Comptes rendus

Optimiser le traitement de l’hypertension pour améliorer l’issue rénale chez le patient atteint de diabète
Stratégies d’utilisation concomitante d’antiviraux et d’immunosuppresseurs chez le transplanté hépatique

Regard sur de nouvelles options de traitement dans le syndrome de la vessie hyperactive

Le présent compte rendu est fondé sur des données médicales présentées lors d'un congrès de médecine reconnu ou publiées dans une revue avec comité de lecture ou dans un commentaire signé par un professionnel de la santé reconnu. La matière abordée dans ce compte rendu s'adresse uniquement aux professionnels de la santé reconnus du Canada.

PRESSE PRIORITAIRE - 107e Assemblée annuelle de l’American Urological Association

Atlanta, Géorgie / 19-24 mai 2012

Les anticholinergiques sont devenus la pierre angulaire du traitement de la vessie hyperactive, mais nombreux sont les patients qui n’y répondent pas bien ou ne les tolèrent pas.

De petits essais cliniques sur l’utilisation de la toxine botulinique de type A dans le traitement de la vessie hyperactive ont donné de bons résultats. Comme l’explique le Dr Victor Nitti, New York University, New York, il a été démontré que cette toxine bloque la libération d’acétylcholine, ce qui permet d’inhiber la voie efférente du réflexe mictionnel (activité du détrusor); elle pourrait aussi bloquer la libération de neurotransmetteurs au niveau des voies motrices et sensitives associées aux symptômes de l’hyperactivité vésicale. Les résultats favorables des études à petite échelle ont motivé la tenue dans 72 centres d’une étude de phase III avec randomisation et placebo d’une durée de 24 semaines. Cette étude avait pour objectif d’évaluer l’innocuité et l’efficacité de la toxine bolutinique A chez 557 patients dont l’hyperactivité vésicale n’était pas bien maîtrisée par un anticholinergique.

Les chercheurs n’ont recruté que des patients présentant une hyperactivité vésicale avec incontinence depuis au moins 6 mois. Les sujets ont indiqué dans leur journal au moins 3 épisodes d’urgence mictionnelle par jour durant 3 jours. Le tableau clinique incluait en outre ≥8 mictions par jour et un résidu postmictionnel (RPM) ≤100 mL, et le traitement anticholinergique était associé à une maîtrise insuffisante des symptômes ou à des effets indésirables intolérables. Les patients ont été randomisés de façon à recevoir dans le détrusor 20 injections de toxine botulinique A (0,5 mL par point d’injection) ou d’un placebo, et la reprise du traitement (100 U) était autorisée après 12 semaines.

Les paramètres principaux étaient le nombre d’épisodes d’incontinence urinaire et la proportion de patients qui répondaient aux critères d’une bonne réponse au traitement selon l’échelle TBS (Treatment Benefit Scale). Parmi les paramètres secondaires figuraient le nombre de mictions, le nombre d’épisodes d’urgence mictionnelle, le volume mictionnel, le score de qualité de vie liée à l’incontinence (I-QOL), et les sous-scores du questionnaire KHQ (King’s Health Questionnaire) concernant la limitation des rôles fonctionnels et la limitation des activités sociales.

Les effets indésirables majeurs étaient notamment la rétention urinaire et l’infection urinaire. La rétention urinaire était définie par le recours au sondage intermittent propre en réponse à un RPM ≥200 mL et <350 mL avec symptômes ou à un RPM ≥350 mL, avec ou sans symptômes. L’infection urinaire était définie par une culture urinaire positive, une bactériurie >105 UFC/mL et une leucocyturie >5/hpf.

L’hyperactivité vésicale remontait en moyenne à près de 7 ans. Les patients – traités depuis 2,5 ans en moyenne – avaient reçu deux ou trois anticholinergiques. Ils avaient en moyenne >5 épisodes d’incontinence par jour, 12 mictions par jour, >8 épisodes d’urgence mictionnelle par jour et >2 mictions par nuit. «Les symptômes de l’hyperactivité vésicale étaient très sévères chez tous les patients», affirme le Dr Nitti.

Chez les patients qui ont reçu la toxine botulinique A, le nombre quotidien d’épisodes d’incontinence a diminué en moyenne de 2,65 vs 0,85 dans le groupe placebo (p<0,001). L’écart entre les deux groupes quant à l’effet du traitement est apparu en 2 semaines, la diminution moyenne atteignant 2,85 épisodes dans le groupe de traitement actif vs 1,09 dans le groupe placebo (p<0,001). À 6 semaines, elle atteignait 3,05 épisodes par rapport au nombre initial vs 1,07 dans le groupe placebo (p<0,001). «L’écart entre les deux groupes quant à l’effet du traitement sur l’incontinence est apparu très tôt, et la différence en faveur de la toxine botulinique A est demeurée significative lors de chacune des évaluations des 12 premières semaines», note le Dr Nitti.

Toujours au chapitre de l’incontinence, on a observé une diminution d’au moins 50 % du nombre quotidien d’épisodes chez plus de 50 % des sujets du groupe de traitement actif vs 28,9 % des sujets du groupe placebo (p<0,001), et 23 % des sujets ont fait état d’une disparition complète de l’incontinence à 12 semaines vs 6,5 % des témoins (p<0,001). Le RPM a diminué de 32,6 mL sous l’effet de la toxine botulinique A vs 2,5 mL sous placebo (p<0,001).

Pour chacun des paramètres liés à l’hyperactivité vésicale, on a observé, en pourcentage, une diminution significativement plus marquée par rapport aux valeurs initiales chez les sujets sous traitement actif (Tableau 1). «Chacune de ces différences représente une amélioration statistiquement et cliniquement significative en faveur du traitement par la toxine botulinique A, précise le Dr Nitti. L’amélioration de chacun des paramètres était 3 à 4 fois plus marquée sous traitement actif.» Les paramètres secondaires ont aussi objectivé une amélioration constante et statistiquement significative à 12 semaines.

«L’écart est considéré comme minimalement important s’il est de ≥10 points dans le cas de l’échelle I-QOL et de ≥5 points dans le cas du KHQ, affirme le Dr Nitti. L’amélioration excédait de loin l’écart minimalement important chez les patients qui ont reçu la toxine botulinique A alors que les patients sous placebo n’ont pas atteint le critère d’amélioration minimale.»

Pour chacun des paramètres d’évaluation de la qualité de vie liée à la santé, on a observé des différences significatives en faveur du traitement actif au cours des 2 premières semaines, et ces différences sont demeurées significatives tout au long des 12 semaines de suivi (paramètres principaux et paramètres secondaires). Comparativement au placebo, le traitement actif a été associé à une amélioration significative de chacun des domaines de l’échelle I-QOL (p<0,001 pour toutes les comparaisons) de même qu’à chacun des six domaines du KHQ (p<0,001 pour toutes les comparaisons).

 

Les effets indésirables les plus fréquents durant les 12 premières semaines de traitement par la toxine botulinique A étaient l’infection urinaire (15,5 %), la dysurie (12,2 %), la bactériurie (5,0 %) et la rétention urinaire (5,4 %). L’hématurie a été plus fréquente sous placebo (5,5 % vs 2,5 %). En outre, le taux de recours au sondage intermittent propre variait entre 4,7 % à 2 semaines et 2,9 % à 12 semaines dans le groupe toxine botulinique A; 6,1 % des patients ont eu besoin d’un sondage intermittent propre à un moment donné, alors qu’aucun sujet du groupe placebo n’en a eu besoin.

Le taux d’abandon toutes causes confondues a atteint 11,1 % dans le groupe sous toxine botulinique A vs 12,3 % dans le groupe placebo. Les effets indésirables ont motivé 1,8 % et 1,4 % des abandons, respectivement.

«L’administration de 100 U de toxine botulinique A aux patients atteints d’hyperactivité vésicale avec incontinence urinaire qui ne répondaient pas totalement aux anticholinergiques a donné lieu à des diminutions significatives et cliniquement pertinentes de tous les symptômes de l’hyperactivité vésicale», conclut le Dr Nitti. De l’avis des patients, le traitement a nettement amélioré leur état et leur qualité de vie. Le profil d’innocuité du traitement est acceptable, les effets indésirables étant surtout locaux.

Nouvelles options

Selon des données présentées au congrès, la fésotérodine, un nouvel antimuscarinique, a été associée à une diminution significative des symptômes de l’hyperactivité vésicale chez des patients de 65 ans ou plus qui présentaient une incontinence urinaire d’urgence. Cet essai avec placebo regroupait 552 patients qui étaient âgés en moyenne de 75 ans, dont 50,4 % avaient au moins 75 ans, et dont le score de vulnérabilité (VES [Vulnerable Elders Survey]) était ≥3. Le protocole de l’étude prévoyait un schéma posologique variable selon le soulagement des symptômes et les effets indésirables (résumé 1352).

Après 12 semaines, le traitement avait permis une diminution moyenne de 2,84 épisodes d’incontinence par jour vs 2,20 épisodes dans le groupe placebo (p=0,0018). Le nombre quotidien moyen de mictions avait baissé de 2,34 sous fésotérodine et de 1,50 sous placebo (p=0,0003).

Le Dr Masayuki Takeda, Université de Yamanashi, Japon, qui faisait un tour d’horizon des actualités en urologie de la femme et en urodynamie, a passé en revue plusieurs autres traitements de l’hyperactivité vésicale.

Il a notamment été question d’une étude sur l’oxybutynine en gel pour application transdermique (1 fois/jour pendant 12 semaines), qui regroupait 542 patients présentant une vessie hyperactive. Les résultats ont montré que l’anticholinergique en gel, comparativement au placebo, était associé à une amélioration significative du nombre d’épisodes d’incontinence par semaine, de la fréquence des mictions par jour et du volume mictionnel (résumé 522).

Dotés d’un mode d’action novateur, les agonistes des récepteurs bêta3-adrénergiques comme le solabegron et le mirabegron représentent une nouvelle approche dans le traitement de la vessie hyperactive. Lors d’un essai de phase II avec placebo qui regroupait 258 femmes atteintes d’hyperactivité vésicale, le solabegron s’est révélé sûr et a réduit le nombre d’épisodes d’incontinence (résumé 520). Lors d’un autre essai de phase II, regroupant cette fois 200 hommes présentant des symptômes du bas appareil urinaire (SBAU) et une obstruction du col vésical, le mirabegron s’est révélé comparable à un placebo selon l’évaluation de tous les paramètres (résumé 1869). Inversement, l’implantation d’un neurostimulateur a eu du succès chez 71 % des 217 patients présentant une hyperactivité vésicale et des SBAU réfractaires au traitement initial (résumé 1956). Après 47 mois de suivi, les bénéfices associés à ce traitement à long terme étaient plus marqués chez les patients présentant une rétention idiopathique que chez les patients présentant une hyperactivité vésicale (p=0,02).

Résumé

Les antimuscariniques sont la pierre angulaire du traitement non invasif de l’hyperactivité vésicale. Les nouveaux bêta3-agonistes oraux semblent prometteurs et pourraient constituer un ajout important à l’arsenal thérapeutique. La toxine botulinique de type A, comparativement à un placebo, a atténué significativement les symptômes de l’hyperactivité vésicale sévère et réfractaire au traitement après 12 semaines dans les cas où les antimuscariniques s’étaient révélés inefficaces ou mal tolérés. Le traitement a été bien toléré, et le taux d’abandon était similaire d’un groupe à l’autre. L’implantation d’un neurostimulateur, traitement invasif, a été associée à un taux élevé de réussite chez des patients qui n’avaient pas répondu au traitement initial. 

 

Commentaires

Nous vous serions reconnaissants de prendre 30 secondes pour nous aider à mieux comprendre vos besoins de formation.