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Risque de suppression de l’axe HHS chez les enfants asthmatiques : considérations thérapeutiques

Le présent compte rendu est fondé sur des données médicales présentées lors d'un congrès de médecine reconnu ou publiées dans une revue avec comité de lecture ou dans un commentaire signé par un professionnel de la santé reconnu. La matière abordée dans ce compte rendu s'adresse uniquement aux professionnels de la santé reconnus du Canada.

PRESSE PRIORITAIRE - Le 86e Congrès annuel de la Société canadienne de pédiatrie

Ottawa, Ontario / 23-27 juin 2009

Selon les nouvelles recommandations consensuelles canadiennes sur la prise en charge de l’asthme chez les enfants, récemment acceptées pour publication dans le JAMC, les corticostéroïdes en inhalation (CI) constituent la pierre angulaire du traitement d’entretien de première intention lorsque les agonistes des récepteurs bêta-2-adrénergiques à courte durée d’action ne permettent plus de bien maîtriser la maladie, affirme le Dr Wade Watson, chef de la Division d’allergologie, Centre de soins de santé IWK, Halifax, Nouvelle-Écosse, et professeur titulaire de pédiatrie, Dalhousie University. L’administration de CI ne doit pas nécessairement être poursuivie indéfiniment, précise-t-il. En effet, la dose de CI doit être augmentée lorsque l’asthme est mal maîtrisé, et réduite, si possible, lorsque la maladie est stabilisée. En l’absence d’exacerbation après l’administration de faibles doses pendant trois à six mois, on peut envisager d’interrompre le traitement. «Comme il s’agit d’un processus dynamique, nous devons surveiller l’état de ces enfants, sans toutefois nous attendre à devoir les soigner toute leur vie», ajoute le Dr Watson.

Bien que l’absorption générale des CI soit moins marquée que celle des corticostéroïdes oraux, surtout dans le cas de faibles doses, l’exposition générale semble fonction de la dose. Citant une étude ayant établi un lien entre des doses élevées de fluticasone en inhalation et un retard statural chez des enfants d’âge préscolaire (Ducharme et al. N Engl J Med 2009;360:339-53), le Dr Watson souligne qu’il essaie d’éviter de prescrire des doses très élevées de CI. Il préfère recourir à un deuxième agent lorsque la maîtrise des symptômes est insuffisante. Il recommande de surveiller la croissance des enfants qui reçoivent une corticothérapie en inhalation à forte dose ou prolongée, et d’intensifier les efforts pour réduire les doses lorsque la croissance s’écarte de la norme.

Le praticien peut également opter pour un autre corticostéroïde, car le risque relatif d’absorption générale n’est pas le même pour tous les CI. Des études ont permis de déterminer le risque relatif de suppression de l’axe hypothalamo-hypophyso-surrénalien (HHS) associé à divers CI (Figure 1). On constate que la fluticasone est associée au risque le plus élevé, suivie du budésonide et de l’association béclométhasone/triamcinolone. La Dre Alexandra Ahmet, Children’s Hospital of Eastern Ontario, et professeure agrégée de pédiatrie, Université d’Ottawa, souligne que le ciclésonide présente le plus faible risque. Certains corticostéroïdes, comme la dexaméthasone, semblent associés à un risque particulièrement élevé de suppression de l’axe HHS par rapport à leur activité anti-inflammatoire, précise-t-elle.

Figure 1. Risque relatif de suppression de l’axe HHS associé aux CI


Plusieurs facteurs influent sur le risque de suppression de l’axe HHS, notamment les comportements pharmacodynamique et pharmacocinétique de chaque CI, qui influent sur le rapport de distribution du médicament entre les poumons et les voies intestinales. Les différences observées à ce chapitre entre les divers CI peuvent se révéler importantes au cours d’une exacerbation, lorsque la constriction pulmonaire réduit encore plus la proportion du médicament qui atteint les poumons. Lorsque la maladie est relativement bien maîtrisée, la dose inhalée est distribuée dans les poumons dans une proportion de 10 à 40 % seulement. En présence de constriction pulmonaire, une plus grande quantité du médicament passe dans les voies intestinales et y est absorbée, contribuant ainsi à la suppression de l’axe HHS. L’avantage offert par les préparations qui présentent un faible risque d’absorption intestinale et qui, de ce fait, permettent d’éviter la suppression de la fonction surrénalienne, est encore plus marqué en cas d’aggravation de la maladie.

Les propriétés du ciclésonide illustrent bien l’importance des différences pharmacologiques au sein de cette classe thérapeutique. Le ciclésonide se lie dans une proportion de 99 % aux protéines plasmatiques et s’accumule dans une proportion relativement élevée dans les poumons. Il demeure toutefois inactif jusqu’à ce qu’il soit métabolisé dans les poumons. Si le ciclésonide atteint les voies intestinales, il est rapidement métabolisé par le foie avant de passer dans la circulation générale, prévenant ainsi la suppression de l’axe HHS. Bien que la réduction du risque d’absorption générale ne soit pas associée à une activité anti-inflammatoire moindre du ciclésonide dans les poumons comparativement à d’autres CI, plusieurs études indiquent que ce médicament pourrait permettre d’éviter les effets sur la croissance attribuables à l’administration de doses élevées d’autres CI.

Cliniquement parlant, les CI ne sont pas interchangeables pour ce qui est du risque relatif de suppression de l’axe HHS. La Dre Ahmet a rappelé le cas d’un patient traité par une dose standard de fluticasone chez qui on avait observé une suppression de la fonction surrénalienne. Après substitution de la fluticasone par une dose standard de ciclésonide, la fonction de l’axe HHS est rapidement revenue à la normale et on a constaté une augmentation de la croissance. Un suivi additionnel sera nécessaire avant que l’on puisse affirmer avec certitude que le ciclésonide est le premier CI dépourvu d’effets indésirables sur la croissance, précise-t-elle, mais il reste qu’aucune inhibition de la fonction surrénalienne n’a été observée après l’administration de doses thérapeutiques de ciclésonide.

La suppression de l’axe HHS est un phénomène insidieux nécessitant une surveillance périodique, mais le médecin doit également être vigilant afin de déceler les poussées d’insuffisance surrénalienne aiguë (PISA). Cinquante cas de PISA ont été signalés récemment chez des patients sous CI, la plupart chez des enfants. Ces patients recevaient 500 mg/jour de fluticasone ou l’équivalent. Bien que les modalités de prise en charge optimale des PISA n’aient pas été définies dans le cadre d’essais comparatifs, la Dre Ahmet recommande de diminuer progressivement la dose de CI, particulièrement chez les patients ayant été exposés à des doses supérieures aux doses physiologiques pendant plus de trois semaines, puis de vérifier le fonctionnement de l’axe HHS.

Recommandations pour la réduction du risque de suppression de l’axe HHS

Plusieurs stratégies permettent de réduire le risque de PISA ou de suppression de l’axe HHS, affirme la Dre Ahmet, la plus importante étant de recourir à la plus faible dose nécessaire pour obtenir une maîtrise efficace de la maladie. Il semble également important d’administrer le médicament au moment approprié de la journée.

«En raison des rythmes circadiens, il est préférable d’administrer un corticostéroïde tôt le matin pour éviter le risque de suppression de la fonction surrénalienne. La diminution de la dose, le recours à un corticostéroïde à courte durée d’action ou la réduction de la fréquence d’administration peuvent également réduire ce risque. Il peut s’écouler jusqu’à un an avant le rétablissement fonctionnel complet de l’axe HHS, mais la durée de cette période varie considérablement d’un patient à l’autre», précise la Dre Ahmet.

Il importe de renseigner les parents sur les signes et les symptômes de suppression de la fonction surrénalienne. Si l’on soupçonne cet effet, on devra recourir à l’épreuve de stimulation par l’ACTH afin de confirmer ce diagnostic et de surveiller l’état du patient pendant toute la période de diminution progressive de la dose de corticostéroïde.

Le type et la dose de CI sont d’importants facteurs qui influent sur le risque de suppression de l’axe HHS. Toutefois, l’utilisation d’un CI chez un enfant asthmatique comporte des difficultés cliniques particulières, notamment l’observance du traitement et l’utilisation appropriée de l’inhalateur. Ainsi, avant d’augmenter la dose d’un CI, le médecin doit s’assurer que son patient prend son médicament correctement. Comme l’explique le Dr Watson, une très forte proportion d’enfants dont l’état est mal maîtrisé par des doses standards de CI ne respectent pas leur traitement, car ils omettent certaines doses ou n’utilisent pas la bonne technique d’inhalation. Ce problème est lié au jeune âge des patients, précise-t-il, ajoutant qu’il est inutile d’ajuster les doses initiales recommandées (Tableau 1) en fonction de l’âge.

Tableau 1. Doses init
es chez les enfants

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Avant d’augmenter la dose de CI, le médecin doit s’assurer que son patient respecte son traitement et traiter les affections concomitantes comme une rhinite ou une sinusite. Toute exposition à un nouvel allergène doit également être écartée. Ces mesures visent à maintenir les doses de CI au niveau le plus faible possible. De l’avis du Dr Watson, il est justifié d’augmenter la dose ou d’administrer un nouveau médicament chez un patient qui respecte son traitement et qui ne souffre d’aucune autre affection, mais dont les symptômes demeurent mal maîtrisés. Une surveillance plus étroite de ces patients s’impose en raison du risque accru de suppression de la fonction surrénalienne et de survenue d’autres effets indésirables associés aux doses plus élevées.

Résumé

Les stratégies visant à éviter la suppression de la fonction surrénalienne chez les enfants qui doivent recevoir des CI pour maîtriser leurs symptômes d’asthme sont mieux définies. Ainsi, sachant que le risque relatif de suppression de la fonction surrénalienne varie selon les CI, le médecin peut choisir les médicaments qui présentent le plus faible risque et accorder une plus grande attention à l’ajustement des doses afin d’obtenir une maîtrise efficace de la maladie à la plus faible dose possible chez son jeune patient. Le risque de suppression de la fonction surrénalienne associé à la plupart des CI d’usage courant augmente proportionnellement à la dose. On ne doit pas renoncer aux CI chez les enfants exposés à des exacerbations susceptibles de mettre leur vie en danger, mais toute augmentation de la dose impose une surveillance plus rigoureuse de la fonction de l’axe HHS.

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