Comptes rendus

Enjeux du traitement de l’asthme chez l’enfant
Traitement des mycoses et de la neutropénie connexe

Progression logique vers l’optimisation du traitement de l’ostéoporose

Le présent compte rendu est fondé sur des données médicales présentées lors d'un congrès de médecine reconnu ou publiées dans une revue avec comité de lecture ou dans un commentaire signé par un professionnel de la santé reconnu. La matière abordée dans ce compte rendu s'adresse uniquement aux professionnels de la santé reconnus du Canada.

Le 6e Congrès européen sur les aspects cliniques et économiques de l’ostéoporose et de l’arthrose

Vienne, Autriche / 15-18 mars 2006

D’après la Dre Heike Bischoff-Ferrari, département de rhumatologie et Institut de médecine physique, Hôpital universitaire, Zurich, Suisse, «les suppléments de vitamine D [vit D] diminuent le risque de fracture non vertébrale [FNV] chez la personne âgée à la fois par une augmentation modérée de la densité minérale osseuse [DMO] et par une réduction du risque de chute. Deux méta-analyses donnent à penser que la vit D devrait réduire le risque de chute de plus de 20 % et le risque relatif d’une première fracture de la hanche ou de toute autre FNV d’environ 25 %.»

Rôle essentiel de la vit D

Une étude récente a montré que 64 % des femmes souffrant d’ostéoporose postménopausique avaient des taux sériques de 25-hydroxyVit D3 (25[OH]D) <75 nmol/L, précise la Dre Bischoff-Ferrari. Selon une enquête nationale d’envergure menée aux États-Unis auprès de personnes de 60 ans et plus, ambulatoires, en bonne santé et vivant à domicile, il semble qu’au plus 33 % des personnes de race blanche et seulement 12 % des personnes de race noire aient un taux de 25(OH)D >80 nmol/L. C’est là un point important parce que la vit D est essentielle au maintien de l’homéostasie calcique et de la santé osseuse du fait qu’elle augmente l’absorption intestinale du calcium et régule le renouvellement osseux. Les carences en vit D perturbent l’homéostasie phosphocalcique, sans compter qu’elles ont plusieurs autres conséquences, dont une hyperparathyroïdie secondaire se traduisant par une accélération de la résorption osseuse et du renouvellement osseux, l’ostéoporose et un risque élevé de fracture.

Au-delà des bienfaits osseux d’une meilleure absorption du calcium, des études épidémiologiques, cliniques et de laboratoire semblent indiquer que la vit D exerce un effet direct sur la force musculaire. Lors d’une étude qui portait sur des femmes âgées recevant 800 UI de vit D plus 200 mg de calcium ou seulement du calcium, et qui visait à évaluer l’effet de la vit D sur l’équilibre et la santé musculaire, on a constaté une diminution significative de 9 % des pertes d’équilibre (body sway) en l’espace de deux mois. Dans le cadre de l’étude de la Dre Bischoff-Ferrari, qui ciblait des femmes âgées fragiles vivant en centre d’accueil et présentant un taux sérique de 25(OH)D très faible, la comparaison des mêmes schémas a fait ressortir une augmentation de 5 à 11 % de la force et de la fonction musculaires de même qu’une réduction significative de 49 % du taux de chutes.

Lorsqu’elle a analysé les résultats regroupés de cinq essais de haute qualité sur les fractures de la hanche et de sept essais de haute qualité sur les FNV, la Dre Bischoff-Ferrari a constaté que les sujets ayant reçu 700 à 800 UI de vit D avaient bénéficié d’une réduction de 26 % du risque de fracture de la hanche et que le nombre de sujets à traiter pour prévenir une fracture de la hanche était de 45. La réduction du nombre de FNV, tous sites confondus, se chiffrait à 23 % et le nombre de sujets à traiter pour prévenir une FNV était de 27. L’efficacité du traitement augmentait parallèlement à la hausse du taux de 25(OH)D, et la méta-régression était significative, tant pour les fractures de la hanche que pour les FNV, lorsque les taux augmentaient. Selon l’étude NHANES, il est important de parvenir à des taux de 25(OH)D d’au moins 49 nmol/L, mais le taux optimal est plutôt de 90 à 100 nmol/L.

Besoins médicaux à combler

L’épidémie actuelle de carences en vit D chez les femmes souffrant d’ostéoporose est attribuable à une diminution de l’exposition au soleil, à une diminution de l’apport alimentaire de vit D et à une diminution de la capacité de la peau à synthétiser la vit D avec l’âge, affirme le Dr Silvano Adami, faculté de médecine, Université de Vérone, Italie. De plus, le taux d’observance du traitement quotidien par des suppléments oraux de calcium et de vit D est généralement inférieur à 40 %, ce qui contribue aussi aux carences de vit D, ajoute-t-il.

Notant les résultats dissemblables de divers bisphosphonates dans le traitement de l’ostéoporose, le Dr Adami a souligné l’ampleur des données sur l’efficacité du traitement par l’alendronate pour abaisser le risque de fracture ostéoporotique. Une méta-analyse récente, par exemple, a confirmé que la diminution moyenne des taux de fractures vertébrales et de fractures de la hanche était d’environ 55 %, tandis qu’une augmentation de 7 à 9 % de la DMO de la colonne vertébrale et de 5 à 8 % de la DMO de la hanche ralentit significativement le renouvellement osseux. L’efficacité antifracturaire de l’alendronate a semblé se maintenir dans un vaste éventail de groupes d’âge.

Le Dr Adami a souligné l’importance de la prévention des fractures en citant des données regroupées provenant d’une vingtaine d’études, selon lesquelles le risque relatif de mortalité était de 5,06 trois mois après la survenue d’une fracture de la hanche et qu’il demeurait à 1,44 cinq ans après la fracture. Une nouvelle préparation, la première de ce type dans le traitement de l’ostéoporose, combine l’alendronate, dont l’efficacité pour réduire le risque de fracture de la hanche et de fracture vertébrale a été prouvée, et une dose hebdomadaire unique de vit D. Le Dr Adami estime que l’association de 70 mg d’alendronate et de 2800 UI de cholécalciférol (vit D3) en un comprimé unique administré une fois par semaine vient combler un besoin médical critique. Dans une étude portant sur 652 femmes ménopausées, on a observé après 15 semaines une augmentation significative de 26 % des taux de vit D chez les femmes qui prenaient ce comprimé une fois par semaine par rapport aux femmes qui recevaient uniquement le bisphosphonate (p<0,001). L’association a réduit de 91 % les carences en vit D, ce qui est significatif, et de 64 % la proportion de patientes ayant un taux de 25(OH)D <37,5 nmol/L (p<0,001).

«La dose a été bien tolérée et est appropriée chez la plupart des femmes à risque de carence en vit D, d’enchaîner le Dr Adami. Un supplément additionnel de vit D pourrait être nécessaire chez les personnes très âgées», ajoute-t-il. Bien que la dose maximale tolérée chez l’adulte ait été établie à 2000 UI/jour aux États-Unis, aucune toxicité n’a été associée à un apport quotidien pouvant atteindre 10 000 UI. De même, aucun cas d’hypercalcémie ou de néphrolithiase n’a été signalé lors d’un essai où l’on administrait 5600 UI de vit D par semaine, même si l’exposition au soleil et d’autres suppléments de vit D étaient permis.

La carence en vit D, un problème au Canada

De l’avis du Dr Wojciech Olszynski, professeur de clinique en médecine, University of Saskatchewan, Saskatoon, ces données sont particulièrement pertinentes au Canada, car les Canadiens ont en moyenne des taux très faibles de vit D. En raison de l’angle du soleil d’octobre à mars et de la latitude, par exemple, la synthèse de la vit D est essentiellement inexistante. Il recommande 1000 unités/jour pendant ces mois. En été, lorsque l’exposition au soleil permet d’accumuler jusqu’à 2000 unités par jour, l’utilisation d’écrans solaires peut inhiber la synthèse de vit D, d’où une absence quasi totale de synthèse de vit D pendant toute l’année chez un grand nombre de personnes. Selon le Dr Olszynski, la solution pourrait se résumer à l’administration hebdomadaire de l’association vit D/bisphosphonate fort pratique.

«Bien que l’administration concomitante de vit D et de calcium inhibe la résorption, elle ne remplace pas le tissu osseux, note-t-il. Des études ont montré que, lorsque l’apport de calcium et de vit D est corrigé, l’alendronate augmente la densité et la résistance osseuses et améliore la minéralisation. La résorption osseuse pourrait être réduite de 40 à 60 % et les fractures, de 50 %.»

En accord avec le point de vue du Dr Olszynski selon lequel un faible taux de vit D est fréquent au Canada, des chercheurs de l’Université McGill, Montréal, Québec, ont évalué la distribution initiale des taux de 25(OH)D chez 449 hommes et femmes ménopausées de huit provinces qui recevaient un supplément de 400 UI ou moins de vit D par jour ou qui n’étaient pas traités pour l’ostéoporose lorsqu’ils ont été admis à l’étude FACTOR.

Comme le souligne l’un des co-investigateurs, le Dr Andrew C. Karaplis, Université McGill, les résultats partiels indiquent une prévalence élevée de carences en vit D. Il a rapporté un taux global moyen de 25(OH)D de 66,3 nmol/L. Près des deux tiers des patients (63,7 %) avaient un taux <75 nmol/L, taux associé à une augmentation du taux sérique de parathormone. On a observé un taux <62,5 nmol/L chez près de la moitié des participants (45 %) et un taux <50 nmol/L chez 27,4 % des patients. Dans ce dernier groupe, 1,8 % des patients avaient un taux de 25(OH)D <22,5 nmol/L et 12,7 %, un taux <37,5 nmol/L. Ni l’âge ni le sexe n’ont influé sur la prévalence des carences en vit D.

Abordant la question de la prescription de vit D chez les patients prenant des agents antirésorptifs au Canada, le Dr David Hanley, University of Calgary Health Science Centre, Alberta, a expliqué que même si les lignes directrices actuelles recommandent l’utilisation de la vit D en concomitance avec un agent antirésorptif, la majorité des Canadiens souffrant d’ostéoporose ne prennent toujours pas de vit D. Parmi les 46 226 sujets de cette étude qui prenaient un agent antirésorptif (90,3 % de femmes), seulement 37,1 % ont reçu une ordonnance au cours de l’année de suivi. En moyenne, les patients avaient à leur disposition des comprimés de vit D pour seulement 55 % des jours où ils recevaient un agent antirésorptif.

Résumé

Malgré un diagnostic d’ostéoporose nécessitant l’utilisation d’un agent antirésorptif, un nombre substantiel de patients ne prennent pas de vit D, ce qui témoigne d’une lacune de taille dans l’optimisation du traitement. Les traitements qui garantissent l’utilisation de la vit D en concomitance avec un agent antirésorptif pourraient éventuellement combler cette lacune, de conclure les chercheurs.

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