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Énurésie nocturne : à bas les attitudes et les démarches dépassées

Le présent compte rendu est fondé sur des données médicales présentées lors d'un congrès de médecine reconnu ou publiées dans une revue avec comité de lecture ou dans un commentaire signé par un professionnel de la santé reconnu. La matière abordée dans ce compte rendu s'adresse uniquement aux professionnels de la santé reconnus du Canada.

PRESSE PRIORITAIRE - Primary Care Today

Toronto, Ontario / 7-9 mai 2009

L’énurésie nocturne – ou émission involontaire et fréquente d’urine pendant le sommeil à un âge où la propreté est généralement acquise – est un trouble répandu et souvent persistant. Elle touche environ 10 % des enfants de sept ans et environ 1 % de ceux de 15 ans. La prédisposition à l’énurésie nocturne est héréditaire. Ainsi, si l’un des parents a déjà eu ce problème, la probabilité que son enfant soit aux prises avec le même problème se chiffre à 44 % alors que si les deux parents l’ont eu, la probabilité grimpe à 77 % (von Gontard et al. J Urol 2001;166[6]:2438-43).

Chez les enfants aux prises avec une énurésie nocturne, l’estime de soi et les relations avec autrui sont fortement perturbées. Le sentiment de honte qui habite ces enfants et la gêne qu’ils ressentent sont des obstacles à la participation aux activités usuelles pour leur âge, comme dormir chez un ami, aller dans une colonie de vacances ou faire un voyage scolaire. «C’est un problème énorme pour eux. Seuls les querelles des parents et le divorce semblent de plus grands facteurs de stress», fait remarquer le Dr Norman Wolfish, professeur titulaire de pédiatrie, Université d’Ottawa, et pédonéphrologue, Children’s Hospital of Eastern Ontario.

En général, les parents comprennent mal les causes de l’énurésie et, bien qu’ils aspirent à être tolérants et compréhensifs, les épisodes continus d’énurésie finissent par devenir une source de frustration et de colère. Pareille réaction ne peut qu’aggraver le stress de l’enfant. Les médecins interrogent rarement les patients et leurs parents sur l’énurésie et, lorsqu’on les consulte, certains répondent que ce n’est pas un problème assez grave pour justifier une intervention de leur part. Or, comme l’énurésie nocturne peut être un obstacle de taille à la maturation psychosociale, le traitement doit être envisagé, poursuit le Dr Wolfish.

Trois facteurs clés

L’énurésie nocturne découle d’une triade de facteurs : production excessive d’urine pendant la nuit, piètre capacité fonctionnelle vésicale (semblable à celle d’un nourrisson) et trouble de l’éveil. Chacun de ces problèmes peut être d’intensité légère à sévère. En temps normal, sous l’effet du jeûne nocturne, la libération de l’hormone antidiurétique (ADH) force la vessie à concentrer l’urine en plus petite quantité. Des études ont révélé que le pic d’ADH pourrait être absent chez les enfants énurétiques et que, en conséquence, ces enfants produiraient presque autant d’urine la nuit que le jour. «Deux problèmes peuvent être liés à l’ADH : soit que sa sécrétion est insuffisante, soit que la quantité sécrétée n’a aucun effet», indique le Dr Wolfish.

La vessie se contracte uniquement pendant les périodes de sommeil lent. Si le sommeil lent occupe environ 30 % de la nuit chez l’adulte, il occupe environ 60 % de la nuit de l’enfant. «La probabilité que la vessie se vide en cas de contraction est donc assez élevée», fait-il remarquer.

Dépistage et traitement de l’énurésie nocturne

Le médecin devrait s’enquérir de l’éventualité d’une énurésie nocturne lorsqu’un jeune patient se présente pour un bilan de santé ou une autre raison, ajoute le Dr Wolfish. Si l’enfant ou le parent reconnaît l’existence d’un problème d’énurésie nocturne, il suffit généralement de procéder à une anamnèse et à un examen physique rigoureux pour exclure les causes d’une polyurie secondaire. Contrairement à la croyance populaire, une perturbation émotionnelle comme l’arrivée d’un bébé est rarement associée à l’énurésie secondaire (énurésie survenant après une période assez longue de propreté). Il est plus probable que l’enfant n’ait pas été tout à fait propre. L’échographie ou d’autres examens ne sont généralement d’aucune aide pour le diagnostic.

Le traitement vise à atténuer le problème de l’énurésie de même que ses conséquences sur les émotions de l’enfant et la dynamique familiale. Si les cas légers peuvent se résoudre rapidement, de petites améliorations peuvent revêtir une grande importance dans les cas sévères, affirme le Dr Wolfish. Par exemple, chez l’enfant qui porte des culottes d’entraînement jetables et qui continue malgré tout de mouiller son pyjama et son lit régulièrement, une simple diminution de la quantité de lessive peut représenter un énorme soulagement. Une amélioration ne serait-ce que légère contribuera au mieux-être de l’enfant et lui permettra de participer à un plus grand nombre d’activités. «La possibilité d’améliorer l’estime de soi de l’enfant est probablement l’aspect le plus important du traitement […] Il m’importe moins de “guérir” l’enfant que de lui faire comprendre que [l’énurésie nocturne] n’est pas de sa faute et que la situation finira par s’améliorer», insiste le Dr Wolfish.

Quelques mesures simples s’imposent. Par exemple, les parents doivent s’assurer que l’enfant ne boit pas trop avant de se coucher (une gorgée d’eau peut être permise, la restriction totale pouvant être perçue comme une punition), qu’il aille aux toilettes avant d’aller dormir et, dans certains cas, les parents pourront même faire lever l’enfant pour qu’il urine de nouveau au moment où ils vont dormir. «Il importe de faire en sorte que la vessie ne se remplisse pas au point de se contracter», précise le Dr Wolfish. Les culottes d’entraînement jetables sont préférables aux couches. Les thérapies comportementales comme l’attribution d’une récompense ou la pose d’une étoile autocollante sur un calendrier après une nuit sèche sont en grande partie inefficaces, et l’enfant qui ne réussit pas à atteindre son objectif peut en outre se sentir puni.

Les anticholinergiques et les antidépresseurs sont au nombre des médicaments que l’on a étudiés et employés par le passé pour traiter l’énurésie nocturne. Les antidépresseurs «devraient fonctionner en théorie», mais ils ne se sont pas révélés plus efficaces qu’un placebo, fait valoir le Dr Wolfish. Les antidépresseurs tricycliques permettent d’obtenir une amélioration raisonnable (taux de réponse d’environ 40 %), mais ils sont associés à un taux élevé de rechute et entraînent d’importants effets indésirables, notamment des arythmies ventriculaires, voire la mort subite.

Démarches recommandées

La Société canadienne de pédiatrie recommande l’utilisation de la desmopressine (analogue synthétique de l’ADH) et/ou d’un dispositif d’alarme qui réveille l’enfant dès que le capteur détecte de l’humidité. Les dispositifs d’alarme sont probablement préférables à partir de l’âge de huit ans, car les périodes de sommeil lent raccourcissent avec l’âge. La sonnerie d’une alarme qui réveille toute la maisonnée sauf l’enfant énurétique n’est évidemment pas acceptable. Ces dispositifs sont généralement associés à un taux d’échec élevé à cause de l’inobservance et de l’arrêt prématuré du traitement.

Lors d’études cliniques, la desmopressine a atteint des taux d’efficacité avoisinant 80 % (Janknegt et al. J Urol 1997;157[2]:513-7), mais on peut s’attendre à une amélioration de 50 à 80 %, selon la sévérité du trouble. L’une des préparations de desmopressine, la DDAVP, est offerte en comprimés ou en préparation que l’on place sur la langue ou sous celle-ci pour la faire fondre. Cette dernière forme posologique est souvent populaire auprès des enfants qui trouvent difficile d’avaler un comprimé. En outre, précise le Dr Wolfish, la quantité d’eau que doit ingérer l’enfant pour avaler un comprimé favorise la production d’urine. La préparation fondante a une durée d’action qui varie entre sept et 11 heures, par comparaison à une durée pouvant atteindre 14 heures pour le comprimé. (La préparation en vaporisation nasale, dont la durée d’action est de 20 heures, est contre-indiquée pour l’énurésie nocturne.) «La préparation désintégrable est plus conforme à la physiologie», enchaîne le Dr Wolfish. Elle complète l’ADH seulement durant le sommeil, et son effet s’estompe le lendemain matin, lorsque l’enfant commence à consommer des liquides.

La préparation désintégrable doit être administrée à une dose initiale de 120 µg, laquelle peut ensuite être portée à 240 µg, puis à 360 µg (dose maximale) à intervalles de trois jours, en l’absence d’une amélioration suffisante de l’énurésie. (La préparation fondante est offerte en deux teneurs, 120 µg et 240 µg, pour faciliter l’administration.) Les parents doivent être sensibilisés à l’importance de restreindre la consommation de liquide une heure avant l’administration de la desmopressine et pendant les huit heures qui suivent (c.-à-d. jusqu’au lendemain matin). «Combien de temps faut-il traiter? Jusqu’à ce que le problème disparaisse […] J’aime que l’enfant soit tout à fait propre toutes les nuits sans exception pendant trois mois, après quoi je diminue la dose, ce qui me permet de vérifier que les mécanismes de maturation ont pris le dessus pour assurer la propreté», conclut le Dr Wolfish.

Il ne suffit peut-être pas de rassurer l’enfant ou ses parents

Bien que l’énurésie nocturne soit manifestement liée à une maturation plus lente que la normale du contrôle de la vessie, il ne suffit pas toujours de dire à l’enfant ou à ses parents que le problème finira par disparaître, étant donné les énormes répercussions de ce problème sur l’enfant et sa famille. L’énurésie nocturne doit être évaluée et traitée, surtout lorsqu’elle survient deux ou trois fois par semaine, voire plus souvent, qu’elle persiste après le début de l’école ou qu’elle mine la qualité de vie de l’enfant. «Il faut surveiller l’enfant énurétique de près», insiste le Dr Wolfish, et pour favoriser l’observance et le succès du traitement, on doit le faire participer au choix de la stratégie de prise en charge.

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