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L’atteinte du taux cible de C-LDL pourrait devenir systématique ou presque grâce à de nouveaux hypolipidémiants

Le présent compte rendu est fondé sur des données médicales présentées lors d'un congrès de médecine reconnu ou publiées dans une revue avec comité de lecture ou dans un commentaire signé par un professionnel de la santé reconnu. La matière abordée dans ce compte rendu s'adresse uniquement aux professionnels de la santé reconnus du Canada.

PRESSE PRIORITAIRE - Congrès canadien sur la santé cardiovasculaire

Vancouver, Colombie-Britannique / 25-28 octobre 2014

Vancouver - Des hypolipidémiants parvenus à un stade avancé de leur développement devraient permettre à la majorité des patients d’atteindre le taux de C-LDL recommandé, peu importe la raison pour laquelle les médicaments actuels ne permettent pas de l’atteindre. Ces agents pourraient donner lieu à une vague de diminutions de la morbi-mortalité de même ampleur que celle qui a suivi l’arrivée des statines. Les inhibiteurs de la PCSK9 (proprotein convertase subtilisin/kexin type 9) sont les hypolipidémiants en développement les plus avancés. Dans le plus vaste des essais de phase III jamais réalisés sur un inhibiteur de la PCSK9, l’alirocumab a été associé à une diminution du C-LDL de 61 %. L’efficacité de l’alirocumab et d’autres inhibiteurs de la PCSK9 fait actuellement l’objet d’essais cliniques. Selon une analyse post hoc réalisée peu après cet essai de phase III sur l’alirocumab, la réduction du risque cardiovasculaire (CV) s’apparente à celle qui a été associée aux diminutions marquées du C-LDL dans les essais sur les statines.

Rédactrice médicale en chef : Dre Léna Coïc, Montréal, Québec

Le taux cible de C-LDL recommandé par la Société canadienne de cardiologie (SCC) (guide de 2012) n’est pas atteint chez une proportion substantielle de Canadiens à risque de maladie CV sous hypolipidémiant. La plupart des patients à risque élevé prennent une statine, mais il demeure fréquent que le taux cible ne soit pas atteint pour diverses raisons, notamment parce que les statines n’abaissent pas suffisamment le taux de C-LDL aux doses tolérées. De nombreux patients sont ainsi vulnérables à des événements évitables.

Selon le registre international CLARIFY regroupant des patients atteints de maladie coronarienne stable, dont 1200 Canadiens, «94 % des patients prennent [maintenant] une statine», souligne le Dr Shaun Goodman, codirecteur de la cardiologie, St. Michael’s Hospital, Toronto. Cela dit, l’objectif de la SSC – un taux de C-LDL ≤2 mmol/L ou une diminution ≥50 % par rapport au taux initial –est atteint chez seulement 60 % des patients du registre (Gandhi et al. Can J Cardiol 2012;28(5S): S224-S390).

Près de 40 % de patients vulnérables

De 35 à 40 % des patients à risque élevé n’atteignent pas leur taux cible de C-LDL, affirme le Dr Goodman (Goodman et al. Can J Cardiol 2010;26;e33-35; Leiter et al. Can J Diabetes 2013;37:82-9). Souvent, une statine puissante est prescrite à une dose insuffisante. Les effets indésirables (EI), surtout les myalgies ou la faiblesse musculaire, peuvent limiter la dose. Dans d’autres cas, même une statine prescrite à la dose maximale ne suffit pas.

Ces lacunes thérapeutiques ont été au cœur du développement de nouveaux hypolipidémiants, surtout les inhibiteurs de la PCSK9, anticorps monoclonaux parvenus à l’étape des essais de phase III. La protéine PCSK9, identifiée au Canada par le Dr Nabil G. Seidah, Institut de Recherches Cliniques de Montréal (IRCM), se fixe au récepteur des LDL (R-LDL) pour induire sa dégradation. Les inhibiteurs de la PCSK9 préservent le R-LDL, abaissant ainsi le taux sérique de C-LDL. Une efficacité et une innocuité remarquables ont été observées lors d’essais de phase III.

«Nous espérons que ces agents soient commercialisés d’ici 1 an ou 2», souligne le Dr Lawrence A. Leiter, professeur titulaire de médecine et de sciences de la nutrition, University of Toronto, Ontario. Dans une revue des trois inhibiteurs de la PCSK9 parvenus au stade de la recherche clinique, le Dr Leiter a présenté des données d’essais de phase III sur l’alirocumab et l’évolocumab et d’essais de phase II sur le bococizumab.

Données tirées d’essais sur les inhibiteurs de la PCSK9

Le Dr Leiter a revu des données d’essais cliniques sur l’alirocumab du programme ODYSSEY initialement présentées au congrès 2014 de la European Society of Cardiology.

Le plus vaste des essais, ODYSSEY Long Term (n=2341), portait sur l’efficacité et l’innocuité de l’alirocumab et ciblait des patients à risque élevé d›événement CV ou atteints d’hypercholestérolémie familiale (HCF) hétérozygote. Tous sous statine à la dose maximale tolérée, les sujets ont reçu aléatoirement 150 mg d’alirocumab ou un placebo par voie sous-cutanée toutes les 2 semaines. À 24 semaines, le C-LDL avait diminué de 61 % sous alirocumab et augmenté de 0,8 % sous placebo, soit un avantage relatif de 61,8 % (p<0,0001) pour l’alirocumab. Le taux recommandé pour les patients à risque très élevé (<1,8 mmol/L) et à risque élevé (<2,6 mmol/L) a été atteint chez 81 % des patients sous alirocumab vs 9 % des patients sous placebo (p<0,0001). Globalement, 79 % des patients sous alirocumab et 8 % des patients sous placebo (p<0,0001) ont atteint un taux <1,8 mmol/L sans égard au risque. Les taux de C-non-HDL, d’ApoB et de Lp(a) ont aussi diminué significativement par rapport aux valeurs initiales sous alirocumab, mais pas sous placebo.

Ces améliorations marquées ont été associées à un profil d’innocuité et de tolérabilité «généralement comparable» dans les deux groupes, poursuit le Dr Leiter. Le taux d’EI graves survenus sous traitement était en fait plus faible sous alirocumab (16,5 % vs 17,6 %), mais l’écart n’était pas significatif.

L’essai ODYSSEY Outcomes – en cours, mais non publié – déterminera si ces diminutions remarquables du C-LDL se traduisent par une diminution du risque d’événement CV. Une analyse post hoc de l’essai ODYSSEY Long Term présentée par le Dr Leiter est encourageante. Dans cet essai dont le paramètre principal était identique à celui d’ODYSSEY Outcomes (décès dû à la maladie coronarienne, infarctus du myocarde non mortel, AVC ischémique mortel ou non mortel, et angor instable nécessitant l’hospitalisation), le taux d’événements était de 1,4 % sous alirocumab vs 3,0 % sous placebo. Une analyse post hoc a ses limites, prévient le Dr Leiter, mais «on parle ici d’une diminution de 50 %», ce qui est «très rassurant sur le plan de la protection CV».

Les diminutions du C-LDL sous évolocumab et bococizumab sont aussi encourageantes. Dans l’essai de phase III DESCARTES, l’évolocumab a été associé à une diminution de 57 % du C-LDL par rapport au placebo (p<0,001) à 52 semaines. Dans un essai de phase IIb de 12 semaines visant à déterminer la posologie du bococizumab et son innocuité, la dose maximale a été associée à une diminution comparable du C-LDL. Les taux d’EI étaient faibles dans les essais sur l›évolocumab et le bococizumab. Contrairement à l’alirocumab et à l’évolocumab, le bococizumab est un anticorps monoclonal humanisé plutôt qu’entièrement humain.

Premier inhibiteur de la PCSK9 associé
à des données à 76 semaines

Nous disposons maintenant des données à 76 semaines d’une étude de prolongation internationale menée en mode ouvert sur l’alirocumab dans l’HCF hétérozygote. Tous les sujets recevaient une statine à une dose stable, et l’ézétimibe était autorisé. Selon la plus récente mise à jour, qui incluait des participants du Canada, le C-LDL a baissé en moyenne de 60,5 % par rapport au taux initial (p<0,0001), précise le Dr Robert Dufour, directeur associé, Clinique de prévention cardiovasculaire à l’IRCM, Montréal. Bien toléré, l’alirocumab a été associé à une bonne observance à long terme, >90 % des patients ayant continué de recevoir une dose de 150 mg toutes les 2 semaines. Aucun patient n’a abandonné le traitement à cause d’une réaction au point d’injection.

Diminution du C-LDL en

présence d’hypercholestérolémie familiale

Deux essais de plan similaire ont fait ressortir des diminutions impressionnantes du C-LDL dans l’HCF hétérozygote. Selon l’analyse groupée (n=735), la diminution du C-LDL sous alirocumab excédait de 51 % la diminution sous placebo à 24 semaines  (p<0,0001) et se maintenait à 52 semaines. Un profil d’innocuité semblable à celui d’un placebo a de nouveau été observé, le taux d’abandon pour cause d’EI ayant été plus faible sous alirocumab que sous placebo (3,1 % vs 3,7 %; écart non significatif).

L’efficacité à long terme de l’alirocumab dans l’HCF hétérozygote est encourageante, mais l’inhibition de la PCSK9 n’est pas la seule stratégie novatrice envisagée pour les groupes n’atteignant pas leurs taux cibles. Le besoin de nouvelles stratégies est particulièrement criant dans l’HCF homozygote. Plusieurs stratégies sont à l’étude, affirme le Dr Jacques Genest, professeur titulaire de médecine, Centre universitaire de santé McGill, Montréal. Un nouvel agent pour l’HCF homozygote, le lomitapide, est déjà homologué au Canada, et un autre, le mipomersen, est en développement. L’épuration extracorporelle des LDL est une autre méthode expérimentale permettant d’abaisser le C-LDL.

C-LDL : bénéfice associé à des taux très faibles

Un très faible taux de C-LDL n’a toujours pas été associé à un risque accru d’EI, insiste le Dr Genest. À en juger par des essais comme JUPITER, PROVE-IT et TNT, de très faibles taux de C-LDL (<1,0 mmol/L) sont au contraire associés à «une très forte tendance» vers une incidence moindre d’événements, comparativement aux taux plus élevés. «Il n’y a pas d’incidence accrue d’EI», poursuit-il, même selon des évaluations approfondies de certains types d’EI suscitant des inquiétudes théoriques, tel un dysfonctionnement neurologique.

Le Dr G. B. John Mancini, professeur titulaire de médecine, University of British Columbia, Vancouver, s’est aussi fait rassurant. Nombre d’auteurs ont fait la preuve d’une relation linéaire positive entre le taux de C-LDL et le risque CV; à son avis, les recommandations en vigueur au Canada et l’hypothèse voulant que l’on puisse abaisser davantage les taux cibles de C-LDL pour réduire le risque sont solidement étayées. Comme le Dr Genest, il conclut de son évaluation que «le profil d’EI associé à un très faible taux de C-LDL ne montre aucune tendance inquiétante qui annule le bénéfice CV.»

Conclusion

Le taux cible de C-LDL n’est toujours pas atteint chez une proportion élevée de patients recevant actuellement une statine. Pourquoi? Probablement parce que les schémas à base d’une statine puissante ne sont pas assez énergiques et que les statines ne permettent pas d’atteindre le taux cible aux doses tolérées. La plupart des sujets de vaste essais cliniques, y compris ceux qui souffrent d’HCF hétérozygote, ont atteint le taux cible grâce à un inhibiteur de la PCSK9. Selon des données préliminaires sur l’alirocumab, la baisse supplémentaire du taux de C-LDL est associée à une diminution du taux d’événements CV. Les essais en cours nous éclaireront sur le rôle clinique des inhibiteurs de la PCSK9, dont le profil d’innocuité et de tolérabilité semble excellent.

Nota : Au moment de la mise sous presse, les inhibiteurs de la PCSK9 n’étaient pas commercialisés au Canada.

 

 

 

 

PP

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