Comptes rendus

Optimisation du traitement des maladies respiratoires pour un bassin de patients toujours plus nombreux
Implications de la pression intraoculaire et du débit sanguin oculaire dans le glaucome

Nouvelles données et stratégies de traitement dans les affections prostatiques

Le présent compte rendu est fondé sur des données médicales présentées lors d'un congrès de médecine reconnu ou publiées dans une revue avec comité de lecture ou dans un commentaire signé par un professionnel de la santé reconnu. La matière abordée dans ce compte rendu s'adresse uniquement aux professionnels de la santé reconnus du Canada.

La 101e Assemblée annuelle de l’American Urological Association (AUA)

Atlanta, Géorgie / 20-25 mai 2006

L’étude des causes de l’hypertrophie prostatique a récemment conduit les chercheurs à examiner le rôle de l’infiltration inflammatoire chronique. Lors de l’étude MTOPS (Medical Therapy of Prostatic Symptoms), 40 % des fragments biopsiques comportaient des signes d’infiltration inflammatoire chronique, lesquels étaient plus volontiers observés chez les sujets plus âgés, ayant une prostate plus volumineuse et un taux plus élevé de l’antigène spécifique de la prostate (PSA). Au cours d’un suivi de 4,5 ans, la maladie a progressé chez 21,4 % des patients qui présentaient des infiltrats inflammatoires, comparativement à 13,2 % des patients sans infiltrats. La présence d’infiltrats était associée à une augmentation similaire de la progression des symptômes et du recours obligatoire au traitement invasif (Kramer G, Marberger M. Curr Opin Urol 2006;16[1]:25-9). D’autres données ont établi un lien entre un taux élevé de protéine C réactive et la présence d’au moins trois symptômes urinaires signalés par le patient (Novara et al. Eur Urol Suppl 2006;5:401-9).

«D’un point de vue conceptuel, pronostique et prédictif, et peut-être même thérapeutique, l’inflammation pourrait représenter une piste intéressante à explorer», note le Dr Steven Kaplan, Weill Medical College, Cornell University, New York.

Nouvelles variables pronostiques

Le rôle de l’obésité dans les symptômes urinaires et le volume de la prostate a suscité un intérêt considérable chez les investigateurs en urologie. Par exemple, des données de la Baltimore Longitudinal Study of Aging ont fait ressortir un parallélisme entre, d’une part, l’accroissement de l’indice de masse corporelle (IMC) et, d’autre part, l’aggravation des symptômes urinaires et l’augmentation du volume de la prostate (Parsons et al. J Urol 2005;174[suppl]:résumé 1278). Selon d’autres données, le tour de taille et un IMC élevé sont tous deux associés à un risque accru d’hypertrophie bénigne de la prostate (HBP) (Lee et al. Obesity 2006;4:172-9).

Les urologues ont globalement écarté le volume du résidu post-mictionnel (RPM) comme facteur contribuant à l’HBP, indique le Dr Kaplan. Toutefois, une nouvelle analyse des données de l’étude MTOPS a révélé que le quartile le plus élevé des RPM était associé à la vitesse et au risque relatif de progression globale de l’HBP les plus élevés. Une association similaire a été observée pour la progression des symptômes et le risque de rétention urinaire aiguë (Roehrborn et al. J Urol 2005;174[suppl]:résumé 1638).

Les rapports entre les symptômes du bas appareil urinaire (SBAU) et la dysfonction sexuelle constituent un autre domaine de recherche récent. Des études épidémiologiques regroupant 12 815 hommes ont indiqué que les SBAU sont un facteur de risque indépendant de dysfonction sexuelle. La nature exacte de cette relation reste à élucider, précise le Dr Kaplan, mais les données existantes portent à croire que le traitement par un alpha-bloquant, un inhibiteur de la phosphodiestérase de type 5 ou une association d’agents pourrait améliorer à la fois les SBAU et la fonction sexuelle (Rosen RC. Curr Opin Urol 2006;16:11-9).

Le volume de la zone de transition (VZT) représente aussi un facteur pronostique potentiel de même qu’une cible de traitement chez les hommes souffrant d’HBP et/ou présentant des SBAU, poursuit le Dr Kaplan. Selon les résultats d’une vaste étude clinique portant sur le dutastéride, un inhibiteur de la 5 alpha-réductase (5AR), cet agent a réduit la stimulation androgénique se répercutant sur le VZT et le volume de la zone périphérique. Comparativement au placebo, l’agent à l’étude a amélioré le score des symptômes et le débit urinaire maximal pour tous les tertiles de l’index de la zone de transition (IZT). C’est dans le tertile de l’IZT le plus élevé que le traitement a été le plus bénéfique (Marks et al. J Urol 2005;174[suppl]:résumé 1703, 1704).

La testostérone sérique est un autre enjeu potentiel dans la prise en charge de l’HBP, des SBAU et de la dysfonction sexuelle. De faibles taux sériques de testostérone sont associés à une diminution de l’activité sexuelle, à la dysfonction érectile, à une baisse de la libido, à une augmentation du volume de la prostate et à un IMC élevé. L’évaluation clinique du dutastéride a démontré l’efficacité de la double inhibition de la 5AR exercée par cet agent pour atténuer les symptômes prostatiques pour tout le spectre des taux de testostérone pris en compte (Marberger et al. J Clin Endocrinol Metab 2006;91:1323-8).

Résolution d’une énigme

Les résultats de l’étude PCPT (Prostate Cancer Prevention Trial) ont confirmé que l’ère de la chimioprévention du cancer de la prostate est arrivée. Les résultats ont montré que, chez les hommes qui ne présentaient aucun signe de cancer de la prostate au départ, le traitement par le finastéride – un inhibiteur de la 5AR – administré pendant une période maximale de sept ans avait réduit l’incidence du cancer de la prostate de 24,4 % comparativement au placebo (Thompson et al. N Engl J Med 2003;349:215-24).

L’incidence des cancers de la prostate à forte malignité était, il est vrai, significativement plus élevée dans le groupe sous traitement actif (p<0,001), ce qui a fait craindre que le traitement ait contribué à induire des cancers à forte malignité, rapporte le Dr Claus Roehrborn, professeur titulaire et directeur, service d’urologie, University of Texas Southwestern Medical Center, Dallas. Cependant, des données produites depuis la publication des résultats de l’étude PCPT indiquent que la disparité dans les cancers à forte malignité résultait d’un artéfact lié à la détermination du grade, et non d’un effet inducteur de cancer de l’inhibiteur de la 5AR. Plus tôt cette année, des investigateurs du University of Toronto-Princess Margaret Hospital ont également observé qu’une prostate plus volumineuse réduisait les chances de diagnostiquer un cancer à forte malignité à la biopsie (Kulkarni et al. J Urol 2006;175[2]:505-9).

Deux études présentées au congrès ont corroboré cette observation. Lors de l’étude PCPT, le traitement par le finastéride a diminué l’incidence du cancer de la prostate de 25 %. Un modèle mathématique qui tenait compte de cette réduction de 25 % a démontré que l’incidence prétendument plus élevée des cancers à forte malignité constatée dans le groupe finastéride s’expliquait par la différence de volume de la prostate entre les deux groupes de traitement (Serfling et al. J Urol 2006;175[suppl 482]:résumé 1493).

La deuxième étude regroupait des données sur 3400 hommes ayant subi une prostatectomie radicale dans deux grands centres européens. L’évaluation pathologique des pièces de prostatectomie a mis au jour une diminution significative de l’incidence des tumeurs à forte malignité corrélée avec l’accroissement du volume prostatique. Le volume de la prostate est demeuré un facteur prédictif significatif des cancers à forte malignité, tant dans une analyse univariée (p<0,005) que dans une analyse multivariée (p<0,001) (Briganti et al. J Urol 2006;175[suppl 482]:résumé 1494).

Potentiel thérapeutique

Dans la mesure où la réduction du volume de la prostate influence le pronostic de l’HBP et des SBAU, il semblerait que le dutastéride puisse offrir un avantage par rapport à l’inhibiteur sélectif du type 2 de la 5AR qu’est le finastéride. L’inhibiteur de la 5AR à double action a réduit le volume de la prostate de 26 % en quatre ans, comparativement à environ 18 % pour le finastéride (Roehrborn et al. Urology 2004;63:709-15; McConnell et al. N Engl J Med 2003;349:2387-98).

«On me demande pourquoi on devrait préférer un inhibiteur de la 5AR à l’autre, relate le Dr Kaplan. Selon ce que j’ai personnellement observé, ce qui n’est aucunement documenté, le fait que le dutastéride inhibe les deux formes de la 5AR semble associé à une réponse plus homogène. Lorsqu’un patient répond à l’un ou l’autre inhibiteur, le taux de réponse est similaire pour les deux agents, mais j’ai simplement l’impression que plus de patients répondent au dutastéride.»

Les données des études qui ont évalué le dutastéride dans l’HBP permettent de supposer que l’inhibiteur à double action exerce un effet favorable sur le risque de cancer de la prostate. Une analyse qui englobait les données portant sur 4325 hommes atteints d’HBP mais exempts de signes de cancer de la prostate a montré que, après 27 mois, le traitement actif avait autorisé une réduction de plus de 50 % de l’incidence du cancer de la prostate comparativement au placebo (Andriole et al. Urology 2004;64:537-41).

Résumé

L’étude REDUCE (Reduction by Dutasteride of Prostate Cancer Events) en cours a pour objectif d’évaluer le dutastéride à titre d’agent chimiopréventif (Gomella LG. Curr Opin Urol 2005;15:29-32). Le plan de l’étude suppose une réduction de 25 % du volume de la prostate dans le groupe sous traitement actif, et l’échantillonnage biopsique comportera 10 fragments de tissu plutôt que six comme dans l’étude PCPT. Contrairement à cette dernière, l’étude REDUCE porte sur des hommes «à risque» qui doivent subir une biopsie de la prostate par suite de l’évaluation clinique. «L’effectif de l’étude REDUCE regroupe des sujets susceptibles d’être considérés comme une cible préférentielle du traitement préventif dans la perspective de toute démarche de sélection au sein de la population, affirme le Dr Roehrborn. Les inhibiteurs de la 5AR représentent une nouvelle option prometteuse dans la chimioprévention du cancer de la prostate. Les résultats de l’étude REDUCE contribueront à élucider le rôle de la double inhibition de la 5AR à cet égard.»

Commentaires

Nous vous serions reconnaissants de prendre 30 secondes pour nous aider à mieux comprendre vos besoins de formation.