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Traitement de la surcharge en fer chez un patient atteint d’un SMD : possibilité de prolongation de la survie

Le présent compte rendu est fondé sur des données médicales présentées lors d'un congrès de médecine reconnu ou publiées dans une revue avec comité de lecture ou dans un commentaire signé par un professionnel de la santé reconnu. La matière abordée dans ce compte rendu s'adresse uniquement aux professionnels de la santé reconnus du Canada.

PRESSE PRIORITAIRE - La 51e Assemblée annuelle de l’American Society of Hematology

La Nouvelle-Orléans, Louisiane / 5-8 décembre 2009

La présentation des résultats à cinq ans de la prolongation du vaste essai clinique de phase III ayant établi l’efficacité du déférasirox, chélateur oral du fer, dans la bêta-thalassémie a coïncidé avec celle de nouvelles données montrant que cet agent peut prolonger la survie de patients atteints d’un syndrome myélodysplasique (SMD) présentant une surcharge en fer et ayant fait l’objet d’une sélection minutieuse. Les données à l’appui des bénéfices associés à ce chélateur oral s’ajoutent aux données toujours plus nombreuses montrant que la surcharge en fer passe souvent inaperçue dans les populations à risque, y compris chez les patients atteints d’un SMD.

«Il a été démontré que la surcharge en fer est en soi un facteur pronostique défavorable pour la progression du SMD et la survie des patients qui en sont atteints», affirme l’auteur d’une étude sur le déférasirox dans les SMD, le Dr Mattias Schmid, Hôpital universitaire, Ulm, Allemagne. «Nous avons maintenant des données issues d’études d’envergure prouvant que l’on peut réduire la surcharge en fer de façon durable à l’aide d’un agent oral dont les effets indésirables sont très bien définis et peuvent être traités.»

Ont aussi été présentées au congrès des données sur l’efficacité et l’innocuité à long terme du déférasirox. Ces données proviennent du suivi pendant cinq ans de patients atteints de bêta-thalassémie, maladie héréditaire associée à un risque à vie de surcharge en fer secondaire à de fréquentes transfusions sanguines. La phase de prolongation faisait suite à un essai de phase III comparatif lors duquel les sujets avaient reçu aléatoirement pendant un an soit du déférasirox oral, soit de la déféroxamine injectable. Les deux agents ont eu des effets dose-dépendants similaires sur la balance nette en fer de l’organisme ainsi que sur la concentration hépatique en fer (CHF). Durant la prolongation, les patients qui avaient d’abord été randomisés de façon à recevoir du déférasirox ont poursuivi leur traitement, alors que les patients initialement randomisés dans le groupe déféroxamine ont reçu l’autre agent.

Des 555 sujets qui ont pris part à la prolongation, environ 55 % avaient d’abord reçu du déférasirox tandis que 45 % avaient reçu l’agent de comparaison. Chez les patients initialement sous déféroxamine, les baisses de la CHF et du taux sérique de ferritine se sont accentuées au fil du temps, si bien que l’écart a atteint le seuil de significativité statistique par rapport au moment où ces patients avaient changé de traitement. Signe d’une bonne tolérabilité tout au long du suivi, 73,4 % des patients ayant changé de traitement sont demeurés sous déférasirox pendant toute la durée de l’étude, cinq ans à ce jour. Les chercheurs n’ont pas observé de dysfonction hépatique ou rénale progressive, et les effets indésirables – telles nausées, éruption cutanée et douleur abdominale – se sont dissipés avec le temps. En effet, les éruptions cutanées – le plus courant des effets indésirables la première année – n’ont pas été signalées par la suite.

EPIC : analyses post hoc

La dose initiale semble toutefois contribuer étroitement à la maîtrise optimale de la surcharge en fer selon des données générées l’année dernière par l’étude EPIC (Evaluation of Patients with Iron Chelation), ce qu’une analyse de sous-groupe post hoc récente a confirmé. Lors de l’essai EPIC, le plus vaste jamais réalisé sur la chélation du fer, on a évalué une série de doses à des fins de comparaison de l’efficacité et de l’innocuité chez 937 patients bêta-thalassémiques ayant des antécédents de surcharge en fer post-transfusionnelle. Les auteurs ont conclu que les doses initiales devaient être ajustées selon le degré de surcharge en fer. Selon la nouvelle analyse post hoc, une forte surcharge en fer peut être maîtrisée par le déférasirox seul à raison de 30 mg/kg/jour, même si l’association avait été inefficace auparavant, et une dose d’entretien plus faible pourrait être appropriée une fois les taux sériques de ferritine normalisés.

«À raison d’au moins 30 mg/kg/jour pendant au moins un an, le déférasirox employé seul a permis une réduction significative et cliniquement pertinente du taux sérique de ferritine, que les patients aient d’abord reçu de la déféroxamine ou de la défériprone, ou les deux en association», note le Dr Ali Taher, American University, Beyrouth, Liban. «Le profil d’innocuité du traitement est venu confirmer les données jusque-là publiées chez des patients atteints de bêta-thalassémie majeure de même que les données colligées d’autres études montrant que des doses de 30 mg/kg/jour ou plus, par comparaison à des doses plus faibles, n’entraînent pas plus d’effets indésirables ni ne détériorent la fonction rénale ou hépatique.»

Cette analyse post hoc a permis d’évaluer 129 sujets de l’étude EPIC qui présentaient une forte surcharge en fer et qui avaient reçu au moins 30 mg/kg/jour de déférasirox pendant l’étude de un an. Chez tous les patients, le taux sérique initial de ferritine était >4500 ng/mL malgré un traitement chélateur antérieur. Chez les sujets qui avaient reçu une monothérapie, la diminution médiane du taux sérique de ferritine a atteint 1024 ng/mL (p<0,0001) après un an, par comparaison à 886 ng/mL (p=0,0078) chez ceux qui avaient reçu une association.

Ces baisses du taux de ferritine sont particulièrement encourageantes parce que le déférasirox, étant un agent oral, est de loin plus facile à administrer. Certes, la chélation du fer est essentielle chez les patients bêta-thalassémiques polytransfusés, mais un traitement oral pourrait être particulièrement utile dans les populations dont la surcharge en fer n’a pas été traitée énergiquement par le passé. Au nombre de ces populations figurent les sujets atteints d’un SMD, surtout ceux qui ont un bon indice fonctionnel et une espérance de vie d’au moins un an. L’avantage qu’offre un agent oral pourrait inciter plus de cliniciens à intervenir.

«Lorsque nous avons recruté des patients atteints d’un SMD pour l’étude EPIC, près de la moitié n’avait jamais reçu de traitement chélateur malgré une forte surcharge en fer», explique le Dr Schmid. Même si l’étude sur le SMD se limitait à des patients à faible risque qui, en théorie, devaient bénéficier d’une chélation du fer, «pareil taux de patients n’ayant jamais reçu de traitement chélateur semble indiquer que la surcharge en fer est sous-estimée ou, à tout le moins, sous-traitée.»

L’étude ÉPIC regroupait en tout 341 patients atteints d’un SMD. Au sein de la population de l’étude dans son ensemble, l’individualisation des doses a révélé qu’une dose de 20 mg/kg/jour de déférasirox ou moins avait été appropriée chez les patients dont la surcharge en fer initiale était relativement faible, alors qu’une dose d’au moins 30 mg/kg/jour avait été nécessaire chez les patients dont les taux sériques initiaux de ferritine étaient plus élevés. Les taux de réponse étaient similaires dans les deux sous-groupes, que les patients aient déjà reçu un chélateur ou non. Les taux d’effets indésirables étaient aussi semblables; les plus courants ont été la diarrhée (33 %) et les nausées (13 %), mais ils étaient d’intensité légère ou modérée chez la plupart des patients.

Prolongation de la survie globale

Dans le cadre d’une deuxième étude, rétrospective cette fois, 93 patients atteints d’un SMD sous chélateur à long terme ont été comparés à 93 témoins appariés pour l’âge au moment du diagnostic, le type de SMD selon la classification de l’Organisation mondiale de la Santé et le score IPSS (International Prognostic Scoring System). Même si les patients sous chélateur et les témoins présentaient tous une surcharge en fer, la médiane du taux sérique initial de ferritine était de 1954 ng/mL dans le groupe sous chélateur et de 945 dans le groupe ne recevant pas de chélateur. La médiane de survie a néanmoins été plus longue dans le groupe sous chélateur (74 vs 49 mois, p=0,002). «Nos données étayent l’hypothèse voulant que le chélateur du fer prolonge la survie chez les patients atteints d’un SMD à faible risque, principalement en raison d’une diminution du risque de mortalité imputable à une cause autre que la leucémie», confirme le Dr Frank Fox, Département d’hématologie, d’oncologie et d’immunologie clinique, Heinrich-Heine-Universität, Düsseldorf, Allemagne.

Nous avons aussi en main les résultats à deux ans d’une troisième étude sur le déférasirox administré comme chélateur du fer (dose moyenne de 24,4 mg/kg/jour) à 83 patients atteints d’un SMD à faible risque. Le taux sérique de ferritine est passé de 3002 à 2069 ng/mL en deux ans. Selon l’un des chercheurs principaux, le Dr Alan F. List, Département d’hémato-oncologie, Moffitt Cancer Center and Research Institute, Tampa, Floride, «le déférasirox a été généralement bien toléré au fil des deux années», et les résultats semblent valider l’efficacité et l’utilité d’un chélateur oral du fer chez des patients bien choisis.

Sous-étude EPIC sur la fonction cardiaque

L’efficacité du déférasirox contre la sidérose myocardique, démontrée dans la sous-étude EPIC sur la fonction cardiaque qui était prévue au protocole et qui vient de prendre fin, pourrait expliquer la baisse de mortalité observée chez les patients atteints d’un SMD. Lors de cette étude satellite regroupant 81 patients évaluables, l’imagerie par résonance magnétique a servi à mesurer la concentration cardiaque en fer au fil du temps. La diminution a été progressive tout au long du traitement et, par rapport aux valeurs initiales, elle a été hautement significative (p<0,001), tout comme les diminutions de la concentration hépatique ou totale en fer. Les améliorations sur les clichés d’imagerie ont été observées parallèlement aux améliorations de la dynamique cardiaque. «L’amélioration de la fonction ventriculaire droite s’explique principalement par l’amélioration des compliances ventriculaires gauche et droite associée à la diminution de la concentration cardiaque en fer», note le Dr Dudley J. Pennell, Royal Brompton Hospital, Londres, Royaume-Uni. Le déférasirox administré à une dose médiane de 33,1 mg/kg/jour a été bien toléré, et aucune détérioration progressive des fonctions rénale ou hépatique n’a été signalée, ajoute-t-il.

Résumé

L’un des avantages éventuels du développement d’un chélateur oral du fer efficace et prévisible est la possibilité de l’utiliser au sein de populations autres que celles régulièrement traitées pour une intoxication martiale, comme la bêta-thalassémie, indication très bien reconnue. La chélation du fer ne convient pas nécessairement à tous les patients atteints d’un SMD, mais pour ceux qui peuvent en bénéficier, le traitement de la surcharge en fer pourrait améliorer la qualité de vie, voire prolonger la survie.

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