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Amélioration de la survie sous l’effet d’un traitement hormonal dans le cancer du sein métastatique

Le présent compte rendu est fondé sur des données médicales présentées lors d'un congrès de médecine reconnu ou publiées dans une revue avec comité de lecture ou dans un commentaire signé par un professionnel de la santé reconnu. La matière abordée dans ce compte rendu s'adresse uniquement aux professionnels de la santé reconnus du Canada.

PRESSE PRIORITAIRE - Symposium 2012 de San Antonio sur le cancer du sein (CTRC-AACR)

San Antonio, Texas / 4-8 décembre 2012

San Antonio - Le cancer du sein (CS) métastatique (CSm) ou avancé et récidivant demeure essentiellement une maladie incurable. En l’absence de traitement curatif, toute intervention qui prolonge la survie et/ou maintient la qualité de vie revêt une importance clinique dans la prise en charge d’un CSm. Au nombre des options de traitement figurent plusieurs classes d’antiœstrogènes, ces derniers faisant obstacle à la progression de la maladie par divers mécanismes qui bloquent l’accès des cellules du CS aux œstrogènes. Plusieurs études récentes ont mis en évidence un gain de survie chez des patientes sous fulvestrant, antiœstrogène sélectif de la classe des SERD (Selective Estrogen Down Regulators). Les données préliminaires de l’essai CONFIRM ont montré que la dose de 500 mg donnait de meilleurs résultats dans le CSm que la dose plus faible de 250 mg. Le suivi à long terme des sujets des essais cliniques est essentiel, bien sûr, mais les plus récentes données de l’essai CONFIRM demeurent favorables à  la dose de 500 mg, cette dernière étant associée à une augmentation cliniquement significative de 19 % de la survie globale chez les patientes atteintes d’un CSm.

Rédactrice médicale en chef : Dre Léna Coïc, Montréal, Québec

Parmi les options de traitement hormonal dans le cancer du sein (CS) métastatique (CSm), le fulvestrant est doté d’un mode d’action unique; il demeure à ce jour le seul représentant de la classe des antiœstrogènes sélectifs appelés SERD )Selective Estrogen Down Regulators). Depuis son introduction il y a une dizaine d’années, son utilisation clinique soulève des questions sur la dose optimale, affirme le Dr Angelo Di Leo, unité d’oncologie médicale Sandro Pitigliani, Hôpital de Prato, Italie.

Dans le but de trancher la question, les chercheurs de l’essai multicentrique avec randomisation CONFIRM (Comparison of Faslodex in Recurrent or Metastatic Breast Cancer) ont comparé les doses de 250 et 500 mg de fulvestrant chez des patientes atteintes d’un CS avancé qui avait progressé durant un traitement hormonal antérieur. Les premiers résultats de l’essai ont mis en évidence une augmentation statistiquement significative de 20 % de la médiane de survie sans progression (SSP), le paramètre principal, chez les patientes qui recevaient 500 mg (J Clin Oncol 2010;28:4594-600). Les résultats ont également objectivé une tendance vers une augmentation de la survie globale (SG) dans le groupe 500 mg (25,1 vs 22,8 mois, p=0,091). Cette différence est ressortie d’une analyse qui, selon le protocole, devait être réalisée après le décès de 50 % des patientes.

«Au vu de ces résultats encourageants, nous avons décidé de faire une deuxième analyse de la survie après le décès de 75 % des patientes», poursuit le Dr Di Leo.

L’essai CONFIRM regroupait 736 femmes ménopausées qui souffraient d’un CS à récepteurs hormonaux (RH+). Une fois le paramètre principal atteint, l’essai s’est poursuivi jusqu’au décès de 75 % des patientes, que le traitement ait été poursuivi ou non.

Gain de survie

Sur le plan de la SG, la première analyse a fait ressortir une diminution de 16 % du risque relatif (HR) de décès dans le groupe qui recevait 500 mg de fulvestrant. La nouvelle analyse, réalisée après un suivi d’une durée médiane d’environ 3 ans, a révélé que l’avantage sur le plan de la SG était passé à plus de 4 mois, ce qui représente une diminution de 19 % du risque relatif (HR; p=0,016).

L’analyse n’ayant pas été ajustée, on ne peut pas affirmer avec certitude que l’avantage sur le plan de la SG est statistiquement significatif, enchaîne le Dr Di Leo. Cela dit, les résultats tendent toujours vers un avantage associé à la dose de 500 mg, conformément aux résultats de la première analyse.

Au chapitre de l’innocuité, les résultats de la deuxième analyse sont également compatibles avec ceux de la première, aucune différence cliniquement pertinente n’ayant été notée entre les deux doses.

«Sur la foi des résultats de cet essai, nous recommandons la dose de 500 mg pour toute femme ménopausée atteinte d’un CS avancé à récepteurs œstrogéniques (RO+) chez qui on envisage le fulvestrant», conclut le Dr Di Leo.

Santé Canada et la Food and Drug Administration aux États-Unis avaient déjà homologué la dose de 500 mg de fulvestrant à la lumière de la première analyse des données de l’essai CONFIRM.

Optimisation du traitement de deuxième intention

Lorsqu’un CS hormonosensible avancé progresse durant le traitement de première intention, nous avons de multiples options pour les traitements subséquents, précise le Dr Stephen Johnston, Royal Marsden Hospital, Londres, Royaume-Uni. Cela dit, le traitement de deuxième intention optimal demeure indéterminé.

Les résultats de deux essais cliniques récents illustrent le mystère qui plane sur le traitement hormonal de deuxième intention. L’essai EFECT n’a objectivé aucune différence entre le groupe fulvestrant et le groupe exémestane (anti-aromatase stéroïdien) quant à la SSP. L’essai avec randomisation SoFEA a quant à lui montré que l’association fulvestrant + anastrozole (anti-aromatase) ne prolongeait pas la SSP comparativement au fulvestrant seul, d’une part, et que le fulvestrant seul et l’exémestane seul étaient associés à une SSP similaire, d’autre part. Dans les deux essais, les patientes sous fulvestrant recevaient une dose d’attaque de 500 mg, suivie d’une dose de 250 mg une fois toutes les 2 semaines, puis d’une dose de 250 mg une fois par mois.

Afin d’éliminer un peu d’incertitude quant au traitement hormonal de deuxième intention dans le CS avancé, le Dr Johnston et ses collaborateurs ont réalisé une méta-analyse des données individuelles des patientes des essais EFECT et SoFEA. L’essai EFECT regroupait 693 patientes randomisées de façon à recevoir de l’exémestane ou du fulvestrant et l’essai SoFEA, 723 patientes randomisées de façon à recevoir de l’exémestane, du fulvestrant ou l’association fulvestrant + anastrozole. Le paramètre principal était la SSP, définie dans le protocole de chaque essai. Au nombre des paramètres secondaires figuraient la SG, le taux de réponse et l’innocuité.

En limitant l’analyse aux patientes qui ne recevaient qu’une monothérapie, les chercheurs ont constaté que le fulvestrant était associé à une médiane de SSP et de SG de 3,9 mois et de 21,9 mois, respectivement, vs 3,8 mois et 22,6 mois pour l’exémestane. L’analyse de sous-groupe n’a pas réussi à objectiver un bénéfice plus marqué sous l’un ou l’autre traitement.

«L’efficacité et l’innocuité du fulvestrant à 250 mg après une dose d’attaque ne diffèrent en rien de celles de l’exémestane à 25 mg chez les femmes ménopausées atteintes d’un CS RO+ avancé», a conclu le Dr Johnston après la présentation de son affiche. «Le fulvestrant administré à raison de 250 mg dans les essais EFECT et SoFEA n’a été associé à aucun avantage dans les analyses de sous-groupe prévues au protocole.»

Traitement d’association

Compte tenu des résultats de l’évaluation du schéma fulvestrant + anastrozole dans le cadre de l’essai SoFEA, des chercheurs cliniciens explorent la possibilité d’un traitement d’association pour accroître les bénéfices associés au traitement hormonal dans le CS hormonosensible avancé. Les résultats d’un petit essai clinique ont révélé que le schéma fulvestrant + évérolimus (inhibiteur de mTOR) exerçait un effet et qu’il était peut-être même associé à un bénéfice.

Les chercheurs de l’essai – toujours en cours – suivent 31 patientes qui reçoivent du fulvestrant selon le schéma des essais EFECT et SoFEA en plus de 10 mg/jour d’évérolimus. Chez toutes ces patientes, le cancer avait progressé lors du traitement hormonal antérieur. Le paramètre principal est l’intervalle sans progression (ISP).

Chez les 31 patientes, l’ISP médian a atteint 7,4 mois. Le taux de réponse globale s’élevait à 13 % (1 réponse complète, 3 réponses partielles), et le schéma a permis de stabiliser la maladie chez 35 % des patientes. Chez 10 patientes, le traitement n’a généré aucune réponse détectable, expliquent la Dre Jessica Crowley, University of Kentucky, Lexington, et ses collaborateurs.

Les effets indésirables les plus fréquents, tous grades confondus, étaient la mucite et la perte de poids (48 % dans chaque cas); venaient ensuite les éruptions cutanées (32 %), la fatigue (32 %), la pneumonie (23 %) et les nausées (23 %). Au nombre des anomalies de laboratoire survenues chez ≥50 % des patientes figuraient l’élévation des enzymes hépatiques, l’hyperglycémie, l’anémie, l’hypercholestérolémie, la thrombocytopénie, l’hypokaliémie et l’hypoalbuminurie.

«L’ajout de l’évérolimus au fulvestrant donne lieu à un bénéfice semblable à ce que l’on observe avec l’association exémestane + tamoxifène», a conclu la Dre Crowley après la présentation de son affiche. «Lors des essais futurs, nous devrions tenter de déterminer si l’utilisation plus précoce des inhibiteurs de la PI3K et de mTOR permet de maintenir un impact robuste sur la résistance au traitement hormonal. L’évérolimus n’étant pas bénéfique chez toutes les patientes, la découverte de prédicteurs moléculaires de son efficacité est essentielle.»

Traitements séquentiels

L’utilisation séquentielle de différents traitements hormonaux adjuvants, c’est-à-dire après l’exérèse chirurgicale de la tumeur mammaire en première intention, est une autre stratégie hormonale intéressante. Dans une étude menée au Japon, 706 patientes ont reçu du tamoxifène en adjuvant pendant 5 ans ou encore, du tamoxifène pendant 1 à 4 ans, puis de l’anastrozole, pour une durée totale du traitement hormonal adjuvant de 5 ans.

Le paramètre principal était la survie sans cancer (SSC). Après un suivi d’une durée médiane de 76,7 mois, 52 événements compromettant la SSC étaient survenus dans le groupe anastrozole vs 59 dans le groupe tamoxifène. Les événements compromettant la survie sans récidive (SSR, paramètre secondaire) se chiffraient à 32 dans le groupe anastrozole et à 42 dans le groupe tamoxifène. Les deux mesures ont fait ressortir un avantage numérique en faveur du traitement séquentiel, mais aucune différence n’a atteint le seuil de signification statistique, affirment le Dr Shigeru Imoto, Kyorin University, et ses collaborateurs.

L’analyse en fonction de la durée du traitement et du suivi a révélé que l’effet maximal de l’anastrozole sur la SSC et la SSR avait été atteint de 2,5 à 3,5 ans après l’intervention. Le risque relatif (HR) d’événement compromettant la SSC et la SSR au cours des 36 premiers mois était de 0,72 et 0,58 en faveur de l’anastrozole, par comparaison à 1,06 et à 0,98 par la suite.

                                                                                                 Résumé       

Le traitement hormonal a été associé à des effets bénéfiques dans le CS hormonosensible, que le CS ait été métastatique ou non. Cependant, les agents et les schémas optimaux demeurent indéterminés. Le fulvestrant à forte dose (500 vs 250 mg) a amélioré la SSP et a été associé au bas mot à une forte tendance vers un gain de SG chez les patientes atteintes d’un CS RH+ métastatique. Le traitement d’association et les traitements séquentiels (y compris de multiples traitements hormonaux et associations de traitements hormonaux et ciblés) ont suscité un intérêt considérable auprès des chercheurs cliniciens, mais on n’a pas encore réussi à objectiver un bénéfice indéniable par rapport à la monothérapie. 

 

 



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