Comptes rendus

UPLIFT : De nouvelles données à l’appui d’un traitement d’entretien
Les enseignements de l’essai PCPT confirmés et étoffés

Les algorithmes de traitement de la MPOC en pleine évolution

Le présent compte rendu est fondé sur des données médicales présentées lors d'un congrès de médecine reconnu ou publiées dans une revue avec comité de lecture ou dans un commentaire signé par un professionnel de la santé reconnu. La matière abordée dans ce compte rendu s'adresse uniquement aux professionnels de la santé reconnus du Canada.

FRONTIÈRES MÉDICALES - Conférence internationale de l’American Thoracic Society

San Diego, Californie / 15-20 mai 2009

Le dernier essai duquel on a tiré des données probantes – qui guideront le choix de traitements pour ralentir la progression de la maladie pulmonaire obstructive chronique (MPOC) – avait pour objectif d’évaluer l’association d’un corticostéroïde en inhalation (CSI), et d’un bêta-agoniste à longue durée d’action (BALA), en l’occurrence le budésonide et le formotérol, respectivement. Cette association s’ajoutait au traitement de première intention par un bronchodilatateur. Cette nouvelle étude intitulée CLIMB faisait suite à un essai récent avec placebo ayant démontré qu’un traitement d’entretien de première intention par un bronchodilatateur seul pouvait modifier l’évolution naturelle de la maladie. Ces études étayent solidement les deux premières étapes de la prise en charge visant à retarder la progression de la MPOC, à améliorer la qualité de vie et peut-être même à prolonger la survie.

«À ce jour, aucune étude d’envergure n’avait évalué prospectivement l’ajout du budésonide/formotérol au tiotropium», explique le Dr Tobias Welte, département de pneumologie, École de médecine de Hanovre, Allemagne. «L’objectif de l’étude était d’évaluer les retombées de cet ajout sur des paramètres cliniquement importants, comme la fonction pulmonaire et la qualité de vie.»

L’étude CLIMB : amplification du bénéfice associé au traitement de première intention

Bien qu’il n’ait toujours pas été déterminé s’il est préférable d’amorcer le traitement d’entretien de la MPOC par un antagoniste des récepteurs muscariniques à longue durée d’action (AMLA) ou un BALA, il était logique, à la lumière de l’étude UPLIFT récemment publiée, qu’on choisisse le tiotropium – un AMLA – pour prouver que le budésonide/formotérol conférait un bénéfice additionnel. L’étude UPLIFT a en effet apporté des preuves – parmi les plus solides à ce jour – de l’effet favorable d’un traitement bronchodilatateur à longue durée d’action par le tiotropium sur l’évolution de la maladie mesurée sur une période d’au plus quatre ans. La MPOC étant de nature évolutive, des traitements supplémentaires doivent nécessairement s’ajouter à toute monothérapie de première intention. Les nouvelles données prouvent que l’association budésonide/formotérol est un second choix approprié.

L’essai comparatif avec placebo CLIMB regroupait 660 patients de neuf pays qui étaient suivis dans 102 centres. L’étude commençait par une période préliminaire de deux semaines pendant laquelle on administrait 18 µg de tiotropium une fois par jour. Les patients étaient ensuite randomisés de façon à recevoir le budésonide/formotérol (320 µg / 9 µg) en une seule inhalation deux fois par jour ou un placebo, également administré à l’aide d’un inhalateur deux fois par jour. Les patients des deux groupes devaient poursuivre leur traitement par l’AMLA durant la totalité des 12 semaines de l’étude.

Les patients étaient admissibles à l’étude si leur maladie était assez avancée pour qu’ils aient besoin d’une association. Plus précisément, leur VEMS (volume expiratoire maximal en une seconde) prébronchodilatation devait se chiffrer à <u><</u>50 % de la valeur théorique pour un sujet sain et le ratio VEMS/capacité vitale, à <70 %. Les patients devaient aussi avoir eu au moins une exacerbation de MPOC ayant nécessité une corticothérapie orale et/ou des antibiotiques au cours des 12 mois précédents. Au moment de l’admission, environ 75 % des patients recevaient un BALA, environ 65 %, un CSI et environ 52 %, un AMLA, et un grand nombre de patients recevaient une association quelconque de ces traitements.

Figure 1. Variation du VEMS prébronchodilatation mesuré à la clinique


Il est ressorti de la comparaison des 329 patients sous budésonide/formotérol et des 331 témoins sous placebo que les deux groupes étaient bien appariés sur le plan des caractéristiques initiales. Dans les deux groupes, le VEMS médian se chiffrait à environ 38 % de la valeur théorique. L’âge moyen était d’environ 62 ans et la médiane du délai écoulé depuis le diagnostic de MPOC, de 5,7 ans. Environ 40 % des patients fumaient toujours régulièrement, et les sujets de l’étude avaient dans l’ensemble des antécédents de consommation de tabac de plus de 35 paquets-année.

Résultats de l’étude

L’évaluation de chacun des paramètres principaux – notamment l’amélioration de la fonction pulmonaire, le soulagement des symptômes du matin et l’amélioration de la qualité de vie – a fait ressortir des bénéfices significatifs. Dans les faits, chez les patients sous budésonide/formotérol, le VEMS a grimpé presque immédiatement, y compris le VEMS minimum évalué avant la dose du matin. Dans le groupe placebo, en revanche, le VEMS est demeuré inchangé. L’amélioration de 6 % (p<0,001) observée entre le VEMS prébronchodilatation mesuré après 12 semaines de traitement et le VEMS initial correspondait à un avantage de 128 mL par comparaison à la même mesure dans le groupe placebo. Lorsque le VEMS était mesuré 15 minutes après l’administration de la dose, l’avantage grimpait à 186 mL. La rapidité de l’effet observé après la dose du matin a été soulignée (Figure 1).

«On observait une amélioration à peine cinq minutes après l’administration de la dose, et cette amélioration s’est maintenue tout au long de la période de traitement, précise le Dr Welte. Le bénéfice associé à la dose matinale de l’association est particulièrement pertinent, car nombreux sont les patients qui se disent incommodés par la dyspnée et la toux lorsqu’ils font leur toilette, s’habillent et commencent leur journée. Il s’agit là d’un obstacle de taille à une qualité de vie acceptable.»

Le matin, le score GCSQ (Global Chest Symptoms Questionnaire) (0 à 4) favorisait l’association – par rapport au placebo – sur le plan de la dyspnée (-0,148; p=0,001), même avant la première dose. Au chapitre de la sensation d’oppression thoracique, l’avantage avoisinait le seuil de significativité statistique (-0,90; p=0,051). Quinze minutes après la dose matinale, l’avantage relatif s’accentuait à la fois pour la dyspnée (-0,185; p<0,001) et la sensation d’oppression thoracique (-0,121; p=0,014). Selon l’échelle CDLM (Capacity of Daily Living during the Morning), les scores totaux attribués à la toilette et à l’habillage, au petit déjeuner et à la mobilité étaient multipliés par un facteur de plus de deux sous budésonide/formotérol après une semaine (0,13 vs 0,05 pour le placebo; p=0,027) et par un facteur d’à peu près cinq après 12 semaines (0,26 vs 0,06; p<0,001).

Lorsque les symptômes étaient mesurés de façon globale à l’aide du SGRQ-C (Saint George’s Respiratory Questionnaire-COPD), on observait des avantages similaires. Environ la moitié des patients recevant l’association ont obtenu une augmentation de 4,0 points, ce qui représente un gain de 25 % (p=0,016) par rapport au gain obtenu avec l’AMLA en monothérapie.

Au chapitre du score des symptômes de la MPOC à 12 semaines, l’avantage en faveur du budésonide/formotérol était hautement significatif dans le cas de la dyspnée, de la sensation d’oppression thoracique, de la toux et des réveils nocturnes (dans tous les cas, p<0,001 vs tiotropium seul). On a aussi rapporté une consommation moindre de médicaments de secours le matin, pendant la journée et pendant la nuit (dans tous les cas, p<0,001 pour l’association vs tiotropium seul).

Diminution des exacerbations sévères

Dans la MPOC, en général, les résultats s’améliorent tous dans le même sens, de sorte qu’une amélioration de la fonction pulmonaire est corrélée avec une atténuation des symptômes et une amélioration de la qualité de vie. Dans le cadre de l’étude CLIMB, le taux d’exacerbations sévères a diminué de 62 % (p<0,001) sous budésonide/formotérol + tiotropium vs sous tiotropium seul. Reportées sur un graphique, les courbes divergeaient déjà nettement 15 jours après la randomisation, après quoi l’écart se creusait systématiquement tout au long de l’étude (Figure 2). Le calcul du taux de risque (HR, pour hazard ratio) de la première exacerbation sévère a objectivé une diminution de 61 % (HR de 0,39; IC à 95 %, 0,17-0,89; p=0,026) en faveur du budésonide/formotérol, par rapport au tiotropium seul. Le pourcentage de patients ayant besoin d’antibiotiques lors d’une exacerbation a été réduit de moitié ou presque (19,6 % vs 38,12 %).

Figure 2. Nombre
sévères par patient

<img3174|center>

«L’avantage du budésonide/formotérol selon cette mesure de l’aggravation de la MPOC plaide une fois de plus en faveur de l’ajout de cette association au traitement d’entretien lorsque le tiotropium seul ne suffit plus à maîtriser la maladie», affirme le Dr Welte. Ici encore, les données probantes servent de fondement au choix du traitement après l’étape du bronchodilatateur en monothérapie.

Une question de séquence

Les données de l’étude CLIMB sont venues étoffer celles de l’étude récente UPLIFT, laquelle a associé un AMLA, le tiotropium, à des bénéfices durables sur une période de quatre ans, même si les patients étaient autorisés à prendre n’importe quel médicament destiné à améliorer la fonction respiratoire à l’exception d’un autre AMLA. L’étude CLIMB n’a pas été conçue pour trancher le débat sur la pertinence d’utiliser un AMLA ou un BALA en première intention. Elle apporte plutôt des éléments d’information pour le choix de l’étape suivante du traitement lorsque la monothérapie ne suffit plus.

«À mon sens, l’objectif n’est probablement pas de savoir si un bronchodilatateur à longue durée d’action est meilleur qu’un autre traitement en première intention. Je soupçonne que certains patients répondront mieux à un AMLA et d’autres, à un BALA», a rétorqué le Dr Welte lorsqu’on lui a demandé si un AMLA devait être privilégié en première intention. L’étude CLIMB montre qu’on obtient «une amélioration plus marquée de la fonction pulmonaire, des symptômes et de la qualité de vie liée à la santé lorsqu’on ajoute l’association budésonide/formotérol».

Tolérance à l’effort

Il semble que ce soient précisément les effets additifs du CSI et du BALA administrés en association qui fassent une différence. Une étude distincte, réalisée à double insu dans 13 centres en Allemagne et en Suisse, a porté sur 111 patients qui recevaient la même dose de budésonide/formotérol que celle de l’étude CLIMB, 9 µg de formotérol seul ou un placebo. Les résultats indiquent que la durée de la tolérance à l’effort (DTE) augmentait progressivement lorsqu’on comparait le formotérol au placebo, puis le budésonide/formotérol au formotérol, que la DTE ait été mesurée une heure ou six heures après la dose du matin (Figur
ée de la tolérance à l’effort 1 h et 6 h après la dose du matin

<img3175|center>

«La supériorité du budésonide/formotérol sur le formotérol seul au chapitre de la tolérance à l’effort témoigne de la contribution du CSI à l’effet clinique», souligne l’auteur principal, le Dr Heinrich Worth, Klinikum Fürth, Universität Erlangen-Nürnberg, Allemagne. «L’augmentation de la DTE laisse présager la capacité à accomplir des activités plus fatigantes pendant au moins six heures après une dose de budésonide/formotérol.»

Pour améliorer la tolérance à l’effort, quel que soit le traitement administré, c’est-à-dire un BALA, un AMLA, un CSI ou une association, on doit rompre le cercle vicieux dans lequel s’enchaînent le déclin de la fonction respiratoire et la progression parallèle des facteurs de comorbidité comme les maladies cardiovasculaires (CV). Il est ressorti d’une étude rétrospective de 664 cas consécutifs présentés par la Dre Irena Sarc, Clinique universitaire de maladies respiratoires et allergiques, Golnik, Slovénie, que 69 % des patients atteints de MPOC souffraient d’une maladie CV. Même s’il est déjà établi que les maladies CV et la MPOC sont étroitement liées, on comprend de mieux en mieux comment une piètre maîtrise de la MPOC pourrait contribuer largement à la progression d’un trouble CV.

«L’exercice est une arme importante contre les maladies CV. À mesure que la MPOC s’aggrave, les patients perdent de leur mobilité et sont donc privés de ce moyen de défense», explique la Dre Sarc. Cette dernière estime par ailleurs qu’on devrait évaluer l’effet d’un meilleur soulagement des symptômes respiratoires sur les paramètres CV chez des patients atteints de MPOC. Il importe ici de souligner que l’étude UPLIFT a objectivé une diminution de 16 % (HR de 0,84; IC à 95 %, 0,73-0,98; p<0,05) des événements CV, notamment une diminution de 29 % (HR de 0,71; IC à 95 %, 0,52-0,99; p<0,05) des infarctus du myocarde. Ces résultats ont été enregistrés après quatre ans chez des patients qui avaient reçu un bronchodilatateur à longue durée d’action en première intention, par comparaison aux patients qui avaient reçu un placebo.

«On en est maintenant à l’étape où l’on doit se concentrer sur l’interdépendance entre la MPOC et les maladies CV et déterminer en quoi le traitement de l’un peut influer sur l’issue de l’autre», conclut la Dre Sarc.

Résumé

De plus en plus de données probantes nous aiguillent quant à la séquence d’administration des traitements pour la maîtrise de la MPOC à long terme. Certes, la MPOC demeure une maladie évolutive, mais de nouvelles données semblent indiquer qu’un traitement d’entretien efficace peut infléchir l’évolution naturelle de la maladie, notamment en ralentissant le déclin de la fonction respiratoire et de la qualité de vie. La corrélation entre l’amélioration de la fonction pulmonaire et celle de la tolérance à l’effort que l’on obtient avec un bronchodilatateur à longue durée d’action, seul ou en association, a d’importantes retombées sur l’issue à long terme, notamment pour ce qui est de la protection contre le risque relatif de comorbidité comme les maladies CV.

Commentaires

Nous vous serions reconnaissants de prendre 30 secondes pour nous aider à mieux comprendre vos besoins de formation.