Comptes rendus

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Prise en charge simplifiée de la maladie pulmonaire obstructive chronique

Le présent compte rendu est fondé sur des données médicales présentées lors d'un congrès de médecine reconnu ou publiées dans une revue avec comité de lecture ou dans un commentaire signé par un professionnel de la santé reconnu. La matière abordée dans ce compte rendu s'adresse uniquement aux professionnels de la santé reconnus du Canada.

FRONTIÈRES MÉDICALES - Conférence internationale de l’American Thoracic Society

San Francisco, Californie / 18-23 mai 2012

San Francisco - Les bronchodilatateurs jouent un rôle clé dans la prise en charge de la maladie pulmonaire obstructive chronique (MPOC). Les bêta-agonistes à longue durée d’action (BALA) et les anticholinergiques à longue durée d’action (ACLA) ont largement contribué à ramener le nombre habituel de prises par jour de quatre à deux. Bien que le seul ACLA à une prise par jour actuellement sur le marché soit le tiotropium (on le qualifie aussi d’antimuscarinique à longue durée d’action), de nouveaux ACLA à une prise par jour sont en développement. Le premier BALA approuvé pour une utilisation 1 fois/jour est maintenant indiqué dans le traitement de la MPOC. D’importantes données cliniques à l›appui d’une utilisation 1 fois/jour ont été présentées au congrès.                                               

La maladie pulmonaire obstructive chronique (MPOC) se caractérise par une réduction progressive du débit de l’air qui ne répond pas totalement au traitement. On estime qu'elle frappe actuellement environ 10 % de la population adulte, et les statistiques donnent tout lieu de croire qu’elle pourrait devenir la deuxième cause de mortalité d’ici 2020. Parmi les nombreux symptômes que signalent les personnes atteintes de MPOC, la dyspnée est le plus incommodant. Au sein de la cohorte de plus de 42 000 patients atteints de MPOC dans la UK General Practice Research Database, comme le soulignent Mullerova et ses collaborateurs, 44 % présentaient une dyspnée cliniquement significative malgré le traitement si l’on en juge par un score ≥3 selon l’échelle du MRC (Medical Research Council). Dans cette cohorte de patients atteints de MPOC recevant des soins de premier recours au Royaume-Uni, seulement 18 % des patients ne souffraient pas de dyspnée, signe que l’on observe à tous les stades de la MPOC, y compris au stade 1 de la Global Initiative for Obstructive Lung Disease (GOLD).

Les patients en proie à une exacerbation aiguë doivent parfois être hospitalisés à l’unité des soins intensifs (USI). Comme l’a montré une étude rétrospective ciblant des Américains admis à l’USI dans un centre universitaire de soins tertiaires, l’issue clinique à long terme après un séjour à l’USI est nettement plus péjorative pour un patient atteint de MPOC. La médiane de survie après un séjour à l’USI était en effet de 11 mois pour les patients atteints de MPOC vs 27,2 mois pour les autres (p<0,001). À 5 ans, parmi les sujets de cette cohorte, seulement 13% des patients atteints de MPOC étaient en vie comparativement à >37 % pour les patients exempts de MPOC.

Phénotype et résultats cliniques

Des données montrent que certains patients atteints de MPOC sont nettement plus à risque de décès que d'autres. Afin de repérer les phénotypes de MPOC et le risque de mortalité qui leur est associé, Burgel et al. ont analysé un groupe de 527 patients dont la MPOC était stable en fonction de leurs données cliniques, de leurs clichés de tomodensitométrie (TDM) et de leur fardeau de comorbidité.

Les analyses ont objectivé trois phénotypes distincts de MPOC. Le premier phénotype – qui se caractérise par une maladie respiratoire légère et un faible taux de comorbidité – a été associé à un très faible risque de mortalité. Le deuxième phénotype correspond à des patients plus jeunes – environ 60 ans – qui présentent une réduction sévère du débit de l’air, une distension, un emphysème marqué sur les clichés de TDM, un faible indice de masse corporelle (IMC) et peu de comorbidité cardiovasculaire (CV). Il a été associé à un risque relatif (HR) ajusté de mortalité 47,5 fois plus élevé par rapport au premier phénotype et était corrélé avec la sévérité de la réduction du débit de l’air. (Figure 1).

Figure 1. Distribution de la mortalité en fonction du stade GOLD (phénotypes 2 et 3)

Le troisième phénotype correspond à des patients plus âgés – environ 75 ans – présentant une réduction modérée du débit de l’air et un emphysème moins sévère à l’examen TDM, mais un IMC plus élevé et un taux plus élevé de comorbidité CV. Ce dernier phénotype est associé à un HR ajusté de mortalité moins élevé par rapport au deuxième phénotype, mais tout de même 14,3 fois plus élevé que le HR de mortalité associé au premier phénotype (Figure 1).

Progrès dans la prise en charge de la MPOC : BALA à une prise par jour

Les bronchodilatateurs – qu’il s’agisse de bêta-agonistes à longue durée d’action (BALA) ou d’anticholinergiques à longue durée d’action (ACLA) – jouent un rôle clé dans le traitement symptomatique de la MPOC. Jusqu’à tout récemment, le formotérol et le salmétérol étaient les seuls BALA commercialisés pour le traitement de la MPOC, et les deux doivent être pris 2 fois/jour.

L’avènement d’un BALA à une prise par jour constitue donc un progrès dans le traitement de la MPOC. L’olodatérol, BALA à l’étude, s’est caractérisé par une durée d’action confirmée d'au moins 24 heures lors des études précliniques et cliniques. Lors d’une étude de phase II regroupant 47 patients atteints de MPOC, la dose de 5 µg 1 fois/jour a été associée à un meilleur profil sur 24 heures que la dose de 2 µg 2 fois/jour (résumé D60).

L'indacatérol est le premier BALA à une prise par jour approuvé pour le traitement d'entretien de la MPOC. La dose de 75 µg/jour procure une bronchodilatation pendant 24 heures comme en témoigne l’amélioration durable du VEMS résiduel jusqu'à la dose quotidienne suivante. Dans le cadre d’une analyse groupée de 2 essais de phase III dont le plan était identique, Donohue et al. ont rapporté que l’indacatérol à 75 µg avait augmenté significativement le VEMS résiduel après 12 semaines par rapport au placebo (p<0,001) et que la différence moyenne entre les deux groupes se chiffrait à 131 mL. Les chercheurs ont aussi constaté que le VEMS s’améliorait dans un délai de 5 minutes suivant la première dose le premier jour, l’augmentation atteignant 95 mL (p<0,001 vs placebo) (Figure 2).

Figure 2. VEMS résiduel et VEMS en fonction de la dose

 

Le traitement a aussi diminué le besoin d’albutérol en traitement de secours au cours des 12 semaines de l’étude, le nombre de jours sans traitement de secours ayant augmenté de 10,5 % par rapport au groupe placebo (p<0,001) (Figure 3).

Les chercheurs ont observé une amélioration de la dyspnée et du score SGRQ (St. George’s Respiratory Questionnaire) sous l’effet de la dose de 75 µg par rapport au placebo. Comme l’ont fait remarquer Mahler et al., la différence minimale cliniquement significative (DMCS) dans le score SGRQ par rapport au score initial – de 4 à 8 unités – indique que le traitement est efficace ou très efficace. À 12 semaines, la qualité de vie s’était améliorée significativement sous l’effet du BALA à une prise par jour par rapport au placebo, comme en témoigne la différence moyenne de -3,8 unités dans le score SGRQ total (p<0,001).

À 12 semaines, le score TDI (Transition Dyspnea Index) total s’était aussi amélioré significativement sous l’effet du traitement actif par rapport au placebo, l’écart moyen entre les deux groupes atteignant 0,8 (p<0,001). En fait, le score TDI total à 12 semaines témoignait d’une DMCS chez 47,7 % des patients sous indacatérol vs 33,8 % des sujets sous placebo (p<0,001), tandis que le score SGRQ total témoignait d’une DMCS chez 49,2 % des sujets sous indacatérol vs 35.9 % des sujets sous placebo (p=0,001). La fréquence globale des effets indésirables (EI) était semblable dans les deux groupes de traitement, et on a enregistré un nombre plus élevé d'EI plus graves chez les patients sous placebo que chez les patients recevant le BALA 1 fois/jour.

Figure 3. Diminution des besoins de traitement de secours  

En développement

À ce jour, le tiotropium 1 fois/jour est le seul ACLA (ou AMLA [antimuscarinique à longue durée d’action]) que l’on trouve sur le marché pour le traitement de la MPOC et c’est un incontournable dans la prise en charge des maladies respiratoires. Cependant, d’autres ACLA sont à l’étude et pourraient s’ajouter à cette classe dans le traitement de la MPOC. Le bromure d’aclidinium en est à un stade avancé de son développement. Une étude de phase III menée chez 600 patients atteints de MPOC en a confirmé l’efficacité à long terme et l’innocuité lorsqu’il était administré 2 fois/jour. En outre, des données de phase III ont été présentées sur le NVA237 (bromure de glycopyrronium), un autre ACLA qui n’est pas encore commercialisé.

Des analyses des études GLOW2 où le NVA237 était comparé à un placebo et au tiotropium en mode ouvert ont montré que ce nouvel agent était associé à des bénéfices cliniques importants dans la MPOC modérée à sévère. Dans une analyse présentée au congrès par Kerwin et al., le VEMS résiduel moyen était plus élevé à 12 semaines sous NVA237 (+97 mL) et sous tiotropium en mode ouvert (+83 mL) que sous placebo (p<0,001). L’agent expérimental a aussi procuré une bronchodilatation rapide après la première dose le premier jour, si bien que le VEMS était significativement plus élevé de 5 minutes à 2 heures après l’administration de la dose comparativement au tiotropium (p<0,01).

Korenblat et al. ont aussi constaté que le NVA237 améliorait significativement le score TDI à 26 semaines (2,13 vs 1,32 pour le placebo), ce qui représente une amélioration comparable à celle que l’on observe sous tiotropium. Le pourcentage de patients chez qui on a observé une DMCI ≥1 point dans le score TDI était aussi significativement plus élevé dans le groupe recevant la nouvelle molécule (55,3 %) que dans le groupe placebo (44,2 %) et se comparait au résultat obtenu sous tiotropium en mode ouvert. Les variations du score SGRQ à 52 semaines dénotaient un avantage significatif sous NVA237 par rapport au placebo (p<0,001) et se comparaient aux améliorations observées sous tiotropium.

Figure 4. GLOW 2 : Amélioration du score SGRQ

D’autres analyses des mêmes données de GLOW2 ont montré que le NVA237 prolongeait significativement de 34 % l’intervalle précédant la survenue de la première exacerbation modérée par rapport au placebo sur une période de 52 semaines (p<0,001) et qu’il fallait traiter 13,2 patients pour prévenir une exacerbation. L’agent expérimental a aussi diminué le nombre d’exacerbations modérées à sévères de 35 % par rapport au placebo (p=0,003). En revanche, l’effet du tiotropium sur ce paramètre en particulier n’était pas statistiquement significatif par rapport au placebo.

Le taux global d’EI était semblable dans les trois groupes de traitement alors que les EI graves étaient légèrement moins fréquents sous NVA237 que sous placebo et sous tiotropium en mode ouvert.

Résumé

Il est fréquent qu'une exacerbation aiguë de MPOC nécessite une hospitalisation à l’USI. Parmi tous les patients séjournant  à l’USI, on enregistre un taux de survie environ trois fois plus élevé chez ceux qui ne souffrent pas de MPOC que chez ceux qui en souffrent. Par ailleurs, la détermination du phénotype des patients atteints de MPOC permet de mieux repérer les patients les plus à risque. La diminution du nombre de doses quotidiennes de BALA – de 4 à 2 prises, en moyenne – a contribué à simplifier la prise en charge. L’indacatérol, premier BALA approuvé pour le traitement 1 fois/jour de la MPOC, a été associé à une action rapide et durable et pourrait améliorer l’observance du traitement. En outre, de nouveaux ACLA sont en développement et on continue d’apporter des changements d’importance clinique aux algorithmes de traitement.

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