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Traiter les patients à risque cardiovasculaire modéré

Le présent compte rendu est fondé sur des données médicales présentées lors d'un congrès de médecine reconnu ou publiées dans une revue avec comité de lecture ou dans un commentaire signé par un professionnel de la santé reconnu. La matière abordée dans ce compte rendu s'adresse uniquement aux professionnels de la santé reconnus du Canada.

PRESSE PRIORITAIRE - Congrès 2010 de la Société européenne de cardiologie

Stockholm, Suède / 28 août-1er septembre 2010

À l’échelle mondiale, on aspire maintenant à ce que le risque cardiovasculaire (CV) global – et non le seul taux de C-LDL – détermine la nécessité du traitement. Dans les cas où un risque élevé résulte de facteurs de risque cumulés, des données objectives montrent maintenant que le taux de C-LDL serait toujours trop élevé, peu importe sa valeur initiale.

Évolution des facteurs de risque

«Les recommandations européennes de 2007 ont été les premières à souligner l’importance de traiter le patient en fonction de son risque global plutôt que de facteurs de risque isolés. Il ne suffit pas de considérer le taux de C-LDL; il faut aussi tenir compte de l’influence d’autres facteurs de risque, tels l’indice de masse corporelle (IMC), l’âge et les anomalies du métabolisme glucidique, sur la probabilité d’un événement», affirme le Pr Faiez Zannad, Université Henri Poincaré, Nancy, France. Compte tenu des essais cliniques réalisés depuis 2007, les prochaines recommandations iront plus loin à son avis. «La théorie voulant que l’inflammation joue un rôle central dans la physiopathologie de l’athérosclérose a gagné ses lettres de noblesse, si bien que des biomarqueurs de l’inflammation comme la protéine C-réactive [CRP] et la phospholipase A<sub>2</sub> associée aux lipoprotéines [Lp-PLA2] ont été proposés comme marqueurs d’appoint chez les patients à risque modéré ou élevé de maladie CV.»

Au Canada, on compte déjà sur la CRP ultrasensible (hsCRP) pour prédire le risque et repérer les patients qui répondent particulièrement bien aux statines, comme on l’a vu lors de l’essai JUPITER (Justification for the Use of Statins in Prevention: an Intervention Trial Evaluating Rosuvastatin). JUPITER regroupait des hommes de =50 ans et des femmes de =60 ans dont le taux de C-LDL était <3,3 mmol/L et qui n’avaient pas d’antécédents de maladie CV, mais dont le taux d’hsCRP était élevé (>2,0 mg/L). L’agent à l’étude, la rosuvastatine à 20 mg 1 fois/jour, a permis, par rapport au placebo, une diminution impressionnante de 44 % (p<0,00001) du paramètre principal mixte (décès CV, infarctus du myocarde [IM] non mortel, AVC non mortel, angor instable ou geste de revascularisation artérielle). C’est en partie sur la foi de cet essai que l’on vise maintenant un C-LDL <2 mmol/L ou une diminution de =50 % par rapport au taux initial chez les patients à risque modéré dont le taux de C-LDL est >3,5 mmol/L, pour autant que le ratio cholestérol total:C-HDL soit >5,0 ou encore, que le taux d’hsCRP soit >2,0 mg/L chez un homme de >50 ans ou une femme de >60 ans.

Prise en charge du risque

La mise à jour des recommandations concerne surtout les patients à risque modéré, les cliniciens étant déjà sensibilisés aux bénéfices importants associés à une diminution énergique des taux lipidiques chez les patients à risque élevé. Une évaluation plus poussée du risque ne serait probablement pas efficiente chez les patients à faible risque, par exemple les jeunes patients généralement en bonne santé, mais le nombre et le type de facteurs de risque sont essentiels à la détermination du risque d’événement sur 10 ans chez les patients à risque modéré.

Les deux méthodes de stratification du risque reconnues dans les recommandations canadiennes conviennent davantage aux Nord-Américains qu’aux autres populations. Cependant, toutes les nouvelles stratégies visant à améliorer la stratification du risque, y compris celles qu’on utilise en Europe, tiennent compte du risque global d’événement CV plutôt que d’un facteur de risque en particulier. L’objectif est de prévenir les maladies vasculaires et non seulement la maladie coronarienne, cible plus restreinte qui minimise l’importance d’événements survenant dans d’autres lits vasculaires, tel l’AVC. On sait maintenant que les maladies vasculaires se caractérisent par divers changements pathologiques, telle la rigidité artérielle, qui ne sont pas forcément corrélés avec l’ampleur des plaques athéromateuses. L’effet favorable d’une baisse du taux de C-LDL sur la fonction vasculaire, sans égard à l’athérosclérose, a été démontré de bien des façons.

Ainsi, si l’on en juge par des études sur la pitavastatine, statine pas encore homologuée en Amérique du Nord mais d’usage répandu en Asie, les bénéfices ne découlent pas tous directement d’une diminution des taux lipidiques. Lors d’une étude récente, la diminution significative de l’épaisseur intima-média (EIM) observée à 6 mois au niveau de la carotide chez les patients sous pitavastatine n’était pas corrélée avec la variation des taux lipidiques. Cette statine, qui n’est pas métabolisée par la même enzyme hépatique que la plupart des autres statines, a abaissé le taux de C-LDL, mais n’a pas abaissé significativement le taux d’hsCRP, explique le Dr Young Soo Lee, Département de cardiologie, École de médecine de l’Université catholique de Daegu, Corée du Sud. Fait digne de mention, la diminution de l’EIM était toutefois corrélée avec l’amélioration de la distensibilité artérielle, qui pourrait aussi réduire le risque d’événement thrombotique.

Une autre étude récente intitulée COSMOS (COronary atherosclerosis Study Measuring effects Of rosuvastatin using intravascular ultrasound in Japanese Subjects) a également ajouté du poids aux données montrant que la diminution des taux lipidiques améliore l’athérosclérose, mais que cette variable ne doit pas être considérée isolément. Lors de cette étude, on utilisait l’échographie intravasculaire pour mesurer le fardeau athéromateux après 76 semaines de traitement chez des diabétiques et des non-diabétiques. Bien que la statine ait abaissé le C-LDL de façon comparable dans les deux groupes, le fardeau athéromateux n’a pas régressé autant chez les diabétiques dont le taux d’HbA<sub>1C</sub> était mal maîtrisé. Le traitement par une statine est la clé de la prise en charge du risque, mais une «maîtrise vigoureuse du taux d’HbA<sub>1c</sub> semble cliniquement importante» pour ce qui est de la diminution du fardeau athéromateux, conclut l’auteur principal de l’étude, le Dr Tadateru Takayama, Département de cardiologie, Université Nihon, Tokyo, Japon.

Rigidité artérielle

Une étude conçue pour évaluer l’effet des statines sur la rigidité artérielle a généré d’autres données prouvant qu’il n’est pas logique d’analyser les taux lipidiques en vase clos. Lors de cette étude, 1225 patients hypertendus recrutés consécutivement ont été stratifiés en fonction des taux de C-LDL et d’hsCRP, après quoi la rigidité artérielle a été mesurée par la vitesse de l’onde de pouls (VOP) au niveau de l’artère fémorale. Après prise en compte de divers facteurs de confusion tels que l’IMC, l’âge, la tension artérielle et l’usage du tabac, les chercheurs ont observé une corrélation entre les taux d’hsCRP et de C-LDL et une rigidité artérielle accrue. Fait digne de mention, l’augmentation relative de la VOP était similaire chez les patients qui avaient un taux élevé d’hsCRP et un faible taux de C-LDL et chez ceux qui avaient à la fois un taux élevé d’hsCRP et un taux élevé de C-LDL.

«L’association entre un taux [d’hsCRP] =2,0 mg/L et une rigidité artérielle accrue et, par conséquent, le risque CV, sans égard au taux de C-LDL, pourrait expliquer en partie les résultats d’études ayant objectivé l’effet bénéfique d’un traitement hypolipidémiant, même chez les sujets dont le taux initial de C-LDL était faible», affirme le Dr Dimitrios Terentes-Printzios, Hôpital Hippocrate, Université d’Athènes, Grèce. D’abondantes données étayent les effets pléiotropes des statines, apparemment indépendants de l’effet hypolipidémiant. Par exemple, l’effet anti-inflammatoire pourrait être bénéfique chez les patients à risque élevé, même lorsque le taux de C-LDL n’a rien d’anormal.

Une autre étude qui visait expressément à évaluer l’effet de la rosuvastatine sur la rigidité artérielle a mis en évidence une corrélation significative entre l’amélioration de la VOP et le taux d’hsCRP. Lors de cette étude, présentée par le Dr Minoru Hongo, Département de médecine cardiovasculaire, Université Shinshu, Matsumoto, Japon, 95 patients hypertendus et dyslipidémiques ont été randomisés de façon à recevoir de la rosuvastatine à faible dose (maximum de 5 mg/jour) ou du bézafibrate (maximum de 400 mg/jour). Même si l’hypertension était maîtrisée, la statine a amélioré la VOP, et une corrélation avec la baisse du taux d’hsCRP a été mise en évidence. De l’avis du Dr Hongo, ces bénéfices – que l’on n’a pas observés chez les témoins – sont attribuables aux effets pléiotropes de la statine.

«Les effets vasculaires bénéfiques de la rosuvastatine ont persisté longtemps chez les patients hypertendus et dyslipidémiques. Cette dernière a permis de fortement abaisser le taux de C-LDL et d’améliorer le ratio C-LDL:C-HDL tout en exerçant une action anti-inflammatoire», poursuit le Dr Hongo.

Résumé

Vu la proportion élevée d’événements CV survenant chez les patients à risque modéré, on essaie maintenant de mieux stratifier le risque afin de repérer les patients qui bénéficieraient vraiment d’un traitement intensif. À l’instar des patients ayant déjà eu un événement CV, les patients à risque élevé n’en ayant jamais eu semblent bénéficier d’une diminution du taux de C-LDL, sans égard ou presque au taux initial de C-LDL. Ces données plaident en faveur de l’utilisation d’un système de stratification du risque, du taux d’hsCRP et d’autres outils pour repérer les patients à risque modéré qui bénéficieraient d’un traitement hypolipidémiant intensif. En particulier, les données actuelles semblent indiquer que le bénéfice associé à un traitement hypolipidémiant intensif pourrait aussi être pertinent chez les patients dont le taux initial de C-LDL n’a rien d’anormal.

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