Comptes rendus

Mise à jour des lignes directrices de GINA : de la théorie à la pratique
Préservation de la puissance antifongique dans les populations exposées à un risque élevé

Hypertrophie bénigne de la prostate : nouvelles données sur les stratégies de traitement d’association

Le présent compte rendu est fondé sur des données médicales présentées lors d'un congrès de médecine reconnu ou publiées dans une revue avec comité de lecture ou dans un commentaire signé par un professionnel de la santé reconnu. La matière abordée dans ce compte rendu s'adresse uniquement aux professionnels de la santé reconnus du Canada.

Le 29e Congrès de la Société Internationale d’Urologie (SIU)

Paris, France / 2-6 septembre 2007

De l’avis du Dr Claus Roehrborn, directeur du département d’urologie, University of Texas Southwestern Medical Center, Dallas, il ressort principalement de l’analyse partielle à deux ans – prévue au protocole – de l’étude CombAT (Combination of Avodart and Tamsulosin) que l’association de ces agents est significativement supérieure à l’un ou l’autre médicament employé seul pour atténuer les symptômes urinaires associés à l’hypertrophie bénigne de la prostate (HBP). En effet, le traitement d’association a procuré un soulagement nettement plus marqué des symptômes que le dutastéride administré seul à partir du troisième mois et que la tamsulosine administrée seule à partir du neuvième mois de même qu’une augmentation nettement plus marquée du débit urinaire maximal (Qmax) que le dutastéride et la tamsulosine en monothérapie à partir du sixième mois. De plus, «le bénéfice s’est maintenu tout au long des deux premières années de traitement». La tendance semble vouloir se maintenir dans la deuxième moitié de l’essai de quatre ans, dit-il.

CombAT est un essai multicentrique, randomisé, à double insu et à trois groupes parallèles qui réunit 4844 hommes de 50 ans et plus : 1623 dans le groupe dutastéride à 0,5 mg (inhibiteur de la 5 alpha-réductase [I5AR]); 1611 dans le groupe tamsulosine à 0,4 mg (alpha-bloquant); et 1610 dans le groupe traitement d’association (chaque agent une fois par jour). Pour être admissibles à l’étude, les patients devaient avoir une prostate >30 cm³ à l’échographie transrectale et un taux sérique d’antigène spécifique de la prostate (PSA) >1,5 ng/mL et <10 ng/mL, précise le Dr Roehrborn. Les autres critères d’inclusion étaient un Qmax compris entre 5 et 15 mL/sec, un volume mictionnel d’au moins 125 mL et un score IPSS (International Prostate Symptom Score) d’au moins 12 points.

Le paramètre principal était la variation du score IPSS par rapport au score initial dans les trois groupes de traitement. Le questionnaire IPSS permet d’évaluer les symptômes du bas appareil urinaire (SBAU), dont les suivants : vidange incomplète, pollakiurie, retard à la miction, miction impérieuse, faible jet, jet intermittent et nycturie.

Résultats à deux ans

«Entre la première visite et l’analyse à deux ans, la diminution du score IPSS a été significativement plus marquée [p<0,001] chez les hommes qui recevaient le traitement d’association que chez ceux qui recevaient le dutastéride ou la tamsulosine en monothérapie, souligne le Dr Roehrborn. Le soulagement important des symptômes après trois mois d’administration du traitement d’association n’a été égalé dans aucun des groupes de monothérapie jusqu’au 15e mois de traitement [...] L’étude CombAT est la première à faire ressortir un bénéfice plus marqué du traitement d’association par rapport à l’une ou l’autre monothérapie au cours des 12 premiers mois de traitement» (Figure 1).

Chez les sujets du groupe alpha-bloquant, on a observé une amélioration de 4,5 points sur l’échelle IPSS après trois mois, et cette amélioration s’est maintenue jusqu’à l’analyse partielle réalisée à 24 mois. Chez les sujets du groupe dutastéride, on a observé une amélioration de presque trois points au troisième mois, mais l’amélioration a finalement rejoint celle du groupe tamsulosine après 12 à 15 mois de traitement pour ensuite la dépasser, et la différence a atteint le seuil de signification statistique après 21 mois de traitement. L’amélioration a été maximale chez les sujets du groupe traitement d’association, et elle était apparente dès la première évaluation. La différence par rapport à l’I5AR seul est devenue statistiquement significative à trois mois alors que la différence par rapport à l’alpha-bloquant l’est devenue à neuf mois.

«Pareille amélioration du paramètre principal montre sans équivoque que le traitement d’association est l’option qui est la plus bénéfique depuis le début de l’essai chez les hommes dont la prostate volumineuse et les SBAU exposent à un risque élevé de progression», affirme le Dr Roehrborn. Le taux de PSA a diminué d’une médiane de 56 % et de 55 % dans les groupes traitement d’association et I5AR, respectivement, alors qu’il a augmenté de 12,5 % dans le groupe alpha-bloquant.

Au chapitre du Qmax, l’augmentation précoce de 1,2 mL/sec observée dans le groupe tamsulosine au cours des six premiers mois s’est atténuée pour ensuite se maintenir à 1 mL/sec jusqu’au terme des 24 mois, explique le Dr Roehrborn. «Dans le groupe dutastéride, en revanche, l’amélioration a été plus marquée, l’augmentation initiale de 1,2 mL/sec à six mois étant passée à 1,9 mL/sec à 24 mois. C’est dans le groupe traitement d’association que l’amélioration a été la plus marquée, l’augmentation de 2 mL/sec à six mois étant passée à 2,4 mL/sec à 24 mois.»

«C’est la première fois que l’on observe une supériorité numérique du dutastéride ou de tout I5AR en monothérapie, par rapport à un alpha-bloquant, au chapitre des symptômes et du Qmax à 21 mois et à 12 mois, respectivement», poursuit-il.

Le dutastéride est le seul agent à double action de la classe des I5AR, dont le mode d’action est d’inhiber la conversion de la testostérone en dihydrotestostérone (DHT). Inhibiteur spécifique des deux isoformes (types 1 et 2) de la 5AR qui agit par compétition, il est capable de supprimer la synthèse de DHT dans une proportion pouvant atteindre 93,7 % (Roehrborn et al. Urology 2002:60:434-41), ce qui est considérable. Il commence à réduire le volume de la prostate et à soulager les symptômes dès le premier mois.

Figure 1. Étude CombAT : score IPSS à deux ans selon l’analyse en intention de traiter


Analyse des études MTOPS et CombAT

Le Dr Jack Barkin, professeur adjoint de chirurgie, division d’urologie, University of Toronto, Ontario, a souligné les différences entre CombAT et l’étude phare antérieure MTOPS (Medical Therapy of Prostate Symptoms), lors de laquelle l’association finastéride/doxazosine a été comparée à chaque agent administré seul. L’étude MTOPS ne comportait aucun critère d’inclusion lié au volume de la prostate, et seul un sous-groupe de sujets était exposé à un risque accru de progression en raison d’un volume prostatique d’au moins 30 cm³ et/ou d’un taux de PSA >1,5 ng/mL. De plus, précise-t-il, la zone de transition de la prostate était beaucoup plus petite, et aucune analyse prospective du bénéfice éventuel associé au traitement d’association n’était prévue.

L’étude MTOPS a donné lieu à d’autres études sur le traitement d’association à base de finastéride, inhibiteur sélectif de la 5AR de type 2. Le dutastéride, dont la mise au point est plus récente, supprime la DHT de façon plus marquée et constante que le finastéride et est 45 fois plus efficace que ce dernier pour inhiber la 5AR de type 1 et 2,5 fois plus efficace pour inhiber la 5AR de type 2 (Tian et al. Biochemistry 1995;34:13453-9). Lors de l’étude MTOPS, la diminution médiane du score des symptômes selon l’index de l’American Urological Association était plus marquée dans le groupe doxazosine que dans le groupe finastéride après un et quatre ans de traitement. Dans l’étude CombAT, en revanche, la diminution moyenne du score des symptômes était identique après 15 mois dans les groupes dutastéride et tamsulosine, mais elle s’est accentuée dans le groupe dutastéride à partir du 18e mois. Cette différence tient probablement au risque global de progression possiblement plus élevé des patients atteints d’HBP en raison d’un volume prostatique plus élevé et d’un taux de PSA plus élevé.

«Cette analyse rétrospective montre qu’en présence d’HBP, le soulagement des symptômes est plus durable sous dutastéride que sous tamsulosine», indique le Dr Barkin.

Il précise par ailleurs que l’incidence globale des effets indésirables et celle des effets indésirables graves – qui étaient consignés tous les trois mois – étaient comparables dans tous les groupes de traitement. Le profil d’innocuité du traitement d’association s’est révélé semblable à celui des deux agents administrés en monothérapie. Cependant, les effets indésirables liés au médicament étaient plus fréquents chez les sujets recevant le traitement d’association (24 %) que chez les sujets recevant une monothérapie (18 % dans le groupe dutastéride et 16 % dans le groupe tamsulosine). Les effets indésirables les plus courants étaient la dysfonction érectile (7,4 %, 6,0 % et 3,8 %, respectivement); venaient ensuite l’éjaculation rétrograde (4,2 %, 0,6 % et 1,1 %) et la baisse de la libido (1,7 %, 1,3 % et 0,9 %). Aucune différence statistiquement significative n’a été observée entre le traitement d’association et les monothérapies quant aux effets cliniques, aux effets sur les constantes biologiques, aux effets sur les signes vitaux et aux résultats de l’examen par toucher rectal.

Un cancer de la prostate a été diagnostiqué chez une faible proportion de sujets de l’étude CombAT (58 au total) au cours des deux premières années de l’étude. De ces patients, 21 recevaient le traitement d’association, 11, l’I5AR et 26, l’alpha-bloquant.

Résumé

Le Dr Francesco Montorsi, président de la European Society for Sexual Medicine et professeur titulaire d’urologie, Università Vita-Salute San Raffaele, Milan, Italie, estime qu’il est parfaitement logique de combiner des agents aux modes d’action distincts, comme c’est pratique courante dans d’autres domaines thérapeutiques, et que ces traitements d’association vont assurément avoir des retombées importantes sur les stratégies de traitement futures dans l’HBP. Il a conclu en disant que les messages qui se dégagent de l’étude CombAT sont sans équivoque : le traitement d’association est préférable à chaque agent seul pour atténuer les symptômes énumérés dans l’IPSS; les sujets de l’étude sont exposés à un risque de progression cliniquement pertinent; et le traitement d’association exerce un effet positif sur le débit urinaire.

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