle sur la circulation extracorporelle

Whistler, Colombie-Britannique / 18-23 mars 2007

Environ 20 % des réserves de sang américaines servent à la chirurgie cardiaque, explique le Dr Bruce Spiess, professeur titulaire d’anesthésiologie et de médecine d’urgence, Virginia Commonwealth University, Richmond. «On estime qu’au moins 25 à 30 % de ce sang est utilisé en vain», note-t-il, et le pourcentage réel pourrait être bien plus élevé. Une part importante du sang transfusé sert à une proportion assez faible (environ 20 %) d’opérés cardiaques. Des efforts concertés pour réduire les transfusions dans ce groupe à risque élevé pourraient donc avoir des retombées substantielles sur l’utilisation globale de sang, dit-il. Il y a bien sûr de bonnes raisons d’éviter les transfusions de tous les dérivés sanguins dans la mesure du possible. Selon une base de données d’observation, les transfusions se soldent par de multiples issues défavorables, et plus un patient reçoit d’unités, plus le risque apparent est élevé.

Selon une étude récente chez des opérés en état critique à l’unité des soins intensifs (USI), entre une transfusion sur 73 et une transfusion sur 193 était associée à une atteinte pulmonaire aiguë transfusionnelle (TRALI, pour transfusion-related acute lung injury) (Rana et al. Transfusion 2006;46[9]:1478-83), et l’apparition d’une TRALI était associée à un taux de mortalité de 47 %. Chez ces mêmes patients, l’incidence des surcharges volémiques transfusionnelles (TACO, pour transfusion-associated circulatory overload) était de une pour 50 patients, et l’apparition d’une TACO était associée à un taux de mortalité de 20 %. Si ces chiffres reflètent la réalité de toutes les USI aux États-Unis, les TRALI et les TACO entraîneraient 25 000 à 50 000 décès par année, précise le Dr Spiess. Les transfusions comportent aussi un risque accru d’insuffisance ventriculaire, de fibrillation auriculaire péri-opératoire ainsi que de septicémie, de bactériémie et d’infection superficielle. Au sein d’un groupe de patients ayant subi des pontages aorto-coronariens, d’autres chercheurs ont observé que le taux de mortalité à 60 mois était deux fois plus élevé chez les transfusés (15 %) que chez les non-transfusés (7 %) (Engoren et al. Ann Thorac Surg 2002;74[4]:1180-6). Après soustraction des facteurs de comorbidité et d’autres facteurs de confusion, la transfusion demeurait associée à une augmentation de 70 % de la mortalité.

Chez un patient en état critique, il semble avantageux d’attendre que le taux d’hémoglobine chute sous 70 g/L avant d’amorcer une transfusion d’érythrocytes. Lors d’une étude publiée, le taux de mortalité globale à 30 jours était semblable chez les patients qui avaient été transfusés lorsque le taux d’hémoglobine avait chuté sous 70 g/L (et avait ensuite été maintenu entre 70 et 90 g/L) et chez ceux qui avaient été transfusés lorsqu’il avait chuté sous 100 g/L (et avait ensuite été maintenu entre 100 et 120 g/L) (Hébert et al. N Engl J Med 1999;340[6]:409-17). Chez les patients atteints d’une maladie cardiaque cliniquement importante, le taux de mortalité ne différait pas non plus d’un groupe à l’autre. Cependant, en présence d’une atteinte moins aiguë, le taux de mortalité était significativement plus faible chez les sujets du groupe stratégie restrictive et les sujets de moins de 55 ans. Le taux de mortalité intrahospitalière était aussi significativement plus faible dans le groupe stratégie restrictive. «Nous ne savons pas dans quelles proportions les transfusions sauvent des vies ou sont meurtrières, mais nous savons qu’elles coûtent cher, affirme le Dr Spiess. Si nous réduisions de moitié l’utilisation des réserves de sang en chirurgie cardiaque, la rareté et le coût [du sang] devraient changer à l’échelle mondiale.»

Les stratégies d’épargne sanguine peuvent diminuer notablement la quantité de sang requise à des fins chirurgicales, souligne le Dr Robert Higgins, professeur titulaire et chef, chirurgie cardiovasculaire et chirurgie thoracique, Rush University Medical Center, Chicago, Illinois. Ce centre a instauré un programme complet de gestion du sang en vertu duquel les besoins transfusionnels sont déterminés par certaines indications cliniques plutôt que par un seuil donné du taux d’hémoglobine ou de l’hématocrite. Selon ce programme, les transfusions de concentrés d’érythrocytes ou de sang autologue ne sont pas permises avant que l’hématocrite atteigne 17 % (20 % en présence d’antécédents d’atteinte carotidienne ou d’ischémie cérébrale transitoire). «Nous discutons de toutes les décisions d’utiliser un dérivé sanguin avec le médecin responsable, d’enchaîner le Dr Higgins, et les décisions ne dépendent d’une mesure unique du taux d’hémoglobine ou de l’hématocrite.»

Les chercheurs ont comparé le taux de transfusions sanguines et l’utilisation des ressources pour l’ensemble des interventions cardiaques chez l’adulte avant l’entrée en vigueur du programme complet d’épargne sanguine et plusieurs années plus tard. Ils ont constaté que la diminution des pertes de sang en chirurgie cardiaque s’était traduite par une diminution du coût, celui-ci passant d’environ 120 000 $ à 50 000 $. Selon une analyse de régression multiple de toutes les interventions cardiaques recensées dans la base de données de 1997 à 2000, la transfusion sanguine était la seule variable statistiquement importante à avoir des retombées sur la mortalité à 30 jours. «La mise en application d’un guide de pratique clinique qui modifie le seuil transfusionnel classique de 10 g/dL peut diminuer le taux de transfusions et l’utilisation des ressources, conclut le Dr Higgins, et on peut avoir recours, dans un contexte moderne de chirurgie cardiothoracique, à des stratégies d’épargne sanguine très bénéfiques pour les patients.»

Initiative ontarienne OnTrac

Depuis janvier 2002, l’Ontario souscrit à une initiative visant à réduire de 5 à 10 % l’utilisation des érythrocytes. Dans les 23 hôpitaux participant au projet OnTrac, on identifie systématiquement, avant l’intervention, les patients pouvant avoir besoin d’une transfusion, puis on corrige tous les facteurs contributifs sous-jacents éventuels pour réduire les besoins transfusionnels. Dix-huit mois après l’entrée en vigueur du programme, l’évaluation des besoins transfusionnels pour trois types de chirurgie (arthroplastie du genou, anévrisme aortique abdominal et pontages aorto-coronariens de novo) a objectivé une réduction d’environ 35 % des besoins transfusionnels pour les seuls pontages aorto-coronariens. «La diminution des transfusions de sang homologue a excédé de beaucoup la réduction escomptée de 5 à 10 % pour chacune de ces interventions», rapporte le Dr C. David Mazer, service d’anesthésie, St. Michael’s Hospital, Toronto, Ontario.

De même, entre 2005 et 2006, on a observé une diminution nette de l’utilisation des érythrocytes dans les hôpitaux du projet OnTrac, vs une augmentation nette dans les autres hôpitaux. La durée moyenne du séjour était aussi plus courte chez les patients n’ayant pas reçu de transfusion de sang homologue, et le risque d’infection postopératoire était aussi considérablement plus élevé chez les transfusés, surtout ceux qui avaient reçu au moins six unités de sang. Vu le coût de 400 $ l’unité de sang, la durée plus courte du séjour des patients non transfusés et la diminution subséquente du travail des laboratoires et des unités de soins infirmiers, le programme a permis à la province d’épargner près de 15 millions de dollars par année, «de sorte que le but est de continuer à financer ce programme et de l’appliquer à d’autres types d’interventions», note le Dr Mazer.

Celui-ci a aussi soupesé le pour et le contre des antifibrinolytiques, surtout l’aprotinine. Des études ont clairement montré que les antifibrinolytiques réduisent les besoins transfusionnels; ils sont d’ailleurs devenus la norme pour de nombreuses interventions cardiaques. Or, l’innocuité rénale de l’aprotinine soulève une certaine controverse. Lors d’une étude fondée sur la base de données d’un seul centre regroupant >10 000 patients, 449 patients ayant reçu l’aprotinine ont été appariés avec 449 patients ayant reçu l’acide tranexamique (Karkouti et al. Transfusion 2006;46[3]:327-38). Si les chercheurs n’ont noté aucune différence entre les deux groupes quant au taux de transfusions, ils ont rapporté un lien possible entre l’utilisation de l’aprotinine et l’insuffisance rénale. Selon une revue récente des données cliniques sur l’aprotinine par la Food and Drug Administration (FDA) aux États-Unis, cet agent serait doté d’un «profil d’innocuité acceptable». Cependant, la FDA recommande aux médecins de surveiller leurs patients de près et d’être à l’affût de signes de toxicité, surtout au niveau des reins, du cœur et du système nerveux central, et d’en restreindre l’utilisation aux cas où le bénéfice associé à la diminution des pertes de sang est essentiel au traitement.

Des données plus solides sur l’innocuité des antifibrinolytiques émaneront de BART (Blood Conservation Using Antifibrinolytics: Randomized Trial in High-risk Cardiac Surgery), étude multicentrique canadienne dans laquelle environ 3000 patients à risque élevé recevront aléatoirement de l’aprotinine, de l’acide tranexamique ou de l’acide epsilon-aminocaproïque. Selon les données colligées d’une deuxième analyse partielle de l’étude BART, 7,5 % des patients randomisés ont eu une hémorragie massive, 2,5 % ont eu besoin de transfusions massives et le taux de mortalité par hémorragie a atteint 0,4 %. Environ 7 % des sujets de la cohorte de BART ont dû être réopérés en raison de saignements postopératoires massifs. À ce jour, toujours dans l’étude BART, le taux d’AVC et le taux d’infarctus du myocarde (IM) sont légèrement supérieurs à 3 % tandis que le taux de mortalité globale est d’environ 4 %.

«Les antifibrinolytiques ne remplacent pas une bonne technique chirurgicale, prévient le Dr Mazer, mais l’étude nous apportera d’importantes nouvelles données sur l’innocuité et l’efficacité de [ces] médicaments.»

Traitement et prévention des pertes sanguines massives

Le facteur VIIa recombinant (rFVIIa) est un ajout potentiellement important à l’arsenal thérapeutique et, dans certains contextes, il peut servir à prévenir les pertes de sang massives. Cet agent hémostatique est actuellement indiqué pour le traitement ou la prévention des saignements associés à l’hémophilie avec inhibiteurs. «En chirurgie cardiaque, la plupart des anesthésiologistes ont déjà eu un patient qui a littéralement épuisé les réserves de sang en 24 heures», affirme la Dre Patricia Murphy, professeure agrégée d’anesthésiologie, Toronto General Hospital. Les mesures thérapeutiques standard en cas de saignements massifs après une intervention sous circulation extracorporelle (CEC) sont notamment la mesure des paramètres de la coagulation, la chirurgie, l’utilisation d’agents hémostatiques systémiques et la transfusion de sang et de dérivés sanguins. Cela dit, malgré un traitement optimal, une petite proportion de patients hémorragiques continue de saigner, avec les graves conséquences que l’on sait, ajoute-t-elle.

De nombreux cas présentés portaient sur l’utilisation du rFVIIa en chirurgie cardiaque. L’une des plus grandes séries est celle de Karkouti et al. (Transfusion 2005;45[1]:26-34). Chez les 51 premiers opérés cardiaques de cette série qui ont reçu le rFVIIa pour un saignement réfractaire, la perte de sang et l’utilisation de dérivés sanguins ont diminué considérablement après l’administration de 2,4 à 4,8 mg de rFVIIa. Lorsqu’on a comparé les issues défavorables chez ces 51 patients et 51 témoins hémorragiques appariés, elles étaient comparables dans les deux groupes, mais l’incidence de l’insuffisance rénale aiguë était plus élevée dans le groupe rFVIIa.

Lors d’une étude subséquente, on a comparé les taux – sans ajustement et avec ajustement en fonction du risque – d’issues défavorables chez 114 opérés cardiaques consécutifs qui avaient reçu le rFVIIa pour une perte sanguine excessive et réfractaire à ceux de 541 patients hémorragiques qui n’avaient pas reçu ce traitement (Karkouti et al. Can J Anaesth 2006;53[8]:802-9). Ces issues défavorables comprenaient la mort, les AVC, l’insuffisance rénale, les IM et les thromboses veineuses majeures. Avant l’administration du rFVIIa, le nombre médian d’unités de sang nécessaires était de huit. Les taux d’issues défavorables chez les patients traités tôt (au plus huit unités de sang) et tardivement (plus de huit unités de sang) étaient respectivement de 30 % et de 60 %. Chez les patients qui n’avaient pas reçu le rFVIIa, le taux était de 24 %. D’après un modèle d’ajustement du risque tenant compte du nombre total d’unités d’érythrocytes, de la durée de la CEC, des difficultés de sevrage, du sexe, du poids et de l’âge, le risque relatif approché (OR, pour odds ratio) non ajusté d’une issue défavorable était de 2,41 dans le groupe traité vs le groupe non traité, mais une fois soustraites ces variables de confusion, l’OR ajusté d’une issue défavorable était de 1,04 pour le groupe traité vs le groupe non traité. Au sein de la cohorte rFVIIa, l’OR ajusté d’une issue défavorable était plus faible dans le groupe de traitement précoce (OR 0,41, IC 0,18-0,92, p=0,03). De plus, souligne la Dre Murphy, l’OR ajusté d’une issue défavorable était environ 60 % plus faible chez les patients qui avaient reçu le rFVIIa tôt après l’intervention que chez ceux qui l’avaient reçu après une perte sanguine importante.

Ces résultats indiquent que si le rFVIIa est administré en dernier recours, il pourrait ne pas réduire la morbi-mortalité associée à une perte sanguine massive, estime la Dre Murphy. Par contre, «si l’on peut identifier les patients qui saigneront abondamment et si on leur administre ce médicament tôt, on pourrait alors observer un effet bénéfique. Ce sera à mon avis l’une des applications cliniques appropriées de cet agent.» Le rFVIIa pourrait aussi être utile chez les patients qui ont besoin d’une intervention cardiaque urgente et dont l’INR élevé doit être normalisé sans délai. Lors d’une petite série de 13 patients dont l’INR excédait 10, qui présentaient un saignement clinique ou qui avaient besoin d’un traitement interventionnel ou chirurgical, une faible dose de 15 à 20 µg/kg de rFVIIa a permis de rapidement neutraliser les effets de la warfarine et ramener l’INR à la normale. Les patients ont alors reçu un anticoagulant de nouveau et, dans cette série, l’utilisation du rFVIIa n’a pas augmenté le risque thrombotique.

Ces données préliminaires semblent indiquer que «le rFVIIa aurait peut-être un rôle à jouer en chirurgie cardiaque chez les patients sous warfarine devant être opérés d’urgence», fait remarquer la Dre Murphy. Quelques-uns de ses collègues ont aussi administré le rFVIIa à titre préventif à des témoins de Jéhovah lorsque la CEC était arrêtée s’ils estimaient que le patient était exposé à un risque accru de saignement du fait qu’il devait être réopéré, était sous anticoagulant ou était thrombopénique avant l’intervention, ou qu’il avait été longtemps sous CEC.

«Après un examen de la littérature, je ne pense pas que le rFVIIa doive être utilisé systématiquement en cas d’hémorragie massive. Il faut penser aux facteurs de risque d’événement thrombotique comme l’AVC, l’embolie pulmonaire ou la thrombose veineuse profonde, poursuit la Dre Murphy. Son utilisation doit donc être individualisée […] mais l’avenir du rFVIIa en tant qu’agent hémostatique universellement reconnu est prometteur.»

L’évaluation préliminaire des nouveaux antagonistes de la glycoprotéine IIb/IIIa donne à penser que les plaquettes seraient mieux protégées après une intervention cardiaque si elles étaient «paralysées» pendant l’intervention grâce à ces agents, après quoi leur fonctionnement normal serait rétabli, explique la Dre Linda Shore-Lesserson, chef, division d’anesthésiologie cardiothoracique, Montefiore Medical Center, Bronx, New York.

Résumé

La médecine transfusionnelle est encore loin d’être homogène, et des données plus solides s’imposent pour justifier la recommandation de certaines pratiques actuelles. Les membres de la Society of Thoracic Surgeons et de la Society of Cardiovascular Anesthesiologists estimaient néanmoins important de revoir les publications existantes afin de recommander une stratégie d’épargne sanguine raisonnable et de déterminer ce qui n’est pas raisonnable. Ces recommandations devraient être publiées sous peu. D’ici là, le point le plus important de ce document est l’instauration d’un programme d’épargne sanguine dans chaque établissement où se pratiquent des interventions cardiaques.

Questions et réponses

Les questions et réponses qui suivent sont tirées d’un entretien avec le Dr Keyvan Karkouti, professeur adjoint d’anesthésie et d’épidémiologie clinique, University of Toronto, Ontario.

Q : Théoriquement, l’administration du rFVIIa comporte un risque d’événement thrombotique, mais les événements thrombotiques n’ont pas été plus fréquents chez les patients cardiaques de votre série qui ont reçu le rFVIIa que chez les témoins appariés. Dans quelle mesure ce risque est-il réel en chirurgie cardiaque?

R : Comme tout autre agent hémostatique, le rFVIIa comporte un certain risque thrombotique. Dans d’autres groupes de patients, où l’on peut mieux juger du risque, il semble comporter un risque thrombotique, quoique non majeur. Selon d’autres données, ce risque est assez raisonnable en présence d’une hémorragie dont les complications sont bien pires que le risque thrombotique du médicament. Dans nos études, où nous avons tenu compte de tous les facteurs afin de voir si le risque thrombotique était accru, nous n’avons pas observé d’augmentation du risque, mais l’effectif n’était pas très vaste, de sorte que l’augmentation du risque thrombotique est une possibilité. Cela dit, tout semble indiquer que c’est un risque calculé, car les risques d’hémorragie massive sont assez importants.

Q : À votre avis, à quel moment le chirurgien devrait-il administrer du rFVIIa face à une hémorragie massive?

R : Plus on maîtrise le saignement rapidement, mieux c’est, car plus le patient perd de sang, plus il a besoin de dérivés sanguins et moins l’issue est favorable. Nous avons démontré que le pronostic s’assombrit nettement après une perte sanguine équivalant à une ou deux masses sanguines (cinq ou six unités d’érythrocytes), si bien que ce serait un seuil approprié pour intervenir. De même, en chirurgie cardiaque, l’expression systémique du facteur tissulaire semble fonction du temps, de sorte que si l’on attend plusieurs heures après l’intervention, le risque de complications thrombotiques est théoriquement plus élevé. Selon les lignes directrices de notre établissement, on doit d’abord retourner en chirurgie et corriger les anomalies de coagulation à l’aide de dérivés sanguins (et nous utilisons un antifibrinolytique chez chaque patient); si, après toutes ces étapes, le patient demeure hémorragique, il est recommandé d’envisager le rFVIIa, quoique le rapport risque:bénéfice doive être soupesé minutieusement chez chaque patient.

Q : A-t-on vraiment besoin de meilleurs agents hémostatiques en chirurgie cardiaque?

R : Absolument. Selon les données de sept hôpitaux canadiens, environ 10 à 15 % des patients perdent suffisamment de sang pour avoir besoin d’au moins cinq unités. Et nous savons qu’une perte de sang importante augmente le risque [de complications] et que le pronostic est beaucoup plus sombre chez les transfusés que chez les non-transfusés. Ce n’est qu’une observation, mais les hémorragies massives semblent moins fréquentes à l’USI depuis que nous utilisons le rFVIIa. Auparavant, les patients mouraient ou restaient très longtemps à l’USI à cause des complications de la perte de sang. La situation semble s’être améliorée, et nous pouvons au moins dire que les données à l’appui du bénéfice du rFVIIa – pour autant qu’il soit bien utilisé – sont de plus en plus solides. Cela dit, nous devons garder à l’esprit qu’on ne connaît pas encore son profil de risque parfaitement bien.

Nota : Au moment où le présent article a été mis sous presse, le facteur VIIa recombinant était indiqué, au Canada, pour le traitement des saignements associés à l’hémophilie A/B avec inhibiteurs du FVIII ou du FIX.

Commentaires

Nous vous serions reconnaissants de prendre 30 secondes pour nous aider à mieux comprendre vos besoins de formation.