Comptes rendus

Mise à jour importante sur la prévention de l’AVC en présence de fibrillation auriculaire

Utilisation des antipsychotiques atypiques dans le trouble dépressif majeur

Le présent compte rendu est fondé sur des données médicales présentées lors d'un congrès de médecine reconnu ou publiées dans une revue avec comité de lecture ou dans un commentaire signé par un professionnel de la santé reconnu. La matière abordée dans ce compte rendu s'adresse uniquement aux professionnels de la santé reconnus du Canada.

PRESSE PRIORITAIRE - Le 59e Congrès annuel de l’Association des psychiatres du Canada

St. John’s, Newfoundland / August 27-30, 2009

Il existe un large éventail d’antidépresseurs pour le traitement du trouble dépressif majeur (TDM). Lorsqu’ils sont efficaces, ces agents peuvent littéralement changer la vie du patient, affirme le Dr Roger McIntyre, professeur agrégé de psychiatrie et de pharmacologie, University of Toronto, Ontario. Malheureusement, dans bien des cas, pour ne pas dire la plupart du temps, le premier antidépresseur ne conduit pas à la rémission. Or, avec chaque nouvel antidépresseur mis à l’essai, la probabilité de rémission diminue considérablement. Cette réalité s’est confirmée dans l’étude STAR*D (Sequenced Treatment Alternatives to Relieve Depression).

Financée par le National Institute of Mental Health, STAR*D a réuni 3671 patients, dont près des deux tiers souffraient d’un trouble psychiatrique concomitant. Les sujets ont d’abord reçu du citalopram, puis jusqu’à quatre traitements successifs par des antidépresseurs actuellement sur le marché (Rush et al. Am J Psychiatry 2006; 163[11]:1905-17). Environ le tiers des sujets se sont rétablis après le traitement initial et une autre tranche de 30,6 % de la population s’est rétablie après le deuxième traitement. Cependant, chez les patients qui ont eu besoin d’un autre antidépresseur, le taux de rémission n’a atteint que 13 % environ, tant à la troisième qu’à la quatrième étape. Cette diminution graduelle de la probabilité de rémission s’est accompagnée d’une hausse progressive du taux de rechute. En effet, chez les sujets parvenus à la rémission, les taux de rechute lors des étapes 1 à 4 ont été les suivants : 33,5 %, 47,4 %, 42,9 % et 50 %; de plus, on a enregistré un taux de rechute plus élevé chez les patients dont l’état s’était amélioré pendant le traitement, sans toutefois que l’on puisse parler de rémission (de 59 à 83 %).

Dans la population de STAR*D, représentative des patients traités dans la pratique clinique, le taux cumulatif de rétablissement soutenu après quatre traitements différents, avec prise en compte des taux de rechute, s’est établi à 43 %, comme le souligne le Dr Craig T. Nelson, University of California, San Francisco, dans son éditorial sur cette étude (Am J Psychiatry 2006;163:1864-6).

«La grande majorité des patients ne parviennent pas à la rémission malgré un traitement optimal, déplore le Dr McIntyre, ce qui justifie, cliniquement, le recours aux antipsychotiques atypiques (APA) dans le TDM.»

Exploration neurobiologique de la dépression

Dans son exposé neurobiologique sur la dépression, la Dre Glenda MacQueen, professeure titulaire de psychiatrie, University of Calgary, Alberta, explique pourquoi la réponse aux antidépresseurs est si variable et comment certains APA peuvent l’améliorer. «La dépression se répercute sur à peu près toutes les fonctions du cerveau», fait observer la Dre MacQueen. À vrai dire, c’est une maladie «fascinante», ajoute-t-elle, parce qu’elle touche à la fois certaines des pulsions les plus primitives de l’être humain — l’appétit, la sexualité et l’agressivité — et ses fonctions les plus évoluées, telles que la cognition, la motivation et les émotions.

Le cortex cingulaire, l’amygdale et l’hippocampe sont trois régions anatomiques fondamentales dans la physiopathologie de la dépression. Leur rôle dans cette maladie ne fait aucun doute, car elles régissent des fonctions perturbées chez le sujet déprimé. «Vu la diversité des symptômes de la dépression, il y a tout lieu de croire que de multiples neurotransmetteurs sont également en cause», précise la Dre MacQueen. Ainsi, l’une des principales anomalies neurochimiques de la dépression est le ralentissement sérotoninergique. Les médicaments qui augmentent la disponibilité de la sérotonine dans la synapse peuvent donc, logiquement, agir sur cette dysfonction. «De même, sachant que l’activité noradrénergique centrale est réduite chez le patient déprimé, on pourra augmenter la disponibilité de l’adrénaline dans la synapse avec des agents exerçant une action noradrénergique», explique la Dre MacQueen.

Le rôle de la dopamine dans la dépression est plus difficile à définir, mais on pense qu’une faible neurotransmission dopaminergique pourrait être en cause, anomalie à laquelle on pourrait remédier par l’inhibition du recaptage de ce neurotransmetteur.

Les APA agissent, tout comme les antidépresseurs classiques, sur les voies sérotoninergiques et noradrénergiques; leur mode d’action justifie donc leur utilisation dans le TDM. Qui plus est, certaines molécules neuroprotectrices, dont le BDNF (brain-derived neurotrophic factor), sont importantes pour la survie et la croissance neuronales. Partant, tout médicament qui accroît la production de BDNF, effet démontré du traitement à long terme par la quétiapine, est théoriquement doté de propriétés neuroprotectrices.

En modulant la transmission neurochimique, plusieurs APA, dont l’olanzapine, la clozapine et la quétiapine, agissent sur une panoplie de fonctions régissant la résilience et la viabilité neuronales, poursuit la Dre MacQueen, et peuvent aussi potentialiser la neuroprotection en inhibant des espèces réactives de l’oxygène. «Nous savons que, dans la plupart des maladies [mentales], de nombreuses régions anatomiques sont en cause et que la communication entre celles-ci est très importante, commente-t-elle. Il y a un tas de similitudes cliniques entre les maladies, alors on peut s’attendre à ce qu’il y ait aussi beaucoup de similitudes biochimiques», conclut-elle.

Nouvelles lignes directrices en matière de traitement

Le rôle des APA dans le TDM est examiné de près dans les nouvelles lignes directrices sur le traitement du TDM, publiées récemment. Comme le souligne le Dr Raymond Lam, professeur titulaire et chef, Département de psychiatrie, University of British Columbia, Vancouver, plusieurs possibilités de traitement demeurent après l’échec d’un premier antidépresseur. On peut tenter une potentialisation par des agents éprouvés tels le lithium et les APA. La mise à l’essai d’un autre agent en monothérapie constitue également une solution intéressante; la quétiapine à libération prolongée (XR) est le seul APA homologué en monothérapie du TDM.

Son homologation s’appuie sur six études (n<u>></u>1700) dont une pendant laquelle des patients atteints d’un TDM ont reçu de la APA XR à 150 ou 300 mg, de la duloxétine à 60 mg ou un placebo pendant six semaines. Au terme du traitement, environ 55 % des sujets des deux groupes sous APA XR avaient obtenu une réponse, comparativement à 50 % des sujets du groupe duloxétine et à 36 % des témoins sous placebo. En outre, environ 26 % des patients du groupe 150 mg et 32 % des patients du groupe 300 mg étaient en rémission, tout comme 32 % des témoins sous duloxétine et 20 % des témoins sous placebo. «La quétiapine XR a également agi sur tous les symptômes principaux de la dépression, ce qui en fait un antidépresseur véritablement indiqué en monothérapie. Le traitement a commencé à faire effet dès la première semaine», précise le Dr Lam.

L’objectif avec un grand «O» de la prise en charge de la dépression étant le rétablissement durable du patient, les chercheurs ont voulu savoir si ce même APA à libération prolongée pouvait être efficace à plus long terme et prévenir les rechutes en monothérapie d’entretien.

L’étude comportait trois phases. La première était une phase préliminaire ouverte d’une durée de quatre à huit semaines. Si les patients répondaient au traitement pendant la phase ouverte, ils le poursuivaient pendant une phase de stabilisation de 12 à 18 semaines. Au terme de cette phase, 787 patients ont été randomisés de façon à recevoir pendant au plus 52 semaines soit le même traitement actif (à la même dose qu’à la dernière visite de la phase de stabilisation ouverte), soit un placebo. Pendant la phase avec randomisation, la posologie de la APA XR pouvait être ajustée (50 mg/jour, 150 mg/jour ou 300 mg/jour), selon le jugement clinique du chercheur. Le paramètre principal était l’intervalle avant la récurrence dépressive.

Pendant la phase avec randomisation, environ 14 % des patients traités par l’APA XR ont subi une récurrence, contre 34 % des témoins sous placebo, ce qui correspond à une réduction de 66 % du risque de récurrence dans le groupe quétiapine XR (p<0,001). «Ces résultats sont aussi bons, voire meilleurs, que les résultats obtenus dans la plupart des études sur le traitement d’entretien par un antidépresseur classique, et ils témoignent de l’efficacité de la quétiapine XR pour le traitement d’entretien de la dépression», se réjouit le Dr Lam.

L’effet indésirable signalé le plus souvent par les patients pendant la phase avec randomisation a été le gain de poids, constaté chez 9,7 % des patients sous traitement actif, contre 1,6 % des témoins sous placebo. Cependant, le risque d’un gain pondéral appréciable (augmentation <u>></u>7 %) n’était pas beaucoup plus grand dans le groupe soumis au traitement actif que dans le groupe placebo (5,4 % vs 2,9 %). De fait, la prise de poids sous quétiapine XR était inférieure au gain pondéral souvent observé lors d’un traitement antidépresseur au long cours, souligne le Dr Lam.

On n’a noté aucun autre effet métabolique digne de mention – pensons notamment à la variation des taux lipidiques et de la glycémie – pendant l’essai sur le traitement d’entretien. C’est peut-être, avance le Dr Lam, que les doses plus faibles d’APA utilisées pour le traitement à court terme ou la monothérapie d’entretien du TDM exposent le patient à un risque moindre d’effets indésirables, qu’ils soient métaboliques ou d’une autre nature, que les doses plus élevées, lesquelles peuvent entraîner notamment des manifestations extrapyramidales.

Résumé

Le TDM affiche une tendance à la chronicité. En effet, les patients rechutent souvent, même après avoir obtenu une rémission sous traitement antidépresseur. Cela dit, plusieurs stratégies sont possibles après l’échec d’un traitement. Ainsi, on peut faire l’essai d’un agent d’une autre classe en monothérapie. Les APA ont fait l’objet d’études dans le TDM, habituellement comme agents de potentialisation; toutefois, la quétiapine XR a également été étudiée en monothérapie, et les résultats sont fort prometteurs. Cette même substance, toujours sous sa forme XR, s’est également révélée efficace pour le traitement d’entretien chez les patients dans un état stable. Voilà qui donne à penser que certains APA pourraient constituer une solution de rechange en traitement d’entretien lorsque la réponse aux antidépresseurs classiques est inadéquate.

Commentaires

Nous vous serions reconnaissants de prendre 30 secondes pour nous aider à mieux comprendre vos besoins de formation.