Comptes rendus

Puissance, tolérabilité et simplicité : ingrédients clés du succès à long terme du traitement de l’infection à VIH
Mise en application de nouvelles stratégies dans le traitement de la leucémie lymphoïde chronique

Nouvelles données sur les retombées de la maîtrise de la MPOC et de l’asthme

Le présent compte rendu est fondé sur des données médicales présentées lors d'un congrès de médecine reconnu ou publiées dans une revue avec comité de lecture ou dans un commentaire signé par un professionnel de la santé reconnu. La matière abordée dans ce compte rendu s'adresse uniquement aux professionnels de la santé reconnus du Canada.

16e Congrès annuel de la European Respiratory Society

Munich, Allemagne / 2-6 septembre 2006

Dans l’asthme, comme dans la maladie pulmonaire obstructive chronique (MPOC), l’objectif immédiat d’un schéma thérapeutique efficace est de prévenir les exacerbations aiguës. L’atteinte de cet objectif a d’importantes retombées pour ce qui est de stopper la progression de la dysfonction bronchique, car la restriction aiguë des voies respiratoires et l’hyperréactivité bronchique sous-tendent la réponse inflammatoire et, en définitive, le remodelage des voies respiratoires. L’asthme et la MPOC sont deux maladies très différentes dont les signes physiopathologiques et les risques sont fondamentalement différents, mais les deux peuvent bénéficier d’un traitement par un corticostéroïde en inhalation (CSI) et un bêta-agoniste à longue durée d’action (BALA). Diverses études – dont plusieurs ont été publiées au cours des derniers mois – ont permis d’accumuler des données montrant que le traitement d’association par un CSI et un BALA autorise une maîtrise plus stricte que l’un ou l’autre agent administré seul chez les patients pour qui les deux traitements sont indiqués.

Stratégies d’association : retombées sur le pronostic

De l’avis du Dr Bo Lundbäck, unité de recherche sur la fonction pulmonaire et les allergies, Institut national de la médecine environnementale, Institut Karolinska, Stockholm, Suède, «les inhalateurs combinés contribuent à l’absence soutenue de symptômes et d’exacerbations. C’est la clé dans le traitement de l’asthme. Cela est important non seulement pour le bien-être du patient, mais aussi pour réduire le risque d’hyperréactivité et d’inflammation bronchiques, ce qui a d’importantes retombées sur le pronostic à long terme.»

Ses remarques concernaient surtout l’asthme, mais d’autres experts, dont le Dr Alvar Agusti, chef, section de pneumologie, Hospital Universitario Son Dureta, Palma de Marjorque, Espagne, ont tenu des propos similaires au sujet de la MPOC. La possibilité de mieux prévenir les exacerbations a non seulement des répercussions immédiates, car l’hospitalisation est alors évitée, mais elle pourrait aussi influer directement sur le pronostic à long terme. «De plus en plus de données montrent que le recours aux bronchodilatateurs pour maîtriser l’hyperinflation atténue la réponse inflammatoire et que l’utilisation de stéroïdes pour maîtriser l’inflammation semble réduire le risque d’hyperinflation. C’est pourquoi l’association de ces deux agents en un inhalateur unique est une option intéressante dans le traitement de la MPOC», explique le Dr Agusti.

Diverses études ayant mis en évidence un degré élevé d’efficacité et d’innocuité ont mené à la mise au point des deux inhalateurs associant un CSI et un BALA que l’on trouve actuellement sur le marché. L’un de ces dispositifs associe le budésonide, un CSI, au formotérol, un BALA, tandis que l’autre associe la fluticasone, un CSI, au salmétérol, un BALA. De nouvelles données, dont celles d’une analyse des deux inhalateurs pour la maîtrise de l’asthme, sont venues confirmer et amplifier les données montrant que ces dispositifs sont hautement efficaces et qu’ils peuvent offrir une protection contre la progression à long terme de l’asthme et de la MPOC. L’amélioration de la qualité de vie, résultant notamment du nombre moindre d’inhalateurs requis, représente un avantage indépendant d’une meilleure maîtrise de la maladie.

Prise en charge des exacerbations

Une étude comparative à double insu sur les deux dispositifs au sein d’une population d’asthmatiques pourrait être la plus notable des nouvelles études sur l’évaluation du rôle de ces dispositifs. L’étude visait non seulement à comparer les deux inhalateurs combinés actuellement sur le marché, mais aussi – ce qui est plus important encore – la stratégie consistant à utiliser un seul dispositif pour le traitement d’entretien de l’asthme et le traitement de secours. Dans cette étude, intitulée COMPASS (COMPArison versus higher fixed dose of Symbicort and Seretide), 3335 patients souffrant d’asthme modéré à sévère ont été randomisés dans l’un des trois groupes de traitement suivants : fluticasone/salmétérol à 250/50 µg 2 fois par jour (f.p.j.) plus terbutaline au besoin pour soulager les symptômes aigus; budésonide/formotérol à 320/9 µg 2 f.p.j. plus terbutaline au besoin; ou budésonide/formotérol à 160/4,5 µg plus, au besoin, la même association administrée au moyen du même dispositif pour soulager les symptômes aigus. Cette dernière méthode, qui a maintenant été testée dans une série d’études cliniques, est connue sous le nom de SMART (Symbicort for Maintenance And Reliever Therapy). Les patients ont été suivis pendant six mois.

«La diminution du nombre d’exacerbations sévères sous l’effet de la méthode SMART par rapport aux associations à doses fixes a atteint près de 40 %, et s’accompagnait d’une diminution de 40 % du nombre de jours où des stéroïdes oraux étaient nécessaires», indique le Dr Piotr Kuna, département de pneumologie et d’allergologie, École de médecine de Lódz, Pologne. «Les résultats de l’étude valident le concept SMART pour la maîtrise des symptômes persistants et des symptômes aigus. En tant que solution de rechange aux associations classiques à doses fixes d’un CSI et d’un BALA assorties d’un traitement de secours, cette méthode est simple, efficace et bien tolérée, sans oublier qu’elle offre un bon rapport coût-efficacité.»

Dans cette étude, un peu plus de 1100 patients ont été randomisés dans l’un des trois groupes de traitement. L’âge moyen des patients était de 38 ans, mais l’âge s’échelonnait de 12 à 83 ans. Le laps de temps médian écoulé depuis le diagnostic de l’asthme était de 10 ans. Au départ, le volume expiratoire maximal en une seconde (VEMS) était d’environ 73 % de la valeur théorique. Au cours de la période préliminaire de deux semaines qui a précédé la randomisation, les patients prenaient en moyenne 2,3 bouffées de bêta-agoniste à courte durée d’action (BACA) par jour.

Hospitalisations

Le nombre total d’exacerbations sévères – une exacerbation sévère se définissant par la nécessité d’une hospitalisation ou la prise de stéroïdes oraux pendant trois jours ou plus – était d’environ 200 dans le groupe fluticasone/salmétérol, de 170 dans le groupe budésonide/formotérol à doses fixes et de 125 dans le groupe SMART (Figure 1). La réduction relative du nombre d’exacerbations sévères était de 39 % dans le groupe SMART par comparaison au groupe fluticasone/salmétérol (p<0,001) et de 28 % par rapport au traitement budésonide/formotérol à doses fixes (p=0,0048). Des stéroïdes oraux ont dû être administrés pendant 618 jours dans le groupe SMART vs 1044 jours dans le groupe à doses fixes et 1132 jours dans le groupe fluticasone/salmétérol, ce qui représente une réduction de 45 % (seuil de signification statistique non rapporté) du nombre de jours sous stéroïdes oraux. En outre, la dose quotidienne moyenne de CSI en équivalents de béclométhasone était légèrement plus faible dans le groupe SMART que dans les autres groupes de traitement (753 µg/jour vs 1000 µg/jour pour la fluticasone et 1000 µg/jour pour l’association à doses fixes).

Figure 1. Exacerbations sévères sur une période de six mois


Certes, il n’y avait aucun groupe pour évaluer l’association fluticasone/salmétérol comme stratégie d’entretien et de secours, mais cette option doit être exclue d’office du fait de l’occupation prolongée des récepteurs bêta par le salmétérol. Le formotérol se caractérise par un début d’action assez rapide, mais aussi par une occupation des récepteurs de durée moindre. Cette occupation plus brève élimine le risque d’effets indésirables associés à l’action prolongée du récepteur bêta, alors que le début d’action plus rapide permet d’inclure le formotérol dans le traitement de secours si l’on explique aux patients qu’ils doivent prendre des bouffées supplémentaires dès l’apparition des symptômes d’une exacerbation. La différence entre les divers BALA quant au délai d’action a été objectivée par des études comparatives, dont celle de K. Richter et al. qui a été publiée dans le European Respiratory Journal (2002;19:865-71). Il est ressorti de cette étude que le formotérol procurait une bronchodilatation plus marquée que le salmétérol lors de chaque évaluation entre 5 et 60 minutes suivant l’administration, précise le Dr Peter J. Barnes, département de médecine thoracique, National Heart and Lung Institute, Imperial College, Londres, Royaume-Uni. Globalement, le salmétérol commence à agir de 20 à 30 minutes plus tard que le formotérol, ce qui exclut son utilisation comme traitement de secours, ajoute-t-il.

«Grâce à son profil pharmacocinétique, le formotérol peut être utilisé de diverses façons, notamment en tant que traitement de secours. Cette différence [par rapport aux autres BALA] est critique. Le salmétérol ne pourrait jamais être administré au besoin en raison du risque inacceptable d’effets indésirables cumulatifs», souligne le Dr Barnes.

Enquête INSPIRE

On sait depuis longtemps qu’une maîtrise plus stricte des symptômes de l’asthme est un objectif crucial si l’on aspire à prévenir les exacerbations qui nécessitent des visites aux urgences ou la prise de stéroïdes oraux et à prévenir la progression de la maladie qui, croit-on, serait associée à des exacerbations fréquentes. Une vaste enquête intitulée INSPIRE (INternational aSthma Patient Insight Research) a étayé l’hypothèse voulant que les patients soient capables d’ajuster leur traitement d’entretien en réponse aux fluctuations de l’activité de la maladie et qu’ils sont prêts à le faire. Lors de l’enquête INSPIRE qui portait sur 3415 patients répartis dans 11 pays, l’intervalle moyen entre les signes d’appel d’une exacerbation et les symptômes paroxystiques a été estimé à 5,1 jours, ce qui représente une période assez longue pour permettre aux patients de modifier leur schéma à temps pour reprendre le dessus sur la maladie sans dépendance excessive et souvent inefficace aux BACA. L’enquête a aussi révélé que 88 % des patients avaient confiance en leur capacité de traiter leur asthme s’ils avaient en main un plan de traitement approprié.

«Les patients reconnaissent les premiers signes d’une exacerbation, et ils ont confiance en leur capacité de traiter leurs symptômes. L’ennui, c’est qu’ils optent pour les mauvais médicaments», indique le Dr Martyn R. Partridge, département de pneumologie, Charing Cross Hospital, Londres, Royaume-Uni. Faisant un survol des résultats de l’enquête INSPIRE, le Dr Partridge a expliqué que même si les patients reconnaissent les signes avant-coureurs d’une exacerbation imminente, leur réaction est presque toujours d’augmenter la dose du BACA plutôt que d’augmenter celle du traitement d’entretien. Par exemple, poursuit-il, les patients modifient peu la dose de leur CSI pour prévenir une exacerbation.

L’enquête INSPIRE incluait des participants du Canada, où l’on a effectué une étude récente pour évaluer la méthode SMART comme solution de rechange à la méthode classique pour améliorer la maîtrise clinique de la maladie. Présentée par le Dr Malcolm Sears, département de médecine, McMaster University, Hamilton, Ontario, l’étude portait sur 1538 patients randomisés dans deux groupes : SMART (budésonide/formotérol à raison de 160/4,5 µg 2 f.pj. plus bouffées supplémentaires au besoin) ou pratique optimale classique, qui permettait au médecin de choisir une stratégie, incluant l’association budésonide/formotérol à doses fixes. Les résultats ont été comparés sur une période de six mois.

Moins de stéroïdes pour une meilleure maîtrise

«Comparativement à la pratique optimale classique dans le traitement de l’asthme persistant, la méthode SMART a été associée à une maîtrise clinique similaire ou meilleure, mais à une utilisation significativement moindre de médicaments de secours [p=0,0036] et à une dose totale de CSI significativement moins élevée [p<0,0001], précise le Dr Sears. La diminution de 43 % des hospitalisations ou des visites aux urgences a presque atteint le seuil de signification statistique [p=0,07].» Par ailleurs, note-t-il, l’analyse des coûts a révélé que le coût total de la prise en charge était 23 % moins élevé (p<0,0001) dans le groupe SMART.

Figure 2. Jours cu
n de stéroïdes oraux

<img419|center>

Dans la MPOC, nous avons aussi de nouvelles données qui appuient l’utilisation d’un traitement d’association par un CSI et un BALA, et ces données font ressortir un effet bénéfique objectif sur la fonction pulmonaire à long terme. La plus connue de ces études présentées au congrès de l’ERS est TORCH (Towards a Revolution in COPD Health). Lors de l’étude TORCH, 6112 patients ont été randomisés dans l’un des quatre groupes suivants : fluticasone à 500 µg 2 f.p.j.; salmétérol à 50 µg 2 f.p.j.; fluticasone/salmétérol à 500/50 µg 2 f.p.j.; ou un placebo. Le paramètre principal de l’étude, qui a été évalué à trois ans, était la mortalité toutes causes confondues.

Comme le souligne le Dr Peter Calverley, service de médecine, Hôpital universitaire Aintree, Clinical Sciences Centre, Liverpool, Royaume-Uni, «l’association à doses fixes a réduit de 17,5 % le risque de mortalité à n’importe quel moment au cours des trois années par rapport à un placebo (p=0,052), ce qui représente une réduction du risque absolu de 2,6 %. La mortalité ne différait pas de manière significative dans les groupes recevant le salmétérol ou la fluticasone seule par rapport à un placebo.»

La rapidité d’action est cruciale

Une étude similaire n’a pas encore été réalisée sur un traitement d’association budésonide/formotérol à doses fixes, mais le début d’action rapide du formotérol par rapport au salmétérol pourrait permettre de tirer avantage de ces bienfaits. Dans le cadre d’un essai croisé comparatif avec placebo qui a été effectué chez 88 patients souffrant de MPOC modérée à sévère et qui, après randomisation, ont reçu des doses uniques de fluticasone/salmétérol, de budésonide/formotérol, de salbutamol (bronchodilatateur à action rapide) ou d’un placebo, l’effet bronchodilatateur de l’association budésonide/formotérol était plus rapide que celui de l’association fluticasone/salmétérol. L’effet était à peu près le même que celui du salbutamol. Tous les traitements évalués ont été plus efficaces que le placebo.

«L’effet bronchodilatateur rapide pourrait procurer une meilleure maîtrise de la maladie et améliorer l’observance du traitement», affirme la Dre Anne Lindberg, service de médecine, Hôpital central Sunderby, Luleå, Suède. Commentant ces données, le Dr Partridge a tiré une conclusion similaire : «La rapidité d’action est aussi importante dans la MPOC que dans l’asthme, surtout le matin lorsque les patients ont souvent besoin d’un effet bronchodilatateur rapide.»

En quête d’une synergie thérapeutique

Tant dans la MPOC que dans l’asthme, nous disposons de données préliminaires montrant que l’administration simultanée d’un CSI et d’un BALA se traduit par des bienfaits additifs plus marqués, voire une synergie, par rapport à l’administration de ces composés un à un. Cependant, on soupçonne que la contribution relative des deux agents diffère d’une maladie à l’autre. Dans l’asthme, on considère que la stratégie de maîtrise de l’inflammation repose sur le CSI, tandis que le BALA prévient la bronchorestriction, composante majeure de la réponse inflammatoire. Dans la MPOC, le BALA pourrait jouer un rôle plus important en prévenant les événements qui provoquent l’aggravation de l’inflammation, comme la dyspnée et les échanges gazeux anormaux, alors que le CSI jouerait un rôle plus secondaire dans la maîtrise du processus inflammatoire.

«Les deux composantes semblent importantes dans les deux maladies, mais leur contribution relative à la maîtrise de la maladie diffère», fait valoir le Dr Eric Bateman, professeur titulaire de pneumologie, University of Cape Town, Afrique du Sud. «Dans les deux cas, cependant, je crois que les médicaments agissent mieux quand ils sont administrés ensemble que quand ils sont administrés séparément à des patients chez qui les deux agents sont indiqués.»

Compte tenu des données montrant que les inhalateurs à dose unique pourraient conférer une meilleure protection contre le remodelage pulmonaire dans l’asthme et la MPOC, ces médicaments pourraient être nommés spécifiquement dans les lignes directrices futures comme moyen possible pour obtenir une maîtrise plus stricte. Le Dr Bateman, dont les propos étaient axés sur l’asthme, estime que les données récentes sur le traitement d’association «remettent les modalités de traitement classiques en question. Il ressort des nouvelles données qu’un traitement soutenu pourrait procurer une meilleure maîtrise, ce qui a des retombées sur le pronostic à long terme.»

Résumé

L’association à doses fixes d’un CSI et d’un BALA semble représenter un progrès de taille dans les options à notre disposition pour la maîtrise à long terme de l’asthme et de la MPOC. Un inhalateur unique est évidemment plus commode que de multiples inhalateurs dans le cadre d’un plan de traitement, mais au-delà de cette considération, les nouvelles données laissent entendre que ces inhalateurs combinés pourraient améliorer les résultats, notamment en réduisant la fréquence des exacerbations sévères dans l’asthme et en réduisant la mortalité par MPOC. Du fait des différences dans les composés qu’ils renferment, les inhalateurs combinés comportant une association à doses fixes ne semblent pas interchangeables. Dans l’asthme, plusieurs études présentées au congrès de l’ERS de cette année ont confirmé l’efficacité et l’innocuité de l’association budésonide/formotérol en inhalateur comme stratégie de secours et d’entretien.

Commentaires

Nous vous serions reconnaissants de prendre 30 secondes pour nous aider à mieux comprendre vos besoins de formation.