Comptes rendus

Optimisation du traitement antipsychotique
L’utilité de l’analyse mutationnelle dans le traitement des GIST

Augmenter la dose ou changer de traitement? Gestion de la perte de réponse dans les maladies inflammatoires de l’intestin

Le présent compte rendu est fondé sur des données médicales présentées lors d'un congrès de médecine reconnu ou publiées dans une revue avec comité de lecture ou dans un commentaire signé par un professionnel de la santé reconnu. La matière abordée dans ce compte rendu s'adresse uniquement aux professionnels de la santé reconnus du Canada.

PRESSE PRIORITAIRE - 2010 Advances in Inflammatory Bowel Diseases

Hollywood, Floride / 9-12 décembre 2010

Bien que la maladie de Crohn (MC) et la colite ulcéreuse (CU) soient des maladies incurables, l’avènement d’immunosuppresseurs micromoléculaires comme la 6-mercaptoturine (6-MP) et l’azathioprine, deux thiopurines, et d’agents biologiques comme l’infliximab et l’adalimumab, deux inhibiteurs du facteur de nécrose tumorale alpha (TNF), a révolutionné la démarche clinique dans le traitement de ces maladies inflammatoires de l’intestin (MII) réfractaires. Or, avec le temps, même le plus efficace des traitements peut perdre de son efficacité thérapeutique en raison de divers facteurs connus et inconnus, et c’est aux médecins traitant ces maladies chroniques qu’il incombe de comprendre les divers facteurs de risque associés aux divers types de traitement, affirme le Dr William J. Sandborn, chef de la Division de gastro-entérologie, et professeur titulaire de médecine clinique, University of California, San Diego.

«La perte de réponse aux anti-TNF et, bien franchement, aux immunomodulateurs en général est un scénario fréquent que nous rencontrons toutes les semaines, voire tous les jours», poursuit-il.

Surveillance de la résistance à la 6-MP et à l’azathioprine

La stratégie de gestion de la perte de réponse pourrait différer selon que la perte est secondaire à des concentrations infrathérapeutiques du médicament, à l’immunogénicité du médicament découlant d’une exposition antérieure du patient à des agents biologiques, ou à une intolérance au médicament. Au nombre des options dont on dispose pour gérer la perte de réponse figurent l’augmentation de la dose en présence de concentrations infrathérapeutiques ou le passage à un autre agent de la même classe (c’est-à-dire d’un immunomodulateur à un autre ou d’un anti-TNF à un autre). Si le patient est intolérant à un traitement, le clinicien pourra essayer de passer à un autre agent au sein de cette classe ou envisager d’arrêter le traitement et de passer à une autre classe, explique le Dr Sandborn.

Ce dernier a cité à cet égard une étude de 2002 ayant démontré que des dosages répétés de la 6-nucléotide thioguanine, métabolite de la 6-MP, permettaient de repérer les patients souffrant d’une MII naturellement résistante au traitement par la 6-MP ou l’azathioprine et que ces patients pourraient donc bénéficier d’un changement de classe thérapeutique (Dubinsky et al. Gastroenterology 2002; 122[4]:904-15).

Même si, de l’avis de certains chercheurs, on peut contourner la résistance à la 6-MP ou à l’azathioprine en administrant simultanément de l’allopurinol, qui inhibe l’enzyme responsable de la dégradation de la 6-MP, la xanthine oxydase, le Dr Sandborn déconseille cette stratégie : «Je connais très bien la pharmacologie de l’azathioprine [...] et je ne pense pas que l’innocuité de cette stratégie ait été établie», fait-il remarquer.

Détermination des titres de HACA

Le Dr Sandborn a discuté d’une étude sur l’utilité clinique du dosage des anticorps anti-infliximab et des anticorps antichimériques humains (HACA) chez des patients porteurs d’une MII. Ses collègues et lui-même ont constaté qu’il était utile de doser ces anticorps chez les patients dont la réponse au médicament s’estompait, mais moins utile chez les patients qui avaient eu des réactions à la perfusion ou qui avaient recommencé à prendre de l’infliximab après un arrêt temporaire du traitement.

«Notre expérience montre que si des anticorps anti-infliximab ou des HACA sont décelables et que l’on se contente d’augmenter la dose d’infliximab, la probabilité de réponse est faible, d’environ 17 %. Par contre, si l’on passe à un autre anti-TNF comme l’adalimumab ou le certolizumab, on obtient souvent une réponse clinique», poursuit-il. Inversement, si le patient n’est pas immunisé contre l’infliximab et qu’il ne présente pas de HACA décelables, mais qu’il ne semble pas répondre au médicament, il répondra peut-être à une augmentation de la dose ou à une diminution de l’intervalle entre les doses.

Le Dr Sandborn et ses collaborateurs ont créé un algorithme de traitement des MII. En présence de concentrations infrathérapeutiques d’infliximab – c’est-à-dire moins de 12 µg/mL à 4 semaines ou un creux plasmatique indécelable –, la dose d’infliximab ou sa fréquence d’administration peuvent être augmentées; si la maladie demeure active, le passage à un autre anti-TNF pourrait être justifié. Si l’on a déjà essayé de changer d’anti-TNF et que la maladie est toujours active, un médicament doté d’un mode d’action différent pourrait alors être justifié.

D’autres facteurs peuvent expliquer la perte de réponse : inflammation; complications de la maladie comme les sténoses, les fistules ou les abcès; complications de la résection chirurgicale comme la diarrhée causée par les sels biliaires, la stéatorrhée ou une surcroissance bactérienne dans l’intestin grêle; infection à Clostridium difficile ou à cytomégalovirus; ou dépression.

Facteurs démographiques et pathologiques

Outre les titres de HACA, certains facteurs démographiques et pathologiques peuvent être prédictifs de la perte de réponse à l’infliximab, expliquent le Dr Ira Shafran et Patricia Burgunder, ARNP, Shafran Gastroenterology Center, Winter Park, Florida.

Après avoir analysé leurs 12 années d’expérience clinique avec cet anti-TNF, ils ont conclu que le tabagisme, la présence de fibrosténoses, une atteinte limitée à l’intestin grêle et l’administration dans un centre de perfusions annonçaient une non-réponse initiale à l’infliximab. Ils ont aussi constaté que la perte de réponse durant le traitement d’entretien était plus probable chez les fumeuses dont la maladie touchait à la fois l’intestin grêle et le côlon.

Les mêmes chercheurs ont également analysé leurs 6 années d’expérience avec l’adalimumab en faisant un examen rétrospectif des dossiers afin de déterminer si un traitement par l’adalimumab pouvait atténuer efficacement les symptômes de la MC chez des patients qui ne toléraient pas l’infliximab ou n’y répondaient pas. Ils ont constaté que «l’adalimumab était efficace pour induire et maintenir la rémission des symptômes de la MC chez des patients qui ne toléraient pas l’infliximab ou n’y répondaient pas».

Leurs résultats, précisent-ils, étayent ceux d’une étude antérieure menée à double insu avec placebo chez 325 patients (Sandborn et al. Ann Intern Med 2007;146[12]:829-38). Comme c’est le cas pour l’infliximab, les patients les plus susceptibles de ne pas répondre au traitement par l’adalimumab étaient les fumeurs, les patients porteurs de fibrosténoses, les utilisateurs de narcotiques et les patients corticodépendants au départ.

Augmentation de la dose : jusqu’où faut-il aller?

Des chercheurs de Montréal et du Centre hospitalier universitaire de Québec ont évalué la fréquence des augmentations de dose à des fins d’amélioration de l’efficacité chez des Canadiens atteints de MC qui commençaient à recevoir un anti-TNF. Alexandra Goyette et son équipe ont analysé les données de 1880 patients qui commençaient à recevoir de l’infliximab et de 896 patients qui commençaient à recevoir de l’adalimumab. Les patients sous adalimumab ont été suivis pendant une durée moyenne de 345 jours et les patients sous infliximab, de 379 jours.

Les chercheurs ont tenu compte, pour chaque médicament et pour chaque patient, de la dose administrée lors de chaque perfusion (infliximab) ou injection (adalimumab) dans le cadre du traitement d’entretien, de la dose hebdomadaire moyenne et de l’intervalle entre les doses. Ils ont évalué les augmentations de dose sous trois angles : dernière vs première dose d’entretien; dose hebdomadaire moyenne; et durée de l’intervalle entre les doses au fil du temps. Peu importe la méthode de mesure que les chercheurs utilisaient, les augmentations de dose étaient beaucoup moins fréquentes sous adalimumab que sous infliximab. La première méthode (dernière vs première dose) a mis en évidence un écart de 11,0 % pour l’adalimumab et de 18,4 % pour l’infliximab (p<0,0001); la deuxième méthode (dose hebdomadaire moyenne), un écart de 10,9 % et de 62,7 %, respectivement (p<0,0001), et la troisième méthode (intervalle entre les doses), un écart de 13,7 % et de 25,7 %.

«Cette analyse exploratoire souligne l’importance de définir les paramètres d’utilisation des médicaments dans les bases de données», écrivent les auteurs dans leur communication par affiche. «Les augmentations de dose chez une forte proportion de patients ont un impact important sur le coût des médicaments, et un besoin moindre d’augmentation de la dose pourrait traduire une efficacité plus durable.»

En cas d’échec d’un premier et d’un deuxième anti-TNF, faut-il abandonner l’idée de prescrire un anti-TNF? Pas forcément, affirme le Dr Sandborn. À l’appui de ses dires, il a cité une étude européenne récente ayant démontré que, chez des patients atteints de MC, l’adalimumab ou le certolizumab pegol administré en troisième intention avait donné lieu après 6 semaines à un taux de réponse de 61 % et à un taux de rémission de 18 %; à 20 semaines, la réponse se maintenait chez 51 % des patients, et 19 % étaient en rémission (Allez et al. Aliment Pharmacol Ther 2010;31[1]:92-101).

Résumé

Bien que les objectifs actuels du traitement des MII soient de soulager les symptômes et, idéalement, d’induire la rémission, l’objectif ultime du traitement sera de modifier l’évolution naturelle de la maladie, conclut le Dr Stephen B. Hanauer, chef de la section de gastro-entérologie, d’hépatologie et de nutrition, et professeur titulaire de la chaire Joseph B. Kirsner de médecine et de pharmacologie clinique, University of Chicago Medical Center, Illinois. «Dorénavant, les nouveaux objectifs du traitement – que l’on continue de réviser – seront la prévention, la stabilisation ou la disparition de l’atteinte structurale, mais du point de vue du patient, nous ne pouvons pas faire fi du soulagement des symptômes et de la maîtrise complète et durable de l’inflammation.»

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