Comptes rendus

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Colite ulcéreuse modérément active : le moment est venu de repenser le traitement de première intention

Le présent compte rendu est fondé sur des données médicales présentées lors d'un congrès de médecine reconnu ou publiées dans une revue avec comité de lecture ou dans un commentaire signé par un professionnel de la santé reconnu. La matière abordée dans ce compte rendu s'adresse uniquement aux professionnels de la santé reconnus du Canada.

D’après les articles suivants : Can J Gastroenterol 2007;21(12):827-34. Am J Gastroenterol 2005;100:2478-85.

mai 2008

Au moment où les deux essais ASCEND (Assessing the Safety and Clinical Efficacy of a New Dose of 5-ASA) ont été conçus, on ignorait si l’administration en première intention de la préparation orale de mésalamine à libération retardée à raison de 4,8 g/jour allait être plus efficace que celle de la préparation à 2,4 g/jour dans la colite ulcéreuse (CU) légèrement ou modérément active.

Dans le cadre de l’essai ASCEND II (dont les résultats ont été publiés avant ceux de l’essai ASCEND I) réalisé par le Dr Stephen B. Hanauer, division de gastro-entérologie, University of Chicago Medical Center, Illinois, et ses collaborateurs, les patients recevaient après randomisation soit six comprimés à 800 mg par jour, pour une dose quotidienne totale de 4,8 g, soit six comprimés à 400 mg par jour, pour une dose quotidienne totale de 2,4 g. Des 386 patients souffrant d’une CU légèrement ou modérément active, 268 présentaient d’emblée une atteinte modérée si l’on en juge par leur score PGA (Physician’s Global Assessment) de 2.

L’analyse en intention de traiter (IT) du paramètre principal d’évaluation de l’efficacité portait uniquement sur les patients présentant une atteinte modérément active : 130 recevaient la dose usuelle et 124, la dose plus forte. Après six semaines, on a noté une amélioration globale chez 59,2 % des patients du groupe 2,4 g/jour et 71,8 % des patients du groupe 4,8 g/jour (la réussite thérapeutique se définissait comme une rémission complète ou une réponse clinique au traitement). L’écart entre les taux d’amélioration globale se chiffrait à 12,5 % (p=0,036). La probabilité de bénéficier d’une rémission complète ou d’une réponse clinique était 1,2 fois plus élevée chez les patients qui avaient reçu la dose plus forte pour le traitement de leur CU modérée que ceux qui avaient reçu la dose usuelle; en termes absolus, l’écart entre les traitements était de 13 %, soulignent les investigateurs. Le délai médian de résolution des rectorragies était aussi significativement plus bref dans le groupe forte dose que dans le groupe dose usuelle (neuf vs 16 jours; p=0,035). Les deux schémas ont été bien tolérés, et les effets indésirables étaient similaires dans les deux groupes de traitement.

Chez les sujets dont la maladie n’était que légèrement active, la dose plus forte de 4,8 g/jour ne s’est traduite par aucun gain supplémentaire.

Comme le soulignent les chercheurs, les médecins ont l’habitude de prescrire la préparation orale de mésalamine à libération retardée pour le traitement de la CU légèrement ou modérément active à raison de 2,4 g/jour, puis de porter la dose au maximum de 4,8 g/jour si le patient ne répond pas à la dose usuelle après quatre à six semaines de traitement. Au vu de ces résultats, les auteurs suggèrent de modifier la pratique clinique afin que les patients atteints d’une CU légèrement active reçoivent la préparation orale de mésalamine à libération retardée à raison de 2,4 g/jour et que les patients atteints d’une CU modérément active reçoivent d’emblée une dose totale de 4,8 g/jour en comprimés à 800 mg, seulement six étant nécessaires pour atteindre la dose quotidienne de 4,8 g.

ASCEND I

Hanauer et ses collaborateurs ont récemment publié les résultats de l’essai ASCEND I, lors duquel des patients atteints d’une CU légèrement ou modérément active ont reçu aléatoirement la préparation orale de mésalamine à libération retardée soit en comprimés à 400 mg, soit en comprimés à 800 mg, pour une dose totale de 2,4 g/jour ou de 4,8 g/jour, respectivement.

Les résultats de l’analyse en IT du paramètre principal d’évaluation de l’efficacité – qui portait sur 286 patients souffrant d’une CU légèrement ou modérément active – ont révélé que la réussite thérapeutique avait été obtenue après six semaines chez 51 % des sujets recevant la dose usuelle et 56 % des sujets recevant la forte dose (p=0,441). Lorsqu’ils limitaient leur analyse aux 180 patients dont la CU était modérément active au départ, les auteurs ont constaté que 57 % des patients (53 sur 93) recevant 2,4 g/jour et 72 % des patients recevant 4,8 g/jour (55 sur 76) avaient bénéficié d’une amélioration globale après six semaines, ce qui revient à un écart de 15 % entre les deux groupes quant au taux d’amélioration globale (p=0,0384).

Comme ce fut le cas lors de l’essai ASCEND II, l’incidence des effets indésirables était semblable dans les deux groupes de traitement de l’essai ASCEND I.

Ces résultats donnent tout lieu de croire qu’en présence d’une CU modérément active, une dose initiale de 4,8 g/jour pourrait améliorer la réponse au traitement initial, de conclure les chercheurs.

À en juger par les essais ASCEND, il pourrait être cliniquement important de différencier la CU légère de la CU modérée, en particulier parce que la CU est modérée d’emblée dans environ 70 % des cas. Dans le passé, la CU légèrement active et la CU modérément active étaient, d’un point de vue clinique, perçues davantage comme un continuum que comme deux entités distinctes, et la dose appropriée pour le traitement initial de l’une et l’autre était présentée sous forme de plage (2,4 g/jour à 4,8 g/jour). Les résultats de ces essais montrent que les patients dont la CU est modérément active bénéficient d’une dose initiale plus forte de 4,8 g/jour.

Questions et réponses

Les questions et réponses qui suivent sont tirées d’entretiens avec le Dr Hillary Steinhart, chef de la division combinée de gastro-entérologie, UHN-Mount Sinai Hospital, Toronto, Ontario; et le Dr Pierre Paré, professeur titulaire de médecine, Université Laval, Québec, Québec.

Q : Maintenant qu’on dispose d’un comprimé dosé à 800 mg, pensez-vous qu’une dose initiale plus forte (et, par conséquent, un nombre moindre de comprimés) améliorera les résultats du traitement?

Dr Steinhart : En situation de poussée aiguë, un nombre élevé de comprimés pose moins de difficultés qu’en situation de traitement d’entretien. Lorsque la maladie est quiescente, la prise d’un grand nombre de comprimés est un fardeau. Les patients qui ont déjà eu une poussée modérée ou sévère devraient tous recevoir une forme quelconque de traitement d’entretien. Si le nombre total de comprimés peut être réduit dans ce contexte, la satisfaction du patient et son adhésion au traitement n’en seront que meilleures. Dr Paré : Les patients en poussée aiguë étant plus malades, le nombre de comprimés à prendre n’est pas vraiment une source d’inquiétude. Quand il s’agit d’un traitement d’entretien, par contre, le nombre de comprimés pèse beaucoup plus lourd dans la balance. Chose certaine, il est plus pratique pour le patient de prendre moins de comprimés durant le traitement d’entretien, de sorte qu’une réduction du nombre de comprimés serait alors un avantage.

Q : Les résultats des essais ASCEND pourraient-ils métamorphoser les balises du traitement de la CU modérément active?

Dr Steinhart : Ils plaident en faveur d’une dose plus forte dans la CU modérément active, car on obtient un gain supplémentaire par rapport à la dose usuelle sans pour autant augmenter la toxicité ou les effets indésirables. À part le coût, donc, il n’y a pas vraiment de désavantage au traitement fortement dosé.

Dr Paré : Je prescris tôt un traitement à forte dose à mes patients dont la CU est modérée ou sévère. Aucune donnée n’appuie la démarche progressive. Il semble logique que la libération de concentrations plus élevées au niveau de la muqueuse se traduise par de meilleurs résultats cliniques, là encore dans la CU modérée ou sévère. Q : À quel stade de la maladie ou chez quels patients envisageriez-vous un agent biologique?

Dr Steinhart : À mon avis, on peut envisager un agent biologique en cas d’échec des traitements usuels – j’entends par là le 5-ASA, les stéroïdes et les immunomodulateurs – ou d’intolérance à ces traitements.

Dr Paré : On doit envisager un agent biologique lorsque la maladie est fulminante ou sévère au point de nécessiter l’hospitalisation. En pareil cas, l’agent biologique devient essentiellement un traitement d’urgence. J’envisagerais aussi un agent biologique lorsque les autres classes, dont les préparations de 5-ASA, les stéroïdes et les immunomodulateurs, ne permettent qu’une maîtrise médiocre de la maladie.

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