Comptes rendus

Progrès dans la maîtrise de la pression intraoculaire sur 24 heures et du risque vasculaire dans le glaucome
Syndrome clinique isolé dans la sclérose en plaques : données à l’appui du traitement précoce

Améliorer et prolonger le traitement de l’ostéoporose

Le présent compte rendu est fondé sur des données médicales présentées lors d'un congrès de médecine reconnu ou publiées dans une revue avec comité de lecture ou dans un commentaire signé par un professionnel de la santé reconnu. La matière abordée dans ce compte rendu s'adresse uniquement aux professionnels de la santé reconnus du Canada.

Le 7e Congrès européen sur les aspects cliniques et économiques de l’ostéoporose et de l’arthrose (ECCEO 7)

Porto, Portugal / 28-31 mars 2007

Le vieillissement de la population se traduit par un nombre croissant de personnes exposées au risque d’une perte de densité osseuse et de fracture. Les fractures de la hanche, en particulier, entraînent une importante morbi-mortalité; en effet, 21 % des femmes de ³65 ans meurent au cours de l’année suivant une fracture de la hanche. Les fractures vertébrales sont elles aussi associées à une diminution de la qualité de vie, à des dorsalgies et à une hausse de la mortalité. En outre, précise le Pr Christian Roux, Hôpital Cochin, Université René Descartes, Paris, France, «les fractures vertébrales annoncent clairement un risque d’autres fractures au cours des années à venir».

Repérage et prise en charge des sujets à risque

L’ostéodensitométrie permet de repérer les sujets à risque, mais si une faible densité minérale osseuse (DMO) est le marqueur d’un risque accru de fracture, on doit aussi tenir compte de l’âge, autre facteur de risque important. Pour le calcul du risque, le Pr Roux recommande un outil disponible sur Internet (www.courses.washington.edu/bonephys/FxRiskCalculator.html) qui, sans être validé dans certains pays, donne un aperçu utile du risque global.

«Comme on dispose d’outils diagnostiques et de traitements efficaces, peut-on conclure que ces traitements sont prescrits? lance le Pr Roux. La réponse est non [...].» C’est le défi que nous lance l’ostéoporose. Selon une enquête qui ciblait 200 000 femmes ménopausées suivies dans 4200 centres de soins primaires aux États-Unis, l’ostéoporose n’était pas considérée comme un problème, même si 11 % présentaient des fractures assurément liées à une fragilisation osseuse. «Nous devons sensibiliser à la fois les cliniciens et le public à la maladie», insiste le Pr Roux.

Études cliniques sur les bisphosphonates

Le premier bisphosphonate azoté à faire son entrée sur le marché a été l’alendronate. L’étude pivot randomisée FIT (Fracture Intervention Trial) visait à comparer, chez des femmes ménopausées, l’alendronate à 5 mg, puis à 10 mg/jour, avec un placebo pendant 36 mois (Black et al. Lancet 1996;348[9041]:1535-41). Le paramètre principal était les nouvelles fractures vertébrales, mais les fractures non vertébrales étaient aussi prises en compte. Les chercheurs ont observé, entre autres, une réduction de 90 % des nouvelles fractures vertébrales multiples (³2) sous l’effet du traitement actif. «Avant la publication de cette étude, nous n’avions aucune donnée montrant qu’un agent pharmacologique pouvait réduire le risque de fractures multiples», souligne le Dr Sol Epstein, Mount Sinai School of Medicine, New York, New York. Les méta-analyses d’essais cliniques randomisés constituent peut-être la stratégie la plus solide pour évaluer l’efficacité d’un agent. Selon une méta-analyse, la diminution du risque de fracture de la hanche et de fracture non vertébrale variait entre 49 % et 55 % pour l’alendronate et entre 26 % et 27 % pour le risédronate (Liberman et al. Int J Clin Pract 2006;60[11]:1394-400).

Ces études portaient sur des schémas à une prise par jour, mais «nous sommes maintenant à l’ère des intervalles posologiques prolongés», précise le Dr Epstein. Les intervalles prolongés sont maintenant chose possible, rappelle-t-il, car la force de l’effet des bisphosphonates dépend de la dose cumulative totale dans le tissu osseux. Ainsi, l’alendronate peut maintenant être administré une fois par semaine, l’ibandronate, une fois par mois, le risédronate, une fois par mois (deux jours de suite) et l’acide zolédronique, une fois par année en perfusion. Ces schémas posologiques devraient contribuer à améliorer l’observance du traitement, l’inobservance étant un obstacle de taille à une meilleure efficacité de ces traitements. (Remarque : Au moment où le présent article a été mis sous presse, les schémas mensuels par l’ibandronate et le risédronate et le schéma annuel en perfusion par l’acide zolédronique n’étaient pas homologués au Canada.)

Lors d’un essai rigoureux dans lequel on a comparé l’alendronate à 70 mg une fois par semaine et le risédronate à 35 mg une fois par semaine dans le traitement de l’ostéoporose post-ménopausique, un nombre significativement plus élevé de sujets du groupe alendronate a atteint les seuils prédéfinis de l’augmentation de la DMO de la hanche et de la baisse des marqueurs biochimiques du renouvellement osseux après trois mois (Sebba et al. Curr Med Res Opin 2004;20[12]:2031-41). Il ressort toutefois de certaines études de cohortes que le risédronate est associé à une incidence plus faible de fractures de la hanche par rapport à l’alendronate. Cela dit, prévient le Dr Epstein, «les études de cohortes – dans lesquelles les facteurs de risque présents au départ ne sont pas pris en compte – peuvent fausser un résultat». L’interprétation des données d’un essai clinique doit donc tenir compte des vices méthodologiques éventuels.

Pour un traitement à long terme

Le «congé thérapeutique» préconisé par certains médecins préoccupe le Dr Epstein. Lors de l’étude randomisée FLEX (prolongation à long terme de l’étude FIT), les patientes qui avaient reçu l’alendronate lors de l’étude FIT ont reçu un placebo ou ont continué de recevoir l’alendronate pendant cinq ans (Ensrud et al. J Bone Min Res 2004;19[8]:1259-69). Chez les patientes qui avaient cessé de recevoir le traitement actif, les taux de marqueurs de la résorption osseuse ont augmenté de 56 %.

Selon le Dr Epstein, les résultats de cette étude semblent indiquer que «l’os cortical a besoin d’être constamment exposé à un bisphosphonate pour que la DMO augmente ou se maintienne. Chez les patientes à risque élevé de plus de 50 ans qui ont des antécédents de fracture et dont le T-score est inférieur à 2,5, je recommande de poursuivre le traitement», dit-il au sujet des retombées de l’étude sur la pratique clinique. L’innocuité est aussi une considération clé de tout traitement à long terme; or, cette étude de prolongation n’a rien révélé d’inquiétant sur ce plan.

D’aucuns craignent aussi que l’utilisation à long terme d’un bisphosphonate perturbe l’architecture osseuse. Cependant, les biopsies osseuses n’ont révélé aucune différence quant à la quantité de tissu minéralisé, à l’architecture osseuse ou à la présence excessive de tissu ostéoïde. Fait encore plus important, le double radiomarquage a mis en évidence un processus actif d’ostéoformation.

La vitamine D, un allié important dans la prévention des fractures osseuses

Il est généralement admis qu’une bonne partie de la vitamine D (vit D) dont l’organisme a besoin est synthétisée lorsque la peau est exposée au soleil. Comme le souligne la Dre Heike Bischoff-Ferrari, Institut de physiatrie, Hôpital universitaire, Zurich, Suisse, «les principaux facteurs de risque d’une diminution de la synthèse de vit D comprennent l’âge, l’utilisation d’un écran solaire [...], un teint foncé [...], et la vie dans un pays nordique où les hivers sont longs». L’obésité peut aussi réduire les concentrations de vit D, celle-ci étant distribuée dans les tissus adipeux.

L’enquête NHANES III, lors de laquelle on a recueilli des données sur la DMO de la hanche et les taux de 25-hydroxyVit D3 (25[OH]D), semble indiquer que, chez les sujets âgés, le taux de 25(OH)D devrait être voisin de 75 nmol/L pour une DMO optimale. Des études qui utilisaient les fractures en tant que telles comme paramètre d’évaluation ont confirmé ce taux. Cependant, selon une étude réalisée dans plusieurs pays, les taux de vit D sont insuffisants chez 64 % des femmes ménopausées (Rizzoli et al. Int J Clin Pract 2006;60[8]:1013-9). Selon une autre étude effectuée aux États-Unis, les taux sériques de 25(OH)D sont supérieurs à 90 nmol/L chez seulement 9 % des sujets de race blanche de plus de 50 ans – et les pourcentages sont encore plus faibles dans d’autres groupes ethniques (Bischoff-Ferrari et al. Am J Med 2004;116[9]:634-9).

Pour déterminer la dose optimale de vit D qui confère une protection contre les chutes et les fractures, on a comparé quatre doses quotidiennes (200 UI, 400 UI, 600 UI ou 800 UI) et un placebo pendant cinq mois chez des résidantes âgées d’un foyer d’accueil. C’est dans le groupe 800 UI que l’on a enregistré le moins de chutes. «Il ressort de ces données qu’une dose voisine de 800 UI serait la dose optimale», enchaîne la Dre Bischoff-Ferrari.

Le risque de toxicité des suppléments de vit D est une source d’inquiétude, mais, explique la Dre Bischoff-Ferrari, «le premier effet indésirable d’un excès de vit D est une hypercalcémie, mais une telle anomalie apparaît seulement au-delà de 220 nmol/L», seuil qui ne serait pas atteint dans des conditions normales.

On dispose maintenant d’un traitement regroupant l’alendronate et 2800 UI de vit D pour administration hebdomadaire. Cette association améliorerait l’observance en réduisant le nombre de médicaments que doit prendre la patiente. De plus, à la lumière de ces nouvelles données sur la dose optimale de vit D, cette dose pourrait être augmentée, estime la Dre Bischoff-Ferrari.

Résumé

L’ostéoporose et ses complications représentent un problème grandissant. L’avènement des bisphosphonates azotés a métamorphosé la prise en charge de la maladie. Ces agents augmentent la DMO et réduisent le risque de fracture vertébrale et non vertébrale chez les femmes ménopausées. Lors d’essais cliniques comparatifs, il a été démontré que l’alendronate – premier bisphosphonate azoté commercialisé – administré pendant une période pouvant atteindre 10 ans était sûr et bien toléré. L’efficacité de ces agents est déterminée par la dose totale cumulative dans le tissu osseux. Par conséquent, un «congé thérapeutique» ne doit pas être systématiquement recommandé; on doit au contraire décider de la conduite à tenir en fonction des facteurs de risque de chaque patiente.

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