Comptes rendus

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Inhiber l’interleukine-6 pour maîtriser l’inflammation dans la polyarthrite rhumatoïde

Le présent compte rendu est fondé sur des données médicales présentées lors d'un congrès de médecine reconnu ou publiées dans une revue avec comité de lecture ou dans un commentaire signé par un professionnel de la santé reconnu. La matière abordée dans ce compte rendu s'adresse uniquement aux professionnels de la santé reconnus du Canada.

ABSTRACTS in PERSPECTIVE - D’après des présentations au 10e Congrès européen annuel de rhumatologie (EULAR)

Copenhague, Danemark / 10-13 juin 2009

COMMENTAIRE ÉDITORIAL :

Alfred A. Cividino, MD, FRCPC,

Professeur de clinique en médecine, Division de rhumatologie, McMaster University, Hamilton (Ontario)

Si l’inflammation se solde par une atteinte articulaire avec le temps, la maîtrise sans délai de la polyarthrite rhumatoïde (PR) devrait théoriquement permettre d’atténuer l’atteinte articulaire. La survenue d’une atteinte articulaire structurale étant précoce, il est assurément justifié d’intervenir adéquatement et sans délai dans la PR.

Nous avons à notre disposition plusieurs outils de mesure de l’activité de la maladie pour évaluer les effets d’une intervention thérapeutique, notamment le score DAS (Disease Activity Score), les critères de réponse de l’American College of Rheumatology (ACR) ainsi que les indices SDAI (Simplified Disease Activity Index) et CDAI (Clinical Disease Activity Index). Les composantes principales de chacun de ces indices diffèrent, mais le score DAS, les critères ACR et le SDAI requièrent tous une évaluation de la réponse de phase aiguë (RPA), donnée qu’on n’a généralement pas en main à la première visite du patient. Un nouvel outil d’évaluation simplifié et axé sur le patient pourrait donc s’avérer très utile dans la pratique clinique au quotidien.

Comme l’expliquait le Dr Theodore Pincus, professeur de clinique en médecine, Division de rhumatologie, New York University School of Medicine, la réponse mesurée à l’aide du critère RAPID3 (Routine Assessment of Patient Index Data 3) a été comparée à la réponse mesurée à l’aide du score DAS28 lors de deux essais sur l’abatacept, AIM (Abatacept in Inadequate Responders to Methotrexate) et ATTAIN (Abatacept Trial in the Treatment of Anti-TNF Inadequate RA Responders). Selon le critère DAS28, la réponse a été jugée bonne chez 27 % des patients sous traitement actif de l’essai AIM, par comparaison à 17 % des sujets sous traitement actif de l’essai ATTAIN. Selon le critère RAPID3, ces pourcentages étaient respectivement de 35 % et de 24 %. Les taux de réponses modérée et médiocre mesurées à l’aide des critères DAS28 et RAPID3 étaient aussi assez comparables. C’est donc dire que le critère RAPID3 pourrait être utile au quotidien.

Il n’est peut-être pas de notoriété commune que les patients polyarthritiques sont exposés à un risque de maladie cardiovasculaire (MCV) à peu près équivalent à celui des patients atteints d’un diabète de type 2. Consciente de ce risque, la Ligue européenne contre le rhumatisme (EULAR) recommande la prévention primaire des MCV chez les patients souffrant d’une forme d’arthrite inflammatoire, notamment la PR, la spondylarthrite ankylosante et le rhumatisme psoriasique. Cette prévention commence par une évaluation annuelle des facteurs de risque traditionnels.

L’EULAR recommande également aux médecins d’utiliser l’algorithme SCORE (Systematic Coronary Risk Evaluation) adapté à la PR afin de déterminer le risque CV du patient sur 10 ans et de traiter ce dernier de façon qu’il atteigne les taux cibles si son risque de MCV est =10 %. Il est aussi impératif de bien maîtriser l’activité de la maladie pour réduire le risque de MCV. Les agents de rémission comme le méthotrexate (MTX) et les inhibiteurs du facteur de nécrose tumorale (anti-TNF) ont permis de grandement améliorer la maîtrise de la PR et, par conséquent, l’issue clinique. Néanmoins, environ 20 % des patients n’obtiennent pas une réponse adéquate au MTX, alors qu’environ le tiers des patients ne répond pas bien aux anti-TNF.

Inhibition de l’IL-6

Dans l’arène biologique, outre les anti-TNF, une nouvelle option a vu le jour : le tocilizumab (TCZ), anticorps monoclonal humanisé dirigé contre le récepteur de l’IL-6. Lors de sa présentation, le Dr Josef Smolen, professeur titulaire de médecine, École de médecine de l’Université de Vienne, Autriche, expliquait qu’une analyse partielle des données de prolongation de 2,5 ans avait confirmé le maintien de l’efficacité initiale. Pour les besoins de cette analyse particulière, les patients ont été subdivisés en trois groupes pour l’évaluation : TCZ à 8 mg/kg seul; réponse inadéquate aux anti-TNF (RI-anti-TNF), et réponse inadéquate aux agents de rémission (RI-AR). En tout, 2583 sujets ont participé à la phase de prolongation, et tous ont reçu 8 mg/kg de TCZ.

Après 108 semaines, 16,7 % des sujets TCZ seul, 10,9 % des sujets RI-anti-TNF et 16,9 % des sujets RI-AR qui avaient maintenu une réponse ACR70 pendant 24 semaines consécutives bénéficiaient toujours d’une rémission clinique majeure. Par ailleurs, 13,6 % des sujets TCZ seul, 5,8 % des sujets RI-anti-TNF et 10,6 % des sujets RI-AR ont maintenu une réponse ACR70 pendant 48 semaines consécutives. La proportion de patients ayant atteint un score DAS28 =3,2, un score DAS28 <2,6 (rémission) et une bonne réponse selon les critères de l’EULAR au terme des premiers essais cliniques (24 semaines) se maintenait après 108 semaines.

Dans le cadre d’une analyse distincte réalisée a posteriori, le Dr Graeme Jones, professeur titulaire de rhumatologie et d’épidémiologie, University of Tasmania, Hobart, Australie, et ses collaborateurs ont évalué le TCZ à 8 mg/kg chez des patients n’ayant jamais reçu de MTX ainsi que chez des patients jamais exposés à un agent de rémission (les deux tiers n’avaient jamais été exposés au MTX). Après 24 semaines, environ 70 % des patients des trois groupes – tous les patients (analyse en intention de traiter), les patients jamais exposés au MTX et les patients jamais exposés aux agents de rémission – avaient obtenu une réponse ACR20, par comparaison à un peu plus de 50 % des témoins (MTX).

Environ 45 % des patients des trois groupes TCZ réunis ont obtenu une réponse ACR50, par comparaison à environ 33 % des sujets du groupe MTX, tandis qu’environ 30 % des patients des trois groupes TCZ réunis ont obtenu une réponse ACR70 par comparaison à environ 15 % des sujets sous MTX. Une proportion encore plus élevée des sujets des trois groupes TCZ est parvenue à la fois à une rémission DAS28 et à une bonne réponse selon les critères de l’EULAR.

L’inhibition de la progression radiographique est l’un des objectifs clés de tout traitement de la PR, car une progression radiographique minime signifie que la capacité fonctionnelle peut être maintenue. Lors de l’essai LITHE (TociLIzumab Safety and THE Prevention of Structural Joint Damage), les patients recevaient du TCZ à raison de 4 mg/kg ou de 8 mg/kg plus du MTX ou du MTX seul. Comme le soulignait le Dr Joel Kremer, Albany Medical College, New York, 47 %, 30 % et 8 % des patients des groupes 8 mg/kg, 4 mg/kg et MTX, respectivement, avaient obtenu une rémission DAS28 à 52 semaines, alors que 64 %, 45 % et 19 %, respectivement, étaient parvenus à un faible score DAS28. Les taux de rémission DAS28 ont aussi augmenté entre la 24e et la 52e semaine, ce qui donne à penser que l’ampleur du bénéfice associé au TCZ s’accentue avec le temps, une première pour un agent biologique.

Toujours à 52 semaines, la dose de 8 mg/kg a été associée à une inhibition de 74 % de la progression radiographique, et même les patients recevant 4 mg/kg présentaient peu de signes de progression radiographique, ou n’en présentaient pas du tout, au terme de l’étude. Dans le cadre du suivi à plus long terme des patients qui avaient reçu du TCZ pendant une moyenne de 1,5 an, aucun nouveau problème d’innocuité n’a été signalé. Le taux d’abandons pour cause d’effet indésirable se chiffrait à 6,5 pour 100 années-patients. Les infections graves ont été les effets indésirables graves les plus fréquents, leur taux global atteignant 4,3 pour 100 années-patients. L’exposition continue au TCZ n’a pas été associée à un risque croissant d’infection grave, de cancer ou d’autres effets indésirables graves.

Variations de la RPA et efficacité clinique

Certains avancent que l’efficacité du TCZ pourrait avoir été surestimée lors des essais cliniques du fait qu’elle inhibe l’IL-6 très fortement, ce qui entraîne une diminution rapide du taux de protéine C-réactive (CRP) en début de traitement. Pour tenter de trouver réponse à cette question, le Dr Daniel Aletaha, professeur agrégé de médecine, École de médecine de l’Université de Vienne, a réévalué trois essais pivots sur le TCZ à l’aide de l’indice SDAI, lequel n’accorde qu’une pondération légère à la composante CRP, et de l’indice CDAI, mesure purement clinique de l’activité de la maladie.

Entre le début et la fin de l’étude, les variations des scores SDAI et CDAI étaient significativement plus marquées chez les sujets sous TCZ des trois essais que chez les témoins sous placebo. Environ 34 % des patients sous placebo ont reçu du TCZ en traitement de secours après 16 semaines. De plus, 98 % des patients qui étaient en rémission selon le score CDAI étaient aussi en rémission selon le score SDAI et, parmi tous les patients qui étaient en rémission selon le score SDAI, 82 % l’étaient aussi selon le score CDAI. Ces résultats indiquent que l’efficacité du TCZ n’est pas surestimée selon les critères d’évaluation de l’activité de la maladie qui tiennent compte de la RPA, puisque l’efficacité n’a pas été compromise selon les scores de rémission SDAI ou CDAI, qui n’accordent que peu ou pas de poids aux variations de la RPA.

Lors des essais cliniques sur la PR, la rémission DAS28 a été plus fréquente que la réponse ACR70. Dans leur analyse groupée des patients sous TCZ, le Dr Edward Keystone, professeur titulaire de médecine, University of Toronto, Ontario, et ses collaborateurs ont tenté de cerner les facteurs qui avaient contribué au fait que les patients étaient parvenus à une rémission DAS28, mais pas à une réponse ACR70. Il est ressorti de leur analyse que parmi les 31 % de patients recevant 8 mg/kg de TCZ qui étaient parvenus à la rémission DAS28, 19 % avaient obtenu une réponse ACR70, vs 3 % et 2 % des patients sous placebo, respectivement. Les chercheurs ont néanmoins constaté que la plupart des patients sous TCZ en rémission selon le critère DAS28 avaient bénéficié d’une amélioration d’au moins 70 % du nombre d’articulations tuméfiées, alors que moins de 50 % de ces patients ont bénéficié d’une amélioration comparable du nombre d’articulations douloureuses. Or, l’obtention d’une réponse ACR70 repose sur une amélioration de 70 % de ces deux paramètres. Il importe ici de souligner que si 54 % des patients sous TCZ n’ont pas bénéficié d’une amélioration de cette ampleur pour les deux paramètres, le bénéfice clinique était néanmoins substantiel chez ceux qui étaient parvenus à une rémission DAS28 après 24 semaines, l’amélioration du score ACR ayant atteint 64,7 % en moyenne.

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