Comptes rendus

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Inhibition de la physiopathologie de la migraine : nouvelles stratégies de traitement

Le présent compte rendu est fondé sur des données médicales présentées lors d'un congrès de médecine reconnu ou publiées dans une revue avec comité de lecture ou dans un commentaire signé par un professionnel de la santé reconnu. La matière abordée dans ce compte rendu s'adresse uniquement aux professionnels de la santé reconnus du Canada.

Le 13e Congrès de l’International Headache Society

Stockholm, Suède / 28 juin-1er juillet 2007

Depuis longtemps déjà, les cliniciens savent que les crises migraineuses survenant juste avant la menstruation ou peu de temps après le début de la menstruation sont plus douloureuses, durent plus longtemps et sont plus difficiles à traiter que les migraines apparaissant à d’autres moments du cycle menstruel. Jusqu’à tout récemment, cependant, il n’existait aucune définition normalisée de la migraine menstruelle pouvant servir de fondement aux essais cliniques pour déterminer le triptan le plus efficace au sein de cette population.

La donne a toutefois changé, l’International Headache Society ayant récemment proposé une classification des critères de recherche de la migraine menstruelle et de la migraine liée à la menstruation, explique la Dre Lisa K. Mannix, directrice médicale, Headache Associates and ClinExcel Research, West Chester, Ohio. Selon ces nouveaux critères définitoires, la migraine menstruelle est une migraine sans aura qui apparaît dans une fenêtre de cinq jours de la période périmenstruelle, plus précisément à partir de deux jours avant la menstruation jusqu’à trois jours après le début de la menstruation, au moins deux cycles menstruels sur trois. Les migraines menstruelles sont subdivisées en deux sous-types, selon le moment du cycle menstruel où elles apparaissent. Les migraines sans aura survenant uniquement pendant cette fenêtre de cinq jours, à l’exclusion de toute autre période du cycle menstruel, sont dites pures ou cataméniales. Les migraines qui surviennent aussi à d’autres moments du cycle sont dites liées à la menstruation. La migraine menstruelle pure est nettement moins courante que la migraine liée à la menstruation, mais elle est plus sévère, dure plus longtemps, est plus souvent récurrente et répond moins bien au traitement médicamenteux.

«Les deux premières études prospectives dans lesquelles on a appliqué les critères diagnostiques de la migraine menstruelle proposés dans la nouvelle classification internationale des troubles céphaliques [ICHD-II, pour International Classification of Headache Disorders] aux migraines menstruelles ont permis de constater que le traitement ponctuel par le rizatriptan à 10 mg est efficace et bien toléré par rapport à un placebo dans le traitement de la migraine menstruelle», note la Dre Mannix. Ces deux études (MM1 et MM2), dont les protocoles étaient identiques, regroupaient 707 patientes âgées de 37 ans en moyenne qui souffraient de migraines menstruelles modérées à sévères. Les sujets de l’étude devaient traiter leurs migraines menstruelles à l’aide d’une dose unique de rizatriptan à 10 mg ou un placebo et prendre note du degré de soulagement de leur douleur à deux et à 24 heures. Un peu plus de 75 % des participantes souffraient de migraines liées à la menstruation alors que les autres souffraient de migraines menstruelles pures sans aura.

Le pourcentage de patientes dont la douleur était soulagée à deux heures était significativement plus élevé dans le groupe de traitement actif que dans le groupe placebo : 70 % vs 53 % dans l’étude MM1 (p=0,001) et 73 % vs 50 % dans l’étude MM2 (p<0,001), poursuit la Dre Mannix. Le pourcentage de patientes chez qui la douleur demeurait absente à 24 heures était aussi significativement plus élevé dans le groupe traité que dans le groupe témoin sous placebo, soit 46 % vs 33 % dans les études MMI et MM2 (p=0,016 et p=0,024, respectivement).

Plusieurs signes et symptômes connexes, dont les nausées, la sensibilité cutanée, la photophobie et la phonophobie, ont été éliminés ou atténués, de manière appréciable dans certains cas. Les patientes recevant le traitement actif étaient aussi plus susceptibles de fonctionner normalement à deux heures que les patientes sous placebo et n’ont pas eu besoin de médicament de secours. Aucun effet indésirable grave n’a été signalé, ni dans un groupe ni dans l’autre, fait-elle observer.

«Ces deux études sont les premières à utiliser les nouveaux critères de la migraine menstruelle selon l’ICHD-II, de conclure la Dre Mannix, et elles montrent l’efficacité du rizatriptan dans le traitement de la migraine menstruelle pour soulager la douleur à deux et à 24 heures.»

Traitement précoce vs tardif

Même si les données à l’appui d’un traitement médicamenteux précoce et ponctuel de la migraine s’accumulent, explique le Dr Michel Ferrari, professeur titulaire de neurologie, Centre médical universitaire de Leyde, Pays-Bas, cette théorie comporte plusieurs faiblesses éventuelles.

«Il peut être préférable d’attendre que la douleur migraineuse soit modérée ou sévère pour s’assurer que l’on traite effectivement une migraine et non une céphalée de tension ou une céphalée non migraineuse de courte durée, par exemple. Une intervention précoce peut vouloir dire que l’on traite une migraine légère et d’évolution lente, mais il pourrait aussi s’agir d’une migraine d’évolution rapide. Il est donc important de bien différencier la migraine légère d’un début de crise migraineuse.»

De l’avis du Dr Ferrari, les critères d’évaluation devraient différer selon la nature de la crise migraineuse. «Dans les faits, nous avons besoin d’un critère d’évaluation qui permet de mesurer à la fois la réponse initiale et la durée de la réponse, dit-il. Autrement dit, on aspire à une dose unique qui coupe court à la crise dans un délai de deux heures, qui procure un soulagement pendant au moins 24 heures et qui élimine la nécessité d’un médicament de secours pendant trois jours.»

Son équipe a fait une méta-analyse qui regroupait 53 essais cliniques comparatifs sur les triptans oraux dans le traitement ponctuel de la migraine, et les résultats ont révélé que le rizatriptan à 10 mg, l’almotriptan à 12,5 mg et l’élétriptan à 80 mg étaient associés à des taux plus élevés d’absence de la douleur à deux heures que le sumatriptan à 100 mg. En outre, le rizatriptan et l’élétriptan à 80 mg ont permis d’augmenter de 59 % le taux de réponse de la céphalée à deux heures par rapport au sumatriptan. Les taux d’absence soutenue de la douleur étaient aussi plus élevés pour le rizatriptan, l’almotriptan et l’élétriptan à 80 mg (mais pas à 20 mg) que pour le sumatriptan.

Bien que nous ayons pour l’instant relativement peu de données scientifiques à l’appui du traitement de la migraine lorsque la douleur est encore légère, le Dr Ferrari estime que l’on doit «traiter le plus tôt possible, dès que la crise migraineuse est confirmée, mais après la phase de l’aura».

Même si l’aura ne répond pas au traitement par un analgésique ou un triptan dans les études randomisées et comparatives avec placebo, fait valoir le Dr Hans-Christoph Diener, professeur titulaire de neurologie, et directeur du département de neurologie, Université de Duisburg-Essen, Essen, Allemagne, il est certain que l’utilisation d’un agoniste des récepteurs 5-HT1B/1D durant la phase de l’aura n’augmente pas l’incidence des effets indésirables ni ne provoque d’AVC, ce qui est important du point de vue de l’innocuité. Cela dit, la kétamine administrée par voie intranasale pourrait être une option expérimentale pour le traitement de l’aura, pour autant qu’elle soit utilisée uniquement à titre préventif chez les sujets qui présentent des auras à répétition.

Certes, on doit conseiller aux patientes de prendre leur préparation antimigraineuse le plus tôt possible, mais on doit leur préciser de ne pas prendre un triptan en présence des symptômes de l’aura, conclut-il. La solution pourrait être de prendre ce dernier lorsque les symptômes de l’aura se résorbent.

Stratégie de traitement novatrice

«Le premier antagoniste oral du peptide lié au gène de la calcitonine [CGRP] pourrait devenir le précurseur de la prochaine génération d’agents puissants pour le traitement de la migraine aiguë», affirme la Dre Stefanie Kane, West Point, Pennsylvanie.

Le CGRP est un puissant neurotransmetteur exprimé dans le système trigéminovasculaire qui est libéré dans la circulation crânienne en présence d’une migraine ou d’une céphalée vasculaire de Horton. Il est même possible que les effets antimigraineux des triptans soient attribuables, du moins en partie, à l’inhibition de la libération du CGRP, car il semble que l’administration de ces agents permette de normaliser les taux élevés de CGRP. Cette dynamique donne à penser que l’activation du système trigéminovasculaire médiée par le CGRP pourrait jouer un rôle clé dans la pathogenèse de la migraine et que l’inhibition des processus physiopathologiques découlant du CGRP pourrait constituer une nouvelle approche dans le traitement de la migraine qui n’exercerait pas les effets cardiovasculaires indésirables usuels, explique la Dre Kane. On pense que les récepteurs du CGRP dans les vaisseaux sanguins méningés participeraient à la douleur migraineuse, et que la vasodilatation de ces derniers induite par le CGRP pourrait être liée à l’allodynie caractéristique de la migraine. Le blocage des récepteurs du CGRP peut supprimer quelques mécanismes éventuels de la crise migraineuse.

Le Dr Tony Ho, Whitehouse Station, New Jersey, a discuté des résultats d’une étude de détermination de la posologie dont l’objectif était d’évaluer l’efficacité et la tolérabilité du MK-0974, nouvel inhibiteur du CGRP. «On a estimé que la proportion des 330 sujets dont la douleur était soulagée à deux heures se chiffrait à 68,1 % (n=38) dans le groupe recevant la dose de 300 mg de MK-0974, à 48,2 % (n=45) dans le groupe recevant la dose de 400 mg et à 67,5 % (n=40) dans le groupe recevant la dose de 600 mg, souligne-t-il. En outre, 45,2 % des sujets du groupe 300 mg, 24,3 % des sujets du groupe 400 mg et 32,1 % des sujets du groupe 600 mg n’avaient aucune douleur.»

Le taux d’absence soutenue de la douleur à 24 heures était plus élevé chez tous les sujets recevant le traitement actif, peu importe la dose, que chez les témoins sous placebo : 39,6 % dans le groupe 300 mg, 22 % dans le groupe 400 mg et 32 % dans le groupe 600 mg, ajoute le Dr Ho. La comparaison des taux moyens de soulagement de la douleur à deux heures – qui était l’hypothèse principale de l’étude – a révélé que la différence entre les trois groupes de traitement actif et le groupe placebo était aussi significative (p=0,015).

Nota : Au moment où le présent article a été mis sous presse, le MK-0974 n’était pas commercialisé au Canada.

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