Comptes rendus

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Inhibition des récepteurs de l’IL-6 dans la polyarthrite rhumatoïde : nouvelles données tirées d’essais cliniques

Le présent compte rendu est fondé sur des données médicales présentées lors d'un congrès de médecine reconnu ou publiées dans une revue avec comité de lecture ou dans un commentaire signé par un professionnel de la santé reconnu. La matière abordée dans ce compte rendu s'adresse uniquement aux professionnels de la santé reconnus du Canada.

PRESSE PRIORITAIRE - Conférence annuelle de la British Society for Rheumatology et British Health Professionals in Rheumatology

Glasgow, Royaume-Uni / 28 avril-1er mai 2009

Bien que nous ayons à notre disposition des agents de rémission et des agents biologiques pour le traitement de la polyarthrite rhumatoïde (PR), d’importantes lacunes demeurent, affirme le Pr John Isaacs, Newcastle University et Freeman Hospital, Newcastle upon Tyne, Royaume-Uni. Seule une minorité de patients parvient à la rémission clinique, et de 30 à 40 % des patients ne répondent pas aux agents biologiques actuels. Des essais cliniques sur les antagonistes du facteur de nécrose tumorale (anti-TNF) réalisés chez des non-répondeurs au méthotrexate (MTX) ont montré que 60 % des patients avaient atteint le critère de réponse ACR20, de 35 à 40 %, le critère ACR50 et 20 %, le critère ACR70. «Ces statistiques valent pour tous les agents biologiques sur le marché chez les non-répondeurs au MTX», poursuit le Pr Isaacs.

Un certain nombre de nouveaux agents biologiques en sont à un stade avancé de leur développement. La plupart d’entre eux sont dotés d’un mode d’action semblable à celui des autres agents biologiques, et la plupart doivent être administrés en association avec un traitement de fond par le MTX pour offrir une efficacité optimale. Les taux de réponse ACR et les taux de rémission sont comparables à ceux que l’on obtient avec les agents existants. De nouveaux agents ciblant d’autres médiateurs/cellules font cruellement défaut. De l’avis du Pr Isaacs, l’agent idéal serait associé à un taux élevé de rémission selon le score DAS (Disease Activity Score), serait efficace pour traiter les manifestations systémiques de la PR et ne nécessiterait pas de traitement de fond par le MTX. Il est toutefois peu probable qu’un seul agent, peu importe sa cible, soit efficace chez la totalité des patients, prévient-il.

L’interleukine-6 (IL-6) – cytokine pro-inflammatoire pléiotrope produite par de multiples types de cellules et intervenant dans un grand nombre de processus physiologiques et pathologiques – est considérée comme une autre cible possible dans le traitement de la PR. Lors d’essais cliniques de phase III, le tocilizumab, anticorps humanisé dirigé contre les récepteurs de l’IL-6, s’est révélé efficace chez des patients souffrant d’une PR réfractaire aux agents de rémission lorsqu’il était administré en association avec un agent de rémission traditionnel (essais OPTION [Tocilizumab Pivotal Trial in Methotrexate Inadequate Responders] et TOWARD [Tocilizumab in Combination with Traditional DMARD Therapy]) de même qu’en association avec le MTX chez des patients dont la réponse aux anti-TNF était insuffisante (essai RADIATE [Rheumatoid Arthritis Study in Anti-TNF Failures]). Il s’est également révélé efficace en monothérapie chez des patients qui n’avaient pas essuyé d’échecs avec le MTX ou un agent biologique (essai AMBITION [Tocilizumab versus Methotrexate Double-Blind Investigative Trial in Monotherapy]). D’autres données d’essais cliniques ont été présentées au congrès.

AMBITION : maladie débutante vs avancée

Une analyse secondaire des données de l’essai AMBITION a apporté un premier élément de preuve plaidant en faveur de l’utilisation précoce du tocilizumab en monothérapie en l’absence d’échecs antérieurs du traitement par le MTX ou un agent biologique, affirment les chercheurs sous la direction du Dr Mark C. Genovese, Stanford University Medical Center, Palo Alto, Californie (Rheumatology [Oxford] 2009;48[Suppl 1]:i86, résumé 190). Dans le cadre de l’étude AMBITION, les patients étaient randomisés de façon à recevoir du tocilizumab à raison de 8 mg/kg par voie intraveineuse (i.v.) toutes les quatre semaines ou du MTX en monothérapie. Le Dr Genovese et ses collaborateurs ont réparti 570 patients en deux sous-groupes selon l’ancienneté de leur maladie au départ : <2 ans (241 patients) ou <u>></u>2 ans (329 patients). Ils ont constaté après 24 semaines que les taux de réponse selon les critères ACR et les taux de rémission (score DAS 28) étaient significativement plus élevés chez les patients sous inhibiteur de l’IL-6 que chez les patients sous MTX dans les deux sous-groupes. Tant chez les patients sous tocilizumab que chez les patients sous MTX, on a enregistré des taux de réponse ACR généralement plus élevés et des taux de rémission selon le score DAS 28 plus élevés lorsque le diagnostic de la PR remontait à <2 ans que lorsqu’il remontait à <u>></u>2 ans (score DAS 28 <2,6 : 41,7 % vs 28 % et 18 % vs 7,3 %, respectivement). L’incidence des effets indésirables des deux traitements était semblable dans les deux sous-groupes. Les élévations des taux sériques d’alanine aminotransférase ont été plus fréquentes chez les patients souffrant de PR depuis <u>></u>2 ans.

Innocuité de l’inhibition à long terme de l’IL-6

On ignore les effets de l’inhibition prolongée de l’IL-6, mais on les évalue dans le cadre de deux études de prolongation ouvertes auxquelles participent 2562 sujets des essais OPTION, TOWARD, RADIATE et AMBITION. L’analyse des données colligées après une exposition au tocilizumab d’une durée médiane de 1,5 an a révélé que le tocilizumab à 8 mg/kg en association avec le MTX était bien toléré, l’incidence et la nature des effets indésirables étant semblables à ce que l’on avait rapporté au terme des études comparatives de six mois (Rheumatology [Oxford] 2009;48[Suppl 1]:i86-i87, résumé 192).

Les taux d’infections graves, de cancers et d’autres effets indésirables graves n’ont pas augmenté avec la poursuite du traitement, soulignent le Dr Ronald F. van Vollenhoven, Hôpital universitaire Karolinska, Stockholm, Suède, et ses collaborateurs. Les effets indésirables les plus fréquents étaient les infections (36 %), les troubles digestifs (22 %), les affections cutanées et sous-cutanées (14 %) et les élévations des taux de lipides et d’enzymes hépatiques (15 %). Parmi les effets indésirables qui ont motivé l’arrêt du traitement (6,2 % des patients), les plus courants étaient les tumeurs (1,1 %), les élévations des taux d’enzymes hépatiques (1 %) et les infections (0,9 %). Les élévations des taux lipidiques observées après six mois se sont ensuite stabilisées.

Inhibition des lésions articulaires structurales

Chez les patients atteints de PR, l’inhibition de l’IL-6 freine la progression des lésions articulaires structurales et améliore la capacité fonctionnelle physique, de manière significative dans les deux cas, si l’on en juge par les données à un an de l’étude en cours LITHE (Rheumatology [Oxford] 2009;48[Suppl 1]:i93, résumé 212). Cette étude vise à évaluer l’efficacité du tocilizumab à 4 mg/kg ou à 8 mg/kg plus MTX par rapport à celle d’un placebo plus MTX dans la prévention des lésions articulaires chez 1195 patients présentant une PR évolutive modérée ou sévère dont la réponse au MTX est insuffisante.

Des chercheurs sous la direction du Dr Joel M. Kremer, Albany Medical College et The Center for Rheumatology, New York, ont rapporté que la variation moyenne du score radiographique combiné Genant/Sharp modifié était plus faible chez les patients recevant l’association (4 mg/kg et 8 mg/kg) que chez les patients recevant du MTX et un placebo (0,34 et 0,29 vs 1,13, respectivement; p<0,001 dans les deux cas). En outre, on n’a observé aucun signe de progression radiographique des érosions articulaires ou du pincement de l’interligne articulaire chez 80,5 % et 84,5 % des patients sous tocilizumab à 4 mg/kg ou à 8 mg/kg, respectivement, par comparaison à 67,2 % des patients sous placebo. L’analyse de l’aire sous la courbe (ASC) de la variation de l’index HAQ-DI (Health Assessment Questionnaire Disability Index) par rapport aux valeurs de départ a objectivé une baisse significativement plus marquée sous l’effet du tocilizumab à 4 mg/kg et à 8 mg/kg que sous l’effet du MTX (30,2 % et 47,2 % vs 7,9 %; p<0,0001 dans les deux cas), ce qui dénote une amélioration de la capacité fonctionnelle physique sur une période de 52 semaines.

RADIATE : Inhibition de l’IL-6 après une réponse insuffisante à un anti-TNF

Une analyse rétrospective exploratoire des données de l’essai RADIATE – présentée par le Pr Paul Emery, Institute of Molecular Medicine, University of Leeds, Royaume-Uni – a montré que l’inhibition de l’IL-6 améliorait l’issue clinique, peu importe le nombre d’anti-TNF prescrits auparavant (Rheumatology [Oxford] 2009; 48[Suppl 1]:i19, résumé OP51).

L’essai RADIATE regroupait 499 patients qui ont été randomisés de façon à recevoir pendant 24 semaines du tocilizumab à 4 mg/kg ou à 8 mg/kg ou un placebo par voie i.v. toutes les quatre semaines en association avec un traitement de fond par le MTX à dose stable. «Une observation unique s’est dégagée de notre étude : chez les patients recevant la dose de 8 mg/kg de tocilizumab, nous n’avons noté aucune baisse du taux de réponse ACR20, sans égard au nombre d’échecs du traitement par un anti-TNF», fait remarquer le Pr Emery. Chez les patients recevant 8 mg/kg qui avaient présenté une, deux ou trois réponses inappropriées à un anti-TNF, les taux de rémission selon le critère DAS 28 se chiffraient à 30,9 %, à 31,4 % et à 25 %, respectivement. Jamais n’a-t-on enregistré pareils taux après un échec du traitement par un anti-TNF, insiste le Pr Emery. Dans l’ensemble, les deux doses ont été bien tolérées. Aucune tendance ne s’est dégagée dans l’incidence des effets indésirables en fonction du groupe de traitement ou du nombre d’échecs antérieurs du traitement par un anti-TNF.

Inhibiteur de l’IL-6 vs autres agents biologiques

Comme on n’a jamais réalisé d’études pour comparer directement les divers agents biologiques sur le plan de l’efficacité, des chercheurs ont effectué une méta-analyse des données d’essais cliniques sur l’abatacept (deux), le rituximab (deux), les anti-TNF (11) et le tocilizumab (trois) (Rheumatology [Oxford] 2009;48[Suppl 1]: i84, résumé 185). Les 18 études – dont la durée était de 24 ou 30 semaines – regroupaient en tout 10 419 patients. Par comparaison au placebo, le tocilizumab était associé à une probabilité de réponse plus forte que les autres agents biologiques, toutes catégories de réponse confondues.

Tous les agents étaient d’efficacité comparable selon les critères ACR20 et ACR50, mais le taux de réponse ACR70 était significativement plus élevé chez les patients sous tocilizumab que chez les patients sous anti-TNF et sous abatacept. Si l’on en juge par le taux de réponse ACR70 après soustraction de l’effet placebo (4,2 %), le tocilizumab serait associé à un taux de réponse de 29 % par comparaison à 16 %, 15 % et 18 % dans le cas des anti-TNF, de l’abatacept et du rituximab, respectivement.

Nota : Au moment de la mise sous presse, le tocilizumab n’était pas commercialisé au Canada.

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