Comptes rendus

Hormonothérapie dans le cancer du sein à un stade précoce
Retombées cliniques et traitement du déficit en testostérone lié à l’âge

Traitement du myélome multiple nouvellement diagnostiqué et rôle de la greffe de cellules souches hématopoïétiques

Le présent compte rendu est fondé sur des données médicales présentées lors d'un congrès de médecine reconnu ou publiées dans une revue avec comité de lecture ou dans un commentaire signé par un professionnel de la santé reconnu. La matière abordée dans ce compte rendu s'adresse uniquement aux professionnels de la santé reconnus du Canada.

La 49e Assemblée/Exposition annuelle de l’American Society of Hematology

Atlanta, Géorgie / 8-11 décembre 2007

Une série d’études comparatives a récemment confirmé que les nouveaux protocoles de traitement du myélome multiple (MM) sont effectivement prometteurs, leur efficacité étant meilleure et leur tolérabilité, acceptable. La plus importante de ces études, VISTA (Velcade as Initial Standard Therapy in Multiple Myeloma: Assessment with Melphalan and Prednisone), est un essai de phase III sur le traitement de première intention du MM lors duquel des patients jamais traités et inaptes à subir une greffe de cellules souches hématopoïétiques (CSH) ont reçu aléatoirement le protocole standard à base de melphalan et de prednisone ou ce même protocole auquel on ajoutait du bortézomib, inhibiteur du protéasome.

VISTA

Après deux ans, le taux de survie globale se chiffrait à 82 % dans le groupe bortézomib/melphalan/prednisone (VMP) vs 69 % dans le groupe de traitement standard (p=0,0078), ce qui revient à une réduction de 40 % du risque de mortalité. Le délai de progression était de 24 mois, vs 17 mois (p=0,0000001), soit une amélioration de 52 %. Le taux de réponse complète (RC) était sept fois plus élevé (35 % vs 5 %; p<0,000001). «Ces résultats montrent que le VMP doit être considéré comme la nouvelle norme de traitement dans cette population», affirme le Dr Jesús San Miguel, chef du service d’hématologie, Hospital Clínico Universitario de Salamanca, Espagne. «La réponse a été rapide et durable dans le groupe VMP, et le taux de 35 % de RC au sein de cette population est sans précédent.»

Les résultats de cette étude de phase III conduite par 151 chercheurs répartis dans 22 pays ont donné du poids aux résultats d’un essai de phase I/II préalable sur le même protocole de traitement. Dans cet essai, le taux de survie à trois ans était de 85 % et le taux de RC, de 32 %. Si l’on tient compte également des réponses quasi-complètes (RqC), le taux de RC passe à 43 %. Comme ces taux de réponse avoisinent ceux que l’on observe chez les patients subissant une greffe de CSH, ils représentent un jalon fort important. L’ajout du bortézomib au protocole standard n’a entraîné que de légers changements dans le profil d’effets indésirables. La différence la plus notable a été l’augmentation des taux de neuropathies périphériques de classe 3 ou 4 (14 % vs 0 %, respectivement) et de fatigue de classe 3 ou 4 (8 % vs 2 %, respectivement); par contre, les cytopénies de classe 3 ou 4 étaient comparables et le taux d’abandons motivés par un effet indésirable se chiffrait à 14 % dans les deux groupes.

«Il y a de quoi se réjouir, car au moins trois essais [sur le bortézomib dans le MM] ont déjà montré un important gain de survie globale. À mon sens, cela change le traitement du tout au tout», affirme le Dr San Miguel.

L’étude VISTA, qui était randomisée, regroupait 682 patients souffrant d’un MM considérés comme inaptes à subir une chimiothérapie fortement dosée et une greffe de CSH. L’âge médian était d’environ 75 ans (seuls 23 patients étaient âgés de <65 ans). La dose de bortézomib était de 1,3 mg/m² deux fois par semaine les semaines 1, 2, 4 et 5 de chacun des cinq cycles de six semaines. En parallèle, les patients recevaient 9 mg/m² de melphalan et 60 mg/m² de prednisone du premier au quatrième jour de chaque cycle. Les sujets du groupe témoin recevaient le même protocole à base de melphalan et de prednisone, sans bortézomib.

Il importe de souligner que la durée médiane du traitement était comparable dans les deux groupes et que l’ajout du bortézomib n’a pas modifié notablement la dose-intensité de melphalan. «L’étude confirme que le protocole comportant du bortézomib est globalement plus bénéfique que le protocole à base de melphalan et de prednisone, poursuit le Dr San Miguel. La différence est apparue très rapidement. Au terme de la première année, les courbes de survie divergeaient déjà.»

Double greffe de CSH

Les progrès récents observés chez les patients âgés – qui représentent la majorité des 2000 Canadiens chez qui un MM est diagnostiqué chaque année – s’ajoutent à plusieurs nouvelles stratégies prometteuses chez les patients plus jeunes qui sont aptes à subir une greffe de CSH. Au nombre de ces stratégies figurent la double autogreffe de CSH, l’administration d’un traitement de consolidation à base de bortézomib et de thalidomide, et l’administration de bortézomib ou de thalidomide en première intention. Au congrès, plusieurs équipes ont présenté des résultats montrant que plus le traitement est intensif, meilleurs sont les résultats. Le bénéfice associé à une double autogreffe de CSH est bien documenté, mais de nouvelles données de la première étude à avoir validé cette stratégie permettent de comprendre pourquoi certains cliniciens la considèrent comme une norme de traitement.

Lors de l’étude initiale, Bologna 96, 321 patients atteints d’un MM ont été randomisés de façon à recevoir un seul cycle de melphalan à 200 mg/m² avec support de CSH ou le même protocole suivi trois à six mois plus tard du melphalan à 120 mg/m² et du busulfan à 12 mg/m² avec support de CSH. L’analyse finale vient de révéler que le taux de RqC est passé de 33 % après la première greffe à 47 % après la seconde (p=0,008). Ce gain a été corrélé avec une prolongation significative de la survie sans rechute (42 vs 23 mois; p<0,001) et de la survie sans événement (35 vs 23 mois; p=0,001). «Les bénéfices de la double autogreffe de CSH sur les plans de la survie sans rechute et de la survie sans événement étaient particulièrement évidents chez les patients qui n’avaient même pas obtenu de RqC après la première autogreffe», rapporte le Dr Michele Cavo, Istituto di Ematologia e Oncologia Medica Lorenzo e Ariosto Seragnoli, Bologne, Italie. Soulignant que l’obtention d’une RC est un marqueur de substitution de paramètres clés, dont la survie globale, le Dr Cavo fait remarquer que les résultats définitifs de l’étude Bologna 96, tout comme les résultats partiels, semblent indiquer que la double greffe de CSH devrait être considérée comme la norme de traitement du MM chez les patients plus jeunes.

Perfectionnement du traitement initial

De plus, il ressort d’une étude non randomisée distincte réalisée par la même équipe de chercheurs qu’il est possible d’améliorer le traitement administré en première intention, avant la première greffe de CSH. Lors de cette étude d’une durée médiane de 32 mois, 311 patients ont reçu de la thalidomide à raison de 200 mg/m² et de la dexaméthasone à raison de 40 mg/m² (le quatrième jour de chaque mois, en plus de deux cycles supplémentaires le premier et le troisième mois) jusqu’à la seconde greffe de CSH. La thalidomide et la dexaméthasone étaient ajoutées au même protocole à base de melphalan que celui qui était évalué dans l’étude Bologna 96. Une comparaison par appariement des sujets avec ceux de l’étude Bologna 96 a révélé que l’ajout de la thalidomide et de la dexaméthasone autorisait une amélioration relative des résultats, notamment une augmentation d’environ 60 % de la survie sans rechute (p=0,005) et de la survie sans événement (p=0,01).

L’auteure principale, la Dre Elena Zamagni, Istituto di Ematologia e Oncologia Medica Lorenzo e Ariosto Seragnoli, rappelle que selon l’analyse, le bénéfice le plus marqué de la double greffe de CSH avec ajout de thalidomide et de dexaméthasone en première intention a été observé chez les patients qui n’avaient même pas obtenu une très bonne réponse partielle (TBRP) lors de la première greffe de CSH. Elle précise que le bénéfice du traitement intensifié semble s’ajouter à celui qu’on a observé dans l’étude initiale. L’intensification du traitement pourrait toutefois ne pas nécessiter l’administration d’autres médicaments.

En effet, lors d’une étude multicentrique sur le MM qui a eu lieu en France, un traitement d’induction à base de bortézomib et de dexaméthasone (B/D) s’est révélé supérieur au protocole à base de vincristine, de doxorubicine et de dexaméthasone (VAD) comme traitement d’induction avant l’autogreffe de CSH en première intention chez des patients plus jeunes. Dans le cadre de cette étude qui regroupait 222 patients et comportait deux groupes de B/D et deux groupes de VAD, chacun avec ou sans le protocole dexaméthasone/cyclophosphamide/étoposide/cisplatine (DCEP), le duo B/D a été associé à une augmentation significative du taux combiné de RC et de RqC (22 % vs 9 %; p=0,0085) et à une augmentation du taux de TBRP (50 % vs 24 %; p=0,0001) après l’induction. Bien que l’augmentation du taux combiné de RC/RqC (38 % vs 28 %; p=0,127) n’ait pas atteint le seuil de signification statistique après l’autogreffe de CSH, l’augmentation du taux de TBRP continuait de favoriser le duo B/D (66 % vs 50 %; p=0,021).

Le traitement de consolidation est une autre stratégie que l’on évalue pour améliorer l’issue d’une autogreffe de CSH chez les patients atteints d’un MM. Dans le cadre d’une étude pilote dont l’effectif comporte actuellement 22 patients évaluables, on a commencé à administrer un schéma à base de bortézomib, de thalidomide et de dexaméthasone dans un délai de six mois à des patients qui avaient obtenu au moins une RC ou une TBRP après une autogreffe de CSH. À ce jour, six patients ont un résultat négatif à l’évaluation par réaction en chaîne de la polymérase (PCR), tandis qu’un effet antitumoral mesurable a été observé chez huit des 10 patients dont le résultat de la PCR est positif. Selon l’auteur principal de cette étude, le Dr Marco Ladetto, division d’hématologie, Università degli studi di Torino, Italie, ces premiers résultats donnent à penser que «la rémission moléculaire est un objectif que l’on peut atteindre sans recourir à la greffe».

Résumé

Les options à notre disposition pour traiter le MM s’améliorent. Si l’intensification des traitements d’induction et de consolidation chez les patients plus jeunes aptes à subir une greffe de CSH semble prometteuse, les gains de survie observés chez les sujets âgés de l’étude VISTA – qui représentent la majorité des diagnostics récents – sont considérés comme une percée clinique plus notable. Chez les patients atteints d’un MM inaptes à subir une greffe de CSH, la suggestion de faire du protocole VMP la nouvelle norme de traitement est fondée à la fois sur le gain de survie et l’augmentation relativement modeste du risque d’effets indésirables lorsque le bortézomib est ajouté au melphalan et à la prednisone.

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