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Colonisation nasopharyngée et incidence des infections : l’éradication des sérotypes vaccinaux permet une diminution remarquable de l’incidence à la fois chez les sujets vaccinés et non vaccinés

Le présent compte rendu est fondé sur des données médicales présentées lors d'un congrès de médecine reconnu ou publiées dans une revue avec comité de lecture ou dans un commentaire signé par un professionnel de la santé reconnu. La matière abordée dans ce compte rendu s'adresse uniquement aux professionnels de la santé reconnus du Canada.

PRESSE PRIORITAIRE - La 10e Conférence canadienne sur l’immunisation

Vancouver, Colombie-Britannique / 3-5 décembre 2012

Vancouver - La colonisation nasopharyngée (NP) asymptomatique par les bactéries colonisantes typiques – en particulier Haemophilus influenzae, Neisseria meningitidis et Streptococcus pneumoniae – est un préalable de l’apparition d’infections localisées et invasives. Certains vaccins diminuent la colonisation NP par les sérotypes vaccinaux, la transmission des agents pathogènes et l’apparition subséquente d’infections chez les sujets vaccinés et, grâce à l’obtention d’une immunité collective, également chez les sujets non vaccinés. En Alberta, une évaluation de l’impact des vaccins antipneumococciques conjugués sur la colonisation NP et les infections invasives à pneumocoque l’a d’ailleurs montré. Les programmes de vaccination antipneumococcique de rattrapage peuvent être efficaces, mais ils comportent leurs lots de difficultés, surtout quand on essaie de joindre les enfants à risque élevé.

Vaccination et diminution de la colonisation nasopharyngée

La colonisation nasopharyngée (NP) asymptomatique est un préalable de l’apparition d’infections localisées et invasives à Haemophilus influenzae, à Neisseria meningitidis et à Streptococcus pneumoniae. La diminution de la colonisation NP est donc une première étape vers l’élimination des infections. Cela dit, «la colonisation pave généralement la voie à l’acquisition d’une immunité contre les agents pathogènes colonisants sans qu’il y ait d’infection apparente», affirme le Dr James Kellner, professeur titulaire de pédiatrie, University of Calgary, Alberta. Les vaccins polysaccharidiques conjugués à une protéine réduisent la colonisation NP par les sérotypes vaccinaux, la transmission des agents pathogènes et, en définitive, l’incidence des infections grâce à l’immunité collective qu’ils confèrent. Par exemple, les vaccins anti-H. influenzae b (Hib) ont ramené les taux de colonisation NP sous le seuil de 1 % et ont pour ainsi dire éradiqué les infections invasives non seulement chez les sujets vaccinés, mais dans tous les groupes d’âge, fait remarquer le Dr Kellner.

De même, les infections par le méningocoque de sérogroupe C ont pratiquement disparu au Canada et ailleurs en raison de la vaste couverture du vaccin antiméningococcique C conjugué au sein de la population ciblée. «Le vaccin a pour effet immédiat de prévenir la maladie, mais cet effet a aussi pour corollaire une diminution significative de la colonisation NP», fait remarquer le Dr Kellner. Comme c’est le cas pour l’infection à H. influenzae, les infections invasives à méningocoque (IIM) de sérogroupe C ont été enrayées ou presque alors que seule une faible proportion de la population avait été vaccinée.

Évaluation par le groupe CASPER

Dans les cas du pneumocoque, la prévalence de la colonisation NP est à son maximum chez les enfants et à son minimum chez les adultes non exposés aux enfants; chez les adultes qui ont des enfants, la prévalence est plus élevée qu’en l’absence de contact avec les enfants.

Lorsque le pneumocoque traverse les barrières immunitaires, «la propagation locale entraîne une otite moyenne ou une sinusite», ajoute-t-il. L’infection invasive à pneumocoque (IIP) peut prendre la forme d’une pneumonie, d’une bactériémie ou d’une méningite. En Alberta, le vaccin antipneumococcique heptavalent (Pneu-C-7) a été commercialisé en 2002. Pour évaluer l’épidémiologie des sérotypes vaccinaux et non vaccinaux du pneumocoque après l’introduction du Pneu-C-7, le groupe CASPER (Calgary Area Streptococcus pneumoniae Epidemiology Research) a fait plusieurs études qui ont montré que les taux de colonisation NP tous sérotypes confondus n’avaient pas changé entre 2003 et 2005.

Par contre, la colonisation par les sérotypes vaccinaux a diminué des deux tiers environ pendant la même période. «C’est donc dire que la diminution de la colonisation par les sérotypes vaccinaux a été neutralisée par une augmentation de la colonisation par des sérotypes non vaccinaux», indique le Dr Kellner. Lorsque le groupe CASPER a repris son étude de la colonisation NP en 2010, juste avant l’introduction du vaccin antipneumococcique 13-valent (Pneu-C-13), «nous avons constaté une diminution significative des taux de colonisation NP par tous les sérotypes du pneumocoque», ajoute-t-il.

Plus précisément, les études du groupe CASPER ont montré que le taux de colonisation NP était d’environ 19 % entre 2003 et 2005. Entre 2010 et 2012, il est passé à 13 %, ce qui a assurément d’importantes retombées sur l’incidence de la maladie, de l’avis des conférenciers. Il importe ici de souligner que plus le nombre d’enfants albertains recevant le Pneu-C-13 augmente, moins la colonisation NP par des sérotypes non vaccinaux compense la diminution de la colonisation NP tous sérotypes confondus. Ce phénomène a également été observé  ailleurs.

En parallèle, on observe un changement spectaculaire dans l’épidémiologie des sérotypes qui colonisent le rhinopharynx, à un point tel qu’en 2012, les écouvillonnages pratiqués chez des enfants de Calgary ont révélé une colonisation par des sérotypes non vaccinaux dans 94 % des cas. Quelque 5 % des enfants étaient colonisés par des sérotypes du Pneu-C-13 et seulement 1 % étaient colonisés par ceux du Pneu-C-7. Dans les 95 cas d’IIP de sérotype connu que le groupe CASPER a répertoriés ultérieurement, comme l’ont dit les chercheurs au congrès, les sérotypes le plus souvent incriminés en 2011 étaient le 19A, le 7F, le 4, le 8 et le 3; de ces sérotypes, le 19A, le 7F, le 4 et le 3 sont tous ciblés par le Pneu-C-13.

Un pas vers l’immunité collective

L’introduction du Pneu-C-13 ayant eu lieu en 2010 en Alberta, ces résultats semblent indiquer que certains sérotypes ciblés par le Pneu-C-13 sont encore à l’origine d’IIP, surtout chez les patients âgés, du fait qu’il est encore trop tôt pour que l’immunité collective soit bien établie. «Dans le cas du Pneu-C-7, environ 6 ans se sont écoulés avant que la colonisation par les sérotypes vaccinaux soit vraiment enrayée», poursuit le Dr Kellner.

Les données du groupe CASPER indiquent clairement une diminution de l’incidence des IIP imputables aux six sérotypes du Pneu-C-13 non ciblés par le Pneu-C-7, mais le Dr Kellner estime qu’«il faudra attendre 2 à 4 ans avant de voir le plein effet de la vaccination. Nos données montrent sans l’ombre d’un doute que le vaccin a permis une diminution remarquable de l’incidence globale des infections grâce à la baisse des taux de colonisation asymptomatique. Le vaccin est donc remarquablement efficace.»

Programmes de rattrapage

Les provinces et les territoires privilégient pour la plupart le Pneu-C-13 pour la prévention des IIP, mais la mise sur pied de programmes «de rattrapage» permettant de conférer une protection contre les six sérotypes non ciblés par le Pneu-C-7 comporte son lot de difficultés. En Ontario, on administre systématiquement le Pneu-C-13 aux nourrissons en bonne santé et à risque élevé dès l’âge de 2 mois : on recommande trois doses chez les nourrissons en santé (2, 4 et 12 mois) et quatre chez les nourrissons à risque élevé (2, 4, 6 et 15 mois). Le programme de rattrapage pour les enfants à faible risque n’ayant reçu aucune dose du Pneu-C-13 ou n’ayant pas reçu toutes les doses requises varie selon les antécédents de vaccination antipneumococcique.

Comme l’expliquait la Dre Marina Salvadori, professeure agrégée de pédiatrie, University of Western Ontario, London, plusieurs facteurs ont contribué à la décision de l’Ontario de mettre sur pied un programme de rattrapage pour les six sérotypes supplémentaires du Pneu-C-13. À en juger par les IIP répertoriées avant l’introduction du Pneu-C-13 en Ontario, 75 cas auraient pu être évités par le Pneu-C-13; «il allait donc de soi que si nous voulions prévenir la plupart des IIP, le Pneu-C-13 s’imposait», fait-elle valoir.

Parmi les enfants ontariens de plus de 12 mois qui ont développé une IIP, une proportion élevée aurait été protégée par le Pneu-C-13, ajoute-t-elle. Lorsque nous avons décortiqué les IIP survenues en Ontario en 2009, «nous avons constaté que le Pneu-C-13 aurait pu protéger un nombre élevé d’enfants de 24 à 35 mois contre l’apparition d’une IIP», note la Dre Salvadori. Il en était de même pour le groupe des enfants de 36 à 59 mois.

 «Je pense que la mise sur pied du programme de rattrapage repose sur des données assez solides, mais nous n’avons pas suffisamment de données sur la couverture», reconnaît la Dre Salvadori. À son avis, la recommandation du gouvernement de l’Ontario quant au rattrapage a probablement échappé à la majorité des professionnels de la santé, car elle était «enfouie» au milieu de longs documents gouvernementaux. De plus, de nombreux enfants à risque élevé sont suivis par des médecins surspécialisés qui sont moins susceptibles d’être au courant de cette recommandation que les médecins de famille, précise la Dre Salvadori.

Enfin, de nombreux médecins ne vaccinent pas un enfant aux prises avec une maladie intercurrente, et l’on sait que c’est généralement une maladie intercurrente qui motive la consultation d’un médecin. Toutes ces observations semblent indiquer que probablement beaucoup d’enfants admissibles au Pneu-C-13 ne l’ont pas encore reçu.

Résumé

La colonisation NP précède l’apparition d’une infection invasive à H. influenzae, à N. meningitidis et à S. pneumoniae. Les vaccins permettent toutefois de diminuer, voire d’enrayer la colonisation NP par les sérotypes vaccinaux ainsi que des infections qui en résultent, et confèrent même une protection aux sujets non vaccinés (immunité collective). Comme le montrent les données du groupe CASPER de Calgary, l’introduction du Pneu-C-7 et, plus récemment, celle du Pneu-C-13 ont abaissé les taux de colonisation par les sérotypes pneumococciques vaccinaux. Étonnamment, cette diminution ne semble pas neutralisée par une augmentation parallèle de la colonisation par des sérotypes non vaccinaux, mais il est encore trop tôt pour juger du plein effet du Pneu-C-13 sur les taux de colonisation NP. Il faudra encore un certain temps pour que la protection soit optimale.

               

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