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Le point sur le traitement antiplaquettaire en médecine cardiovasculaire

Le présent compte rendu est fondé sur des données médicales présentées lors d'un congrès de médecine reconnu ou publiées dans une revue avec comité de lecture ou dans un commentaire signé par un professionnel de la santé reconnu. La matière abordée dans ce compte rendu s'adresse uniquement aux professionnels de la santé reconnus du Canada.

PRESSE PRIORITAIRE - Conférence TCT (Transcatheter Cardiovascular Therapeutics) de 2008

Washington D.C. / 12-17 octobre 2008

Les plaquettes jouent un rôle clé dans l’athérothrombose, cause première des syndromes coronariens aigus (SCA). Les patients chez qui on implante un tuteur sont exposés au risque de thrombose sur tuteur et apparemment à un risque de thrombose tardive s’ils reçoivent un tuteur médicamenté. Un certain pourcentage de patients en proie à un SCA ou vulnérables à un SCA sont des «hyporépondeurs» aux antiplaquettaires actuels (c.-à-d., AAS et clopidogrel). Une réponse insuffisante au traitement antiplaquettaire est considérée comme un facteur de risque d’événement ischémique après la pose d’un tuteur coronarien, surtout chez les victimes d’un infarctus du myocarde (IM) aigu. L’utilisation d’un troisième antiplaquettaire ou d’un nouvel agent plus puissant est au nombre des stratégies que l’on propose pour suppléer à la réponse insuffisante et ainsi éviter les événements ischémiques.

La trithérapie antiplaquettaire : une possibilité?

Le Dr Young-Hoon Jeong, Hôpital universitaire national du Gyeongsang, Jinju, Corée du Sud, et ses collaborateurs ont expérimenté un triple traitement antiplaquettaire en ajoutant du cilostazol, inhibiteur sélectif de la phosphodiestérase de l’AMP cyclique, à l’ASS et au clopidogrel.

Dans le cadre de l’essai ACCEL-AMI (Adjunctive Cilostazol Vs. High Maintenance Dose Clopidogrel in Patients with AMI) qui regroupait 90 victimes d’un IM aigu chez qui on implantait un tuteur, l’agrégation plaquettaire maximale en réponse à l’adénosine diphosphate (ADP) a été significativement plus marquée (p<0,001) après 30 jours dans le groupe trithérapie antiplaquettaire avec cilostazol que dans le groupe bithérapie. La trithérapie a aussi été associée au taux le plus faible de réponse insuffisante au clopidogrel.

Selon les données du registre DECREASE, l’effet antiplaquettaire supplémentaire qui a résulté de l’ajout du cilostazol à l’AAS et au clopidogrel s’est traduit par un taux plus faible de thrombose sur tuteur après un an, par comparaison à la bithérapie antiplaquettaire, souligne un co-investigateur de l’essai ACCEL-AMI, le Dr Seong-Wook Park, Centre médical Asan, Séoul, Corée du Sud. Ce registre a été bâti dans un centre où l’on a administré la trithérapie antiplaquettaire à 1443 patients et la bithérapie antiplaquettaire standard à 1656 patients après la mise en place d’un tuteur médicamenté.

Selon une analyse où les groupes étaient appariés sur le score de propension, le risque de thrombose sur tuteur et le risque d’IM à un an étaient respectivement 88 % et 70 % plus faibles dans le groupe trithérapie que dans le groupe bithérapie, et on n’a pas observé pour autant d’augmentation du risque d’hémorragie majeure ou mineure, précisent les chercheurs.

Bien que la trithérapie axée sur le cilostazol puisse être utile lorsque la réponse insuffisante au clopidogrel est démontrée, les chercheurs en ont conclu que nous avons besoin d’études d’envergure à long terme pour déterminer si l’ajout du cilostazol permet une prévention plus efficace des événements thrombotiques après un IM aigu.

Résultats d’une étude de phase II sur un nouvel antiplaquettaire

Le ticagrelor (AZD6140), premier antagoniste oral et réversible qui agit directement sur le récepteur P2Y<sub>12</sub> de l’ADP, fait actuellement l’objet d’études cliniques de phase II. Par comparaison au clopidogrel, cet agent – qui ne fait pas partie de la classe des thiénopyridines – a exercé une inhibition plaquettaire plus rapide, plus constante et plus marquée, et a semblé être associé à une incidence moindre d’IM, quoique l’écart n’ait pas été significatif, explique le Dr Dominick J. Angiolillo, University of Florida, Jacksonville.

Ce nouvel antiplaquettaire a été associé à une dyspnée et à des pauses ventriculaires de <u>></u>2,5 secondes dose-dépendantes, mais le taux d’abandon était similaire dans les deux groupes, tout comme le taux d’hémorragie, soulignent les chercheurs.

Résultats de TRITON-TIMI 38

Le prasugrel, autre antagoniste des récepteurs P2Y<sub>12</sub>, est aussi au nombre des nouveautés. Les résultats de l’essai de phase III TRITON (Trial to Assess Improvement in Therapeutic Outcomes by Optimizing Platelet Inhibition with Prasugrel)-TIMI 38 semblent corroborer son court délai d’action et l’incidence moindre d’événements ischémiques qui lui est associée.

Lors de l’essai TRITON-TIMI 38, 13 608 patients en proie à un SCA chez qui on prévoyait implanter un tuteur coronarien ont été randomisés de façon à recevoir du clopidogrel (dose d’attaque de 300 mg suivie d’une dose d’entretien de 75 mg/jour) ou du prasugrel (dose d’attaque de 60 mg suivie d’une dose d’entretien de 10 mg/jour). Le traitement durait six à 15 mois (médiane : 12 mois). Tous les patients recevaient également de l’AAS.

Les résultats cliniques à 30 jours favorisent le nouvel antiplaquettaire, celui-ci ayant été associé à une réduction de 19 % du paramètre mixte principal – décès d’origine cardiovasculaire, IM non mortel et AVC non mortel – par comparaison au clopidogrel, affirme le Dr C. Michael Gibson, Harvard Medical School et Beth Israel Deaconess Hospital, Boston, Massachusetts. Le traitement par le prasugrel a aussi permis de diminuer significativement les taux d’IM (9,7 % pour le clopidogrel vs 7,4 % pour le prasugrel; p<0,001), d’interventions urgentes de revascularisation des vaisseaux cibles (3,7 % vs 2,5 %, respectivement; p<0,001) et de thromboses sur tuteur (2,4 % vs 1,1 %, respectivement; p<0,001).

Sans égard au type de tuteur utilisé, le prasugrel a également autorisé une réduction significative du taux de thrombose sur tuteur à court terme (<u><</u>30 jours après la pose du tuteur) et à plus long terme (>30 jours après la pose du tuteur).

La diminution du paramètre principal tient surtout à la diminution du taux d’IM. L’incidence de tous les types d’IM, sauf les IM survenant très peu de temps après un pontage aortocoronarien, était systématiquement plus faible dans le groupe prasugrel que dans le groupe clopidogrel, note le Dr Gibson. Le prasugrel a été associé à une diminution de 29 % du risque relatif d’IM spontané (p=0,0015), «bref, le type d’IM que la plupart d’entre nous craignent le plus, surtout à long terme», ajoute-t-il.

Si le prasugrel a été associé à une diminution des événements cliniques, on a toutefois observé une augmentation des événements hémorragiques suivants dans le groupe prasugrel : les hémorragies majeures (2,4 % vs 1,8 %; p=0,03); les hémorragies menaçant le pronostic vital (1,4 % vs 0.9 %; p=0,01), y compris les hémorragies qui se sont révélées non mortelles (1,1 % vs 0,9 %; taux de risque [HR] de 1,25; p=0,23); et les hémorragies mortelles (0,4 % vs 0,1 %; p=0,002).

Sur le plan clinique, le résultat net favorise le prasugrel, puisqu’on a enregistré 23 IM de moins; par contre, on a enregistré cinq hémorragies majeures non reliées à un pontage de plus pour 1000 patients traités par le prasugrel plutôt que par le clopidogrel.

Sous-groupes exposés à un risque hémorragique plus élevé

«Il est possible de réduire le risque hémorragique en limitant l’utilisation de cet antiplaquettaire aux patients dont le risque est acceptable», fait remarquer le Dr Gibson. L’excédent d’hémorragies observé dans le groupe prasugrel de l’essai TRITON-TIMI 38 concernait trois sous-groupes : patients âgés de plus de 75 ans, patients pesant moins de 60 kg, et patients ayant des antécédents d’AVC ou d’ischémie cérébrale transitoire (ICT). Si l’on exclut ces sous-groupes de l’analyse, l’écart entre les groupes quant au taux d’hémorragies majeures n’est plus significatif.

Peut-être des ajustements posologiques diminueraient-ils le risque hémorragique chez les patients de plus de 75 ans et ceux de moins de 60 kg, estime le Dr Gibson, mais on doit néanmoins éviter le prasugrel chez les patients ayant des antécédents d’AVC ou d’ICT.

Maintien des bénéfices à court et à plus long terme

Chez les sujets sous prasugrel, la plupart des hémorragies sont survenues tardivement (>30 jours) alors que 80 % du bénéfice clinique a été observé tôt (<30 jours). De l’avis du Dr John Ambrose, University of California at San Francisco, il serait logique d’amorcer le traitement par le prasugrel, puis de passer au clopidogrel. Après trois jours, le taux d’hémorragies menaçant le pronostic vital se chiffrait à 0,4 % sous prasugrel vs 0,3 % sous groupe clopidogrel; c’est surtout pendant le traitement d’entretien que surviennent plus d’hémorragies majeures sous prasugrel.

Cependant, cette stratégie ne tient pas compte du fait que, durant le traitement initial et le traitement d’entretien, le prasugrel s’est révélé supérieur au clopidogrel pour la réduction des événements ischémiques, fait remarquer le Dr Gibson. La diminution du risque relatif de survenue du paramètre principal d’évaluation de l’efficacité chez les patients sous prasugrel, par rapport aux patients sous clopidogrel, était de 18 % après trois jours et de 20 % à partir du troisième jour.

De plus, la moitié des IM signalés dans l’essai TRITON-TIMI 38 étaient des IM spontanés et des IM résultant d’une thrombose sur tuteur, «et ce sont précisément les types d’IM dont nous souhaitons réduire l’incidence à long terme», explique le Dr Gibson. Après 30 jours, la réduction du risque relatif d’IM spontané était de 23 % sous prasugrel (p=0,01), ce qui reflète une fois de plus le bénéfice associé à la dose d’entretien par rapport au clopidogrel.

Toujours dans l’essai TRITON-TIMI 38, un deuxième événement est survenu chez près de deux fois plus de sujets sous clopidogrel que de sujets sous prasugrel, fait valoir le Dr Steven Wiviott, Brigham and Women’s Hospital, Harvard Medical School, qui souligne par ailleurs que le traitement par le prasugrel a été associé à une réduction de la taille de l’infarctus et qu’il a permis une réduction systématique du paramètre principal sans égard à la taille de l’infarctus.

Résumé

Vu la variabilité interindividuelle de la réponse aux antiplaquettaires actuels, il est essentiel d’optimiser le traitement antiplaquettaire, que ce soit en ajoutant un antiplaquettaire, en augmentant la dose des schémas actuels ou en utilisant de nouveaux antiplaquettaires. Bien que les nouveaux agents semblent se caractériser par un délai d’action plus court et un effet antiplaquettaire plus complet, seul le suivi à long terme permettra d’en optimiser l’utilisation.

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