Comptes rendus

Une nouvelle association pour abaisser la pression intraoculaire : traitement plus efficace et patients plus satisfaits
Maîtrise serrée de la maladie et atteinte des objectifs dans la polyarthrite rhumatoïde

Infections compliquées : améliorer la probabilité d’une issue favorable

Le présent compte rendu est fondé sur des données médicales présentées lors d'un congrès de médecine reconnu ou publiées dans une revue avec comité de lecture ou dans un commentaire signé par un professionnel de la santé reconnu. La matière abordée dans ce compte rendu s'adresse uniquement aux professionnels de la santé reconnus du Canada.

FRONTIÈRES MÉDICALES - 21e Congrès européen de microbiologie clinique et d’infectiologie et 27e Congrès international de chimiothérapie

Milan, Italie / 7-10 mai 2011

Bien-fondé d’un congé précoce

Le recours précoce au traitement ambulatoire est l’une des stratégies possibles pour améliorer l’issue d’une infection à Staphylococcus aureus résistant à la méthicilline (SARM). Chez la majorité des patients, l’antibiothérapie intraveineuse (i.v.) n’a pas sa raison d’être et, lorsqu’elle s’impose, elle n’est généralement nécessaire que pendant 24 à 48 heures, affirme le Dr Matthew Dryden, Département de microbiologie et des maladies transmissibles, Royal Hampshire Hospital, Winchester, Royaume-Uni.

Les indications de la mise en route ou de la poursuite d’une antibiothérapie i.v. sont un sepsis important, une voie orale compromise (vomissements ou diarrhée sévère), l’aggravation d’une affection clinique, une augmentation des globules blancs ou de la protéine C-réactive, une hémoculture positive pour un micro-organisme pathogène au cours des dernières 24 heures, une indication particulière du traitement i.v. (p. ex., méningite, bactériémie à S. aureus) et l’absence de formulation orale.

Lors d’une étude sur les infections des tissus mous à SARM que le Dr Dryden a citée, la durée moyenne du traitement i.v. a été significativement plus brève sous linézolide que sous vancomycine. La durée moindre d’un traitement a des conséquences économiques, car un congé plus précoce de l’hôpital et la prise en charge en milieu extrahospitalier peuvent réduire les coûts, fait-il remarquer.

Le congé précoce pourrait être une meilleure stratégie pour la prise en charge d’une infection, affirme le Dr Dryden. D’une part, les patients préfèrent être à la maison, car ils se sentent moins isolés et ont davantage mainmise sur leur maladie et leur traitement. D’autre part, le traitement à domicile diminue le risque de contracter ou de transmettre une infection. L’économie de jours-lit et de jours d’utilisation de voies i.v. ainsi réalisée pourrait représenter une diminution appréciable des coûts.

Lors de l’essai Going Home (Glycopeptides to Oral Treatment at Home) mené dans les Hammersmith Hospitals, Londres, Royaume-Uni, 155 patients qui recevaient un glycopeptide i.v. ont quitté l’hôpital après un relais oral (n=64) ou sont demeurés à l’hôpital afin de poursuivre leur traitement (n=91). Dix-sept patients de ce dernier groupe ont bénéficié d’un relais oral. Les 1215 jours de traitement ambulatoire du groupe ayant quitté l’hôpital représentent le nombre de jours-lit économisés. Le relais oral en milieu intrahospitalier a permis d’économiser 511 jours de traitement i.v. (Figure 1).

Un outil qui permettrait d’évaluer les patients sous antibiothérapie et la possibilité d’un congé sous antibiothérapie (orale ou i.v.) sans risque pourrait avoir d’importantes retombées économiques, poursuit le Dr Dryden. Les chercheurs ont passé en revue 1356 patients séjournant dans un service de médecine aiguë ou de chirurgie de 6 hôpitaux, dont 429 patients étaient sous antibiothérapie. À la suite d’une évaluation, 99 de ces 429 patients – dont 26 étaient sous antibiothérapie i.v. – ont pu cesser de prendre leur antibiotique; parmi les 139 qui demeuraient sous antibiothérapie i.v., 47 (34 %) ont pu bénéficier d’un relais oral. Les évaluateurs ont recommandé le congé chez 88 des 429 patients (20 %) : 10 ont eu besoin d’un traitement i.v. en ambulatoire, 55 ont eu besoin d’un traitement oral en ambulatoire et 24 ont pu mettre fin à leur antibiothérapie.


Si les patients chez qui le congé a été recommandé avaient quitté l’hôpital le jour même de leur évaluation, 481 jourslit auraient pu être épargnés, ce qui aurait généré des économies de 120 450 £ (environ 190 294 $CAD).

Selon une analyse économique présentée dans une communication par affiche, l’utilisation d’un outil d’évaluation pour déterminer la pertinence d’un congé précoce de l’hôpital permettrait d’économiser 170 000 £ (environ 268 569 $). Cet outil clinique a permis d’évaluer l’usage clinique des antibiotiques et la prise en charge de l’infection chez des patients hospitalisés dans 30 unités de soins aigus en médecine ou en chirurgie au Royaume-Uni.

Parmi 291 patients sous antibiothérapie, 82 ont été jugés aptes à quitter l’hôpital : 54 sous antibiothérapie orale et 28 sous antibiothérapie i.v. Trente-six des 54 patients sous antibiothérapie orale et 6 des 28 patients sous antibiothérapie i.v. auraient pu arrêter leur traitement, et 18 autres sous antibiothérapie i.v. auraient pu bénéficier d’un relais oral, rapportent le Dr Dryden et le Pr Alastair Gray, Health Economics Research Centre, University of Oxford, Royaume-Uni.

La mise en application de ces recommandations aurait évité 494 jours d’hospitalisation et généré des économies de 186 731 £ (environ 294 993 $). Compte tenu des coûts de l’évaluation, de l’aide communautaire supplémentaire et du traitement ambulatoire, on obtient une économie nette de 170 198 £ (environ 268 888 $).

Réévaluation des antibiotiques dans le traitement de la pneumonie à SARM

Aux États-Unis, la pneumonie nosocomiale vient au deuxième rang de l’ensemble des infections nosocomiales (~15 %), et c’est la plus fréquente des infections nosocomiales à l’unité des soins intensifs (~30 %). On estime que 10 à 15 % des pneumonies nosocomiales sont causées par un SARM.

Jadis considérée comme la pierre angulaire de l’antibiothérapie antistaphylococcique dans les hôpitaux, «la vancomycine ne devrait plus être perçue comme la norme par excellence dans le traitement des infections à Gram positif résistantes», affirme le Pr Robert Masterton, NHS Ayrshire & Arran, Hampshire, Royaume-Uni.

À en juger par le nombre croissant d’isolats nécessitant une concentration minimale inhibitrice (CMI) plus élevée, on assiste peut-être à une augmentation insidieuse de la CMI de la vancomycine – le «CMI creep» des anglophones – contre le SARM et le S. aureus sensible à la méthicilline dans certains établissements. Une telle élévation de la CMI sous-entend une diminution de l’activité. Bien que l’augmentation insidieuse de la CMI (moyenne géométrique des CMI) de vancomycine n’ait pas été confirmée, une CMI accrue est un prédicteur constant de la mortalité dans divers types de pneumonies associées aux SARM, notamment la pneumonie nosocomiale, la pneumonie acquise sous ventilation et la pneumonie associée aux soins de santé (PSS), «pour des valeurs jugées inférieures au seuil de résistance», poursuit le Pr Masterton.

«Depuis une dizaine d’années, nous essayons d’ajuster la dose de vancomycine afin d’en accroître l’efficacité», dit-il, mais nous avons du mal à abaisser la CMI, et l’augmentation des creux plasmatiques entraîne une augmentation importante de la néphrotoxicité.

Dans ses plus récentes recommandations sur le traitement des infections à SARM (Clin Infect Dis 2011;52:e18-55), l’Infectious Diseases Society of America (IDSA) préconise un traitement empirique en cas de pneumonie communautaire (PC) sévère chez les patients hospitalisés, note le Pr Hartmut Lode, Centre de recherche des études en médecine, Hôpital universitaire de la Charité, Berlin, Allemagne.

Dans la pneumonie, le traitement optimal doit couvrir les agents pathogènes possiblement en cause, être amorcé à temps et être administré à une dose appropriée par une voie appropriée, explique-t-il. Sur le plan pharmacodynamique, le foyer infectieux (liquide sécrété par l’épithélium respiratoire et macrophages alvéolaires dans le cas de la pneumonie) doit être exposé de façon optimale au traitement.

Dans les recommandations de l’IDSA, les options proposées pour le traitement de la PSS ou de la PC à SARM sont la vancomycine i.v., le linézolide i.v. ou oral, ou la clindamycine i.v. ou orale, pendant 7 à 21 jours. L’IDSA s’aligne en cela sur les recommandations de 2008 de la British Society for Antimicrobial Chemotherapy, à savoir un traitement empirique par le linézolide ou la clindamycine à forte dose si l’évaluation du risque fait ressortir une possibilité d’infection par un SARM communautaire.

Lors de l’essai à double insu ZEPHyR mené chez 448 patients atteints d’une PSS sévère dont une culture était positive à SARM, la probabilité de réussite thérapeutique ou de guérison dans les 7 à 30 jours suivant le traitement était plus élevée sous linézolide que sous vancomycine (57,6 % vs 46,6 %, p=0,042), rapporte le Pr Jean Chastre, Groupe hospitalier Pitié-Salpêtrière, Paris, France.

Dans la PSS à SARM, le taux de réussite clinique sous linézolide était au moins comparable au taux sous vancomycine et le taux de réussite microbiologique, supérieur au taux sous vancomycine, précisaient le Dr Daniel Kett et ses collaborateurs, Miller School of Medicine, University of Miami, Floride, dans une communication par affiche au congrès.

Au total, 78 patients atteints de PSS à SARM confirmé par culture ont reçu au moins 1 dose de l’un ou l’autre agent après randomisation. Au terme de l’étude, le taux de guérison s’élevait à 57 % dans le groupe linézolide et à 44 % dans le groupe vancomycine, mais l’écart n’a pas atteint la significativité statistique. Par contre, les taux de réussite microbiologique au terme du traitement et au terme de l’étude étaient significativement plus élevés sous linézolide : 81 % vs 64 % e
tivement (Figure 2).

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Principes pharmacodynamiques de l’optimisation du traitement

L’émergence d’agents pathogènes multirésistants, tant à Gram positif qu’à Gram négatif, qui peuvent être à l’origine d’infections en milieu hospitalier est un problème d’envergure mondiale. La prise en charge des infections compliquées pose deux difficultés particulières : le choix de l’antimicrobien le plus approprié et l’usage rationnel des antibiotiques afin de réduire la prévalence des infections pharmacorésistantes.

Le traitement précoce et l’optimisation du traitement fondée sur des principes pharmacodynamiques sont essentiels à l’amélioration de la probabilité d’une issue favorable, note le Pr Francesco Scaglione, Département de pharmacologie, Università degli Studi di Milano, Italie. Dans le cas de certaines classes d’antibiotiques, les aminosides par exemple, le taux de réponse est d’autant plus élevé que le ratio concentration maximale (C<sub>max</sub>):CMI est élevé. Dans les cas des bêta-lactamines, on a plutôt intérêt à opter pour la perfusion continue afin de maintenir les concentrations au-delà de la CMI.

Pour ce qui est de la vancomycine, au vu de sa CMI croissante dans les isolats cliniques de SARM, nous n’avons d’autre choix que d’optimiser sa dose si nous voulons continuer à l’utiliser. Il a été démontré qu’un ratio aire sous la courbe (ASC):CMI >400 améliorait la probabilité d’une issue favorable, mais pour ce faire, il faut augmenter la dose de vancomycine, ce qui n’est pas possible si la fonction rénale du patient est compromise, explique le Pr Scaglione.

Chez les patients gravement atteints qui présentent des degrés variables de dysfonction organique, les paramètres pharmacodynamiques optimaux sur lesquels on doit se fonder sont le ratio ASC:CMI dans le cas des fluoroquinolones, du linézolide, de la daptomycine et de la tigécycline; dans le cas des aminosides, c’est le ratio C<sub>max</sub>:CMI et dans le cas des bêtalactamines, c’est la durée de la période où la concentration demeure supérieure à la CMI.

Infections intra-abdominales

Au cours des 15 dernières années, on a observé l’émergence de souches résistantes dans les infections intra-abdominales parallèlement à une hausse de la mortalité imputable à ces infections. Lorsqu’un patient présente une infection intraabdominale compliquée à risque élevé, on doit s’attendre à une probabilité élevée d’échec du traitement de même qu’à la présence fort probable d’un agent pathogène résistant. Un traitement empirique inapproprié expose le patient à un risque accru de mortalité qu’une modification subséquente du schéma ne peut pas corriger, affirme le Pr Christoph Wenisch, Département d’infectiologie et de médecine tropicale, Hôpital Kaiser-Franz-Josef, Vienne, Autriche.

Dans le traitement d’une infection intra-abdominale compliquée, les critères de sélection d’un antimicrobien sont notamment la pénétration tissulaire, le profil de sensibilité de la population locale, les recommandations officielles (à titre indicatif seulement, le traitement devant être adapté aux besoins du patient) et les protocoles de bon usage des antimicrobiens.

Dans le contexte des SARM multirésistants, l’IDSA propose dans ses recommandations le linézolide, la daptomycine, la tigécycline et la vancomycine. Le traitement empirique est recommandé dans les infections intra-abdominales liées aux soins de santé chez un patient colonisé par un SARM ou si l’on suspecte un SARM en raison d’un échec du traitement et d’une exposition importante aux antibiotiques.

Infections compliquées

En présence d’une infection des tissus profonds causée par un staphylocoque ou un micro-organisme peu sensible aux antibiotiques, on recommande une dose plus forte de vancomycine afin d’obtenir des creux plasmatiques plus élevés et un ratio ASC:CMI plus élevé lorsqu’on observe une tolérance acquise ou l’émergence de souches résistantes. Cela dit, même ces mesures intensives ne garantissent pas une issue clinique favorable, sans compter qu’elles augmentent le risque de toxicité, ce qui nous oblige à envisager le recours à d’autres agents antistaphylococciques dans le traitement des infections compliquées.

Dans le traitement des infections de la peau et des tissus sous-cutanés compliquées (IPTSCc) à SARM, le linézolide semble avantageux pour les patients atteints d’une maladie vasculaire, affirme la Dre Therese M. Duane, Medical College of Virginia, Richmond. Selon son analyse groupée des données de deux essais cliniques prospectifs regroupant 477 patients atteints d’une IPTSCc à SARM d’un membre inférieur, le taux de réussite clinique au terme de l’étude était significativement plus élevé sous linézolide (600 mg par voie i.v. ou orale/12 heures) que sous vancomycine (15 mg/kg ou 1 g par voie i.v./12 heures) chez les patients atteints d’une maladie vasculaire : 80,4 % sous linézolide vs 66,7 % sous vancomycine (p=0,02). Au sein de la cohorte totale, la présence d’une maladie vasculaire et le traitement par la vancomycine étaient des facteurs prédictifs de l’échec clinique au terme de l’étude. Au sein du sousgroupe des patients aux prises avec une maladie vasculaire, le traitement par la vancomycine et une hospitalisation antérieure étaient des facteurs prédictifs de l’échec clinique au terme de l’étude.

Selon une analyse post hoc des données d’une étude prospective menée en mode ouvert avec randomisation, le délai de disparition des signes inflammatoires ne différait pas selon que les patients atteints d’une IPTSCc à SARM confirmée recevaient du linézolide ou de la vancomycine, affirmait le Dr Alan D. Tice, Infections Limited Hawaii, Honolulu, dans une communication par affiche au congrès.

Dans cette étude, 640 patients ont été randomisés de façon à recevoir du linézolide par voie orale ou i.v. (600 mg q12h) ou de la vancomycine par voie i.v. (15 mg/kg/12 heures avec ajustement posologique en fonction des creux plasmatiques et de la clairance de la créatinine). Sur le plan de la disparition de la fièvre, de l’érythème, de l’induration, de l’écoulement purulent, de la douleur, de la tuméfaction, de la sensibilité au toucher et de la sensation de chaleur, on n’a pas observé de différence significative entre les groupes le 3e ou le 7e jour, que les patients aient été atteints de diabète ou non.

À en juger par les tests de sensibilité des isolats à Gram positif provenant d’établissements européens, on n’assiste pas à une escalade des souches résistantes au linézolide, souligne le Dr Ronald Jones, JMI Laboratories, North Liberty, Iowa. En effet, l’analyse de 5532 isolats à Gram positif a révélé que le linézolide était actif dans
que le taux de résistance globale s’élevait à 0,05 % (Tableau 1).

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Résumé

Sur le plan clinique, les infections à SARM survenant dans les hôpitaux posent un grand problème. Le choix de la bonne antibiothérapie ainsi que la diminution de la durée de l’hospitalisation et des coûts du traitement sont maintenant d’importants facteurs qui influent sur les choix cliniques. Ainsi, une stratégie appropriée de prise en charge de toute infection à SARM devrait prévoir un congé précoce de l’hôpital et, partant, la possibilité d’un relais oral chez les patients traités initialement par voie i.v. Par ailleurs, la prise en charge des infections compliquées à l’hôpital est de plus en plus difficile avec l’émergence d’agents pathogènes multirésistants. Nous n’avons donc d’autre choix que d’amorcer le traitement sans délai et de l’optimiser en fonction de principes pharmacodynamiques si nous aspirons à améliorer la probabilité d’une issue favorable.

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