Comptes rendus

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Le point sur le blocage des récepteurs de l’interleukine-6 dans la polyarthrite rhumatoïde

De nouveaux critères de diagnostic et de détermination de la sévérité élargissent le spectre de la prise en charge de la fibromyalgie

Le présent compte rendu est fondé sur des données médicales présentées lors d'un congrès de médecine reconnu ou publiées dans une revue avec comité de lecture ou dans un commentaire signé par un professionnel de la santé reconnu. La matière abordée dans ce compte rendu s'adresse uniquement aux professionnels de la santé reconnus du Canada.

PRESSE PRIORITAIRE - La 73e Assemblée annuelle de l’American College of Rheumatology

Philadelphie, Pennsylvanie / 17-21 octobre 2009

On propose de nouveaux critères cliniques pour le diagnostic de la fibromyalgie (FM). Ces critères ne reposent pas sur l’évaluation des points douloureux, mais sont en corrélation très étroite avec les critères de classification définis en 1990 par l’American College of Rheumatology (ACR). Les nouveaux critères devraient aider les omnipraticiens à diagnostiquer la maladie.

En 1990, un comité de l’ACR chapeauté par le Dr Frederick Wolfe, National Data Bank, Wichita, Kansas, a déterminé que la présence d’un syndrome douloureux diffus associée à une sensibilité à la pression d’au moins 11 points sur les 18 points définis signait la FM (Arthritis Rheum 1990;33:160-72). Malheureusement, déplore le Dr Wolfe, les omnipraticiens n’appliquent pas toujours ces critères comme il se doit.

«En règle générale, les omnipraticiens ne savent pas comment procéder à la recherche des points douloureux, et en médecine de premier recours, le diagnostic de la FM repose essentiellement, selon nous, sur la symptomatologie», affirme le Dr Wolfe. De plus, certains symptômes importants de la FM, notamment la fatigue, les troubles du sommeil et les difficultés cognitives, sont laissés de côté dans les critères de l’ACR. C’est pourquoi un nouveau comité a voulu établir des critères diagnostiques ne reposant pas sur la recherche de points douloureux et proposer une échelle d’évaluation de la sévérité rendant compte du retentissement des symptômes sur la qualité de vie.

À cette fin, les membres du comité ont mené une étude en deux volets à laquelle ont pris part 55 établissements ainsi que 1002 sujets et témoins fibromyalgiques. «Les médecins ont mené des entretiens et des examens physiques méticuleux, et se sont notamment livrés à la recherche des points douloureux, explique le Dr Wolfe. Ils ont évalué la douleur diffuse au moyen de l’indice de douleur diffuse (IDD), allant de 0 à 19.» Fait à noter, les participants avaient reçu un diagnostic de FM avant leur admission à l’étude, et le médecin qui a procédé à l’évaluation dans le cadre de l’essai était le même que celui qui avait posé le diagnostic.

L’IDD s’est révélé le meilleur prédicteur de la FM, déclare le Dr Wolfe. Cela dit, le sommeil non réparateur, la fatigue, les difficultés cognitives et l’étendue des symptômes somatiques se sont également avérés d’excellents prédicteurs de la FM. Du coup, on a retenu ces quatre catégories de symptômes pour les inclure dans une échelle de sévérité graduée de 0 à 12, en forte corrélation tant avec le nombre de points douloureux (r=0,688) qu’avec l’IDD (r=0,733).

Selon ces nouveaux critères, on peut porter un diagnostic de FM en présence d’un IDD de 7 ou plus et d’un score de sévérité de 5 ou plus, ou d’un IDD de 3 à 6 et d’un score de sévérité de 9 ou plus, pour autant, précise le Dr Wolfe, que les symptômes persistent depuis au moins trois mois.

Au terme d’une comparaison avec les critères de l’ACR, les membres du comité ont constaté qu’on avait pu, grâce aux nouveaux critères, diagnostiquer 80,9 % des cas de FM positifs selon les critères de l’ACR et qu’il y avait concordance entre les diagnostics des médecins et les critères de l’ACR dans 84,1 % des cas. Il y a eu concordance, également, entre les nouveaux critères diagnostiques et un score de sévérité de 7 ou plus dans 93 % des cas, fait observer le Dr Wolfe. Dans le deuxième volet de l’étude, explique-t-il, de simples catégories, convenant tout à fait en pratique clinique, ont donné d’aussi bons résultats que les variables du premier volet.

«Nous proposons un ensemble de critères cliniques simples pour le diagnostic de la FM sans la recherche de points douloureux; ces critères étendus englobent des symptômes autres que la douleur et permettent d’en évaluer la sévérité», concluent le Dr Wolfe et ses collègues. Il ne s’agit pas, insiste le comité, de remplacer les critères de l’ACR, mais simplement d’offrir une autre méthode diagnostique mieux adaptée aux contextes cliniques ou expérimentaux où la recherche des points douloureux n’est pas possible.

Autres symptômes fréquents

Bien que les phénomènes douloureux prédominent dans la FM, le traitement devrait soulager d’autres manifestations fréquentes du syndrome afin d’améliorer l’état général du patient. Afin de mesurer les effets généraux du traitement, la Dre Lesley Arnold, professeure titulaire de psychiatrie et directrice, Women’s Health Research, University of Cincinnati College of Medicine, Ohio, et ses collègues ont décidé de mettre au point un indice de réponse. Pour ce faire, ils ont analysé les données regroupées de divers essais pour déterminer quelles catégories de symptômes influaient le plus sur la perception d’une amélioration par le patient. L’analyse a porté sur 1664 patients ayant reçu de la prégabaline à 300 mg par jour ou à 450 mg par jour, ou un placebo.

Les catégories de symptômes les mieux corrélées avec l’échelle PGIC (Patient Global Impression of Change) étaient la douleur, la fatigue, les troubles du sommeil et les capacités fonctionnelles physiques. «La douleur demeure le paramètre clé, ce qui est tout à fait naturel, la FM étant essentiellement un syndrome douloureux, confirme la Dre Arnold. Mais cet exercice montre qu’elle ne constitue pas le seul symptôme invalidant et que pour améliorer le traitement du syndrome fibromyalgique, nous devons axer nos efforts sur la douleur, la fatigue, les troubles du sommeil et les capacités fonctionnelles physiques», résume la Dre Arnold.

Vu le large spectre de sa symptomatologie, la FM est traitée par une grande variété de médicaments, dont la duloxétine, la gabapentine, les antidépresseurs tricycliques, le tramadol et l’hydrocodone. La prégabaline, un analgésique, est le premier agent homologué dans le traitement de la FM aux États-Unis et au Canada. Au terme d’une étude d’observation de courte durée lors de laquelle on a comparé la prégabaline (n=68) au traitement de référence (n=18), environ 50 % des patients des deux groupes ont répondu au traitement à court terme, mais les taux d’abandon ont été élevés dans un groupe comme dans l’autre, rapportent le Dr Micha Abeles, University of Connecticut School of Medicine, Farmington, et ses collaborateurs.

Afin d’évaluer la persistance des bienfaits du traitement, on a poursuivi le traitement chez les patients qui, pendant l’essai de courte durée, avaient répondu à la prégabaline ou aux médicaments de référence. On a amorcé le traitement par la prégabaline à une posologie de 75 mg, deux fois par jour, que l’on pouvait porter graduellement à un maximum de 300 mg, deux fois par jour, selon la tolérabilité, mais les patients pouvaient continuer de prendre leurs médicaments antérieurs. Dans la présente étude, le traitement de référence correspondait à la démarche thérapeutique normale du médecin en présence de FM. On a évalué la réponse à un an au moyen des scores EVA (échelle visuelle analogique), FIQ (FM Impact Questionnaire) et PGIC. La réponse était considérée comme cliniquement significative en présence d’une amélioration d’au moins 30 % du score EVA ou FIQ par rapport à la valeur de départ.

À un an, 16 des 18 patients qui prenaient toujours de la prégabaline profitaient encore de ses bienfaits, comparativement à six patients sur 16 dans l’autre groupe. «À l’origine, notre intention était d’aller chercher des données sur l’utilisation de la prégabaline dans des conditions de pratique réelles afin de pouvoir la comparer aux traitements habituels et de mieux la situer dans l’arsenal thérapeutique, se remémore le Dr Abeles. Mais ce que nous retenons de cette étude plus longue, c’est que chez le patient qui y répond et la tolère, la prégabaline est le médicament de choix, parce que c’est le seul agent utilisé dans la FM qui est assorti d’une efficacité durable.»

Douleurs réfractaires

Le Dr Brett Stacey, Oregon Health & Science University, Portland, a exposé les résultats d’une analyse qu’il a dirigée et qui porte sur un sous-groupe de patients aux prises avec des douleurs réfractaires au traitement. La population comptait 25 patients, dont 24 étaient réfractaires à la gabapentine et aux antidépresseurs tricycliques. Les chercheurs souhaitaient évaluer l’innocuité et l’efficacité à long terme de la prégabaline à 150-600 mg par jour chez ces patients. En cours d’étude, 40 % des sujets ont pris en concomitance un antidépresseur tricyclique, 40 %, de la gabapentine et 88 %, un agent de troisième intention. Les 15 premiers mois de l’étude se sont déroulés comme suit : cycles de traitement de trois mois, séparés par un intervalle de trois à 28 jours sans traitement, en vigueur jusqu’à la rechute.

Au total, 19 patients se sont rendus au terme de l’étude de 15 mois. Au départ, 71 % des patients signalaient une douleur intense (70 mm ou plus sur l’EVA du Questionnaire sur la douleur de McGill [version abrégée]). Après 15 mois, 38 % des patients seulement ont affirmé ressentir une douleur aussi intense qu’au début, tandis que les scores moyens de douleur ont diminué d’au moins 30 % entre le début de l’étude et le troisième mois chez 54,2 % des sujets, et entre le début et la fin de l’étude chez 45,8 % des sujets. En outre, le score moyen de douleur a diminué d’au moins 50 % dans la moitié du groupe entre le début de l’étude et le troisième mois, et chez 37,5 % des sujets entre le début et la fin de l’étude. La prégabaline a généralement été bien tolérée, peu de sujets ayant mis fin au traitement en raison d’effets indésirables, notent les auteurs. À la lumière de ces résultats, il y a lieu de penser que ce médicament pourrait être utile chez les patients qui ne répondent pas suffisamment aux autres agents utilisés dans la FM.

Résumé

On met en œuvre des stratégies fort diversifiées pour traiter la FM, mais aucune ne semble avoir des effets durables. Toutefois, des données récentes portent à croire que la prégabaline, premier analgésique homologué dans le traitement de la FM, pourrait procurer des bienfaits plus durables et soulager les douleurs réfractaires.

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