Comptes rendus

Déjouer la dihydrotestostérone dans la prévention du cancer de la prostate
Nouvelles données et stratégies de traitement dans les affections prostatiques

Optimisation du traitement des maladies respiratoires pour un bassin de patients toujours plus nombreux

Le présent compte rendu est fondé sur des données médicales présentées lors d'un congrès de médecine reconnu ou publiées dans une revue avec comité de lecture ou dans un commentaire signé par un professionnel de la santé reconnu. La matière abordée dans ce compte rendu s'adresse uniquement aux professionnels de la santé reconnus du Canada.

102e Conférence internationale de l’American Thoracic Society

San Diego, Californie / 19-24 mai 2006

La maladie pulmonaire obstructive chronique (MPOC) vient au quatrième rang des causes de mortalité aux États-Unis; elle a été responsable d’environ 119 000 décès en 2000, et on estime qu’elle coûte plus de 20 milliards de dollars au système de santé (Urbano et al. J Manag Care Pharm 2005;11:S2-S13). L’incidence de la MPOC étant souvent liée au tabac, on dit de cette maladie qu’elle est courante, mais qu’on peut souvent la prévenir. À l’échelle mondiale, avec le cancer et les maladies cardiaques, la MPOC demeure l’une des 10 premières causes de mortalité. Contrairement à de nombreuses autres maladies, par contre, les taux de MPOC sont à la hausse (Edwards et al. Wisconsin Medical Journal 2005;104:50-4), et de nouveaux traitements s’imposent pour traiter cette population toujours plus nombreuse. De l’avis du Dr Bartolome Celli, chef, division de la pneumologie, des soins intensifs et de la médecine du sommeil, Caritas St. Elizabeth’s Medical Center, Boston, Massachusetts, et professeur titulaire de médecine, Tufts University School of Medicine, «la prévalence de la MPOC demeure un problème majeur».

Plusieurs initiatives mondiales ont été mises sur pied pour mieux combattre la MPOC. L’une d’elles est la rédaction des lignes directrices de la GOLD (Global Initiative for Chronic Obstructive Lung Disease) qui proposent les objectifs suivants :

• recommander des stratégies efficaces de prise en charge et de prévention de la MPOC dans tous les pays;

• sensibiliser le corps médical, les autorités sanitaires et le grand public à la MPOC;

• diminuer la morbidité et la mortalité qui découlent de la MPOC;

• promouvoir la recherche sur les raisons de la prévalence croissante de la MPOC, au besoin en explorant la possibilité d’un lien avec l’environnement;

• mettre sur pied des programmes de prévention efficaces. Traitements d’association

Le sevrage du tabac est bien sûr essentiel, mais l’oxygénothérapie de longue durée à domicile et la chirurgie de réduction du volume pulmonaire sont des stratégies qui se sont révélées efficaces pour prolonger la survie des patients atteints de MPOC. De nouveaux agents prometteurs, moins invasifs, pointent à l’horizon.

Les bronchodilatateurs de la classe des bêta2-agonistes à longue durée d’action (LABA) comme le formotérol et le salmétérol, et les corticostéroïdes en inhalation (CSI) qui servent d’anti-inflammatoires comme le budésonide et le propionate de fluticasone, sont des stratégies thérapeutiques possibles pour réduire les exacerbations symptomatiques associées à la MPOC et améliorer l’état de santé.

Le Dr Peter M. Calverley, School of Clinical Sciences, University Hospital Aintree, Liverpool, Royaume-Uni, a présenté quelques données parmi les plus récentes de l’étude TORCH (Towards a Revolution in COPD Health). Afin d’évaluer les effets des nouvelles modalités de traitement pour la MPOC, «nous avions besoin d’un essai comparatif, prospectif, randomisé et à double insu», affirme le Dr Calverley. L’objectif premier de l’étude était d’«évaluer les effets de l’association salmétérol/propionate de fluticasone [ASF] et ceux d’un placebo sur la mortalité toutes causes confondues pendant trois ans chez des patients souffrant de MPOC modérée à sévère», explique-t-il. Les paramètres d’évaluation de l’innocuité étaient, entre autres, les effets indésirables. Les exacerbations de la MPOC se caractérisent généralement par une détérioration de l’état clinique causée par l’aggravation des symptômes respiratoires comme la toux, la respiration sifflante et la dyspnée qui peuvent nécessiter une intervention du médecin.

Cette étude internationale regroupait 450 centres répartis dans 42 pays. Après randomisation, 6184 patients ont reçu pendant trois ans l’un des quatre traitements expérimentaux suivants deux fois par jour (b.i.d.) : ASF (50/500 µg; n=1546); propionate de fluticasone (500 µg, n=1551); salmétérol (50 µg; n=1542); ou un placebo (n=1545).

Les chercheurs ont constaté une réduction de 17,5 % du risque de mortalité pendant le suivi de trois ans de l’étude chez les patients qui recevaient l’ASF par rapport à ceux qui recevaient un placebo. En termes absolus, la mortalité avait baissé de 2,6 % après trois ans (ASF vs placebo). Le Dr Calverley fait aussi remarquer que, sur le plan de la mortalité (paramètre principal), la valeur p corrigée de la différence en faveur de l’ASF, par rapport au placebo, était égale à 0,052 lorsque les résultats de l’analyse partielle étaient pris en compte.

Dans le cadre d’autres études sur les traitements d’association, le Dr Calverley et ses collaborateurs avaient déjà rapporté que la fonction pulmonaire des patients atteints de MPOC pouvait s’améliorer rapidement sous l’effet des corticostéroïdes oraux et des bronchodilatateurs. Dans une étude portant sur 1022 patients, les chercheurs ont montré que le traitement d’association (BUD/FORM, pour budésonide/formotérol) avait permis de retarder la première exacerbation, de réduire le nombre d’exacerbations et de maintenir un VEMS plus élevé (Calverley et al. Eur Respir J 2003;22:912-9). Ce traitement d’association a été plus efficace que chaque agent administré séparément pour stabiliser la fonction pulmonaire.

Le Dr Derk Bathoorn, service de pneumologie, Centre médical universitaire de Groningue, Pays-Bas, et son équipe ont comparé les effets du traitement BUD/FORM à ceux d’un placebo sur l’éosinophilie des expectorations induites pendant les exacerbations chez des patients souffrant de MPOC légère à modérée. Les paramètres secondaires de l’étude étaient le VEMS et les symptômes connexes. Les chercheurs ont émis l’hypothèse voulant que les CSI entraînent moins d’effets indésirables systémiques que les préparations orales.

L’étude portait sur une cohorte de 45 patients (37 femmes, 8 hommes; 21 fumeurs, 24 ex-fumeurs; âge médian de 65 ans). Les patients ont reçu l’association BUD/FORM (320 µg/9 µg 4 fois par jour), la prednisone (30 mg/jour) ou un placebo pendant 14 jours dans le cadre de cet essai randomisé, à double insu et à double placebo. Le pourcentage d’éosinophiles dans les expectorations induites était comparé au départ et au terme du traitement.

Les chercheurs ont constaté des réductions significatives de l’éosinophilie des expectorations sous l’effet de l’association BUD/FORM (p=0,01) et de la prednisone (p=0,01) par comparaison au placebo (variations moyennes : -1,5 %, -1,1 % et -0,2 %, respectivement). En outre, on a observé une diminution significative de l’ensemble des symptômes sous l’effet des deux traitements – BUD/FORM (p£0,01) et la prednisone (p£0,05) – par comparaison au placebo. Les variations du VEMS mesuré à deux semaines – 125 mL dans le groupe BUD/FORM et 27 mL dans le groupe prednisone – ne représentaient pas une amélioration significative par rapport au placebo (43 mL). Les chercheurs ont résumé leurs conclusions dans les termes suivants : «Nous avons constaté une diminution significative de l’inflammation et des symptômes sous l’effet de l’association BUD/FORM, ce qui donne à penser que les exacerbations de la MPOC légère à modérée pourraient être traitées par l’association BUD/FORM fortement dosée.»

Conditions réelles

L’utilité de l’association d’un CSI et d’un LABA a été soulignée dans d’autres allocutions présentées au congrès. Le Dr Paul Van den Brande, service de pneumologie, Hôpital Sint-Maarten, Duffel, Belgique, et ses collaborateurs ont présenté les résultats de leur recherche sur le bien-être des patients atteints de MPOC qui avaient reçu l’association BUD/FORM b.i.d. pendant trois mois. Les patients ont été suivis dans le cadre du programme iPEP (InPractice Evaluation Program). Dans la pratique quotidienne, l’observance est parfois moins bonne que dans les essais cliniques, et c’est là une difficulté importante. Les chercheurs ont émis l’hypothèse selon laquelle l’instrument iPEP leur permettrait de mieux reproduire les conditions réelles. En outre, on a demandé aux patients de remplir un questionnaire clinique sur la MPOC (CCQ, pour Clinical COPD Questionnaire) au début et au terme de l’étude. Le CCQ mesure la sévérité des symptômes, la capacité fonctionnelle et l’état mental; un score de 0 indique l’absence de symptômes, tandis qu’un score de 6 indique la présence maximale de symptômes.

Des 161 patients qui ont terminé l’étude, 34 % fumaient. La majorité des patients ont ajouté l’association BUD/FORM à leur traitement en cours, qui se composait par exemple de bêta2-agonistes à courte durée d’action (SABA) (36 %), d’anticholinergiques (36 %) ou de théophylline (14 %). Par comparaison au score initial, le score au CCQ s’était amélioré significativement après le traitement par l’association BUD/FORM. Au départ, avant le traitement donc, le score total médian au CCQ était de 2,9 (0,8 à 4,9) chez les fumeurs et de 2,2 chez les ex-fumeurs (0,2 à 4,4; p=0,002). Après le traitement par l’association BUD/FORM, le score au CCQ était de 2,1 chez les fumeurs (0,5 à 5,5; p<0,0001) et de 1,5 chez les ex-fumeurs (0,1 à 3,6; p<0,0001). Une variation ³0,4 dans le score au CCQ est considérée comme cliniquement significative.

Le Dr Van den Brande et son équipe ont conclu que le recours à l’association BUD/FORM avait amélioré significativement la vie quotidienne des patients souffrant de MPOC et que les résultats étaient indépendants des habitudes liées au tabac. «L’utilisation de l’association BUD/FORM dans des conditions réelles améliore l’état de santé des patients atteints de MPOC, qu’ils fument ou non», de noter les chercheurs.

La maîtrise de l’asthme, une absolue nécessité

D’après la Dre Sally Wenzel, professeure titulaire, division de pneumologie et de médecine intensive, University of Colorado Health Sciences Center, Denver, nous avons besoin de diverses options thérapeutiques pour l’asthme, et le traitement d’association est globalement la démarche la plus efficace. «Le recours au formotérol en plus d’un CSI offre une flexibilité assez impressionnante sur le plan de l’administration, la raison étant que le formotérol est en fait un bronchodilatateur à action rapide», explique la Dre Wenzel.

Citant les plus récentes lignes directrices de la Global Initiative for Asthma (GINA), le Dr Paul O’Byrne, division de pneumologie, et directeur de médecine, McMaster University Health Sciences Centre, Hamilton, Ontario, insiste sur «la nécessité d’une surveillance étroite du traitement et de l’administration d’un traitement anti-inflammatoire chez les patients souffrant d’asthme chronique. Cela dit, il estime que l’on doit envisager le traitement d’association dès que les stéroïdes faiblement dosés ne suffisent plus. L’association devrait idéalement comporter un CSI et un LABA.»

À l’instar des lignes directrices de la GOLD dans le traitement de la MPOC, celles de la GINA visent les objectifs suivants :

• déployer des efforts à l’échelle internationale, notamment pour sensibiliser la population à l’asthme et à ses conséquences pour la santé publique;

• tenter de cerner les raisons qui sous-tendent la prévalence à la hausse de l’asthme;

• promouvoir l’étude des liens entre l’asthme et l’environnement;

• diminuer la morbidité et la mortalité qui découlent de l’asthme;

• améliorer la prise en charge de l’asthme de même que l’accès à des traitements efficaces de l’asthme.

Le Dr O’Byrne a présenté les résultats d’études pivots qui visaient à évaluer le recours au traitement d’association pour la maîtrise de l’asthme. L’une de ces études – OPTIMA – portait sur l’asthme chronique léger. Dans cette étude, le formotérol, un LABA, a été ajouté à un CSI faiblement dosé, le budésonide. L’étude regroupait près de 2000 patients stratifiés d’après leur utilisation antérieure d’un corticostéroïde. L’étude a révélé que, chez les patients qui n’avaient jamais pris de corticostéroïde, le budésonide en inhalation administré à faible dose en monothérapie avait réduit les exacerbations sévères et amélioré la maîtrise de l’asthme, alors que chez les patients qui recevaient déjà un CSI, il était plus efficace d’ajouter du formotérol que d’augmenter la dose du corticostéroïde, voire de la doubler (O’Byrne et al. Am J Respir Crit Care Med 2001;164:1392-7).

Une autre étude citée par le Dr O’Byrne a démontré de quelle façon on pouvait améliorer la maîtrise de l’asthme chez les patients recevant une faible dose d’entretien de l’association BUD/FORM en remplaçant le SABA par une augmentation de la dose de l’association BUD/FORM au besoin pour soulager les symptômes rapidement et diminuer les exacerbations. Dans le cadre de cette étude randomisée, à double insu et à groupes parallèles qui regroupait 2760 patients, les chercheurs ont constaté que l’association BUD/FORM pour le traitement d’entretien et le soulagement des symptômes permettait de prolonger le délai d’apparition de la première, de la deuxième et de la troisième exacerbation nécessitant une intervention médicale (p<0,001), de réduire le taux d’exacerbations sévères et d’atténuer les symptômes (O’Byrne et al. Am J Respir Crit Care Med 2005;171:129-36).

«Les données sont très concluantes, et il ne fait aucun doute que l’association est la démarche thérapeutique la plus efficace», fait valoir le Dr O’Byrne.

En fait, l’association BUD/FORM s’est révélée plus efficace que chacune de ses composantes pour le traitement de secours de l’asthme. Une étude présentée par la Dre Mylinh Duong, McMaster University, Hamilton, Ontario, et ses collègues, visait à évaluer les effets de l’association BUD/FORM en inhalateur pour améliorer la maîtrise de l’asthme et diminuer les exacerbations lorsque l’association était utilisée comme traitement de secours. Le traitement d’association a été comparé à chacune de ses composantes en fonction de plusieurs variables, dont l’allergie respiratoire tardive (ART) en réponse à un allergène. Dans cette étude croisée, randomisée et à double insu, 15 patients ont reçu une dose unique de l’association BUD/FORM (400/12 µg), de formotérol (12 µg), de budésonide (400 µg) ou un placebo, laquelle dose était administrée pendant la bronchoconstriction aiguë en réponse à l’inhalation de l’allergène. Les chercheurs ont constaté que, par comparaison au placebo, l’association BUD/FORM atténuait significativement l’ART et qu’elle donnait des résultats significativement meilleurs que l’une ou l’autre composante en monothérapie (placebo, -21,2±3,1 %; BUD/FORM, -4,2±1,4 %; formotérol, -7,5±1,7 %; budésonide, -10,4±1,6 %). Les chercheurs en ont conclu qu’une dose unique de l’association BUD/FORM était plus efficace que chacune de ses composantes pour atténuer l’ART et pour protéger contre l’hyper-réactivité bronchique induite par l’allergène.

Résumé

Bien que la MPOC demeure souvent sous-diagnostiquée et sous-déclarée en tant que cause de mortalité, cette maladie pourrait un jour se traiter grâce à des initiatives mondiales comme les lignes directrices de la GOLD. Un parallèle peut être fait avec les lignes directrices de la GINA dont l’objectif est d’améliorer la prise en charge de l’asthme. La Dre Wenzel fait remarquer que c’est grâce à cette initiative si le concept de l’association administrée en un inhalateur unique a vu le jour. Ce traitement permet de retarder l’apparition des exacerbations symptomatiques et d’améliorer le VEMS, ce qui aide à stabiliser l’état de santé. Au chapitre de l’avenir des traitements en pneumologie, la Dre Wenzel précise que «les traitements déterminés par les patients pourraient en fait être l’une des réponses aux problèmes d’observance et d’adhérence».

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