Comptes rendus

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Intervention précoce, observance du traitement et rémission dans la schizophrénie

Le présent compte rendu est fondé sur des données médicales présentées lors d'un congrès de médecine reconnu ou publiées dans une revue avec comité de lecture ou dans un commentaire signé par un professionnel de la santé reconnu. La matière abordée dans ce compte rendu s'adresse uniquement aux professionnels de la santé reconnus du Canada.

Assemblée annuelle de 2007 de l’American Psychiatric Association

San Diego, Californie / 19-24 mai 2007

Selon nos connaissances actuelles, une intervention précoce est nécessaire et amplement justifiée si l’on aspire à améliorer l’issue de la schizophrénie. Une intervention précoce dès le premier épisode peut donner lieu à une rémission et prévenir l’incapacité à long terme associée à ce trouble. Tels étaient les propos clés du récipiendaire du prix Adolf Meyer, le Dr Jeffrey A. Lieberman, directeur de la psychiatrie, Columbia University College of Physicians and Surgeons, New York, New York.

L’évolution de la maladie s’articule autour d’un groupe de gènes de prédisposition à la schizophrénie qui pourrait, de façon additive, causer l’apparition de la maladie plus tard dans la vie. Ces gènes ont des retombées sur le développement et la fonction cellulaires, et se forment alors des circuits neurologiques dont la connectivité est anormale. «Cela dit, la présence de ce déficit génétique et de cette connectivité anormale ne se traduit pas nécessairement par l’apparition de la schizophrénie. Les agressions environnementales comme les traumas ou les toxines augmentent les probabilités d’apparition de la maladie», explique le Dr Lieberman.

Installation et stades de la schizophrénie

En général, la schizophrénie apparaît à l’adolescence ou au début de l’âge adulte. Chez les personnes qui deviennent schizophrènes, le développement apporte son lot de facteurs déclenchants qui déstabilisent les circuits neuronaux vulnérables et entraînent une dérégulation des émotions et des troubles cognitifs, ce qui mène au premier épisode.

L’avènement de l’imagerie a permis de mettre en évidence des différences structurelles dans le cerveau du patient schizophrène. En particulier, on observe une diminution du volume des cortex de même qu’une hypertrophie des ventricules et des espaces sous-arachnoïdiens. Au fil du temps, a-t-on constaté lors d’études longitudinales, la perte de substance grise corticale et l’hypertrophie des ventricules et des espaces sous-arachnoïdiens s’accentuent. Ces altérations cérébrales sont associées à des rechutes et à une piètre issue à long terme, note le Dr Lieberman. «Selon une hypothèse fondée sur des données récentes, la schizophrénie comporterait des stades neurodéveloppementaux», ajoute-t-il.

Le stade prémorbide se caractériserait par un développement anormal du cerveau, alors que le stade prodromique correspondrait au début d’une anomalie de la régulation neurochimique. «Il se pourrait que le traitement stabilise le stade prodromique et prévienne la détérioration continue, affirme-t-il. La corollaire thérapeutique est d’amorcer le traitement tôt et de maintenir les patients en rémission dans l’espoir de prévenir la détérioration.»

Chaque nouvel épisode se caractérise par une détérioration encore plus marquée, et la réponse au traitement est de moins en moins bonne au fil des rechutes, note-t-il. Après plusieurs épisodes, le patient entre dans une phase chronique de la maladie caractérisée par des symptômes résiduels. Les troubles cognitifs et les symptômes négatifs s’aggravent et prédominent sur la psychose.

La recherche menée chez des patients en proie à un premier épisode a révélé que les probabilités de rémission et le temps nécessaire à l’obtention de celle-ci dépendaient du temps écoulé depuis l’apparition de la maladie. «Lorsque la maladie est d’installation récente, le rétablissement est meilleur. La durée de la maladie est un facteur indépendant du délai d’apparition de la rémission», poursuit le Dr Lieberman.

Dans le cadre d’études menées chez des patients qui en étaient à leur premier épisode, les chercheurs ont étudié l’effet d’antipsychotiques atypiques sur la structure du cerveau. Le Dr Lieberman a cité une étude non publiée réalisée aux Pays-Bas dans laquelle 96 patients schizophrènes ont été comparés à 113 témoins sains. Plus le traitement antipsychotique était long, moins la perte de volume de substance grise était prononcée. «Cette étude semble indiquer que la poursuite du traitement par un antipsychotique atypique prévient la récurrence. Nous n’avions pas observé cet effet avec l’halopéridol [lors d’une étude préalable]», ajoute-t-il.

L’efficacité d’un traitement, quel qu’il soit, est tributaire de son observance. Les données montrent que, chez un patient qui en est à son premier épisode, l’inobservance du traitement antipsychotique multiplie par un facteur de cinq environ le risque d’une première et d’une deuxième rechute au cours des cinq années suivantes, fait valoir le Dr Lieberman. «Chaque épisode psychotique successif – en quelque sorte, une série de “mini-attaques” contre le cerveau – compromet la réponse au traitement.»

Rémission

Selon les critères établis récemment par le Remission in Schizophrenia Working Group, la rémission se définit comme une amélioration des principaux signes et symptômes pendant au moins six mois; tout symptôme résiduel doit être de faible intensité et ne pas nuire au comportement pendant au moins six mois (Am J Psychiatry 2005;162:441-9). La rémission est maintenant un objectif raisonnable du traitement d’un patient qui en est à son premier épisode ou d’un adulte schizophrène cliniquement stable.

La préparation injectable à longue durée d’action de rispéridone a fait l’objet de deux études utilisant ces critères. La première – l’analyse partielle prédéterminée à un an d’un essai ouvert de deux ans – a révélé que le traitement d’un premier épisode était associé à l’obtention et au maintien de la rémission selon les critères. Les facteurs associés à une probabilité plus élevée de rémission étaient une réponse précoce au traitement et le sexe féminin. La rémission était associée à une amélioration de l’état clinique, de la capacité fonctionnelle et de la productivité, explique le Dr Robin Emsley, département de psychiatrie, Stellenbosch University, Le Cap, Afrique du Sud, qui présentait ces résultats dans une communication par affiche.

L’étude regroupait 51 patients psychotiques; 55 % avaient reçu un diagnostic de schizophrénie et 45 %, de trouble schizophréniforme selon les critères du DSM-IV. Cinquante pour cent des patients ayant reçu 25 à 50 mg ont atteint la rémission. L’âge ou le score PANSS (Positive and Negative Syndrome Score) initial n’étaient pas annonciateurs d’une rémission, fait-il remarquer. La médiane du délai de rémission était de 213 jours. Chez les patients en rémission, vs ceux qui ne l’étaient pas, on a noté une utilisation moindre des ressources (hospitalisations et visites aux urgences).

La majorité des effets indésirables (97 %) étaient bénins ou modérés, et les patients se sont remis de 82,7 % de ces effets indésirables sans ajustement de la dose.

Une rémission à long terme, d’une durée pouvant atteindre 18 mois, est aussi réalisable, comme l’a montré la deuxième étude réunissant 529 patients de sept pays d’Europe admis à l’étude initiale StoRMi (Switch to Risperidone Microspheres). Les sujets de cet essai avaient choisi de poursuivre le traitement au moyen de la préparation injectable à longue durée d’action. Les résultats de l’essai ont été présentés dans une communication affichée du Dr Pierre-Michel Llorca, Centre hospitalier universitaire Clermont-Ferrand, France.

Parmi les patients qui ont atteint la rémission ou sont demeurés en rémission pendant les six premiers mois de l’étude, 93,7 % étaient toujours en rémission après 18 mois. Plus précisément, on a observé une amélioration significative (p<0,001) à 18 mois, par rapport aux valeurs de départ, de tous les paramètres de l’échelle PANSS pour les critères suivants : symptômes positifs, symptômes négatifs, dépression/anxiété, désorganisation cognitive et excitation/hostilité. Au terme de l’étude, le score total sur l’échelle PANSS dénotait une amélioration d’au moins 20 % chez 47 % des patients. Le traitement a été bien toléré, et l’analyse de l’innocuité n’a rien révélé d’inattendu par rapport aux études antérieures.

Hospitalisations

Un traitement d’un an par la rispéridone à longue durée d’action – par rapport à une période de 12 mois avant le début du traitement – s’est traduit par une utilisation moindre des ressources; plus précisément, on a noté une baisse du nombre d’hospitalisations pour cause de santé mentale, de visites aux urgences et de jours passés à l’hôpital pour cause de santé mentale. Tels sont les résultats qui se sont dégagés de l’analyse partielle à un an des données relevées chez 109 patients schizophrènes admis à une étude d’observation multicentrique de deux ans. Ces patients étaient âgés en moyenne de 26 ans lorsqu’ils ont reçu un diagnostic de schizophrénie, et la maladie remontait en moyenne à 19,8 ans, expliquait le Dr Chris Kozma, University of South Carolina, Columbia, lors d’une communication par affiche.

L’étude portait sur 525 patients. Le Dr Kozma a analysé les données de 109 patients qui s’étaient présentés à cinq visites. L’âge moyen était de 49 ans, et 64 % des sujets étaient de sexe masculin. Pendant les 12 mois qui ont précédé l’admission à l’étude, 28,4 % des patients ont été hospitalisés, vs 17,4 % un an après le traitement (p=0,046); le nombre moyen de jours à l’hôpital est passé, par patient, de huit avant le traitement à quatre après le traitement. Le pourcentage de patients ayant visité le service des urgences est passé de 19,6 % à 9,8 % (p=0,05). D’autres analyses permettront d’évaluer des facteurs liés aux rechutes et aux hospitalisations.

Bilan lipidique

L’augmentation du risque cardiovasculaire associée aux antipsychotiques de deuxième génération soulève des inquiétudes. La Dre Erica Duncan, service de santé mentale, Atlanta VA Medical Center, Decatur, Géorgie, a rapporté les résultats d’une vaste étude rétrospective qui visait à évaluer le bilan lipidique de 6331 patients sous halopéridol, rispéridone, olanzapine ou quétiapine. Il en est ressorti que les taux lipidiques variaient selon l’antipsychotique administré.

Les comparaisons intergroupes ont montré que la rispéridone et la quétiapine, vs l’olanzapine, étaient associées à des taux significativement plus élevés de C-HDL (p<0,05 entre la rispéridone et l’olanzapine; p=0,001 pour la rispéridone et la quétiapine vs l’olanzapine), alors que l’olanzapine et la quétiapine, vs la rispéridone, étaient associées à une triglycéridémie significativement plus élevée (p<0,001 pour l’olanzapine vs la rispéridone; p<0,01 pour l’olanzapine et la quétiapine vs la rispéridone). Selon une analyse plus approfondie, la rispéridone a été associée à des taux plus faibles de cholestérol total, de C-LDL et de triglycérides de même qu’à un pourcentage plus faible de patients ayant un faible taux de C-HDL, par rapport à l’olanzapine (p<0,05).

La Dre Duncan estime que l’on doit tenir compte de ces données lorsqu’on administre un antipsychotique à un patient présentant déjà des facteurs de risque cardiovasculaire.

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