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Étude CombAT : stratégies de traitement d’association pour une efficacité à long terme

Le présent compte rendu est fondé sur des données médicales présentées lors d'un congrès de médecine reconnu ou publiées dans une revue avec comité de lecture ou dans un commentaire signé par un professionnel de la santé reconnu. La matière abordée dans ce compte rendu s'adresse uniquement aux professionnels de la santé reconnus du Canada.

Le XXIIIe Congrès annuel de l’Association européenne d’urologie

Milan, Italie / 26-29 mars 2008

L’association de deux molécules aux modes d’action complémentaires est une stratégie souvent privilégiée en médecine, par exemple pour traiter l’hypertension et certains cancers et, de plus en plus maintenant, pour soulager les symptômes du bas appareil urinaire (SBAU) secondaires à l’hypertrophie bénigne de la prostate (HBP). Les alpha-bloquants procurent un soulagement rapide des symptômes et une augmentation du débit urinaire en diminuant le tonus des muscles lisses de la prostate et du col vésical, tandis que les inhibiteurs de la 5 alpha-réductase (I5AR) empêchent la transformation de la testostérone en dihydrotestostérone, réduisant ainsi le volume de la prostate et, partant, le risque de rétention urinaire aiguë et le besoin d’intervention chirurgicale liée à l’HBP, confirme le Dr Carlos Llorente, chef de l’urologie, Fundación Hospital Alcorcón, Madrid, Espagne. En revanche, ce qui demeure mal connu jusqu’à présent est la question des effets à court et à long terme d’un schéma associant le dutastéride (I5AR) et la tamsulosine (alpha-bloquant) dans les cas d’HBP symptomatique et de prostate volumineuse, en comparaison de l’utilisation de ces agents en monothérapie.

L’étude CombAT

CombAT (Combination of Avodart and Tamsulosin) est une importante étude qui vise à déterminer si les hommes à risque accru de progression de l’HBP, en raison d’un volume de la prostate et d’un taux d’antigène spécifique de la prostate (PSA) élevés, peuvent retirer un plus grand bienfait du traitement associant un I5AR et un alpha-bloquant que de l’un ou l’autre médicament employé seul.

Pour la première fois, l’analyse comparative a également porté sur des scores de symptômes spécifiques, tel le paramètre principal de l’étude à deux ans défini comme la variation du score IPSS (International Prostate Symptom Score) entre l’inclusion et l’évaluation à deux ans. Les sujets inclus — qui devaient avoir une prostate d’au moins 30 cm3, un taux sérique de PSA compris entre 1,5 et 10 ng/mL ainsi qu’un débit urinaire maximal (Qmax) compris entre 5 et 15 mL/sec (volume mictionnel d’au moins 125 mL) — ont été randomisés en vue de recevoir, une fois par jour pendant quatre ans, l’un des trois traitements suivants : dutastéride à 0,5 mg, tamsulosine à 0,4 mg ou association de ces deux agents.

On a évalué les SBAU à l’aide du questionnaire IPSS (qui comprend une évaluation de l’état de santé lié à l’HBP) de même que le Qmax au départ, puis à intervalles de trois et six mois, respectivement. À 24 mois, 3822 hommes étaient évaluables. Comme le rapporte l’investigateur principal, le Dr Claus Roehrborn, directeur du département d’urologie, University of Texas Southwestern Medical Center, Dallas, l’association dutastéride/tamsulosine a autorisé une réduction significativement plus marquée du score IPSS que l’un ou l’autre agent seul.

Par rapport aux valeurs initiales, le score IPSS à 24 mois a baissé de 6,2 points dans le groupe bithérapie comparativement à 4,9 points dans le groupe dutastéride et à 4,3 points dans le groupe tamsulosine, et la différence était significative par rapport aux deux monothérapies (p<0,001). La différence par rapport au dutastéride seul est devenue significative dès le troisième mois, et la différence par rapport à la tamsulosine l’est devenue après neuf mois.

De même, comparée à l’un ou l’autre médicament seul, la bithérapie a réduit significativement le score de l’état de santé lié à l’HBP (p<0,001 dans les deux cas). Au chapitre du débit urinaire, les investigateurs ont de plus observé une augmentation significativement plus marquée du Qmax dans le groupe bithérapie que dans les groupes monothérapie, différence qui est apparue au sixième mois et s’est maintenue jusqu’au terme des 24 mois; à 24 mois, cette différence correspondait à une valeur p<0,001.

Autre élément important, l’âge n’a eu aucun effet statistiquement significatif sur les résultats thérapeutiques, non plus que le volume de la prostate et le taux de PSA initiaux : l’association des deux agents était systématiquement supérieure à l’un ou l’autre médicament seul, sans égard à ces paramètres initiaux.

Le nombre total d’effets indésirables liés aux médicaments était significativement plus important dans le groupe bithérapie; toutefois, le taux d’abandons de l’étude pour cause d’effets indésirables n’a dépassé 5 % dans aucun groupe de traitement, de souligner les investigateurs.

Le volume de la prostate, un facteur dans le choix du traitement

De façon générale, les prostates plus volumineuses répondent mieux au traitement d’association, comme l’ont démontré d’autres études, poursuit le Dr Roehrborn. «Lorsqu’on examine les résultats à deux ans de l’étude CombAT en corrélation avec le volume de la prostate selon une progression ascendante, on constate que l’I5AR est plus efficace dans les glandes plus volumineuses. Dans le cas des alpha-bloquants, l’efficacité décroît non seulement en fonction du volume, mais également en fonction du temps.» Ainsi, chez les sujets de l’étude CombAT qui avaient les prostates les plus petites (entre 30 et 41 cm3), les bienfaits du traitement dérivaient seulement de l’alpha-bloquant jusque vers le neuvième mois, après quoi le traitement d’association est devenu plus efficace.

Dans le groupe des prostates plus volumineuses (42 à 58 cm3), l’I5AR a été moins efficace que la tamsulosine jusque vers le 12e mois, après quoi il a numériquement surpassé l’alpha-bloquant en efficacité. Cela dit, «le traitement d’association est l’option qui offre l’efficacité la plus grande avec le plus de constance, note le Dr Roehrborn, en concluant : plus la prostate est volumineuse, plus les bienfaits sont marqués lorsqu’on choisit le traitement d’association, même après seulement trois mois. Par comparaison, l’effet de l’alpha-bloquant est minime lorsque la prostate est volumineuse. Dans ces cas, la majeure partie de l’effet thérapeutique repose sur l’I5AR».

I5AR et réduction du risque

Les résultats de l’essai PCPT (Prostate Cancer Prevention Trial) ont montré sans équivoque que les I5AR réduisaient le risque de cancer de la prostate. Néanmoins, il n’y a pas encore consensus sur la question de savoir quels patients devraient recevoir un I5AR à titre prophylactique et quel taux de PSA seuil devrait être utilisé comme marqueur du risque. Selon le Dr Gerald Andriole, division de chirurgie urologique, Washington University, St. Louis, Missouri, le traitement prophylactique par un I5AR devrait être envisagé chez les hommes qui éprouvent des SBAU modérés ou sévères et ont une prostate d’au moins 30 cm3.

Plusieurs essais cliniques d’envergure ont montré que les hommes qui répondaient à ces critères d’admissibilité et qui ont été mis sous I5AR ont obtenu un soulagement significatif de leurs symptômes. Par ailleurs, les hommes ayant un taux de PSA >1,5 ng/mL courent également un risque élevé de cancer de la prostate, et il est raisonnable de penser qu’ils pourraient bénéficier d’un traitement prophylactique par un I5AR, étant donné qu’ils sont sujets à des examens répétés de dépistage du cancer de la prostate.

«On pourrait dire que s’il est jugé utile de faire un dépistage du cancer chez un homme dont le taux de PSA est de 1,5 ng/mL ou plus, ce patient devrait aussi, par définition, être considéré comme un candidat au traitement visant à réduire le risque», fait valoir le Dr Andriole.

Cela dit, prévient-il, «une seule biopsie négative chez un homme ayant un taux de PSA élevé ne suffit pas à exclure de manière certaine la présence d’un cancer de la prostate». Ainsi, on observait encore un risque de cancer de la prostate de 28 % chez les participants à l’essai PCPT qui avaient des antécédents de biopsies négatives, mais dont le taux de PSA était de 4 ng/mL. De même, chez les hommes présentant un taux de PSA normalement considéré comme relativement faible, mais ayant un résultat suspect à l’examen par toucher rectal et une biopsie négative, la probabilité qu’un cancer de la prostate soit détecté à la seconde biopsie est presque de 25 %, fait observer le Dr Andriole.

Le Dr Andriole a conclu sur ces mots : «Il semble que les hommes ayant un taux de PSA de 1,5 ng/mL soient exposés à un risque futur de cancer significativement élevé comparativement à la population générale, ce qui pourrait comprendre entre 30 et 40 % des patients. Je pense qu’il nous incombe de revoir notre façon d’utiliser le taux de PSA, non pas simplement comme un indicateur du risque présent de cancer, mais également comme un marqueur du risque à venir. Même si le taux de PSA ne dépasse pas une valeur seuil, de 4 par exemple, il est parfaitement justifié de faire une biopsie dès lors qu’il excède 1,5 ng/mL, étant donné que ces patients demeurent exposés à un risque considérable de [cancer de la prostate] sur 4 à 5 ans et que cela justifie un traitement à visée préventive.»

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