Comptes rendus

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Le point sur la prise en charge des infections à pneumocoque : épidémiologie et rôle du vaccin conjugué chez l’adulte

Le présent compte rendu est fondé sur des données médicales présentées lors d'un congrès de médecine reconnu ou publiées dans une revue avec comité de lecture ou dans un commentaire signé par un professionnel de la santé reconnu. La matière abordée dans ce compte rendu s'adresse uniquement aux professionnels de la santé reconnus du Canada.

PRESSE PRIORITAIRE - 21e Congrès européen de microbiologie clinique et d’infectiologie (ECCMID)

Milan, Italie / 7-10 mai 2011

Chez l’adulte, les infections à pneumocoque représentent un lourd fardeau. Non seulement l’incidence des infections invasives à pneumocoque (IIP) est-elle en hausse, mais la mortalité ne diminue pas malgré une meilleure prise en charge. Toujours chez l’adulte, les IIP prennent la forme d’une pneumonie dans 50 à 80 % des cas. La pneumonie communautaire (PC), source fréquente de morbi-mortalité, est causée par divers agents pathogènes, dont le pneumocoque, qui est d’ailleurs l’agent pathogène le plus souvent en cause chez les patients hospitalisés et les patients ambulatoires qui consultent un médecin de premier recours.

Le traitement des IIP est difficile, car les micro-organismes en cause ne sont pas toujours identifiés. De plus, les pneumocoques antibiorésistants compliquent les décisions thérapeutiques et sont responsables d’échecs de traitement. Les experts en infectiologie et en pneumologie s’entendent généralement pour dire que la prévention des IIP par la vaccination est la stratégie la plus efficace qui soit pour faire diminuer la morbidité et la mortalité. Il est donc important de surveiller les sérotypes à l’origine des PC et les sérotypes associés aux syndromes cliniques plus graves si l’on aspire à évaluer l’impact de la vaccination antipneumococcique sur ces infections importantes. De nouvelles données de surveillance ont permis de dégager les plus récentes tendances quant aux sérotypes responsables des IIP chez les adultes du Canada, et deux nouvelles études cliniques ont montré qu’un vaccin antipneumococcique conjugué était au moins aussi immunogène que le vaccin antipneumococcique polysaccharidique contre les 12 sérotypes pathogènes ciblés par les deux vaccins.

Le fardeau des IIP : incidence et mortalité croissantes avec l’âge

L’incidence des IIP est à la hausse chez les adultes, souligne le Pr Tobias Welte, École de médecine de Hanovre, Allemagne. En Europe, par exemple, l’incidence est passée de 13,9 pour 100 000 adultes durant la période 1997-2001 à 19,55 pour 100 000 adultes durant la période 2005-2007.

Bien que la prise en charge des patients hospitalisés pour une IIP se soit améliorée, la mortalité est demeurée presque inchangée pendant la deuxième moitié du XXe siècle, le taux avoisinant 12 %, note le Pr Welte. Les facteurs qui influent sur l’issue des IIP chez l’adulte sont l’âge, le foyer de l’infection à S. pneumoniae, les sérotypes de S. pneumoniae, et la comorbidité. Le taux de létalité des IIP augmente radicalement après l’âge de 44 ans et continue d’augmenter par la suite, pour finalement atteindre 40 % en cas de méningite et de septicémie et environ 20 % en cas de pneumonie chez les patients de plus de 75 ans.

Chez l’adulte, l’IIP prend la forme d’une pneumonie dans 50 à 80 % des cas, et la morbi-mortalité associée à la pneumonie chez l’adulte est considérable. L’incidence augmente à partir de la quarantaine, et si la mortalité atteint 1 à 2 % chez les patients ambulatoires, elle atteint de 10 à 20 % chez les patients hospitalisés. C’est toutefois chez les patients admis à l’unité des soins intensifs qu’elle atteint un maximum, soit près de 50 %.

Bien que les statistiques varient d’un pays à l’autre, on estime que S. pneumoniae cause jusqu’à 68 % des cas de PC, dont le fardeau de morbidité est particulièrement lourd chez les adultes. Environ 20 à 25 % des adultes atteints de PC sont hospitalisés, explique le Pr Welte, et la mortalité augmente avec l’âge parmi ces patients. Par exemple, le taux de mortalité atteint près de 7 % chez les 50 à 59 ans alors qu’il excède 25 % à partir de l’âge de 90 ans. Dans les résidences pour personnes âgées, S. pneumoniae est de loin le plus fréquent des agents pathogènes responsables des PC. Moins de 30 sérotypes de S. pneumoniae sont à l’origine de plus de 90 % des IIP mortelles chez l’adulte. Chez les individus de plus de 16 ans, les sérotypes 19A et 3 sont associés à un taux de létalité d’environ 50 %. «Certains sérotypes ne sont pas ciblés par les vaccins, et ce sont ceux qui sont associés au plus haut taux de mortalité», précise le Pr Welte.

Influence de la comorbidité

La comorbidité accroît le risque d’infection à pneumocoque et la sévérité de l’infection, poursuit le Pr Welte. Les cancers non pulmonaires sont les affections le plus souvent associées aux PC et aux IIP, quoique les maladies rénales et cardiaques et d’autres pathologies pulmonaires soient aussi importantes. Selon des données allemandes de 2005-2006, le taux de mortalité serait de 17,4 % chez les patients hospitalisés aux prises avec des affections concomitantes. Une étude d’observation réalisée au Veterans Affairs Hospital, Louisville, Kentucky, a mis en évidence une association entre la PC et l’infarctus du myocarde (IM) aigu, survenu chez 20 % des patients atteints de PC victimes d’une défaillance respiratoire ou d’un choc. Parmi les patients atteints de PC, les taux de mortalité à 30 et à 90 jours étaient significativement plus élevés chez ceux qui étaient aux prises avec une maladie pulmonaire obstructive chronique (MPOC) que chez ceux qui ne l’étaient pas. Chez les patients souffrant de MPOC, l’indice de sévérité de la pneumonie et le taux d’admission à l’unité des soins intensifs étaient plus élevés.

PC : diagnostic difficile

La PC doit être différenciée des infections respiratoires inférieures non pulmonaires, ce qui n’est pas toujours évident, affirme la Dre Mary Slack, division des services de microbiologie de la Health Protection Agency, Colindale, Londres, Royaume-Uni. Comme le souligne cette dernière, bien que l’idéal en pareil cas soit de faire une radiographie pulmonaire et d’identifier l’agent pathogène en cause, «c’est rarement ce qui se passe dans la pratique». Les tests de laboratoire traditionnels (c.-à-d., hémoculture et culture des expectorations) ne sont pas très utiles, explique la Dre Slack. Le pneumocoque est en cause dans au moins 35 % des PC, mais aucun agent pathogène n’est isolé dans environ 50 % des PC. Le pneumocoque est probablement responsable d’une proportion considérable des PC où aucun agent pathogène n’est isolé, ajoute-t-elle.

Tendances quant aux sérotypes responsables des IIP chez les adultes au Canada

Selon les statistiques du Toronto Invasive Bacterial Disease Network, qui procède au sérotypage des isolats dans les infections respiratoires, depuis que le vaccin antipneumococcique conjugué heptavalent (Pneu-C-7) est utilisé systématiquement chez les enfants, l’incidence des IIP imputables aux sérotypes ciblés par le Pneu-C-7 est en baisse chez les adultes de Toronto alors que celle des IIP causées par les sérotypes maintenant ciblés par le Pneu-C-13 et non ciblés par un vaccin antipneumococcique conjugué est en hausse. (Les provinces canadiennes ont inclus le Pneu-C-7 dans le calendrier vaccinal pédiatrique entre 2002 et 2005.) De 2002 à 2009, la proportion des IIP dues aux sérotypes ciblés par le Pneu-C-7 a chuté de 57 à 17 % alors que la proportion des IIP imputables aux sérotypes ciblés par le Pneu-C-13, mais non par le Pneu-C-7, a augmenté, passant de 17 à 44 %. L’incidence des IIP imputables aux sérotypes non ciblés par un vaccin antipneumococcique conjugué est ainsi passée de 1,2 à 2,0/100 000/année chez les adultes de moins de 65 ans et de 9,7 à 12/100,000/année chez ceux de 65 ans ou plus.

Mieux vaut prévenir que guérir

Pour abaisser la mortalité associée aux PC et aux IIP, il faudra prendre des mesures de prévention plus musclées, prévient le Pr Welte. L’introduction du Pneu-C-7 chez les enfants a eu un effet marqué sur la résistance aux macrolides. À en juger par les isolats bactériens soumis au Canadian Bacterial Surveillance Network pour analyse, l’incidence des IIP dues aux sérotypes ciblés par le Pneu-C-7 est en baisse chez les adultes depuis l’avènement de la vaccination systématique des enfants par le Pneu-C-7. De 2000 à 2009, le pourcentage des IIP imputables aux sérotypes ciblés par le Pneu-C-7 a chuté, passant de 56 à 18 %, alors que le pourcentage des IIP imputables aux sérotypes maintenant ciblés par le Pneu-C-13 mais pas par le Pneu-C-7, a augmenté, passant de 18 à 43 %. De 2000 à 2009, la résistance à au moins une classe d’antibiotiques est passée de 16 à 27 % et la multirésistance, de 1 à 5 %.

Chez les adultes jamais vaccinés, la vaccination pourrait offrir une protection à long terme. Les vaccins conjugués pourraient mieux protéger contre les infections invasives du fait de la conjugaison d’un polysaccharide entier à une protéine transporteuse, explique la Pre Behazine Combadière, INSERM, Paris, France. La conjugaison «provoque une réponse immunitaire T-dépendante à l’antigène polysaccharidique, ce qui a l’avantage de générer des anticorps de haute affinité, de créer une mémoire immunitaire et d’induire une capacité de réponse aux doses de rappel», poursuit-elle.

Deux nouvelles études ont montré que le Pneu-C-13 était au moins aussi immunogène qu’un vaccin antipneumococcique polysaccharidique non conjugué contre les 12 sérotypes ciblés par les deux vaccins. Ces résultats ont été mis en évidence chez des adultes d’au moins 50 ans qui n’avaient jamais été vaccinés ou qui avaient déjà reçu le vaccin antipneumococcique polysaccharidique, rapporte la Dre Lisa A. Jackson, Group Health Research Institute, Seattle, Washington.

Les deux études regroupaient plus de 2170 patients, et l’une d’elles ne ciblait que des patients de 70 ans ou plus qui avaient déjà reçu le vaccin polysaccharidique au moins 5 ans plus tôt. Dans l’autre étude, 835 adultes de 60 à 64 ans qui n’avaient jamais été vaccinés recevaient une dose unique du Pneu-C-13 ou du vaccin polysaccharidique; et un groupe additionnel de 404 adultes de 50 à 59 ans recevaient le Pneu-C-13 en mode ouvert.

L’analyse des données en fonction des paramètres secondaires de ces études a révélé qu’une dose du Pneu-C-13 – par comparaison à une dose du vaccin polysaccharidique – générait une réponse anticorps fonctionnelle significativement plus marquée sur le plan statistique contre la plupart des sérotypes ciblés par les deux vaccins et le sérotype 6A, qui est ciblé uniquement par le Pneu-C-13. Dans les deux études, les vaccins ont eu des effets indésirables comparables, des réactions au point d’injection pour la plupart.

Résumé

Les chercheurs présents au congrès s’accordaient à dire que les IIP et les PC chez l’adulte sont très préoccupantes à l’échelle mondiale. L’âge est l’un des principaux facteurs de risque d’infection à pneumocoque, et le taux de létalité de l’IIP augmente avec l’âge. La comorbidité accroît le risque d’infection à pneumocoque et la sévérité de l’infection chez l’adulte. Le diagnostic demeure difficile malgré une investigation des plus rigoureuses, ce qui complique le traitement. La stratégie de prévention par la vaccination contre les sérotypes responsables des IIP les plus sévères aura probablement pour conséquence une diminution substantielle de la morbi-mortalité imputable aux IIP. Le vaccin conjugué offre une efficacité digne de mention contre les infections invasives et s’est révélé au moins aussi immunogène qu’un vaccin polysaccharidique non conjugué chez les adultes contre les 12 sérotypes ciblés par les deux vaccins.

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