Comptes rendus

Prolongation de la survie à long terme du greffon rénal

Progrès dans le traitement de l’hypertension : associations fixes et ß-bloquants mieux tolérés

Le présent compte rendu est fondé sur des données médicales présentées lors d'un congrès de médecine reconnu ou publiées dans une revue avec comité de lecture ou dans un commentaire signé par un professionnel de la santé reconnu. La matière abordée dans ce compte rendu s'adresse uniquement aux professionnels de la santé reconnus du Canada.

PRESSE PRIORITAIRE - 2011 Canadian Hypertension Congress – Assemblée scientifique annuelleAnnual Scientific Meeting

Alliston, Ontario / 2-5 octobre 2011

Rédactrice médicale en chef : Dre Léna Coïc, Montréal, Québec

Selon le Programme éducatif canadien sur l’hypertension (PECH), la modification des habitudes de vie est la première étape du traitement de l’hypertension chez l’adulte en l’absence d’autres indications impératives. Les médecins ont à leur disposition cinq classes d’antihypertenseurs. Comme le souligne le Dr George Dresser, professeur agrégé de médecine, University of Western Ontario, London, la maîtrise de l’hypertension repose sur au moins deux agents, très souvent trois agents, dans la majorité des cas.

Chez la plupart des patients obèses, la maîtrise de l’hypertension nécessite des antihypertenseurs de plusieurs classes, souligne le Dr Raj Padwal, professeur agrégé de médecine interne, University of Alberta, Edmonton. Il a été démontré que, pour abaisser la tension artérielle (TA), il est plus efficace d’opter pour deux antihypertenseurs à faible dose que d’augmenter la dose d’un seul agent, mais «l’hypertension réfractaire est courante. Les patients prennent déjà de l’AAS et un certain nombre d’antidiabétiques, et ils doivent en plus prendre plusieurs antihypertenseurs. L’adhésion au traitement devient [donc] un énorme problème», poursuit le Dr Padwal.

Associations fixes en un comprimé

Selon les plus récentes recommandations du PECH, il est préférable, chez certains patients à risque élevé, d’ajouter un inhibiteur de l’ECA (IECA) à une dihydropyridine à action prolongée que de l’ajouter à un diurétique thiazidique ou à un diurétique apparenté, affirme la Dre Ellen Burgess, professeure titulaire de néphrologie et d’endocrinologie, University of Calgary, Alberta.

Cette recommandation découle de l’essai ACCOMPLISH qui visait à comparer deux associations fixes à base d’un IECA, le bénazépril, chez des patients hypertendus à risque élevé d’événement cardiovasculaire (CV) (J Am Coll Cardiol 2010;56:77-85). Les chercheurs ont fait état de taux de maîtrise de la TA similaires dans le groupe bénazépril + amlodipine (inhibiteur des canaux calciques [ICC]) et le groupe bénazépril + hydrochlorothiazide (HCTZ). Au chapitre du taux d’événements, par contre, il y avait une diminution significative de 20 % du risque relatif en faveur de l’association IECA + ICC (p=0,0002)», précise la Dre Burgess.

Dans le traitement de première intention de l’hypertension, l’utilisation de cette association fixe efficace a le mérite de réduire le nombre de comprimés à ingérer, de simplifier la prise de décisions pour le médecin et de maximiser les probabilités d’atteinte de la TA cible. Lors de l’essai STITCH, par exemple, les médecins de famille qui se servaient d’un algorithme simple privilégiant une association fixe ont été plus nombreux à atteindre les chiffres tensionnels cibles (~65 %) que les médecins qui suivaient un algorithme fondé sur les recommandations officielles (~50 %).

La première association fixe à regrouper le telmisartan, un antagoniste des récepteurs de l’angiotensine (ARA), et l’amlodipine, un ICC, en un seul et même comprimé a été homologuée au Canada. Chacun a déjà fait la preuve de son efficacité pour abaisser la TA, et leur association en un seul et même comprimé est perçue comme un moyen efficient de simplifier la prise de décisions thérapeutiques, d’optimiser l’adhésion au traitement et de maximiser les probabilités d’atteinte de la TA cible tout en limitant les effets indésirables.

Hétérogénéité des ß-bloquants

Les diurétiques thiazidiques, les IECA, les ARA, les ICC à action prolongée et les ß-bloquants sont tous des choix possibles dans le traitement de première intention de l’hypertension. Les ß-bloquants, par contre, ne sont pas recommandés en première intention après l’âge de 60 ans. Cela dit, de nombreux patients hypertendus souffrant d’angine ou d’insuffisance cardiaque ou ayant été victimes d’un infarctus du myocarde ont besoin d’un ß-bloquant. «C’est dans ces cas, ainsi que chez les patients hypertendus atteints de tachycardie, que nous avons besoin d’un meilleur ß-bloquant», affirme Luc Poirier, BPharm, Clinique d’hypertension, Centre hospitalier universitaire de Québec, Québec. Ce dernier a cité trois études où le nébivolol, l’aténolol, le bisoprolol et le métoprolol avaient été associés à une réduction statistiquement significative de la TA par rapport à la TA initiale, sans qu’il y ait de différence entre les agents.

Les ß-bloquants abaissent la TA principalement en diminuant la fréquence cardiaque et le débit cardiaque. Cela dit, la classe des ß-bloquants est hétérogène, de sorte que chacun se distingue des autres par son propre profil pharmacocinétique et pharmacodynamique.

Les ß-bloquants non cardiosélectifs comme le propranolol bloquent les récepteurs ß1-adrénergiques dans le cœur et les récepteurs ß2-adrénergiques dans divers organes, dont les poumons. En revanche, le nébivolol, ß-bloquant de troisième génération, est un antagoniste hautement sélectif des récepteurs ß1-adrénergiques dont la demi-vie est longue (11 à 33 heures) et dont l’autre action principale repose «sur la vasodilatation médiée par l’oxyde nitrique, explique M. Poirier. Certes, [il] bloque les récepteurs ß1-adrénergiques dans le cœur et ralentit la fréquence cardiaque comme tout autre ß-bloquant, mais il est le seul à dilater les vaisseaux par l’entremise de l’oxyde nitrique.»

Le carvédilol et le labétalol exercent aussi un effet vasodilatateur, mais ils y parviennent en bloquant les récepteurs a-adrénergiques. Contrairement au labétalol, le nébivolol n’est doté d’aucune activité sympathomimétique intrinsèque (ASI). Les agents dotés d’une ASI peuvent augmenter les résistances vasculaires périphériques et atténuer la diminution de la fréquence cardiaque et du débit cardiaque, ce qui pourrait annuler le bénéfice attendu chez les sujets à risque d’événement CV.

Il existe aussi des différences entre les ß-bloquants au chapitre de la liposolubilité : si le pindolol et le timolol sont hautement lipophiles, le nébivolol l’est quand même modérément. «Il y a donc lieu de croire que le nébivolol pourrait traverser la barrière hémato-encéphalique», ajoute M. Poirier. Lors des premières études, par contre, les chercheurs n’ont pas noté les effets indésirables typiques d’un ß-bloquant lipophile comme la fatigue, les cauchemars et la dysfonction érectile. De même, aucun des ß-bloquants hautement cardiosélectifs ne devrait entraîner des effets indésirables tels que les extrémités froides qui sont associés aux ß-bloquants agissant sur les récepteurs ß2-adrénergiques.

Figure 1. Effets hémodynamiques chez les patients hypertendus après 2 semaines


Résultats d’études

Dans le cadre d’une analyse de la Collaboration Cochrane qui regroupait 13 essais et plus de 90 000 patients, 75 % des sujets sous ß-bloquant recevaient de l’aténolol (Cochrane Database Syst Rev 2007;1:CD002003). L’aténolol et le nébivolol, ß-bloquant de troisième génération, se distinguent notamment par leur effet sur le débit cardiaque. Une étude de Kamp et al. (Am J Cardiol 2003;92:344-8) a révélé que l’aténolol avait diminué le débit cardiaque de 24 % par rapport au débit initial alors que le nébivolol l’avait augmenté de 7,1 %. Les chercheurs en ont conclu que l’aténolol abaissait la TA principalement en diminuant le débit cardiaque et la fréquence cardiaque alors que le nébivolol y parvenait en diminuant les résistances périphériques et en augmentant le volume d’éjection systolique, préservant ainsi le cœur, ce qui pourrait être important dans le traitement de l’insuffisance cardiaque.

Il a été démontré que les ß-bloquants exerçaient un effet cardioprotecteur moins marqué que d’autres classes d’antihypertenseurs. Lors de l’essai ASCOT, un schéma reposant sur l’amlodipine, un ICC, avec ou sans IECA a été comparé à un schéma traditionnel reposant sur l’aténolol, un ß-bloquant, avec ou sans diurétique dans le traitement de l’hypertension non compliquée. Les résultats ont révélé que le schéma à base d’ICC était associé non seulement à un bénéfice significativement plus marqué sur le plan des événements CV, mais aussi à une probabilité trois fois moins élevée d’apparition d’un diabète.

Lors de leur propre essai pivot, Poirier et ses collaborateurs ont évalué l’effet du nébivolol et de l’aténolol sur la sensibilité à l’insuline et l’hémodynamique (J Hypertens 2001;19:1429-35). À 16 semaines l’aténolol était associé à une diminution de 10 % de la sensibilité à l’insuline chez des adultes hypertendus présentant une intolérance au glucose alors que le nébivolol n’avait entraîné aucune diminution.

À en juger par les résultats de cinq essais comparatifs avec randomisation sur les ß-bloquants de première intention et ceux d’essais sur les diurétiques thiazidiques de première intention, les ß-bloquants ne seraient pas aussi efficaces pour abaisser l’incidence des AVC (tous types confondus), des événements CV (tous types confondus) et de la maladie coronarienne. Or, «l’aténolol était l’agent évalué dans quatre des cinq essais sur les ß-bloquants, et il se pourrait que l’efficacité apparemment moindre des ß-bloquants de première intention ne s’applique qu’à l’aténolol», fait remarquer M. Poirier. L’explication pourrait être que l’aténolol est associé à une rigidité artérielle plus prononcée et que les vaisseaux ne sont donc pas aussi compliants en sa présence. Les taux plus élevés de morbidité et de mortalité seraient alors logiques, enchaîne M. Poirier.

Lors des essais pivots menés au Canada, Lacourcière et al. ont constaté que le nébivolol et la nifédipine étaient associés à des chiffres tensionnels similaires, tant en clinique qu’en ambulatoire sur 24 heures, et que ni l’un ni l’autre n’altéraient le bilan lipidique (Am J Ther 1998;5[4]:237-43). Tant en monothérapie qu’en association avec l’HCTZ, ce ß-bloquant peut abaisser la TA systolique et la TA diastolique de façon marquée. Les chercheurs ont par ailleurs noté que son efficacité et son innocuité ne variaient pas selon que le patient métabolisait le médicament lentement ou rapidement (Br J Clin Pharmacol 2006:63:575-82).

«Nous ne savons pas encore si toutes ces nouvelles propriétés se traduiront par une diminution de la morbi-mortalité, conclut M. Poirier, mais une chose est certaine : nous avons besoin d’un ß-bloquant mieux toléré dont l’action est davantage axée sur la vasodilatation périphérique que sur la diminution du débit cardiaque.»

Résumé

Compte tenu de l’efficacité établie des différentes classes d’antihypertenseurs, l’avènement de l’association fixe telmisartan + amlodipine en un comprimé à prendre 1 fois/jour pourrait constituer une nouvelle option de traitement de l’hypertension toute simple et efficiente qui encourage l’adhésion au traitement. En outre, pour les patients souffrant d’angine ou d’insuffisance cardiaque, l’arrivée sur le marché d’un ß-bloquant de troisième génération plus efficace et bien toléré est un pas dans la bonne direction.

Note : Au moment de la mise sous presse, nébivolol n’était pas commercialisé au Canada.

Commentaires

Nous vous serions reconnaissants de prendre 30 secondes pour nous aider à mieux comprendre vos besoins de formation.