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Inhibiteurs du facteur de croissance endothéliale vasculaire dans le cancer du rein avancé

Le présent compte rendu est fondé sur des données médicales présentées lors d'un congrès de médecine reconnu ou publiées dans une revue avec comité de lecture ou dans un commentaire signé par un professionnel de la santé reconnu. La matière abordée dans ce compte rendu s'adresse uniquement aux professionnels de la santé reconnus du Canada.

D’après l’article publié suivant : N Engl J Med 2007;356(2):125-34

Selon l’essai TARGET (Treatment Approaches in Renal Cancer Global Evaluation Trial), le traitement par le sorafenib, inhibiteur multikinase de la prolifération et de l’angiogenèse des cellules tumorales, prolonge la survie sans progression (SSP) des patients souffrant d’un cancer du rein avancé à cellules claires chez qui le traitement préalable a échoué.

Le pronostic du cancer du rein métastatique ne s’est pas amélioré de façon appréciable depuis 25 ans, soulignent les investigateurs de l’essai TARGET. Après cinq ans, moins de 10 % des patients atteints d’un cancer du rein métastatique sont toujours en vie. L’interleukine 2 à forte dose et l’interféron-alfa sont tous deux utilisés pour traiter les formes avancées, mais, de rapporter les chercheurs, «ils ont une efficacité limitée et entraînent une toxicité considérable».

Le sorafenib inhibe principalement les kinases pro-angiogéniques, ce qui vient perturber la vascularisation de la tumeur. Un autre inhibiteur du facteur de croissance endothéliale vasculaire (VEGF), le bevacizumab, s’est aussi révélé capable de prolonger la SSP dans le cancer du rein.

Sous la direction du Dr Bernard Escudier, chef de l’unité Immunothérapie et thérapies innovantes, Institut Gustave-Roussy, Paris, France, et ses collègues de plusieurs centres, 903 patients souffrant d’un cancer du rein avancé et subdivisés en deux groupes de taille égale ont reçu aléatoirement le sorafenib (400 mg b.i.d.) ou un placebo. Tous les patients présentaient un cancer du rein métastatique (présence de cellules claires confirmée à l’examen histologique) qui avait progressé au cours des huit derniers mois malgré un traitement préalable.

Selon les critères du Memorial Sloan-Kettering Cancer Center, 51 % des sujets présentaient un cancer à faible risque et les autres, un cancer à risque moyen. L’agent actif et le placebo étaient administrés sans interruption en cycles de six semaines au cours des 24 premières semaines, puis en cycles de huit semaines jusqu’à la progression de la maladie, l’abandon pour cause d’effets indésirables ou la mort. La durée médiane du traitement a été de 23 semaines sous sorafenib vs 12 semaines sous placebo.

«Le paramètre principal était la survie globale [SG]», indiquent les chercheurs, et l’analyse des données de SSP était prévue pour janvier 2005. Les paramètres secondaires étaient la SSP (depuis la date de randomisation jusqu’à la progression de la maladie) et le meilleur taux de réponse globale (d’après les critères RECIST) au cours des 10 derniers jours de chaque cycle de traitement. Le suivi médian a été de 6,6 mois dans les deux groupes.

Résultats de l’essai TARGET

«En date de janvier 2005, la médiane de SSP était de 5,5 mois sous sorafenib vs 2,8 mois sous placebo», soit une réduction de 56 % du risque de progression de la maladie en faveur du traitement actif (p<0,001), notent les chercheurs. Les patients initialement affectés au groupe placebo pouvaient passer au groupe sorafenib à partir de mai 2005, date où la première analyse programmée de la SG avait lieu. Selon les résultats de cette analyse, le traitement actif a réduit le risque de mortalité de 28 % (taux de risque : 0,72), résultat significatif sur le plan clinique, mais pas sur le plan statistique. Cela dit, selon le même suivi médian de 6,6 mois, «la médiane de SG actuarielle était de 14,7 mois dans le groupe placebo, mais n’avait toujours pas été atteinte dans le groupe sorafenib». Le Dr Escudier en a alors conclu que le sorafenib «prolonge probablement à la fois la SG et la SSP».

Une autre analyse de la SG a eu lieu six mois plus tard; environ la moitié des sujets initialement randomisés dans le groupe placebo étaient alors passés au groupe sorafenib depuis mai 2005. Au sein de cette cohorte, la médiane de SG était de 19,3 mois sous traitement actif vs 15,9 mois sous placebo, ce qui semble indiquer là encore que le traitement actif pourrait bien améliorer la SG dans le cancer du rein avancé à cellules claires.

Lors de l’analyse de janvier 2005, une analyse indépendante a permis de repérer les meilleures réponses chez 335 patients du groupe sorafenib et 337 patients du groupe placebo. Dans le groupe sorafenib, on a noté sept réponses partielles (RP) (2 %), la stabilisation du cancer chez 78 % des patients et une progression du cancer chez 9 % des patients. Dans le groupe placebo, aucun patient n’a eu de RP, tandis que le cancer s’est stabilisé chez 55 % des patients et a progressé chez 30 % des patients. Les meilleures réponses évaluées par les chercheurs en date de mai 2005 se résumaient à une réponse complète (RC) et à 10 % de RP dans le groupe sorafenib (n=451). Chez les patients qui ont obtenu une RC ou une RP au sorafenib, le délai de réponse médian était de 80 jours et la durée médiane de la réponse, de 182 jours.

La proportion d’abandons pour cause d’effets indésirables était faible et comparable dans les deux groupes (10 % pour le traitement actif vs 8 % pour le placebo). «Les abandons étaient pour la plupart imputables à des symptômes constitutionnels, gastro-intestinaux, dermatologiques ou pulmonaires/respiratoires (voies supérieures)», soulignent les chercheurs.

Questions et réponses

Les questions et réponses qui suivent sont tirées d’un entretien avec l’investigateur principal de l’essai TARGET, le Dr Bernard Escudier, chef de l’unité Immunothérapie et thérapies innovantes, Institut Gustave-Roussy, Paris, France.

Q : De toute évidence, de meilleurs traitements font cruellement défaut dans le cancer du rein avancé. Quelle importance revêtent les résultats de l’essai TARGET?

R : TARGET est la première étude de phase III à montrer que le sorafenib est actif dans le cancer du rein avancé. Ce sont donc des résultats encourageants pour nous tous qui traitons cette maladie, car il est bien sûr essentiel d’avoir de bons médicaments pour traiter ce cancer.

Q : Comment se comparent les réponses au sorafenib obtenues dans cette étude aux réponses typiques que l’on obtiendrait avec l’interleukine 2 ou l’interféron-alfa?

R : Globalement, le sorafenib donne de meilleurs résultats que les cytokines. Cela dit, les cytokines pourraient permettre d’obtenir une rémission complète chez un petit groupe de patients, de sorte qu’elles demeurent de bons choix. Avec ce nouvel agent, on n’obtient pas de rémission complète, mais on peut aspirer à une rémission durable. À cet égard, donc, les deux types de médicaments diffèrent.

Q : À votre avis, quelles sont les caractéristiques les plus intéressantes du sorafenib?

R : Il est généralement bien toléré; chez 90 % des patients, ce médicament est doté d’un très bon profil d’innocuité. Son administration par voie orale en fait aussi un traitement pratique pour les patients. En bref, un médicament oral bien toléré, c’est toujours bon pour le patient.

Q : Par quel mécanisme le sorafenib ralentit-il la progression de ce cancer?

R : La progression du cancer du rein dépend d’une surexpression du VEGF. Ce cancer étant VEGF-dépendant, plus la concentration de VEGF est élevée, plus le pronostic est sombre. Le sorafenib agit principalement en bloquant le récepteur du VEGF, et son activité est probablement assez semblable à celle du bevacizumab, autre inhibiteur du VEGF qui, lors d’une étude de phase II, a aussi prolongé la SSP. On a aussi observé une prolongation significative de la médiane de SSP chez des patients souffrant d’un cancer du rein métastatique jamais traité auparavant qui recevaient le sunitinib, par comparaison à ceux qui recevaient l’interféron-alfa.

Q : Est-il envisageable que l’administration d’un agent à un stade beaucoup moins avancé du cancer du rein permette d’obtenir de meilleurs taux de réponse? R : Oui, il serait logique d’essayer d’administrer le médicament en adjuvant, mais encore faut-il d’abord démontrer son efficacité en pareil contexte.

Q : La commercialisation du sorafenib et d’autres nouveaux agents marque-t-elle le début d’une ère nouvelle dans le traitement du cancer du rein avancé?

R : Oui. Nous pouvons maintenant obtenir une rémission et une durée de survie plus longues chez ces patients. En fait, la médiane de survie a augmenté considérablement dans le cancer du rein métastatique. Nous avons maintenant à notre disposition des traitements que nous pouvons probablement administrer séquentiellement. Nous sommes tous d’accord pour dire que, au bas mot, la médiane de survie a au moins doublé sous l’effet de ces nouveaux médicaments, si l’on prend comme référence les données dont nous disposions avant leur commercialisation.

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