Comptes rendus

Résultats à six ans de l’IES : nouvelles données sur le traitement à long terme du cancer du sein RE+
Le point sur les tuteurs pharmacoactifs

Vers une prolongation de la survie chez les patients porteurs d’un glioblastome

Le présent compte rendu est fondé sur des données médicales présentées lors d'un congrès de médecine reconnu ou publiées dans une revue avec comité de lecture ou dans un commentaire signé par un professionnel de la santé reconnu. La matière abordée dans ce compte rendu s'adresse uniquement aux professionnels de la santé reconnus du Canada.

PRESSE PRIORITAIRE - La 15e Conférence européenne sur le cancer et le 34e Congrès multidisciplinaire de l’ESMO

Berlin, Allemagne / 20-24 septembre 2009

En 2004, un essai de phase III avec randomisation mené par l’Organisation européenne de recherche sur le traitement du cancer (OERTC) et le Groupe des essais cliniques de l’Institut national du cancer du Canada (GEC-INCC) a établi une nouvelle norme de soins. En effet, cet essai a révélé que l’administration du témozolomide (TMZ) en concomitance avec la radiothérapie (RT), puis en adjuvant au décours de la RT augmentait significativement la médiane de survie et le taux de survie à deux ans par rapport à la RT seule chez des patients atteints d’un glioblastome multiforme (GBM) diagnostiqué récemment.

«Cet essai a été le premier à objectiver un bénéfice statistiquement et cliniquement significatif associé à l’ajout du TMZ à la RT», explique le Dr Warren Mason, directeur médical, Pencer Brain Tumor Centre, Princess Margaret Hospital, Toronto, Ontario. Après un suivi d’une durée médiane de 61 mois, le gain de survie significatif associé à l’ajout du TMZ – qu’on a observé à deux ans – a persisté et s’est révélé particulièrement robuste chez les patients porteurs d’une tumeur exprimant le promoteur méthylé de l’enzyme MGMT. Il est maintenant établi que les tumeurs exprimant le promoteur méthylé de la MGMT sont plus sensibles au TMZ que les tumeurs exprimant le promoteur non méthylé.

Dans sa revue des données mises à jour, le Dr Mason a rappelé aux congressistes que lors de l’essai initial, 573 patients porteurs d’un GBM nouvellement diagnostiqué avaient reçu aléatoirement soit la RT seule à raison de 60 Gy en 30 fractions, soit la même dose de RT en concomitance avec 75 mg/m2/jour de TMZ pendant 42 jours consécutifs, suivie de six cycles d’un traitement adjuvant par le TMZ à raison de 150 à 200 mg/m2/jour pendant cinq jours consécutifs sur 28.

Après deux ans, 27,2 % des patients ayant reçu l’association RT/TMZ étaient toujours en vie vs 10,9 % des patients ayant reçu la RT seule. Le taux de survie à trois, quatre et cinq ans se chiffrait à 16,0 %, 12,1 % et 9,8 dans le groupe RT/TMZ vs 4,4 % , 3,0 % et 1,9 % dans le groupe RT seule (p<0,0001). «Il y a 10 ans, jamais un patient porteur d’un GBM n’aurait survécu trois, quatre ou cinq ans, fait valoir le Dr Mason. Cet essai a donc été le prélude d’un changement important dans les données démographiques.» Les patients dont le pronostic était le plus favorable sont ceux qui ont le plus bénéficié de l’association : 40 % des sujets du groupe RT/TMZ étaient en vie après deux ans vs 20 % des sujets du groupe RT seule; après cinq ans, les pourcentages correspondants étaient 28 % et 6,8 %. Le bénéfice découlant de l’association, par rapport à la RT seule, était également apparent dans les sous-groupes de pronostic plus sombre, mais il était moins concluant, le nombre de patients en vie étant moins élevé lors de chacune des évaluations. Comme on pouvait s’y attendre, la méthylation du promoteur de la MGMT était un important facteur prédictif de la réponse et des résultats de la chimioradiothérapie à base de TMZ.

«Le pronostic de cette maladie demeure sombre, mais nous avons de bonnes raisons d’être optimistes, car quelques patients peuvent maintenant être considérés comme des survivants à long terme», conclut le Dr Mason, ajoutant que tout nouveau traitement pour le GBM doit désormais être comparé à l’association RT/TMZ, devenue le traitement de référence pour cette population difficile à traiter.

Tableau 1. Essai de l’OERTC et du GEC-INCC : taux de survie globale (%)


D’autres préparations à l’étude

Au nombre des critères d’exclusion de l’essai pivot de l’OERTC et du GEC-INCC figuraient la dysphagie, les anomalies de l’absorption gastro-intestinale, un mauvais indice fonctionnel et un âge avancé. Tous ces patients exclus, surtout les personnes âgées (la majorité des GBM surviennent à un âge avancé), pourraient bénéficier de la chimioradiothérapie à base de TMZ si le TMZ pouvait être administré autrement que par voie orale comme dans l’essai pivot.

Une préparation injectable par voie intraveineuse (i.v.) a récemment été mise au point, précise le Dr Andrew Lassman, directeur du programme de bourses post-doctorales en neuro-oncologie, Memorial Sloan-Kettering Cancer Center, New York.

Dans le cadre d’une étude pilote croisée de bioéquivalence réalisée en mode ouvert, 22 patients ont reçu consécutivement les deux préparations, et les données de pharmacocinétique étaient évaluables pour 19 d’entre eux. Les résultats ont révélé que l’aire sous la courbe (ASC) et la C<sub>max</sub> du TMZ et de son métabolite actif étaient bien conformes aux normes établies pour la bioéquivalence d’une préparation administrée par voie orale et d’une préparation injectable par voie i.v., pour autant que la préparation ait été perfusée à raison de 150 mg/m2 sur une période de 90 minutes. Aucune manifestation de toxicité inattendue n’a été observée chez les patients ayant reçu la préparation i.v., et les réactions au point d’injection étaient légères, souligne le Dr Lassman.

Pseudoprogression

Comme l’expliquait la Dre Alba Brandes, chef de l’oncologie médicale, Ospedale Bellaria-Maggiore, Bologne, Italie, l’utilisation concomitante du TMZ et de la RT augmente le taux de nécrose induite par le traitement, phénomène appelé «pseudoprogression». Malheureusement, la pseudoprogression est impossible à différencier d’une récidive tumorale sur un cliché d’imagerie, et il est ardu de distinguer une progression réelle d’une pseudoprogression lors du premier, voire du deuxième examen IRM après la chimioradiothérapie.

Cela dit, il importe de reconnaître que l’incidence de la pseudoprogression, du moins en présence d’une tumeur exprimant le promoteur méthylé de la MGMT, n’est pas sans conséquence. Lorsque la pseudoprogression – qui touche 20 à 40 % des patients de ce groupe – passe à tort pour une progression réelle, le traitement adjuvant par le TMZ risque d’être abandonné prématurément, ce qui compromet les résultats.

Dans sa propre étude sur la pseudoprogression, la Dre Brandes, entourée de son équipe, a traité 103 patients atteints d’un GBM nouvellement diagnostiqué. Les sujets recevaient du TMZ en concomitance avec la RT, puis une chimiothérapie d’entretien prolongée. «Au terme du traitement concomitant, les lésions étaient stables ou avaient régressé chez 53 patients, alors que leur taille avait augmenté chez les 50 autres, d’où le dilemme : s’agissait-il d’une progression réelle ou non?»

Au deuxième examen IRM, les chercheurs ont observé que les lésions agrandies s’étaient stabilisées ou avaient régressé chez 64 % des sujets de ce sous-groupe de 50 patients et ont confirmé que la progression était réelle chez seulement 36 % des sujets. En outre, «nous avons calculé une probabilité de pseudoprogression de 91 % chez les patients porteurs d’une tumeur exprimant le promoteur méthylé de la MGMT vs une probabilité de 59 % de progression précoce en présence du promoteur non méthylé», explique la Dre Brandes.

Pour l’ensemble de la cohorte de l’étude, la médiane de survie globale était de 20,7 mois; là encore, la médiane de survie était beaucoup plus élevée en présence du promoteur méthylé : 43 mois vs 16 mois. La médiane de survie se chiffrait à seulement 10 mois en présence d’une progression réelle précoce vs 38 mois en présence d’une pseudoprogression.

«À défaut d’une méthode claire et validée permettant de distinguer une pseudoprogression d’une progression réelle, nous estimons que le TMZ doit continuer d’être administré, à tout le moins en présence d’une tumeur qui exprime le promoteur méthylé de la MGMT, quels que soient les résultats du premier examen IRM après la radiochimothérapie», conclut la Dre Brandes. Cette pratique pourrait être considérée comme «raisonnable» vu le taux élevé de pseudoprogression chez les patients porteurs d’une tumeur exprimant le promoteur méthylé de la MGMT», ajoute-t-elle.

Résistance aux alkylants

Dans la prise en charge des gliomes malins, la résistance aux alkylants, comme la résistance au TMZ qui résulte de l’action de la MGMT, demeure un défi. Les chercheurs ont donc tenté de déterminer si l’augmentation de la dose-densité du TMZ pouvait venir à bout de cette résistance. Comme l’explique le Dr Wolfgang Wick, chef de la neuro-oncologie, Universität Heidelberg, Allemagne, les résultats d’essais récents semblent indiquer que l’exposition prolongée au TMZ pourrait donner lieu à la déplétion de l’activité MGMT des cellules et augmenter la sensibilité de ces dernières aux alkylants.

Dans le cadre de l’une de ses propres études, le Dr Wick, entouré de son équipe, s’est penché sur 21 patients atteints d’un GBM récidivant ou en progression. Les sujets de cette étude de phase II recevaient 150 mg/m²/jour de TMZ une semaine sur deux (jours 1 à 7 et 15 à 21 d’un cycle de 28 jours). Deux GBM ont répondu partiellement tandis que 17 autres se sont stabilisés. La médiane de survie sans progression a été de cinq mois. «Cette étude était non comparative, mais les résultats sont impressionnants», rapporte le Dr Wick.

Résumé

En guise de conclusion, le Dr Wick fait remarquer que les résultats de l’essai de l’OERTC et du GEC-INCC sont «encore plus convaincants» après cinq ans de suivi et que l’écart entre les deux groupes se creuse avec le temps. «Il est très important», a-t-il rappelé à l’auditoire, de ne pas se précipiter pour changer de traitement après la RT. Il vaut mieux poursuivre le traitement en cours, «car cela pourrait être dans l’intérêt de vos patients».

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