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La MPOC revisitée

Le présent compte rendu est fondé sur des données médicales présentées lors d'un congrès de médecine reconnu ou publiées dans une revue avec comité de lecture ou dans un commentaire signé par un professionnel de la santé reconnu. La matière abordée dans ce compte rendu s'adresse uniquement aux professionnels de la santé reconnus du Canada.

PRESSE PRIORITAIRE - Conférence internationale de l’American Thoracic Society

San Diego, Californie / 15-20 mai 2009

La maladie pulmonaire obstructive chronique (MPOC) s’accompagne souvent de maladies concomitantes, principalement de maladies cardiovasculaires (CV). Le Dr Leonardo M. Fabbri, Département de pneumologie, Università degli Studi di Modena e Reggio Emilia, Italie, qui faisait part à l’auditoire de la réflexion en cours sur le processus pathologique qui sous-tend la MPOC, rappelait que même si le tabagisme fait clairement partie des premiers signes du processus qui endommage les poumons dans la MPOC, il exerce probablement un effet inflammatoire généralisé, puisque les particules de la fumée se retrouvent dans la circulation et dans de nombreux tissus autres que les poumons. Au nombre des maladies caractérisées par une inflammation systémique figurent les maladies CV, et la quasi-totalité des patients souffrant de MPOC présentent au moins une affection concomitante. «Il est primordial, à mon avis, que la MPOC soit maintenant considérée comme une maladie systémique», affirme le Dr Fabbri. En effet, lorsque ses collaborateurs et lui-même ont évalué la possibilité que des patients fréquentant une clinique de soins CV souffrent de MPOC, ils ont constaté que 29 % des patients présentant une insuffisance cardiaque congestive souffraient aussi de MPOC, mais que seulement deux le savaient.

Le fait de voir la MPOC comme un processus inflammatoire systémique et non seulement comme une maladie pulmonaire a plusieurs retombées importantes sur le traitement. D’abord, note le Dr Bartolome Celli, Tufts University, Boston, Massachusetts, on pourrait atténuer les conséquences négatives inévitables qui affligent actuellement les patients atteints de MPOC.

Lorsque le Dr Celli et son équipe ont analysé les causes de décès chez les sujets au terme des trois années de l’étude TORCH, ils ont constaté que la mort découlait d’un trouble respiratoire dans 35 % des cas – la MPOC étant directement en cause dans 28 % des cas – mais que 27 % des décès étaient dus à une cause CV et 21 % des cas, à un cancer.

Ainsi, il se pourrait bien que les maladies CV et les cancers – qui pourraient avoir des éléments pathologiques en commun avec la MPOC – soient au nombre des «manifestations extrapulmonaires» de la MPOC, estime le Dr Celli.

Maladie inflammatoire systémique

Si l’on découvrait un marqueur à la fois spécifique de la MPOC et prédictif de l’issue clinique, la théorie voulant que la MPOC soit en fait une maladie inflammatoire systémique gagnerait en crédibilité. Malheureusement, nous n’avons toujours pas repéré de tel marqueur. Dans le poumon, l’inflammation semble résulter en grande partie d’un afflux de neutrophiles, d’éosinophiles, de macrophages et de monocytes, alors que l’activation des lymphocytes est commune à l’inflammation pulmonaire et à l’inflammation systémique. La protéine C-réactive (CRP), le fibrinogène, le facteur de nécrose tumorale alpha (TNFa), l’interleukine(IL)-6 et l’IL-8 semblent davantage caractéristiques d’un état inflammatoire systémique.

Un marqueur de l’inflammation qui serait prédictif de la MPOC serait surtout utile s’il permettait de reconnaître la MPOC à un stade précoce. Comme le souligne le Dr Ravi Kalhan, Feinberg School of Medicine, Northwestern University, Chicago, Illinois, la quasi-totalité des cas de MPOC sont diagnostiqués à un stade assez avancé, lorsqu’il semble bien peu probable que les lésions tissulaires puissent régresser. «À l’heure actuelle, non seulement n’avons-nous pas de marqueur de la maladie à un stade précoce, poursuit-il, mais nous ne pouvons même pas définir le stade précoce. L’augmentation de l’inflammation systémique pourrait être l’outil dont [nous avons] besoin pour repérer ces patients avant que d’importantes lésions pulmonaires n’apparaissent.»

À ce jour, l’étude prospective en cours intitulée CARDIA (Coronary Artery Risk Development in young Adults) a démontré que le déclin pulmonaire prévisible qui survient avec l’âge était fortement corrélé avec les taux de CRP et de fibrinogène, mais seulement lorsqu’il était mesuré en capacité vitale forcée. En revanche, le volume expiratoire maximal en une seconde (VEMS) n’était pas lié au taux de CRP ni au taux de fibrinogène selon la même étude de cohorte prospective. «Nous sommes loin d’être avancés pour ce qui est de mesurer l’inflammation systémique en relation avec la MPOC, mais je pense que nous allons repérer un phénotype pour l’inflammation en vertu duquel certains patients atteints de MPOC sont vulnérables à un vaste éventail de maladies inflammatoires», avance le Dr Kalhan.

Traitements novateurs

L’identification de marqueurs de l’inflammation qui caractérisent la MPOC pourrait aussi être la première étape du développement de traitements novateurs. La plupart des traitements actuels de la MPOC n’agissent pas sur les marqueurs systémiques de l’inflammation. Le tiotropium, bronchodilatateur à longue durée d’action, améliore la fonction pulmonaire et la qualité de vie chez les patients atteints de MPOC, mais il ne diminue pas les marqueurs de l’inflammation systémique comme la CRP ou le TNFa de façon significative, affirme le Dr Klaus F. Rabe, Département de pneumologie, Centre médical de l’Université de Leyde, Pays-Bas. Il en va de même pour les corticostéroïdes en inhalation comme la fluticasone, même si ces agents diminuent les cytokines inflammatoires spécifiques du tissu pulmonaire.

Les statines, par contre, semblent bénéfiques dans la MPOC, vraisemblablement en raison de leurs effets anti-inflammatoires systémiques. Dans le cadre d’une étude, van Gestel et al. ont constaté que les statines étaient associées à une augmentation significative de 33 % de la survie à long terme chez les patients atteints de MPOC. Les auteurs sont partis du principe que la MPOC était une maladie inflammatoire et que les effets anti-inflammatoires systémiques des statines devraient améliorer les résultats.

«Les médicaments classiques n’agissent pas sur l’inflammation systémique, de sorte que s’il s’agit d’un objectif important, nous devons élaborer de nouvelles stratégies de traitement», indique le Dr Rabe. En fait, un certain nombre de traitements novateurs ciblant la régulation des cellules inflammatoires de façon plus globale sont en développement, dont les inhibiteurs de la phosphodiestérase-4 (PDE-4).

De tous les candidats possibles à l’étude dans la MPOC, «les inhibiteurs de la PDE-4 sont ceux qui sont les plus susceptibles de franchir le cap du marché», explique le Dr Peter Calverley, School of Clinical Sciences, University Hospital Aintree, Liverpool, Royaume-Uni. Étant donné que la PDE-4 assure la médiation des effets inflammatoires non seulement dans l’appareil respiratoire, mais dans l’organisme entier, «il est parfaitement logique de traiter une maladie systémique en administrant par voie générale un médicament qui exerce des effets systémiques», ajoute-t-il.

La logique de cette théorie a été démontrée dans un vaste essai clinique portant sur un inhibiteur de la PDE-4 à une prise par jour, le roflumilast, considéré comme le plus actif des inhibiteurs de la PDE-4 éprouvés en clinique à ce jour. Comme le soulignent Calverley et al. (Am J Respir Crit Care Med 2002; 76:154-61), 1513 patients atteints de MPOC sévère (VEMS médian de 41 % du volume prédit) ont reçu aléatoirement 500 µg de roflumilast ou un placebo. Au terme des 52 semaines de l’étude, le VEMS post-bronchodilatation avait augmenté de 39 mL sous l’effet de cet agent, par rapport au placebo, et les patients atteints de MPOC très sévère ont eu moins d’exacerbations sous roflumilast.

Les résultats de cette étude valident la théorie voulant que les traitements systémiques puissent améliorer les paramètres cliniques de la maîtrise de la MPOC comme la fonction pulmonaire, fait remarquer le Dr Calverley. D’autres données sur cet agent sont attendues.

«À mon avis, l’inflammation systémique est le chaînon manquant qui nous permettra d’élucider la MPOC, et la mesure de l’inflammation sera d’une absolue nécessité pour le développement et l’utilisation de traitements novateurs qui maîtrisent le processus morbide», enchaîne le Dr Steven Rennard, University of Nebraska School of Medicine, Omaha.

Résumé

De plus en plus de données montrent que la MPOC n’est pas seulement une maladie pulmonaire, mais aussi une maladie inflammatoire systémique qui a en commun certaines caractéristiques pathologiques avec les affections concomitantes souvent observées chez les patients atteints de MPOC, comme les maladies CV. On évalue actuellement des traitements novateurs qui atténuent l’inflammation systémique plus efficacement que les anti-inflammatoires en inhalation, l’objectif ultime étant une meilleure maîtrise de la maladie. En diminuant l’inflammation systémique, on espère que le traitement améliorera non seulement la fonction pulmonaire, mais également le pronostic global des patients atteints de MPOC, lesquels demeurent très vulnérables aux troubles respiratoires et aux autres facteurs de comorbidité.

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