Comptes rendus

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Progrès thérapeutiques dans l’hémorragie cérébrale aiguë

Le point sur les acides gras oméga-3 et le développement du nourrisson : les preuves sont-elles assez concluantes pour nous inciter à l’action?

Le présent compte rendu est fondé sur des données médicales présentées lors d'un congrès de médecine reconnu ou publiées dans une revue avec comité de lecture ou dans un commentaire signé par un professionnel de la santé reconnu. La matière abordée dans ce compte rendu s'adresse uniquement aux professionnels de la santé reconnus du Canada.

juin 2007

Pour les cliniciens qui ne connaissent pas à fond les acides gras oméga-3, il importe de souligner que les mammifères ne synthétisent pas eux-mêmes les acides gras oméga-3 ou oméga-6, de sorte que leurs besoins doivent être comblés par leur alimentation. Bien que l’huile de lin et l’huile de canola soient de bonnes sources d’acide alpha-linolénique (ALA), on croit souvent à tort que les sources de cet oméga-3 d’origine végétale équivalent à des sources d’oméga-3 d’origine marine, surtout d’acide eïcosapentaénoïque (EPA) et d’acide docosahexaénoïque (DHA).

La confusion provient en partie du fait que, même si les mammifères ont les enzymes nécessaires pour fabriquer l’EPA et le DHA à partir du précurseur végétal (ALA), des études récentes lors desquelles on a utilisé des marqueurs chez l’humain ont révélé que cette conversion est un moyen très inefficace d’augmenter le taux tissulaire de DHA, seulement <0,5 % de l’ALA étant transformé en DHA.

En revanche, les sources marines, surtout le saumon, le maquereau et le hareng, sont d’importantes sources de DHA biologiquement viable, et c’est ce DHA qui est essentiel à la croissance et au développement chez l’humain. Lorsque le taux de DHA baisse dans le cerveau et la rétine, on observe une augmentation concomitante du taux d’acide docosapentaénoïque (DPAn-6), qui est un oméga-6. Cependant, cette substitution exerce un effet délétère sur la structure et le fonctionnement du cerveau, de sorte que le DPAn-6 n’est pas un substitut fonctionnel du DHA, précisent les chercheurs des National Institutes of Health, Bethesda, Maryland.

Apport suffisant pendant et après la grossesse

Des études ont montré que la croissance du cerveau humain connaît une pointe au cours du dernier trimestre de la grossesse et des premiers mois suivant la naissance, et que l’on observe notamment une importante augmentation de la teneur cérébrale en DHA et en acide arachidonique. La mère étant la seule source d’acides gras dont l’enfant a besoin, il est plus probable qu’elle ne puisse pas combler les besoins de son nourrisson en oméga-3 si son apport à elle est déjà carentiel.

Le nourrisson a généralement une réserve de DHA à la naissance, mais s’il ne reçoit pas un apport suffisant de DHA à partir du lait maternel ou de lait maternisé enrichi, il développe rapidement une carence en DHA. Les conséquences d’une alimentation riche en EPA et en DHA pendant la grossesse n’ont pas été étudiées à fond, mais une étude récente a confirmé en partie que la consommation de poissons et de fruits de mer pendant la grossesse semble améliorer le développement de l’enfant1.

Lors de cette étude de cohorte, 11 875 femmes enceintes qui en étaient à leur 32e semaine de gestation ont répondu à un questionnaire sur leur alimentation, et plus précisément sur leur consommation de poissons et de fruits de mer. Après avoir tenu compte de 28 facteurs de confusion éventuels, les chercheurs ont constaté qu’un apport maternel de poissons et fruits de mer <340 g/semaine pendant la grossesse augmentait la probabilité que l’enfant soit dans le dernier quartile du quotient intellectuel verbal, par comparaison à un apport maternel >340 g/semaine (la consommation de poissons et de fruits de mer trois fois par semaine équivaut généralement à un apport de 347 g/semaine). Une faible consommation de poissons et de fruits de mer était aussi associée à un risque accru de résultats sous-optimaux sur les plans du comportement prosocial, de la motricité fine, de la communication et du développement social. Pour chacun de ces paramètres, plus la consommation maternelle de poissons et de fruits de mer était faible pendant la grossesse, plus le risque de développement sous-optimal était élevé.

Les résultats de cette étude sont d’autant plus importants qu’en 2004, le gouvernement fédéral américain a conseillé aux femmes enceintes de restreindre leur consommation globale de poissons et de fruits de mer à 340 g/semaine afin d’éviter l’exposition du fœtus à d’infimes quantités de neurotoxines. Or, comme le soulignent Hibbeln et al., les enfants dont la mère avait consommé <340 g de poissons et de fruits de mer par semaine étaient plus susceptibles d’avoir un neurodéveloppement sous-optimal que les enfants dont la mère avait consommé davantage de poissons et de fruits de mer.

Une étude antérieure qui semble étayer ces résultats plaide également en faveur d’un apport maternel d’acides gras polyinsaturés (PUFA) oméga-3 à très longue chaîne2. Les chercheurs ont étudié l’effet de l’administration d’huile de foie de morue ou d’huile de maïs à des femmes enceintes ou qui allaitaient sur le développement mental subséquent des enfants. Des femmes enceintes recrutées à la 18e semaine de gestation ont pris 10 mL d’huile de foie de morue ou d’huile de maïs jusqu’à trois mois après l’accouchement. L’huile de foie de morue contenait 1183 mg/10 mL de DHA et 803 mg/10 mL d’EPA, alors que l’huile de maïs contenait 47 mg/10 mL d’acide linoléique et 92 mg/10 mL d’ALA. La quantité de vitamines liposolubles était identique dans les deux huiles.

Les nourrissons nés de cette cohorte de femmes ont subi des tests d’évaluation de la fonction cognitive à l’âge de six et de neuf mois, et une petite proportion d’enfants a de nouveau été évaluée à l’âge de quatre ans. Les résultats ont révélé que les enfants dont la mère avait consommé de l’huile de foie de morue pendant la grossesse et l’allaitement avaient un meilleur score sur l’échelle des processus mentaux composites du test K.ABC (Kaufman Assessment Battery for Children) que les enfants dont la mère avait pris de l’huile de maïs. Les scores équivalents à l’âge de quatre ans étaient aussi corrélés de manière significative avec l’apport maternel de DHA et d’EPA pendant la grossesse. En fait, l’apport maternel de DHA durant la grossesse était la seule variable qui avait des retombées statistiquement importantes sur le score des processus mentaux de l’enfant à l’âge de quatre ans lorsque les données étaient analysées dans un modèle de régression multiple. L’apport maternel plus élevé de DHA s’est traduit par des taux plasmatiques maternels plus élevés et, par conséquent, par un transfert plus marqué de DHA au fœtus, expliquent les auteurs.

Une autre étude intéressante a porté sur des enfants atteints d’un trouble de l’acquisition de la coordination3. Comme le soulignent les auteurs, ce trouble entraîne des difficultés sur les plans de l’apprentissage, du comportement et de l’ajustement psychosocial qui persistent à l’âge adulte. Les sujets de cette étude, qui avaient de cinq à 12 ans, ont reçu aléatoirement des suppléments d’acides gras oméga-3 et oméga-6 ou un placebo pendant trois mois, après quoi ils passaient à l’autre groupe. Les suppléments n’ont eu aucun effet sur la motricité, mais les chercheurs ont noté une amélioration notable de la lecture, de l’épellation et du comportement durant les trois mois où les enfants recevaient un supplément actif, ce qui semble indiquer que les acides gras oméga-3 et oméga-6 pourraient être bénéfiques chez les enfants qui présentent cette constellation de symptômes comportementaux.

Intégration des options pour optimiser l’apport de DHA

De l’avis des chercheurs, l’apport type actuel de DHA n’est pas très bon chez les femmes du Canada. Lors d’une enquête menée par Michel Lucas, épidémiologiste et nutritionniste, Université Laval, en juin 2006, seulement 17 % des femmes en âge de procréer au Québec avaient un apport de DHA de 300 mg/jour comme le recommande l’International Society for the Study of Fatty Acids and Lipids. Au Canada, les taux de DHA dans le lait maternel sont parmi les plus faibles du monde entier, la moyenne étant de seulement 0,14 % par comparaison à une médiane mondiale de 0,3 % à 0,4 %. Plusieurs groupes de chercheurs estiment que les femmes enceintes ou qui allaitent devraient consommer au moins 200 mg de DHA/jour – idéalement 300 mg – pour assurer un apport suffisant aux nourrissons. On suppose qu’il s’agit ici de DHA de source marine, car les suppléments de graines de lin n’ont aucun effet sur les taux de DHA dans le lait maternel.

La façon la plus sûre de faire en sorte que les femmes ingèrent suffisamment d’oméga-3 est de leur recommander de consommer, par semaine, au moins deux portions de poisson (trois portions pour dépasser le seuil de 340 g/semaine), surtout des poissons gras, comme le précise l’American Heart Association dans ses lignes directrices. Sinon, les femmes peuvent envisager un supplément périnatal, des capsules d’huile de poisson ou des aliments enrichis d’oméga-3 comme le yogourt Danino, qui a été formulé expressément pour les enfants mais qui peut contribuer à l’apport de DHA de la femme s’il est consommé en quantité suffisante.

L’American Academy of Pediatrics recommande que les enfants de plus de deux ans consomment plus de poisson, surtout des poissons gras, grillés ou cuits au four. Les aliments enrichis d’oméga-3 qui sont probablement plus agréables que le poisson au goût de nombreux enfants pourraient aider ces derniers à avoir un apport suffisant d’acides gras essentiels pour que leur santé soit optimisée. Le yogourt Danino, par exemple, renferme 40 mg de DHA par portion de 100 g.

Au dire des chercheurs, le ratio oméga-3:oméga-6 est d’environ 1:10 dans l’alimentation type du Canadien, alors que le ratio optimal devrait être de 1:3. Les suppléments d’oméga-6 sont donc essentiellement redondants, car nous en avons déjà trop dans notre alimentation. Nous devrions plutôt essayer d’augmenter la teneur de notre alimentation en acides gras oméga-3.

Références : Interview avec Michel Lucas, épidémiologiste et nutritionniste, chaire Lucie et André Chagnon, Université Laval, Québec, Québec.

Symposium « Is There a Role for Omega-3 Fatty Acids? » à la 83e Conférence annuelle de la Société canadienne de pédiatrie (2006), St. John’s, Terre-Neuve et Labrador.

1Hibbeln et al. Maternal seafood consumption in pregnancy and neurodevelopmental outcomes in childhood (ALSPAC study): an observational cohort study. Lancet 2007;369[9561]:578-85.

2Helland et al. Maternal supplementation with very-long-chain n-3 fatty acids during pregnancy and lactation augments children’s IQ at 4 years of age. Pediatrics 2003;111[1]:e39-44.

3Richardson AJ, Montgomery P. The Oxford-Dunham study: a randomized controlled trial of dietary supplementation with fatty acids in children with developmental coordination disorder. Pediatrics 2005;115[5]:1360-6.

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